VERBENA
Les
anciens désignent de ce nom tout rameau verdoyant, provenant d'une
plante sacrée ou destiné à un usage sacré. Il faut distinguer de cet
accessoire les guirlandes formées de fleurs, qui jouaient un rôle
analogue.
Les verbenae servent aux usages suivants : 1 - elles constituent à elles
seules une offrande; 2 - elles servent à couvrir et à orner, avant le
sacrifice, les autels de gazon; 3 - unies aux bandelettes de laine,
elles forment des couronnes, dont on orne les prêtres, particulièrement
les sacrificateurs, les victimes, les statues des dieux; les
nouvelles mariées portaient une couronne de ce genre, qui s'appelait
corolla; 4 - elles forment des guirlandes décorant les temples, ou les
maisons privées, les jours de cérémonies.
Il est
probable qu'à l'origine toute verdure d'aspect et d'odeur agréable
avait droit à ce nom. Puis on tendit à le réserver à une classe de
plantes particulièrement saintes, ou même à une seule plante : selon
les uns, le romarin, selon d'autres, l'olivier, ou le myrte», le
laurier, ou enfin la verveine, dite aussi ἱερα βοτάνη ou verbenaca.
Apparemment les prêtres auront essayé, sans succès, de préciser le
terme trop compréhensif de verbena.
Les fétiaux qui allaient négocier
emportaient des verbenae cueillies au Capitole et un d'entre eux, celui
qui les tenait, s'appelait le verbenarius. Ces verbenae, qu'on
appelle aussi, dans ce cas, sagmina, étaient peut-être plutôt des
herbes, prises avec la terre des racines, que des branchages; elles
étaient sans doute arrachées sur l'emplacement de l'auguraculum; c'était
le consul ou le préteur qui les arrachait. On peut supposer, par
exemple, que les cérémonies des fétiaux, à la frontière, exigeaient
qu'ils eussent une portion de la terre d'où les auspices avaient été
pris et s'étaient déclarés favorables.
Les verbenae servaient aussi à des
usages médicaux; on peut se
demander si la confiance en leur vertu sacrée n'a pas conduit à des
expériences qui purent être utiles. Parmi toutes les verbenae
qu'employaient les médecins, la verveine était peut-être la plus
réputée; son efficacité médicale allait de pair avec sa vertu magique.
La verbena ne diffère sans doute pas de l'eirésioné (εἰρεσιώνη) des Grecs, branche
d'olivier ou de laurier, mariée à des bandelettes de laine. Les
Marseillais ornaient de verbenae la victime humaine qu'ils
sacrifiaient. Les Gaulois avaient un culte particulier pour la
verveine. Le culte des branchages, et particulièrement des feuillages
toujours verts, où l'âme de la végétation paraît se réfugier en hiver,
est un culte universel. La légende du roi de Nemi prouve
l'antiquité de ce culte dans le Latium; il n'y a pas lieu de le
rattacher au ritus Graecus. Très fréquentes sont les figurations de
verbenae : branches portées dans des cortèges funéraires (vases du
Dipylon, relief d'Amiterne), - rameau lustral, tenu par un dieu ou
par un prêtre, - guirlandes décorant des autels ou des
monuments, branches trempant dans des vases d'eau lustrale, - guirlandes décoratives utilisées dans des scènes
très profanes mais qui demeurent une survivance d'une
pratique religieuse.
A. PIGANIOL
Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines