PLINIUS ROMANO SUO SALUTAT
8, 8

Les sources et les bords du Clitumne
 
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[8,8] PLINIUS ROMANO SUO SALUTAT
 
(1) Vidistine aliquando Clitumnum fontem ? Si nondum - et puto nondum : alioqui narrasses mihi -, uide; quem ego - pænitet tarditatis - proxime uidi. (2) Modicus collis assurgit, antiqua cupressu nemorosus et opacus. Hunc subter exit fons et exprimitur pluribus uenis sed imparibus, eluctatusque quem facit gurgitem lato gremio patescit, purus et uitreus, ut numerare iactas stipes et relucentes calculos possis. (3) Inde non loci deuexitate, sed ipsa sui copia et quasi pondere impellitur, fons adhuc et iam amplissimum flumen, atque etiam nauium patiens; quas obuias quoque et contrario nisu in diuersa tendentes transmittit et perfert, adeo ualidus ut illa qua properat ipse, quamquam per solum planum, remis non adiuuetur, idem ægerrime remis contisque superetur aduersus.





(4) Iucundum utrumque per iocum ludumque fluitantibus, ut flexerint cursum, laborem otio otium labore uariare. Ripæ fraxino multa, multa populo uestiuntur, quas perspicuus amnis uelut mersas uiridi imagine adnumerat. Rigor aquæ certauerit niuibus, nec color cedit.




(5) Adiacet templum priscum et religiosum. Stat Clitumnus ipse amictus ornatusque prætexta; præsens numen atque etiam fatidicum indicant sortes. Sparsa sunt circa sacella complura, totidemque di. Sua cuique ueneratio suum nomen, quibusdam uero etiam fontes. Nam præter illum quasi parentem ceterorum sunt minores capite discreti; sed flumini miscentur, quod ponte transmittitur. (6) Is terminus sacri profanique: in superiore parte nauigare tantum, infra etiam natare concessum. Balineum Hispellates, quibus illum locum Diuus Augustus dono dedit, publice præbent, præbent et hospitium. Nec desunt uillæ quæ secutæ fluminis amoenitatem margini insistunt.




(7) In summa nihil erit, ex quo non capias uoluptatem. Nam studebis quoque : leges multa multorum omnibus columnis omnibus parietibus inscripta, quibus fons ille deusque celebratur. Plura laudabis, non nulla ridebis; quamquam tu uero, quæ tua humanitas, nulla ridebis. Vale.




 
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(1) As-tu jamais vu la source du Clitumne ? Si tu ne l'as pas encore vue (et je le crois; autrement tu m'en aurais parlé), va la voir : moi, en regrettant d'avoir tardé); je l'ai vue récemment. (2) Une colline se dresse, de hauteur moyenne, couverte et ombragée par d'antiques cyprès. A sa base sort la source, qui jaillit par plusieurs veines, de taille inégale cependant; une fois dégagée du bouillonnement qu'elle produit, elle s'étale en un large bassin, limpide et transparente, au point qu'il est possible de compter les pièces de monnaie qu'on y a jetées et les cailloux qui reluisent au fond. (3) A partir de là, elle est entraînée non par la pente du terrain, mais par sa deule abondance et, si l'on peut dire, par son propre poids. C'est encore une source et c'est déjà un fleuve très imposant, et même navigable, où les bateaux, y compris quand ils se croisent et se déplacent en sens contraire et dans des directions opposées, passent et accostent; sa force est telle que si l'on suit le fil de l'eau, qui pourtant coule sur une surface plane, on n'a pas besoin de rames, et qu'inversement on a les plus grandes difficultés à en venir à bout avec rames et perches lorsque l'on en remonte le cours.

(4) C'est un double agrément pour ceux qui se promènent sur l'eau par plaisir ou amusement, de faire alterner selon la direction qu'ils prennent, l'effort et le repos, le repos et l'effort. Les rives sont couvertes de frênes en grand nombre, d'un grand nombre de peupliers, que la transparence de l'eau, comme s'ils y avaient été plongés, permet de compter grâce à leur reflet verdoyant. La fraîcheur de l'eau peut rivaliser avec celle des flocons de neige, et son éclat ne leur est pas non plus inférieur.

(5) Tout à côté se trouve un temple ancien et respecté. Le Clitumne en personne est représenté debout, vêtu et paré de la prétexte. Des tablettes d'oracle révèlent la présence de la divinité et aussi son rôle prophétique. Tout autour sont dissiminés plusieurs chapelles et autant de dieux. Chacune a son culte, son nom,  certaines même leurs sources; car, outre la principale, qui est comme la mère de toutes les autres, il y en a de plus petites, ayant chacune leur point d'origine; elles se mêlent cependant au fleuve, qu'enjambe un pont. (6) Celui-ci marque la limite entre l'espace sacré et l'espace profane. Dans la partie en amont, il est seulement permis de naviguer; au- dessous, on peut aussi nager. Les habitants d'Hispellum auxquels le divin Auguste a fait don de ce lieu, offrent le bain aux frais de leur ville; ils offrent aussi le logement. Il ne manque pas non plus de villas qui, attirées par le charme du fleuve, se dressent sur ses bords.

(7) Pour me résumer, tu ne trouveras rien qui ne puisse te faire plaisir. Car tu feras aussi travailler ton esprit : tu liras une foule d'inscriptions gravées par une foule de gens sur toutes les colonnes, sur tous les murs, et qui célèbre la source et le dieu. Tu feras l'éloge d'un certain nombre, tu riras de quelques-unes; ou plutôt non, compréhensif comme tu l'es, tu ne riras d'aucune. Au revoir.



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                                                                           trad. Nicole Méthy; éd. les belles lettres