SUMMANUS.
- Ce vocable religieux qui en rappelle d'autres semblables, tous
s'appliquant à d'anciennes divinités romaines ou latines, se rencontre
pour la première fois chez Plaute : le dieu qu'il désigne est invoqué
par un esclave voleur, et le verbe summanare est employé ailleurs comme
un synonyme pittoresque de furtum facere. Dans
l'histoire du culte, il ne remonte pas au delà des guerres contre
Pyrrhus ; c'est en 278 av. J.-C. qu'une statue en argile qui le
représentait, ou sur le fronton, ou au faîte du temple de Jupiter
Capitolin, fut frappée de la foudre et la tête projetée dans le Tibre
où on la retrouva plus tarde. Pour expier ce prodige on voua à Summanus
un sanctuaire auprès du Grand Cirque, dans le voisinage de celui de
Juventas; la dédicace en eut lieu le 20 juin, date à laquelle on
continua de lui offrir des sacrifices. Parmi les prodiges de l'an 197
av. J.-C., au cours de la seconde guerre Punique, on mentionne que la
foudre frappa également le sanctuaire3. Tous les témoignages des
historiens sont, en ce qui concerne la nature du dieu, ou obscurs ou
ambigus ; pour les uns Sumrnanus est
une divinité spéciale, pour les autres seulement un vocable donné à
Jupiter Capitolin. On les peut concilier en admettant qu'à l'origine Summanus exprimait
une fonction de ce dernier et que peu à peu le vocable se détacha du
dieu pour désigner une personnalité distincte. D'après Varron, Summanus est
un dieu d'origine sabine, introduit dans le culte romain par T. Tatius
et qui personnifia ou le ciel nocturne ou la foudre qui frappe durant
la nuit'. Il semble avoir fait partie du noms sont également des
vocables donnés à Jupiter et transformés ensuite en divinités
distinctes de Dans la discipline des auspices postérieurs, on distingua
la foudre diurne attribuée. à Jupiter (fulgur dium) et le fulgur nocturnum qui était lancé par Summanus; et même Summanus, interprété par sub mane,
se serait appliqué au seul phénomène qui se produisait vers le matin.
Les uns et les autres étaient l'objet d'une cérémonie d'expiation qui
se résumait dans le verbe condere'. On enterrait les foudres diurnes en
immolant des béliers blancs, les autres en sacrifiant des béliers noirs
4. Tout à fait au déclin du paganisme, le vocable Suininanus était mis
en rapport avec les Manes et le dieu qu'il désignait identifié avec Dis
Pater ou Pluton°. On comprend, à la lumière de ces fâits que, de très
bonne heure, la religion populaire ait fait de Summanus un dieu des
voleurs. Ce fut par une association d'idées semblable à celle qui
donnait Laverna, forme double de Lara, la mère des Lares,
comme patronne aux voleurs : l'un et l'autre devinrent leurs
protecteurs à la faveur des ténèbres qui couvraient leurs méfaits. Au
déclin de la République, on avait cessé d'avoir du dieu une idée
précise, et Ovide, quand il rencontre son culte dans les Fastes, se tire d'affaire par un quisquis is est,
qui témoigne de son embarras. Comme Cicéron remarque, en parlant de la
statue frappée par la foudre en 278, qu'elle était alors en argile, il
faut admettre qu'on la remplaça par une image en bronze : elle devait
se dresser sur le toit, probablement dans la partie ouest, le quadrige
de Jupiter couronnant le fronton. Outre les victimes animales qui
étaient immolées au dieu, d'après les actes des Frères Arvales, on offrait à Summanus des gâteaux nommés summanalia.
Ils avaient la forme d'un disque, symbole du char du tonnerre, et ils
rappellent les disques, ceux-ci en métal, qui figurent dans le culte de Dius Fidius.
J. A. Hild
Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines
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