Versions grecques

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 Le rôle des juges


voir
Manuel de version grecque; trad. Philippe Le Moigne, page 37; éd. ellipses




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(6) Εὖ γὰρ ἴστε, ὦ Ἀθηναῖοι, ὅτι τρεῖς εἰσὶ πολιτεῖαι παρὰ πᾶσιν ἀνθρώποις, τυραννὶς, καὶ ὀλιγαρχία, καὶ δημοκρατία. Διοικοῦνται δ' αἱ μὲν τυραννίδες καὶ ὀλιγαρχίαι τοῖς τρόποις τῶν ἐφεστηκότων, αἱ δὲ πόλεις αἱ δημοκρατούμεναι τοῖς νόμοις τοῖς κειμένοις. Μηδεὶς οὖν ὑμῶν τοῦτ' ἀγνοείτω, ἀλλὰ σαφῶς ἕκαστος ἐπιστάσθω, ὅτι, ὅταν εἰσίῃ εἰς δικαστήριον, γραφὴν παρανόμων δικάσων, ἐν ταύτῃ τῇ ἡμέρα μέλλει τὴν ψῆφον φέρειν περὶ τῆς ἑαυτοῦ παρρησίας. Διόπερ καὶ ὁ νομοθέτης τοῦτο πρῶτον ἔταξεν ἐν τῷ τῶν δικαστῶν ὅρκῳ, ψηφιοῦμαι κατὰ τοὺς νόμους· ἐκεῖνό γε εὖ εἰδώς, ὅτι, ὅταν διατηρηθῶσιν οἱ νόμοι τῇ πόλει, σῴζεται καὶ ἡ δημοκρατία.
 
(7) ἃ χρὴ διαμνημονεύοντας ὑμᾶς, μισεῖν τοὺς τὰ παράνομα γράφοντας, καὶ μηδὲν ἡγεῖσθαι μικρὸν εἶναι τῶν τοιούτων ἀδικημάτων, ἀλλ' ἕκαστον ὑπερμέγεθες, καὶ τοῦθ' ὑμῶν τὸ δίκαιον μηδένα ἐᾶν ἀνθρώπων ἐξαιρεῖσθαι, μήτε τὰς τῶν στρατηγῶν συνηγορίας, οἳ, ἐπὶ πολὺν ἤδη χρόνον συνεργοῦντές τισι τῶν ῥητόρων, λυμαίνονται τὴν πολιτείαν, μήτε τὰς τῶν ξένων δεήσεις, οὓς ἀναϐιϐαζόμενοι, τινὲς ἐκφεύγουσιν ἐκ τῶν δικαστηρίων, παράνομον πολιτείαν πολιτευόμενοι· ἀλλ', ὥσπερ ἂν ὑμῶν ἕκαστος αἰσχυνθείη τὴν τάξιν λιπεῖν, ἣν ἂν ταχθῇ ἐν τῷ πολέμῳ, οὕτω καὶ νῦν αἰσχύνθητε ἐκλιπεῖν τὴν τάξιν ἣν τέταχθε ὑπὸ τῶν νόμων, φύλακες τῆς δημοκρατίας τήνδε τὴν ἡμέραν.

(8) Κἀκεῖνο δὲ χρὴ διαμνημονεύειν, ὅτι νυνὶ πάντες οἱ πολῖται παρακαταθέμενοι τὴν πόλιν ὑμῖν, καὶ τὴν πολιτείαν διαπιστεύσαντες, οἱ μὲν πάρεισι καὶ ἐπακούουσι τῆσδε τῆς κρίσεως, οἱ δὲ ἄπεισιν ἐπὶ τῶν ἰδίων ἔργων· οὓς αἰσχυνόμενοι, καὶ τῶν ὅρκων, οὓς ὠμόσατε, μεμνημένοι, καὶ τῶν νόμων, ἐὰν ἐξελέγξω Κτησιφῶντα, καὶ παράνομα γεγραφότα, καὶ ψευδῆ, καὶ ἀσύμφορα τῇ πόλει, λύετε, ὦ Ἀθηναῖοι, τὰς παρανόμους γνώμας, βεϐαιοῦτε τῇ πόλει τὴν δημοκρατίαν, κολάζετε τοὺς ὑπεναντίως τῷ νόμῷ, καὶ τῇ πόλει, καὶ τῷ συμφέροντι τῷ ὑμετέρῳ πολιτευομένους. Κἂν, ταύτην ἔχοντες τὴν διάνοιαν, ἀκούητε τῶν μελλόντων ῥηθήσεσθαι λόγων, εὖ οἶδ' καὶ δίκαια, καὶ εὔορκα, καὶ συμφέροντα ὑμῖν αὐτοῖς ψηφιεῖσθε καὶ πάσῃ τῇ πόλει.

(9) Περὶ μὲν οὖν τῆς ὅλης κατηγορίας μετρίως μοι ἐλπίζω προειρῆσθαι· περὶ δὲ αὐτῶν τῶν νόμων, οἳ κεῖνται περὶ τῶν ὑπευθύνων, παρ' οὓς τὸ ψήφισμα τυγχάνει γεγραφὼς Κτησιφῶν, διὰ βραχέων εἰπεῖν βούλομαι. Ἐν γὰρ τοῖς ἔμπροσθεν χρόνοις ἄρχοντές τινες τὰς μεγίστας ἀρχὰς, καὶ τὰς προσόδους διοικοῦντες, καὶ δωροδοκοῦντες περὶ ἕκαστα τούτων, προσλαμϐάνοντες τούς τε ἐκ τοῦ βουλευτηρίου ῥήτορας, καὶ τοὺς ἐκ τοῦ δήμου, πόρρωθεν προκατελάμϐανον τὰς εὐθύνας ἐπαίνοις καὶ κηρύγμασιν· ὥστ' ἐν ταῖς εὐθύναις τῶν ἀρχόντων, εἰς τὴν μεγίστην μὲν ἀπορίαν ἀφικνεῖσθαι τοὺς κατηγόρους, πολὺ δὲ ἔτι μᾶλλον τοὺς δικαστάς.
                                                                                                                                                                   Eschine, contre Ctésiphon, 6, 7, 8, 9




(6). Vous savez bien, citoyens d'Athènes, qu'il y a dans le monde trois genres de gouvernement, la monarchie, l'oligarchie et la la démocratie. Les deux premières formes sont régies par l'humeur des chefs, les Etats démocratiques le sont, au contraire, par les lois établies. Que donc personne d'entre vous n'ignore, mais que chacun tienne bien pour certain que, lorsqu'il entre au tribunal pour juger un cas d'illégalité, il s'apprête à prononcer ce jour-là sur sa propre liberté de s'exprimer une opinion. C'est pourquoi le législateur a mis en tête du serment des juges : "Je voterai en conformité avec les lois", sachant bien que lorsque les lois sont respectées dans l'Etat, la souveraineté du peuple est, elle aussi, sauvegardée.

(7). Souvenez-vous de cela et poursuivez de votre haine ceux qui proposent des mesures contraires à notre législation. Ne considérez aucune de ces illégalités comme légère, mais regardez chacune d'entre elles comme une faute de la plus haute gravité. Ne laissez personne le droit de vous dépouiller de ce droit de sévir; n'écoutez ni les plaidoyers de ces généraux qui, deepuis bien longtemps déjà, associés avec certains politiciens, jettent le trouble dans notre constitution, ni les prières de ces étrangers que des gens qui pratiquent une politique d'illégalité appellent à la tribune pour échapper ensuite au châtiment. Vous rougiriez tous d'abandonner votre poste dans une bataille : eh bien ! que le même sentiment vous fasse rougir aussi de déserter celui que les lois vous assignent en ce jour en faisant de vous les gardiens de la démocratie.

(8). Je dois encore vous rappeler une chose. Le corps entier des citoyens a confié notre cité à votre garde et remis la constitution entre vos mains, quoique sur ce nombre les uns soient présents ici et assistent à ces débats, tandis que les autres sont absents et assistent à ces débats, retenus ailleurs pour leurs affaires privées. Craignez donc de les scandaliser, souvenez-vous des serments que vous avez  prêtez, de nos lois, et, si je prouve que le décret rédigé par Ctésiphon est illégal, contraire à la vérité et aux intérets de l'Etat, alors, citoyens d'Athènes, annulez ces propositions illégales, affermissez notre constitution démocratique, châtiez enfin ceux qui  pratiquent une république contraire aux lois et désavantageuse pour vous-mêmes. Si vous écoutez dans cet esprit ce qui va ce qui va se dire au cours de ces débats, je sais que votre sentence sera juste et conforme à votre serment, à vos intérêts et à ceux de la république.

(9) Voilà, je pense, bien défini le caractère de ce procès; quant aux lois sur la responsabilité des magistrats, lois qu'a violées Ctésiphon en proposant son décret, je vais en parler en peu de mots. On a vu autrefois des magistrats du plus haut rang, des administrateurs des finances publiques donner dans ces diverses fonctions des preuves de vénalité, puis, grâce à la complicité des orateurs du Conseil et de l'Assemblée, anticiper la décharge de leur gestion en se faisant décerner d'avance des éloges et des proclamations. Ils mettaient ainsi dans le plus grand embarras non seulement leurs accusateurs, mais bien plus encore les juges chargés d'examiner leur gestion.
         trad. Victor Martin et Guillaume de Budé; éd. les belles lettres.



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εὖ γὰρ ἴστε : car vous le savez bien.
πολιτεία, ας (ἡ) : qualité et droits de citoyen, droit de cité; vie d’un citoyen, genre de vie d’un citoyen; l’ensemble des citoyens; constitution d’un État, forme de gouvernement, régime politique.
τρεῖς εἰσὶ πολιτεῖαι παρὰ πᾶσιν ἀνθρώποις : il y a dans le monde trois sortes de gouvernements.
τυραννίς, voc. ί, gén. ίδος (ἡ) : pouvoir absolu, souveraineté, royauté; pouvoir despotique, despotisme, tyrannie.
τυραννὶς, καὶ ὀλιγαρχία, καὶ δημοκρατία : la tyrannie/monarchie, l'oligarchie et la démocratie.

διοικέω-ῶ (imparf. διῴκουν, futur διοικήσω, aor. διῴκησα, parf. διῴκηκα; passif futur διοικηθήσομαι, aor. διῳκήθην, parf. διῴκημαι ou δεδιῴκημαι) :  habiter à part; administrer une maison; administrer, gouverner.

ἐφίστημι (futur ἐπιστήσω, aor. ἐπέστησα, parf. ἐφέστηκα) : placer sur ou auprès; poser sur, asseoir sur; être à la tête de.
οἱ ἐφεστηκότες : ceux qui sont placés à la tête de, les gouvernants, les magistrats, les chefs.
τοῖς τρόποις τῶν ἐφεστηκότων : aux volontés de ceux qui commandent.
τρόπος, ου (ὁ) : façon d'être, façon d'agir, conduite, caractère; tournure, attitude.
δημοκρατέω-ῶ : être un chef démocratique.
au passif δημοκρατέομαι-οῦμαι : être gouverné démocratiquement, avoir une constitution démocratique.

κεῖμαι (imparf. ἐκείμην, futur κείσομαι) : être couché, être immobile, être au repos; être situé, être placé; être institué, être établi.
memento οἱ ὑπὸ τῶν θεῶν κείμενοι νόμοι, Xén. Mem. 4, 4, 21 : les lois établies par les dieux.

διαμνημονεύω : conserver le souvenir de, se rappeler; rappeler le souvenir; faire souvenir.
μισέω-ῶ (futur μισήσω, aor. ἐμίσησα, parf. μεμίσηκα) : haïr, détester; avoir horreur de.
παρανόμημα, ατος (τὸ) : acte contraire à la loi ou à la justice, illégalité, méfait.
μισεῖν τοὺς τὰ παράνομα γράφοντας : haïr tout citoyen qui écrivent des décrets contraires aux lois.

αἰσχύνω (imparf. ᾔσχυνον, futur αἰσχυνῶ, aor. ᾔσχυνα, parf. récent non att. ᾔσχυγκα) : enlaidir, défigurer; déshonorer.
passif moyen. (futur. αἰσχυνοῦμαι, rar. αἰσχυνθήσομαι; aor. ᾐσχύνθην, parf. récent ᾔσχυμμαι) : avoir le sentiment de l’honneur, avoir honte, rougir.
νῦν αἰσχύνθητε ἐκλιπεῖν τὴν τάξιν ἣν τέταχθε ὑπὸ τῶν νόμων : il faut qu'aujourd'hui vous rougissiez de quitter le poste où vous ont placés les lois.
φύλακες τῆς δημοκρατίας τήνδε τὴν ἡμέραν : (vous) les gardiens de la démocratie en ce jour.

διαμνημονεύω : conserver le souvenir de, se rappeler
διαπιστεύω : confier; avoir confiance, se confier.
ἐπακούω (futur ἐπακούσομαι) : prêter l’oreille à.
κἀκεῖνο δὲ χρὴ διαμνημονεύειν, ὅτι νυνὶ πάντες οἱ πολῖται παρακαταθέμενοι τὴν πόλιν ὑμῖν, καὶ τὴν πολιτείαν διαπιστεύσαντες, οἱ μὲν πάρεισι καὶ ἐπακούουσι τῆσδε τῆς κρίσεως, οἱ δὲ ἄπεισιν ἐπὶ τῶν ἰδίων ἔργων : je dois encore vous rappeler une chose : le corps entier des citoyens a confié notre cité à votre garde et remis la constitution entre vos mains, quoique sur ce nombre les uns soient présents ici et assistent à ces débats, tandis que les autres sont absents et assistent à ces débats, retenus ailleurs pour leurs affaires privées.

μέλλω (imparf. ἔμελλον, att. ἤμελλον, futur μελλήσω, aor. ἐμέλλησα, rar. ἠμέλλησα) : être sur le point de.
εἴρω (rare au présent; futur ἐρῶ, ῥηθήσομαι; parf. εἴρηκα, aor. passif εἰρήθην, parf. εἴρημαι) : dire, parler.
ψηφίζω (futur ίσω, att. ιῶ, aor. ἐψήφισα; passif futur ψηφισθήσομαι, aor. ἐψηφίσθην, parf. ἐψήφισμαι) : compter avec des cailloux; compter sur ses doigts; compter, calculer;  décider, décider ou attribuer par un vote.
memento ψῆφος, ου (ἡ) : caillou.
κἂν, ταύτην ἔχοντες τὴν διάνοιαν, ἀκούητε τῶν μελλόντων ῥηθήσεσθαι λόγων, εὖ οἶδ' καὶ δίκαια, καὶ εὔορκα, καὶ συμφέροντα ὑμῖν αὐτοῖς ψηφιεῖσθε καὶ πάσῃ τῇ πόλει : si vous écoutez dans cet esprit ce qui va ce qui va se dire au cours de ces débats, je sais que votre sentence sera juste et conforme à votre serment, à vos intérêts et à ceux de la république.


ἀπορία, ας (ἡ) : difficulté de passer; embarras, difficulté.
δικαστής, οῦ (ὁ) : juge.
πολὺ δὲ ἔτι μᾶλλον : mais bien plus encore.
Περὶ μὲν οὖν τῆς ὅλης κατηγορίας μετρίως μοι ἐλπίζω προειρῆσθαι : voilà, je pense, bien défini le caractère de ce procès.
ὥστ' ἐν ταῖς εὐθύναις τῶν ἀρχόντων, εἰς τὴν μεγίστην μὲν ἀπορίαν ἀφικνεῖσθαι τοὺς κατηγόρους, πολὺ δὲ ἔτι μᾶλλον τοὺς δικαστάς : ils mettaient ainsi dans le plus grand embarras non seulement leurs accusateurs, mais bien plus encore les juges chargés d'examiner leur gestion.















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Le nécessaire et le superflu

voir Manuel de version grecque; Philippe Le Moigne, pages 37 et 154; éd. ellipses




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(13) Ἀλλ' ἐφ' ἕτερον ἔλθωμεν εἶδος κενοδοξίας· ποῖον δὴ τοῦτο; ὃ τῶν πολλῶν ἐστι καὶ οὐκέτι ἑνὸς καὶ δευτέρου· χαίρομεν ὅταν ἐπαινώμεθα καὶ ἐπὶ πράγμασιν ἐν οἷς οὐδὲν σύνισμεν ἑαυτοῖς οὐδὲ μικρόν. Καὶ ὁ πένης πάντα ποιεῖ ὥστε ἱμάτια περιθέσθαι καλά, δι' οὐδὲν ἕτερον ἀλλ' ὥστε δοξασθῆναι παρὰ τῶν πολλῶν· καὶ πολλάκις ἑαυτῷ διακονήσασθαι δυνάμενος οἰκέτην ὠνήσατο οὐ χρείας ἕνεκεν, ἀλλ' ὥστε μὴ δόξαι ἠτιμῶσθαι ἑαυτῷ διακονούμενος. Ἐπεὶ τίνος ἕνεκεν, εἰπέ μοι, τὸν πάντα χρόνον ταῖς ἑαυτοῦ χερσὶν ὑπηρετούμενος ταῖς ἄλλου βούλει νῦν ὑπηρετεῖσθαι; Εἶτα, ἂν ἕτερον χρυσίον προσγένηται, καὶ σκεύη ἀργυρᾶ κτᾶται καὶ οἰκίαν λαμπράν. Τούτων οὐδὲν χρείας ἕνεκεν· εἰ γὰρ χρείας ἕνεκεν ταῦτα ἐγίνετο, τὸ πλέον ἂν τοῦ γένους τῶν ἀνθρώπων ἀπωλώλει καὶ διέφθαρτο.

Οἷόν τι λέγω· ἔστιν ἀναγκαῖα καὶ ὧν ἄνευ ζῆν οὐκ ἔνι, οἷον ἡ τῆς γῆς φορὰ πρᾶγμα ἀναγκαῖόν ἐστιν, καὶ ταύτης μὴ φερούσης καρπὸν οὐκ ἔνι ζῆν· τὰ τῶν ἱματίων σκεπάσματα, ὄροφος καὶ τοῖχοι καὶ ὑποδήματα, ταῦτα τῶν ἀναγκαίων ἐστίν, τὰ μέντοι ἄλλα ἅπαντα περιττά. Ἐπεὶ εἰ κἀκεῖνα ἀναγκαῖα ἦν καὶ οὐκ ἦν ἀνθρώπῳ ἄνευ διακόνου ζῆν, ὥσπερ οὐκ ἔστι δυνατὸν ἄνευ ἐκείνων ζῆν, τὸ πλέον ἂν ἀπωλώλει τῶν ἀνθρώπων, ἐπειδὴ τὸ πλέον τοὺς διακονουμένους οὐκ ἔχουσιν.

(14 fin) Οὒκ ἐστι σχῆμα τὸ καλὰ φορεῖν ἱμάτια, ἀλλὰ σχῆμά ἐστι τὸ καλὰς περικεῖσθαι πράξεις.
                                                                                                            Jean Chrysostome, Sur la vaine gloire et l'éducation des enfants




(13) Mais passons à une autre forme de la vaine gloire. Laquelle donc ? Celle qui est le fait de la plupart des hommes et non plus d'un seul ou de deux. Nous éprouvons du plaisir quand on nous fait des compliments et à propos de choses pour lesquelles nous n'avons pas le moindre mérite, nous le savons bien. Le pauvre fait tout pour porter de beaux vêtements et il n'a en cela d'autre but que de s'attirer la considération de la foule; souvent, alors qu'il pourrait se servir lui-même, il s'achète un domestique, non par nécessité, mais pour ne pas être considéré aux yeux de tous en se servant lui-même. En effet pour quelle raison, dis-moi, te servant constamment de tes mains, veux-tu maintenant être servi par les mains d'un autre ? Ensuite, si sa fortune augmente, il achète même de l'argenterie et une belle maison. De tout cela, aucun besoin; s'il s'agissait d'un besoin, la plus grande partie de l'humanité serait morte et aurait péri.

Voici ce que je veux dire : il est des choses nécessaires sans lesquelles il n'est pas possible de vivre; par exemple, les produits de la terre sont une chose nécessaire et si elle ne porte pas de fruits, il n'est pas possible de vivre. Les vêtements qui nous couvrent, le toit et les murs, les chaussures, tout cela ce sont des choses nécessaires, tandis que toutes les autres choses sont du superflu. En effet si elles étaient nécessaires et s'il n'était pas possible de vivre sans serviteur tout comme il n'est pas possible de vivre sans ces choses, la plupart des hommes seraient morts, puisque la plupart du temps ils n'ont pas de serviteur.

(14 fin) La dignité, ce n'est pas de porter de beaux vêtements, mais la dignité, c'est d'être entouré de belles actions.
                                                                                                                   trad. Anne-Marie Malingrey, les éditions du Cerf, 1972



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κενοδοξία, ας (ἡ) : recherche ou amour de la vaine gloire.
ἀλλ' ἐφ' ἕτερον ἔλθωμεν εἶδος κενοδοξίας : mais passons à une autre forme de la vaine gloire.
οἷόν τι λέγω : je dis quelque chose de ce genre.
τὸ πλέον ἂν ἀπωλώλει τῶν ἀνθρώπων, ἐπειδὴ τὸ πλέον τοὺς διακονουμένους οὐκ ἔχουσιν : la plupart des hommes seraient morts, puisque la plupart du temps ils n'ont pas de serviteur.
διακονέω-ῶ (imparf. ἐδιακόνουν, futur διακονήσω, aor. ἐδιακόνησα, parf. δεδιακόνηκα; passif aor. ἐδιακονήθην, parf. δεδιακόνημαι : être serviteur, faire office de serviteur, servir.
διακονημένοι : qui sont serviteurs, les serviteurs.

ἔστιν ἀναγκαῖα καὶ ὧν ἄνευ ζῆν οὐκ ἔνι, οἷον ἡ τῆς γῆς φορὰ πρᾶγμα ἀναγκαῖόν ἐστιν, καὶ ταύτης μὴ φερούσης καρπὸν οὐκ ἔνι ζῆν : il est des choses nécessaires sans lesquelles il n'est pas possible de vivre; par exemple, les produits de la terre sont une chose nécessaire et si elle ne porte pas de fruits, il n'est pas possible de vivre.

ἱμάτιον, ου (τὸ) : pièce de vêtement, pardessus, manteau.
au passif περίκειμαι, περικεῖσθαι : être entouré, être enveloppé.
πρᾶξις, εως (ἡ) : action.
οὒκ ἐστι σχῆμα τὸ καλὰ φορεῖν ἱμάτια, ἀλλὰ σχῆμά ἐστι τὸ καλὰς περικεῖσθαι πράξεις : la dignité, ce n'est pas de porter de beaux vêtements, mais la dignité, c'est d'être entouré de belles actions.




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Les pygmées

voir
Manuel de version grecque;  Philippe Le Moigne, page 24; éd. ellipses



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XI. Ὅτι μέσῃ τῇ Ἰνδικῇ ἄνθρωποί εἰσι μέλανες (καλοῦνται Πυγμαῖοι) ὁμόγλωσσοι τοῖς ἄλλοις Ἰνδοῖς. Μικροὶ δέ εἰσι λίαν· οἱ μακρότατοι αὐτῶν πηχέων δύο, οἱ δὲ πλεῖστοι, ἑνὸς ἡμίσεος πήχεος. Κόμην δὲ ἔχουσι μακροτάτην μέχρις ἐπὶ τὰ γόνατα καὶ ἔτι κατώτερον, καὶ πώγωνα μέγιστον πάντων ἀνθρώπων. Ἐπειδὰν οὖν τὸν πώγονα μέγα φύσωσιν, οὐκέτι ἀμφιέννυνται οὐδὲν ἱμάτιον, ἀλλὰ τὰς τρίχας, τὰς μὲν ἐκ τῆς κεφαλῆς ὄπισθεν καθίενται πολὺ κάτω τῶν γονάτων, τὰς δὲ ἐκ τοῦ πώγωνος ἔμπροσθεν μέχρι ποδῶν ἑλκομένας, ἔπειτα περιπυκασάμενοι τὰς τρίχας περὶ ἅπαν τὸ σῶμα, ζώννυνται χρώμενοι αὐταῖς ἀντὶ ἱματίου. Αἰδοῖον δὲ μέγα ἔχουσιν ὥστε ψαύειν τῶν σφυρῶν αὐτῶν, καὶ παχύ. Αὐτοὶ δὲ σιμοί τε καὶ αἰσχροί. Τὰ δὲ πρόϐατα αὐτῶν ὡς ἄρνες, καὶ οἱ ὄνοι καὶ αἱ βόες σχεδὸν ὅσον κριοί. Καὶ οἱ ἵπποι αὐτῶν καὶ ἡμίονοι καὶ τὰ ἄλλα κτήνη πάντα οὐδὲν μείζω κριῶν. Ἕπονται δὲ τῷ βασιλεῖ τῶν Ἰνδῶν τούτων τῶν Πυγμαίων ἄνδρες τρισχίλιοι· σφόδρα γάρ εἰσι τοξόται. Δικαιότατοι δέ εἰσι καὶ νόμοισι χρῶνται ὥσπερ καὶ οἱ Ἰνδοί. Λαγοὺς δὲ καὶ ἀλώπεκας θηρεύουσιν οὐ τοῖς κυσὶν ἀλλὰ κόραξι καὶ ἰκτίσι καὶ κορώναις καὶ ἀετοῖς.

Ὅτι λίμνη ἐστὶν ἐν αὐτοῖς (σταδίων ὀκτακοσίωνπερίμετρος) ἐν ᾗ ἀνέμου μὴ πνέοντος, ἐπάνω τῆς λίμνης ἔλαιον ἐφίσταται· καὶ πλοαρίοις πλέοντες δι´ αὐτῆς, ἐκ μέσης αὐτῆς σκαφίοις τοῦ ἐλαίου ἀπαρύονται καὶ χρῶνται. Χρῶνται δὲ καὶ σησαμίνῳ. Ἔχει δὲ ἡ λίμνη καὶ ἰχθύας. Καὶ τῷ καρυΐνῳ δὲ χρῶνται· κρεῖσσον δὲ τὸ λιμναῖον.

XII. Ἔστι δὲ αὐτόθι ἄργυρος πολὺς καὶ ἀργύρεα μέταλλα, οὐ βαθέα, ἀλλὰ βαθύτερα εἶναί φασι τὰ ἐν Βάκτροις. Ἔστι δὲ καὶ χρυσὸς ἐν τῇ Ἰνδικῇ χώρᾳ, οὐκ ἐν τοῖς ποταμοῖς εὑρισκόμενος καὶ πλυνόμενος ὥσπερ ἐν τῷ Πακτωλῷ ποταμῷ, ἀλλ´ ὄρη πολλὰ καὶ μεγάλα ἐν οἷς οἰκοῦσι γρῦπες, ὄρνεα τετράποδα, μέγεθος ὅσον λύκος, σκέλη καὶ ὄνυχες οἷά περ λέων· τὰ ἐν τῷ ἄλλῳ σώματι πτερὰ μέλανα, ἐρυθρὰ δὲ τὰ ἐν τῷ στήθει. Δι´ αὐτοὺς δὲ ὁ ἐν τοῖς ὄρεσι χρυσὸς πολὺς ὢν γίνεται δυσπόριστος.

voir hors site Ctésias
                                                                                                                                                         Ctésias de Cnide



XI. Il y a au milieu de l'Inde des hommes noirs, qu'on appelle Pygmées. Ils parlent la même langue que les Indiens, et sont très petits. Les plus grands n'ont que deux coudées; la plupart n'en ont qu'une et demie. Leur chevelure est très longue; elle leur descend jusqu'aux genoux et même encore plus bas. Ils ont la barbe plus grande que tous les autres hommes; quand elle a pris toute sa croissance, ils ne se servent plus de vêtements, leurs cheveux et leur barbe leur en tiennent lieu. Ils laissent descendre leurs cheveux par derrière beaucoup au-dessous des genoux; leur barbe leur va aux pieds. Lorsqu'ils ont ainsi tout le corps couvert de poils ils se le ceignent d'une ceinture, et n'ont pas besoin par conséquent de vêtements. Ils ont le membre viril long et gros; il leur descend à la cheville des pieds. Ils sont camus et laids. Leurs moutons ne sont pas plus gros que des agneaux ; leurs bœufs et leurs ânes le sont presque autant que des béliers. Leurs chevaux, leurs mulets et toutes les autres bêtes de charge ne le sont pas plus que des béliers. Les pygmées accompagnent le Roi de l'Inde, il en a trois mille à sa suite. Ils sont habiles à tirer de l'arc. Ils sont très justes et se servent des mêmes lois que les Indiens, vont à la chasse du lièvre et du renard. Au lieu de chiens, ils se servent pour cette chasse de corbeaux, de milans, de corneilles et d’aigles.

Les Indiens ont dans leur pays un lac qui a huit cents stades de circonférence. Lorsque ce lac n’est pas agité par le vent, il nage sur sa surface une huile semblable à la nôtre. Ils naviguent sur ce lac et puisent l’huile avec des vases et s’en servent aux mêmes usages que nous. Ils ont aussi de l’huile de sésame et de noix mais la meilleure est celle du lac. Ce lac est très poissonneux.

XII. Il y a beaucoup d'argent dans l'Inde; les mines de ce métal ne sont pas profondes. Elles le sont cependant davantage que dans la Bactriane. On y trouve aussi de l'or, non dans les fleuves, comme on en trouve dans le Pactole, mais dans beaucoup de grandes montagnes. Ces montagnes sont habitées par des Gryphons. Ce sont des oiseaux à quatre pieds, de la grandeur du loup, dont les jambes et les griffes ressemblent à celles du lion. Leurs plumes sont rouges sur la poitrine, et noires sur le reste du corps. Ces animaux sont cause qu'il est très difficile d'emporter l'or, quoiqu'il soit abondant dans les montagnes.





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μέλας, αινα, αν, gén. μέλανος, αίνης, ανος : noir, de couleur noire.
καλέω-ῶ (futur καλέσω, att. καλῶ, aor. ἐκάλεσα, parf. κέκληκα ; passif présent καλοῦμαι, futur κληθήσομαι, aor. ἐκλήθην, parf. κέκλημαι) : appeler.
καλοῦνται Πυγμαῖοι : on les appelle Pygmées.
ὁμόγλωσσος, att. ὁμόγλωττος, ος, ον : qui parle la même langue.
ὁμόγλωσσοι τοῖς ἄλλοις Ἰνδοῖς : qui parlent la même langue que les autres Indiens.
λίαν adv. : tout à fait extrêmement, très, fort; tout à fait.
memento λίην πιστεύειν, Hdt. 4, 96 : avoir une confiance excessive.
memento μὴ λίαν στένε, Soph. El. 1172 : ne te lamente pas à l’excès.
memento λίην μέγα, Od. 3, 227 ; 16, 243 : trop grand.

μακρός, ά, όν : long; grand.
compar. μακρότερος; superl. μακρότατος.
πῆχυς, εως (ὁ) : coudée (un pied et demi, 0m45)
οἱ μακρότατοι αὐτῶν πηχέων δύο, οἱ δὲ πλεῖστοι ἑνὸς ἡμίσεος πήχεος : les plus grands n'ont que deux coudées; la plupart n'en ont qu'une et demie.

λαγός, οῦ (ὁ) (c. λαγώς) : lièvre. --- voir dico Bailly version établie par Gérard Gréco
ἀλώπηξ, εκος (ἡ) : renard.
θηρεύω : aller à la chasse.
κύων (voc. κύον, gén. κυνός, dat. κυνί, acc. κύνα; dat. plur. κυσί) (ὁ, ἡ) : chien, chienne.
κόραξ, ακος (ὁ) : corbeau.
κορώνη, ης (ἡ) : corneille.
ἴκτιν (ὁ) d’où acc. sing. ἴκτινα ou *ἰκτίν (ὁ); nom. plur. ἰκτῖνες; dat. ἰκτῖσι : c. ἰκτῖνος : milan.--- voir dico Bailly
ἀετός, οῦ (ὁ) : aigle.
λαγοὺς δὲ καὶ ἀλώπεκας θηρεύουσιν οὐ τοῖς κυσὶν ἀλλὰ κόραξι καὶ ἰκτίσι καὶ κορώναις καὶ ἀετοῖς  : au lieu de chiens, ils se servent pour cette chasse de corbeaux, de milans, de corneilles et d’aigles.

ὄρος, εος-ους (τὸ) : montagne, colline, hauteur.
δύσπορος, ος, ον : difficile à traverser.
χρυσός, οῦ (ὁ) : or, métal précieux.
γίγνομαι rare γίνομαι (imparf. ἐγιγνόμην, futur γενήσομαι, aor.2 ἐγενόμην, parf. γέγονα et γεγένημαι) : devenir, être fait, être, avoir lieu, arriver.
et la 3e pers. sing. des temps de γίγνομαι (γίγνεται, γίγνηται, ἐγένετο, etc.).
memento ὅσσα γίνεται ἐπὶ χθονί : tout ce qui arrive sur terre.
δι´ αὐτοὺς δὲ ὁ ἐν τοῖς ὄρεσι χρυσὸς πολὺς ὢν γίνεται δυσπόριστος : ces animaux sont cause qu'il est très difficile d'emporter l'or, quoiqu'il soit abondant dans les montagnes.



                                                                                                                                                                                                            

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L'étonnant Périclès




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[2,65,1] Τοιαῦτα ὁ Περικλῆς λέγων ἐπειρᾶτο τοὺς Ἀθηναίους τῆς τε ἐς αὑτὸν ὀργῆς παραλύειν καὶ ἀπὸ τῶν παρόντων δεινῶν ἀπάγειν τὴν γνώμην. [2] οἱ δὲ δημοσίᾳ μὲν τοῖς λόγοις ἀνεπείθοντο καὶ οὔτε πρὸς τοὺς Λακεδαιμονίους ἔτι ἔπεμπον ἔς τε τὸν πόλεμον μᾶλλον ὥρμηντο, ἰδίᾳ δὲ τοῖς παθήμασιν ἐλυποῦντο, ὁ μὲν δῆμος ὅτι ἀπ' ἐλασσόνων ὁρμώμενος ἐστέρητο καὶ τούτων, οἱ δὲ δυνατοὶ καλὰ κτήματα κατὰ τὴν χώραν οἰκοδομίαις τε καὶ πολυτελέσι κατασκευαῖς ἀπολωλεκότες, τὸ δὲ μέγιστον, πόλεμον ἀντ' εἰρήνης ἔχοντες. [3] οὐ μέντοι πρότερόν γε οἱ ξύμπαντες ἐπαύσαντο ἐν ὀργῇ ἔχοντες αὐτὸν πρὶν ἐζημίωσαν χρήμασιν. [4] ὕστερον δ' αὖθις οὐ πολλῷ, ὅπερ φιλεῖ ὅμιλος ποιεῖν, στρατηγὸν εἵλοντο καὶ πάντα τὰ πράγματα ἐπέτρεψαν, ὧν μὲν περὶ τὰ οἰκεῖα ἕκαστος ἤλγει ἀμϐλύτεροι ἤδη ὄντες, ὧν δὲ ἡ ξύμπασα πόλις προσεδεῖτο πλείστου ἄξιον νομίζοντες εἶναι. [5] ὅσον τε γὰρ χρόνον προύστη τῆς πόλεως ἐν τῇ εἰρήνῃ, μετρίως ἐξηγεῖτο καὶ ἀσφαλῶς διεφύλαξεν αὐτήν, καὶ ἐγένετο ἐπ' ἐκείνου μεγίστη, ἐπειδή τε ὁ πόλεμος κατέστη, ὁ δὲ φαίνεται καὶ ἐν τούτῳ προγνοὺς τὴν δύναμιν. [6] ἐπεϐίω δὲ δύο ἔτη καὶ ἓξ μῆνας· καὶ ἐπειδὴ ἀπέθανεν, ἐπὶ πλέον ἔτι ἐγνώσθη ἡ πρόνοια αὐτοῦ ἡ ἐς τὸν πόλεμον.
[7] ὁ μὲν γὰρ ἡσυχάζοντάς τε καὶ τὸ ναυτικὸν θεραπεύοντας καὶ ἀρχὴν μὴ ἐπικτωμένους ἐν τῷ πολέμῳ μηδὲ τῇ πόλει κινδυνεύοντας ἔφη περιέσεσθαι· οἱ δὲ ταῦτά τε πάντα ἐς τοὐναντίον ἔπραξαν καὶ ἄλλα ἔξω τοῦ πολέμου δοκοῦντα εἶναι κατὰ τὰς ἰδίας φιλοτιμίας καὶ ἴδια κέρδη κακῶς ἔς τε σφᾶς αὐτοὺς καὶ τοὺς ξυμμάχους ἐπολίτευσαν, ἃ κατορθούμενα μὲν τοῖς ἰδιώταις τιμὴ καὶ ὠφελία μᾶλλον ἦν, σφαλέντα δὲ τῇ πόλει ἐς τὸν πόλεμον βλάϐη καθίστατο. [8] αἴτιον δ' ἦν ὅτι ἐκεῖνος μὲν δυνατὸς ὢν τῷ τε ἀξιώματι καὶ τῇ γνώμῃ χρημάτων τε διαφανῶς ἀδωρότατος γενόμενος κατεῖχε τὸ πλῆθος ἐλευθέρως, καὶ οὐκ ἤγετο μᾶλλον ὑπ' αὐτοῦ ἢ αὐτὸς ἦγε, διὰ τὸ μὴ κτώμενος ἐξ οὐ προσηκόντων τὴν δύναμιν πρὸς ἡδονήν τι λέγειν, ἀλλ' ἔχων ἐπ' ἀξιώσει καὶ πρὸς ὀργήν τι ἀντειπεῖν. [9] ὁπότε γοῦν αἴσθοιτό τι αὐτοὺς παρὰ καιρὸν ὕϐρει θαρσοῦντας, λέγων κατέπλησσεν ἐπὶ τὸ φοϐεῖσθαι, καὶ δεδιότας αὖ ἀλόγως ἀντικαθίστη πάλιν ἐπὶ τὸ θαρσεῖν. ἐγίγνετό τε λόγῳ μὲν δημοκρατία, ἔργῳ δὲ ὑπὸ τοῦ πρώτου ἀνδρὸς ἀρχή. [10] οἱ δὲ ὕστερον ἴσοι μᾶλλον αὐτοὶ πρὸς ἀλλήλους ὄντες καὶ ὀρεγόμενοι τοῦ πρῶτος ἕκαστος γίγνεσθαι ἐτράποντο καθ' ἡδονὰς τῷ δήμῳ καὶ τὰ πράγματα ἐνδιδόναι.
                                                                                                                                                     Thucidide, Guerre du Péloponnèse, 2, 65, 1-10.




[2,65,1] Voilà en substance ce que disait Périclès : il s'efforçait par là, tout à la fois, d'enrayer la colère des Athéniens contre lui et de détacher leur esprit des souffrances présentes. [2] Quant à eux, dans l'ordre politique, ils se laissaient convaincre par ses arguments, et, n'envoyant plus d'ambassades à Spartes, ils se montraient plus résolus à la guerre; ils s'affligeaient seulement, à titre personnel, de leurs malheurs : car le peuple, parti avec peu, se trouvait privé de cela même; et les riches avaient perdu de beaux biens à la campagne, sous forme de constructions et d'installations coûteuses; surtout, ils avaient la guerre au lieu de la paix. [3] Mais, en ce qui concerne leur colère envers lui, ils n'y renoncèrent pas qu'ils ne l'eussent frappé d'une amende. [4] Puis, peu après, par une mesure contraire, ainsi que le peuple en use volontiers, ils le choisirent comme stratège et lui confièrent la direction de toutes les affaires : pour leurs mécontements personnels, leur sensiblité était désormais moins vive, et, pour les besoins de l'Etat dans son ensemble, ils le jugeaient le plus capable. [5] En effet, tout le temps qu'il fut à la tête de la cité pendant la paix, il la dirigeait avec modération, et sut veiller sur elle de façon sûre; aussi est-ce de son temps qu'elle fut la plus grande; et de même, lorsqu'il y eut la guerre, il apparaît que, là aussi, il apprécia d'emblée sa puissance. [6] Ils vécut les événements pendant deux ans et six mois, et, après sa mort, on reconnut encore bien mieux la valeur de ses prévisions en ce qui concerne la guerre. [7] Il avait dit aux Athéniens qu'en restant tranquilles, en prenant soin de la flotte, en s'abstenant d'étendre leur domination au cours de la guerre et de mettre la cité en péril, ils auraient le dessus. Or, en tout cela, ils firent, eux, l'inverse; et, en outre, pour servir leurs ambitions privées et leurs profits privés, ils prirent, dans un domaine en apparence étranger à la guerre, des mesures aussi mauvaises pour eux-mêmes que pour leurs alliés : leur réussite devait plutôt apporter aux individus de l'honneur et des avantages, mais leur échec entraînait pour la cité des conséquences fâcheuses dans l'organisation de la guerre. [8] La raison en était la suivante. C'est qu'il avait, lui, de l'autorité, grâce à la considération dont il jouissait et à ses qualités d'esprit, et que, de plus, pour l'argent, il montrait une éclatante intégrité; mais tenait-il la foule, quoique libre, bien en main, et, au lieu de se laisser diriger par elle, il la dirigeait : en effet, comme il ne devait pas ses moyens à des sources illégitimes, il ne parlait jamais en vue de faire plaisir et il pouvait au contraire mettre à profit l'estime des gens pour s'opposer même à leur colère. [9] En tout cas, chaque fois qu'il les voyait à se livrer mal à propos à une insolente confiance, il les frappait par ses paroles en leur imposant de la crainte; et s'ils éprouvaient une frayeur déraisonnable, il les ramenait à la confiance. Sous le nom de démocratie, c'était en fait le premier citoyen qui gouvernait. [10] Au contraire, les hommes qui suivirent étaient, par eux-mêmes, plus égaux entre eux, et ils aspiraient chacun à cette première place : ils cherchèrent donc le plaisir du peuple, dont ils firent dépendrela conduite même des affaires.
                   trad. Jacqueline de Romilly; éd. les belles lettres


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Τοιαῦτα ὁ Περικλῆς λέγων ἐπειρᾶτο τοὺς Ἀθηναίους τῆς τε ἐς αὑτὸν ὀργῆς παραλύειν : Périclès, par ces paroles, tentait de dissiper la colère dont il était l'objet et de détourner des maux présents la pensée des Athéniens.
πειράω-ῶ (imparf. ἐπείρων, futur πειράσω, aor. ἐπείρασα, parf. πεπείρακα ; passif futur πειραθήσομαι, aor. ἐπειράθην, parf. πεπείραμαι) : essayer, tenter, s’efforcer.

ὁρμή, ῆς (ἡ) : assaut, attaque; impulsion, désir; élan vers un but, ardeur, zèle.
ὁρμάω-ῶ (imparf. ὥρμων, futur ὁρμήσω, aor. ὥρμησα, parf. ὥρμηκα ; passif aor. ὡρμήθην, parf. ὥρμημαι) : s'élancer, mettre en mouvement, mettre de l'ardeur, entreprendre, partir.
πέμπω (imparf. ἔπεμπον, futur πέμψω, aor. ἔπεμψα, parf. πέπομφα, pl.q.parf. ἐπεπόμφειν ; passif futur πεμφθήσομαι, aor. ἐπέμφθην, parf. πέπεμμαι, πέπεμψαι, πέπεμπται, etc., pl.q.parf. ἐπεπέμμην) : envoyer.
οὔτε πρὸς τοὺς Λακεδαιμονίους ἔτι ἔπεμπον ἔς τε τὸν πόλεμον μᾶλλον ὥρμηντο : ils n'envoyèrent plus désormais d'ambassades aux Lacédémoniens et mirent plus d'ardeur à poursuivre la guerre.

πάθημα, ατος (τὸ) : maladie, au plur. symptômes d’une maladie; affliction, malheur.
λυπέω-ῶ (futur λυπήσω, aor. inus., parf. λελύπηκα) : chagriner, affliger; inquiéter, harceler.
διος, α ou ος, ον : personnel, privé; particulier.
τὰ ἴδια : les affaires privées, les intérêts particuliers; la demeure particulière, le chez soi.
οἱ ἴδιοι : les simples particuliers; les amis particuliers. 
ἰδίᾳ : dans la vie privée.
ἰδίᾳ δὲ τοῖς παθήμασιν ἐλυποῦντο : dans la vie privée, ils s'affligeaient de leurs souffrances.

moyen ὀρέγομαι (aor. ὠρεξάμην, plus souvent ὠρέχθην) : s’étendre, s’allonger;  s’étendre vers, tendre vers, viser, aspirer à (avec gén.).
τρέπω (futur τρέψω, aor.1 ἔτρεψα, aor.2 ἔτραπον, parf.2 τέτροφα ou τέτραφα) : tourner, diriger; changer, transformer.
οἱ δὲ ὕστερον ἴσοι μᾶλλον αὐτοὶ πρὸς ἀλλήλους ὄντες καὶ ὀρεγόμενοι τοῦ πρῶτος ἕκαστος γίγνεσθαι ἐτράποντο καθ' ἡδονὰς τῷ δήμῳ καὶ τὰ πράγματα ἐνδιδόναι : au contraire, les hommes qui suivirent étaient, par eux-mêmes, plus égaux entre eux, et ils aspiraient chacun à cette première place : ils cherchèrent donc le plaisir du peuple, dont ils firent dépendre la conduite même des affaires.













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Nicias exhorte les Athéniens et leurs alliés


voir
Manuel de version grecque;  Philippe Le Moigne, page 59; éd. ellipses




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[7,64] τούς τε Ἀθηναίους ὑμῶν πάλιν αὖ καὶ τάδε ὑπομιμνῄσκω, ὅτι οὔτε ναῦς ἐν τοῖς νεωσοίκοις ἄλλας ὁμοίας ταῖσδε οὔτε ὁπλιτῶν ἡλικίαν ὑπελίπετε, εἴ τε ξυμϐήσεταί τι ἄλλο ἢ τὸ κρατεῖν ὑμῖν, τούς τε ἐνθάδε πολεμίους εὐθὺς ἐπ' ἐκεῖνα πλευσομένους καὶ τοὺς ἐκεῖ ὑπολοίπους ἡμῶν ἀδυνάτους ἐσομένους τούς τε αὐτοῦ καὶ τοὺς ἐπελθόντας ἀμύνασθαι. καὶ οἱ μὲν ἂν ὑπὸ Συρακοσίοις εὐθὺς γίγνοισθε, οἷς αὐτοὶ ἴστε οἵᾳ γνώμῃ ἐπήλθετε, οἱ δὲ ἐκεῖ ὑπὸ Λακεδαιμονίοις. ὥστε ἐν ἑνὶ τῷδε ὑπὲρ ἀμφοτέρων ἀγῶνι καθεστῶτες καρτερήσατε, εἴπερ ποτέ, καὶ ἐνθυμεῖσθε καθ'ἑκάστους τε καὶ ξύμπαντες ὅτι οἱ ἐν ταῖς ναυσὶν ὑμῶν νῦν ἐσόμενοι καὶ πεζοὶ τοῖς Ἀθηναίοις εἰσὶ καὶ νῆες καὶ ἡ ὑπόλοιπος πόλις καὶ τὸ μέγα ὄνομα τῶν Ἀθηνῶν, περὶ ὧν, εἴ τίς τι ἕτερος ἑτέρου προφέρει ἢ ἐπιστήμῃ ἢ εὐψυχίᾳ, οὐκ ἂν ἐν ἄλλῳ μᾶλλον καιρῷ ἀποδειξάμενος αὐτός τε αὑτῷ ὠφέλιμος γένοιτο καὶ τοῖς ξύμπασι σωτήριος.

[7,65] Ὁ μὲν Νικίας τοσαῦτα παρακελευσάμενος εὐθὺς ἐκέλευε πληροῦν τὰς ναῦς. τῷ δὲ Γυλίππῳ καὶ τοῖς Συρακοσίοις παρῆν μὲν αἰσθάνεσθαι, ὁρῶσι καὶ αὐτὴν τὴν παρασκευήν, ὅτι ναυμαχήσουσιν οἱ Ἀθηναῖοι, προηγγέλθη δ' αὐτοῖς καὶ ἡ ἐπι
ϐολὴ τῶν σιδηρῶν χειρῶν, καὶ πρός τε τἆλλα ἐξηρτύσαντο ὡς ἕκαστα καὶ πρὸς τοῦτο· τὰς γὰρ πρῴρας καὶ τῆς νεὼς ἄνω ἐπὶ πολὺ κατεϐύρσωσαν, ὅπως ἂν ἀπολισθάνοι καὶ μὴ ἔχοι ἀντιλαϐὴνχεὶρ ἐπιϐαλλομένη.
                                                                                                                                                Thucydide, Guerre du Péloponnèse, 7, 64 et 65




[7,64] Quant à vous, Athéniens, je vous rappelle que vous n'avez derrière vous, ni flotte semblable à celle-ci dans vos arsenaux, ni jeunesse en état de porter les armes. Si donc il vous arrive autre chose que d'être vainqueurs, vos ennemis d'ici mettront immédiatement le cap sur l'Attique et les troupes que vous avez là-bas seront impuissantes à résister à l'adversaire ainsi renforcé. Vous, vous tomberez immédiatement aux mains des Syracusains - et vous n'ignorez pas quelles étaient vos dispositions en venant les attaquer - ceux d'Attique tomberont au pouvoir des Lacédémoniens. Aussi montrez-vous fermes plus que jamais dans ce combat, qui doit vous préserver d'un double malheur. Tous ensemble et chacun en particulier dites-vous qu'avec vous sur ces vaisseaux, il y a les troupes de terre athéniennes, ce qui reste de la ville et le grand nom d'Athènes. « Aussi tous ceux qui l'emportent par l'expérience et par la valeur doivent se convaincre qu'ils n'auront jamais meilleure occasion d'assurer, avec leur propre intérêt, le salut de tous. »

[7,65] Après cette exhortation, Nicias donna, sans tarder, l'ordre d'embarquer. Gylippos et les Syracusains pouvaient voir distinctement que les Athéniens se préparaient au combat. De plus, on les informa que l'ennemi devait utiliser des grappins de fer. Ils prirent en conséquence toutes leurs dispositions; en particulier, ils garnirent de peaux les proues et les gaillards; ainsi les grappins glisseraient et n'auraient pas de prise.





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νεώσοικοι, ων (οἱ) : loges d’un chantier ou d’un arsenal maritime pour radouber les navires ou remiser ceux qu’on tirait à sec (ναῦς, οἶκος).
συμϐαίνω (imparf. συνέϐαινον, futur συμϐήσομαι, aor. 2 συνέϐην, parf. συμϐέϐηκα, passif aor. συνεϐάθην, parf. συμϐέϐασμαι): se rencontrer, s'entendre, convenir, conclure un marché; arriver, aboutir; coïncider, cadrer avec, s'accorder.
συμϐαίνει (ὥστε) + inf. : il arrive que.
ξυμϐήσεταί = συμϐήσεταί
εἴ τε ξυμϐήσεταί τι ἄλλο ἢ τὸ κρατεῖν ὑμῖν : si donc il vous arrive autre chose que d'être vainqueurs.










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Prose et poésie
       

    
voir Manuel de version grecque;  Philippe Le Moigne, page 63; éd. ellipses




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[8] Οἶδα μὲν οὖν ὅτι χαλεπόν ἐστιν ὃ μέλλω ποιεῖν, ἀνδρὸς ἀρετὴν διὰ λόγων ἐγκωμιάζειν. Σημεῖον δὲ μέγιστον· περὶ μὲν γὰρ ἄλλων πολλῶν καὶ παντοδαπῶν λέγειν τολμῶσιν οἱ περὶ τὴν φιλοσοφίαν ὄντες, περὶ δὲ τῶν τοιούτων οὐδεὶς πώποτ' αὐτῶν συγγράφειν ἐπεχείρησεν. Καὶ πολλὴν αὐτοῖς ἔχω συγγνώμην.

(9) Τοῖς μὲν γὰρ ποιηταῖς πολλοὶ δέδονται κόσμοι· καὶ γὰρ πλησιάζοντας τοὺς θεοὺς τοῖς ἀνθρώποις οἷόν τ' αὐτοῖς ποιῆσαι καὶ διαλεγομένους καὶ συναγωνιζομένους οἷς ἂν βουληθῶσι, καὶ περὶ τούτων δηλῶσαι μὴ μόνον τοῖς τεταγμένοις ὀνόμασιν, ἀλλὰ τὰ μὲν ξένοις, τὰ δὲ καινοῖς, τὰ δὲ μεταφοραῖς, καὶ μηδὲν παραλιπεῖν, ἀλλὰ πᾶσι τοῖς εἴδεσι διαποικῖλαι τὴν ποίησιν·

[10]  τοῖς δὲ περὶ τοὺς λόγους οὐδὲν ἔξεστι τῶν τοιούτων, ἀλλ' ἀποτόμως καὶ τῶν ὀνομάτων τοῖς πολιτικοῖς μόνον καὶ τῶν ἐνθυμημάτων τοῖς περὶ αὐτὰς τὰς πράξεις ἀναγκαῖόν ἐστι χρῆσθαι. Πρὸς δὲ τούτοις οἱ μὲν μετὰ μέτρων καὶ ῥυθμῶν ἅπαντα ποιοῦσιν, οἱ δ' οὐδενὸς τούτων κοινωνοῦσιν· ἃ τοσαύτην ἔχει χάριν, ὥστ' ἂν καὶ τῇ λέξει καὶ τοῖς ἐνθυμήμασιν ἔχῃ κακῶς, ὅμως αὐταῖς ταῖς εὐρυθμίαις καὶ ταῖς συμμετρίαις ψυχαγωγοῦσι τοὺς ἀκούοντας.

(11) Γνοίη δ' ἄν τις ἐκεῖθεν τὴν δύναμιν αὐτῶν· ἢν γάρ τις τῶν ποιημάτων τῶν εὐδοκιμούντων τὰ μὲν ὀνόματα καὶ τὰς διανοίας καταλίπῃ, τὸ δὲ μέτρον διαλύσῃ, φανήσεται πολὺ καταδεέστερα τῆς δόξης ἧς νῦν ἔχομεν περὶ αὐτῶν. Ὅμως δὲ καίπερ τοσοῦτον πλεονεκτούσης τῆς ποιήσεως, οὐκ ὀκνητέον, ἀλλ' ἀποπειρατέον τῶν λόγων ἐστίν, εἰ καὶ τοῦτο δυνήσονται, τοὺς ἀγαθοὺς ἄνδρας εὐλογεῖν μηδὲν χεῖρον τῶν ἐν ταῖς ᾠδαῖς καὶ τοῖς μέτροις ἐγκωμιαζόντων.
                                                                                                                                                                                               Isocrate, Evagoras, 8, 11.


[8] Je connais la difficulté de ce que je vais faire : faire l'éloge de la vertu d'un homme en prose. J'en ai une preuve incontestable; au sujet de bien d'autres, de toute origine, ceux qui s'occupent de philosophie osent parler, tandis qu'au sujet de tels hommes, aucun d'entre eux n'a jamais entrepris de composer un écrit. Et je leur pardonne volontiers.

(9) Il est en effet donner aux poètes de disposer de bien des ornements. Il leur est en effet permis de représenter les dieux se rapprochant des hommes, discutant et combattant avec ceux qu'ils veulent, et de faire leur démonstration à leur propos non seulement avec les mots d'usage, mais en usant  tantôt de termes étrangers, tantôt de vocables nouveaux,  tantôt de métaphores,  et de ne rien négliger, mais de broder leur poésie à l'aide de toutes les formes qui existent.

[10] En revanche, aucun des procédés de ce genre n'est possible aux prosateurs; non, la règle est stricte : ils sont obligés de recourir, parmi les mots, à ceux qui sont en usage dans la cité et, parmi les pensées, à celles qui touchent les actions elles-mêmes. En outre, les uns représentent tout avec des mètres et des rythmes, tandis que les autres n'ont part à aucun de ces procédés, qui ont tant d'agrément que, même si l'expression et les idées sont en défaut, ils n'en charment pas moins les âmes des auditeurs par la beauté des rythmes et l'harmonie des proportions.

(11) Et l'on pourrait en reconnaître la vertu par ceci : si l'on conserve, dans les poèmes célèbres, les mots et les idées, mais que l'on supprime le mètre, on verra qu'ils sont bien inférieurs à l'opinion que nous avons d'eux actuellement. Cependant, bien que la poésie jouisse d'un si grande supériorité, il n'y a pas lieu d'hésiter; au contraire, il faut faire l'épreuve de la prose et voir si elle pourra arriver à ce résultat également : dire du bien des honnêtes gens d'une manière qui n'est en rien inférieure à ceux qui composent des éloges dans leurs odes, avec les mètres.
      trad. Le Moigne Philippe;  Manuel de version grecque, éd. Ellipses



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ἐγκωμιάζω (imparf. ἐνεκωμίαζον, futur ἐγκωμιάσω et ἐγκωμιάσομαι, aor. ἐνεκωμίασα) : faire l’éloge de, vanter.
οἶδα μὲν οὖν ὅτι χαλεπόν ἐστιν ὃ μέλλω ποιεῖν, ἀνδρὸς ἀρετὴν διὰ λόγων ἐγκωμιάζειν : je sais combien est difficile la tâche que je me suis imposée, de louer la vertu d'un homme dans un discours en prose.


ἀποπειράω-ῶ (futur ἀποπειράσω, aor. ἀπεπείρασα) : faire une tentative sur, essayer de s’emparer de; faire l’essai de, tenter.
ἀλλ' ἀποπειρατέον τῶν λόγων ἐστίν, εἰ καὶ τοῦτο δυνήσονται, τοὺς ἀγαθοὺς ἄνδρας εὐλογεῖν μηδὲν χεῖρον τῶν ἐν ταῖς ᾠδαῖς καὶ τοῖς μέτροις ἐγκωμιαζόντων : mais quelque grands que puissent être les prestiges de la poésie, il ne faut pas perdre courage, il faut voir si les hommes distingués pour leur vertu ne peuvent pas être loués dans un discours éloquent, aussi bien que dans une poésie harmonieuse.








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Nous avons tous été vaincus

            
voir Manuel de version grecque;  Philippe Le Moigne, page 63; éd. ellipses




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Καρχηδόνιοι δὲ τοὺς μὲν κατ´ ἰδίαν βίους ἀεὶ διεξαγαγόντες ἀπὸ τῶν ἐκ τῆς χώρας γεννημάτων, τὰς δὲ κοινὰς παρασκευὰς καὶ χορηγίας ἁθροίζοντες ἐκ τῶν κατὰ τὴν Λιϐύην προσόδων, ἔτι δὲ πολεμεῖν εἰθισμένοι ξενικαῖς δυνάμεσι, τότε πάντων ἅμα τούτων οὐ μόνον ἐστερημένοι παραλόγως, ἀλλὰ καὶ καθ´ αὑτῶν ὁρῶντες ἕκαστα τῶν προειρημένων ἐπιστρέφοντα, τελέως ἐν μεγάλῃ δυσθυμίᾳ καὶ δυσελπιστίᾳ καθέστασαν, ἅτε παρὰ τὴν προσδοκίαν αὐτοῖς τῶν πραγμάτων ἀποϐεϐηκότων. Τετρυμένοι γὰρ ἐν τῷ περὶ Σικελίας πολέμῳ συνεχῶς ἤλπιζον ἐπιτελεσθεισῶν τῶν διαλύσεων ἀναπνοῆς τινος τεύξεσθαι καὶ καταστάσεως εὐδοκουμένης. Συνέϐαινε δ´ αὐτοῖς τἀναντία· μείζονος γὰρ ἐνίστατο πολέμου καταρχὴ καὶ φοϐερωτέρου. Πρόσθεν μὲν γὰρ ὑπὲρ Σικελίας ἠμφισϐήτουν Ῥωμαίοις, τότε δὲ περὶ σφῶν αὐτῶν καὶ τῆς πατρίδος ἔμελλον κινδυνεύσειν, πόλεμον ἀναλαμϐάνοντες ἐμφύλιον. Πρὸς δὲ τούτοις οὐχ ὅπλων πλῆθος, οὐ ναυτικὴ δύναμις, οὐ πλοίων κατασκευὴ παρ´ αὐτοῖς ἦν, ὡς ἂν τοσαύταις ναυμαχίαις περιπεπτωκότων· καὶ μὴν οὐδὲ χορηγιῶν διάθεσις οὐδὲ φίλων οὐδὲ συμμάχων τῶν βοηθησόντων ἔξωθεν ἐλπὶς οὐδ´ ἡτισοῦν ὑπῆρχεν.

Διὸ καὶ τότε σαφῶς ἔγνωσαν ἡλίκην ἔχει διαφορὰν ξενικὸς καὶ διαπόντιος πόλεμος ἐμφυλίου στάσεως καὶ ταραχῆς. Οὐχ ἥκιστα δ´ αὐτοὶ σφίσι τῶν τοιούτων καὶ τηλικούτων κακῶν ἐγεγόνεισαν αἴτιοι.
                                                                                                                                                                                                                Polybe, 2, 71


Ainsi, les Carthaginois qui, pour leurs besoins particuliers, tiraient tout de leurs campagnes, et  qui trouvaient d'ordinaire dans les revenus de l'Afrique de quoi subvenir aux nécessités de l'État et aux subsides publics, les Carthaginois, enfin, habitués à combattre avec des troupes mercenaires, voyaient ces ressources non-seulement détruites, mais encore tournées contre eux-mêmes. Cette nouvelle épreuve, si inattendue, les jeta dans un abattement qui allait jusqu'au désespoir. Sans cesse accablés de revers en Sicile, ils espéraient, à l'ombre de la paix, pouvoir respirer un peu et goûter quelques moments de bonheur. Tout à coup, au contraire, éclatait une guerre plus redoutable encore et plus violente que celle qu'ils avaient soutenue contre les Romains. Dans celle-ci, il ne s'agissait que de disputer à Rome la Sicile, maintenant c'était leur existence même, c'était celle de leur patrie que ces dissensions intestines mettaient en question. Ajoutez qu'ils n'avaient plus d'armes pour leurs soldats, plus d'armée navale, plus de vaisseaux, après tant et de si terribles désastres; pas d'approvisionnements, pas d'amis, pas d'alliés au dehors, sur l'assistance de qui on pût compter; de ce côté nul espoir.

Ils sentirent alors quelle différence il y a entre une guerre dont le théâtre est au delà des mers sur un sol étranger et des troubles civils. Du reste, ils devaient s'en prendre surtout à eux-mêmes de calamités si affreuses.



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Οὐχ ἥκιστα δ´ αὐτοὶ σφίσι τῶν τοιούτων καὶ τηλικούτων κακῶν ἐγεγόνεισαν αἴτιοι : du reste, ils devaient s'en prendre surtout à eux-mêmes de calamités si affreuses.





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Socrate, l'aulète

            
voir Manuel de version grecque;  trad. Philippe Le Moigne, pages 88 et 175; éd. ellipses




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Σωκράτη δ᾽ ἐγὼ ἐπαινεῖν, ὦ ἄνδρες, οὕτως ἐπιχειρήσω, δι᾽ εἰκόνων. οὗτος μὲν οὖν ἴσως οἰήσεται ἐπὶ τὰ γελοιότερα, ἔσται δ᾽ ἡ εἰκὼν τοῦ ἀληθοῦς ἕνεκα, οὐ τοῦ γελοίου. φημὶ γὰρ δὴ ὁμοιότατον αὐτὸν εἶναι τοῖς σειληνοῖς τούτοις τοῖς (215b) ἐν τοῖς ἑρμογλυφείοις καθημένοις, οὕστινας ἐργάζονται οἱ δημιουργοὶ σύριγγας ἢ αὐλοὺς ἔχοντας, οἳ διχάδε διοιχθέντες φαίνονται ἔνδοθεν ἀγάλματα ἔχοντες θεῶν. καὶ φημὶ αὖ ἐοικέναι αὐτὸν τῷ σατύρῳ τῷ Μαρσύᾳ. ὅτι μὲν οὖν τό γε εἶδος ὅμοιος εἶ τούτοις, ὦ Σώκρατες, οὐδ᾽ ἄν αὐτὸς δή που ἀμφισβητήσαις· ὡς δὲ καὶ τἆλλα ἔοικας, μετὰ τοῦτο ἄκουε. ὑβριστὴς εἶ· ἢ οὔ; ἐὰν γὰρ μὴ ὁμολογῇς, μάρτυρας παρέξομαι. ἀλλ᾽ οὐκ αὐλητής; πολύ γε θαυμασιώτερος ἐκείνου· (215c) ὁ μέν γε δι᾽ ὀργάνων ἐκήλει τοὺς ἀνθρώπους τῇ ἀπὸ τοῦ στόματος δυνάμει, καὶ ἔτι νυνὶ ὃς ἂν τὰ ἐκείνου αὐλῇ· ἃ γὰρ Ὄλυμπος ηὔλει, Μαρσύου λέγω, τούτου διδάξαντος· τὰ οὖν ἐκείνου ἐάν τε ἀγαθὸς αὐλητὴς αὐλῇ ἐάν τε φαύλη αὐλητρίς, μόνα κατέχεσθαι ποιεῖ καὶ δηλοῖ τοὺς τῶν θεῶν τε καὶ τελετῶν δεομένους διὰ τὸ θεῖα εἶναι. σὺ δ᾽ ἐκείνου τοσοῦτον μόνον διαφέρεις, ὅτι ἄνευ ὀργάνων ψιλοῖς λόγοις ταὐτὸν (215d) τοῦτο ποιεῖς.

ἡμεῖς γοῦν ὅταν μέν του ἄλλου ἀκούωμεν λέγοντος καὶ πάνυ ἀγαθοῦ ῥήτορος ἄλλους λόγους, οὐδὲν μέλει ὡς ἔπος εἰπεῖν οὐδενί· ἐπειδὰν δὲ σοῦ τις ἀκούῃ ἢ τῶν σῶν λόγων ἄλλου λέγοντος, κἂν πάνυ φαῦλος ᾖ ὁ λέγων, ἐάν τε γυνὴ ἀκούῃ ἐάν τε ἀνὴρ ἐάν τε μειράκιον, ἐκπεπληγμένοι ἐσμὲν καὶ κατεχόμεθα.
                                                                                                                                                         Platon, Banquet, 215 a-d


J'entreprendrai, pour ma part, de louer Socrate de cette façon, par le moyen d'images. Celui-ci, donc, croira peut-être que c'est pour faire rire davantage, mais l'image sera en vue de la vérité, et non du risible. J'affirme en effet bien nettement qu'il est parfaitement semblable aux Silènes, ceux qui siègent dans les ateliers des sculpteurs, ceux que façonnent les artisans en les dotant de syrinx et d'aulos, et qui, une fois ouverts en deux, montrent qu'ils ont, à l'intérieur, des statues des dieux. Et j'affirme, à mon tour, qu'il ressemble au satyre, à Marsyas. Quant au fait donc que, pour la forme du moins, tu leur es semblable, Socrate, toi-même ne saurais le contester; et que, pour le reste, tu leur ressembles, écoute la suite. Tu es violent; oui ou non ? Si en effet tu ne le reconnais pas, je produirai des témoins. Mais tu n'es pas joueur d'aulos ? Si, bien plus admirable que celui-là. Lui, en effet, charmait les humains en se servant d'instruments, par le pouvoir qui lui venait de sa bouche, et encore aujourd'hui celui qui joue les airs de celui-là - ce que jouait Olympos, c'est du Marsyas, dis-je, puisque c'est lui qui a été son maître - les airs de celui-là, que celui qui joue un bon aulète ou une médiocre joueuse d'aulos, ils font les seules choses capables de nous rendre possédés, et ils montrent que nous avons besoins des dieux et des cérémonies d'initiation, puisque ces airs sont divins. Mais toi, tu diffères de lui : c'est que tu fais la même chose sans recours à des instruments, avec la nudité des mots.

Pour ce qui est de nous, en tout cas, quand nous entendons un autre parler, et d'autres discours d'un très bon orateur, cela ne nous fait ni chaud ni froid, pour ainsi dire.  Mais si l'on t'entend ou que l'on entende tes paroles prononcées par un autre, même si celui qui parle  est sans aucune valeur, que ce soit une femme qui écoute, un homme fait ou un adolescent, nous sommes abasourdis et possédés.



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Σωκράτη δ᾽ ἐγὼ ἐπαινεῖν οὕτως ἐπιχειρήσω, δι᾽ εἰκόνων : j'entreprendrai, pour ma part, de louer Socrate de cette façon, par le moyen d'images.
οὗτος μὲν οὖν ἴσως οἰήσεται ἐπὶ τὰ γελοιότερα : celui-ci, donc, croira peut-être que c'est pour faire rire davantage.
ἔσται δ᾽ ἡ εἰκὼν τοῦ ἀληθοῦς ἕνεκα, οὐ τοῦ γελοίου : mais l'image sera en vue de la vérité, et non du risible.
σὺ δ᾽ ἐκείνου τοσοῦτον μόνον διαφέρεις : mais toi, tu diffères de lui.
ὅτι ἄνευ ὀργάνων ψιλοῖς λόγοις ταὐτὸν  τοῦτο ποιεῖς : c'est que tu fais la même chose sans recours à des instruments, avec la nudité des mots.
ἐκπλήσσω, att. ἐκπλήττω (futur ἐκπλήξω, aor. ἐξέπληξα; passif futur ἐκπλαγήσομαι, aor. 2 ἐξεπλήγην, ou plus us. ἐξεπλάγην, parf. ἐκπέπληγμαι) : abattre en frappant; fig. frapper de stupeur, d’admiration, de crainte.
ἐκπεπληγμένοι ἐσμὲν καὶ κατεχόμεθα : nous sommes abasourdis et possédés.
κατέχω (futur καθέξω et κατασχήσω, ao. 2 κατέσχον): tenir fortement.
moyen κατέχομαι (futur καθέξομαι, aor. 2 κατεσχόμην) : s’arrêter; être maîtrisé, possédé, contraint.





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Pythagore a introduit en Grèce la sagesse apprise en Egypte





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[28] Ἔχοι δ' ἄν τις μὴ σπεύδειν ὡρμημένος πολλὰ καὶ θαυμαστὰ περὶ τῆς ὁσιότητος αὐτῶν διελθεῖν, ἣν οὔτε μόνος οὔτε πρῶτος ἐγὼ τυγχάνω καθεωρακώς, ἀλλὰ πολλοὶ καὶ τῶν ὄντων καὶ τῶν προγεγενημένων, ὧν καὶ Πυθαγόρας ὁ Σάμιός ἐστιν· ὃς ἀφικόμενος εἰς Αἴγυπτον καὶ μαθητὴς ἐκείνων γενόμενος τήν τ' ἄλλην φιλοσοφίαν πρῶτος εἰς τοὺς Ἕλληνας ἐκόμισε, καὶ τὰ περὶ τὰς θυσίας καὶ τὰς ἁγιστείας τὰς ἐν τοῖς ἱεροῖς ἐπιφανέστερον τῶν ἄλλων ἐσπούδασεν, ἡγούμενος, εἰ καὶ μηδὲν αὐτῷ διὰ ταῦτα πλέον γίγνοιτο παρὰ τῶν θεῶν, ἀλλ' οὖν παρά γε τοῖς ἀνθρώποις ἐκ τούτων μάλιστ' εὐδοκιμήσειν.
 
[29] Ὅπερ αὐτῷ καὶ συνέϐη· τοσοῦτον γὰρ εὐδοξίᾳ τοὺς ἄλλους ὑπερέϐαλεν, ὥστε καὶ τοὺς νεωτέρους ἅπαντας ἐπιθυμεῖν αὐτοῦ μαθητὰς εἶναι, καὶ τοὺς πρεσϐυτέρους ἥδιον ὁρᾶν τοὺς παῖδας τοὺς αὑτῶν ἐκείνῳ συγγιγνομένους ἢ τῶν οἰκείων ἐπιμελουμένους. Καὶ τούτοις οὐχ οἷόν τ' ἀπιστεῖν· ἔτι γὰρ καὶ νῦν τοὺς προσποιουμένους ἐκείνου μαθητὰς εἶναι μᾶλλον σιγῶντας θαυμάζουσιν ἢ τοὺς ἐπὶ τῷ λέγειν μεγίστην δόξαν ἔχοντας.

[30] Ἴσως ἂν οὖν τοῖς εἰρημένοις ἀπαντήσειας, ὅτι τὴν μὲν χώραν καὶ τοὺς νόμους καὶ τὴν εὐσέϐειαν, ἔτι δὲ τὴν φιλοσοφίαν ἐπαινῶ τὴν Αἰγυπτίων, ὡς δὲ τούτων αἴτιος ἦν, ὃν ὑπεθέμην, οὐδεμίαν ἔχω λέγειν ἀπόδειξιν. Ἐγὼ δ' εἰ μὲν ἄλλος τίς μοι τὸν τρόπον τοῦτον ἐπέπληττεν, ἡγούμην ἂν αὐτὸν πεπαιδευμένως ἐπιτιμᾶν· σοὶ δ' οὐ προσήκει ταύτην ποιεῖσθαι τὴν ἐπίληψιν.
                                                                                                                                                                                        Isocrate, Busiris, 28, 29



[28] Un homme qui ne voudrait pas se hâter pourrait bien exposer bien des traits admirables de la piété des Egyptiens, piété que je suis ni le seul ni le premier à avoir constatés. Beaucoup de gens l'ont fait soit maintenant soit parmi nos prédécesseurs, entre autres Pythagore de Samos. Celui-ci, venu en Egypte et s'étant fait le disciple des gens de là-bas, fut le premier à rapporter en Grèce toute la philosophie et s'illustra plus que tout autre par son intérêt pour les sacrifices et les cérémonies des sanctuaires; il pensait que même si des dieux cela ne lui faisait obtenir aucun avantage, du moins acquerrait-il une très grande réputation auprès des hommes.

[29] C'est ce qui lui advint : sa célébrité a tant dépassé celle des autres que tous les jeunes gens désiraient être de ses disciples et que les gens plus agés voyaient avec plus de plaisir leurs fils fréquenter que s'occuper de leurs affaires domestiques. Et nul ne peut en douter, car maintenant encore ceux qui affectent d'être ses disciples sont plus admirés dans leur silence que les gens à qui la parole a valu la plus grande réputation.

[30] Peut-être objecterais-tu que, tout en louant le pays, les lois, la piété et même la philosophie des Egyptiens, je ne démontre nullement que l'auteur en soit celui que j'ai prétendu. Si c'était un autre qui me critiquât ainsi, je penserais qu'il me blâme en homme bien instruit; mais tu n'as pas le droit de te livrer à cette attaque.
        trad. Georges Matthieu et Emile Brémond; éd. les belles lettres






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ὃς ἀφικόμενος εἰς Αἴγυπτον καὶ μαθητὴς ἐκείνων γενόμενος τήν τ' ἄλλην φιλοσοφίαν πρῶτος εἰς τοὺς Ἕλληνας ἐκόμισε : celui-ci, venu en Egypte et s'étant fait le disciple des gens de là-bas, fut le premier à rapporter en Grèce toute la philosophie.
θαυμάζουσιν : on admire.
ἐπὶ τῷ λέγειν : par l'art de parler, par leur éloquence.

ἀπαντάω -ῶ : aller au-devant de (en parole),réfuter, objecter.
Ἴσως ἂν οὖν τοῖς εἰρημένοις ἀπαντήσειας : peut-être objecterais-tu à ce que j'ai dit (à mes propos)



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Eviter d'être curieux





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[13] Ἀλλὰ μὴν οὐδ´ ἐκεῖνο χαλεπὸν καὶ δύσκολον, ἀνθρώπων λοιδορουμένων ἐν ἀγορᾷ καὶ κακῶς λεγόντων ἀλλήλους μὴ προσελθεῖν ἢ συνδρομῆς ἐπί τι πλειόνων γενομένης μεῖναι καθήμενον, ἐὰν δ´ ἀκρατῶς ἔχῃς, ἀπελθεῖν ἀναστάντα. χρηστοῦ μὲν γὰρ οὐδενὸς τοῖς πολυπραγμονοῦσιν ἀναμίξας σεαυτὸν ἀπολαύσεις, μεγάλα δ´ ὠφεληθήσῃ τὸ πολύπραγμον ἀποστρέψας βίᾳ καὶ κολούσας, ὑπακούειν τῷ λογισμῷ συνεθιζόμενον. ἐκ δὲ τούτου μᾶλλον ἐπιτείνοντα τὴν ἄσκησιν ὀρθῶς ἔχει καὶ θέατρον ἀκροάματος εὐημεροῦντος παρελθεῖν, καὶ φίλους ἐπ´ ὀρχηστοῦ τινος ἢ κωμῳδοῦ θέαν παραλαμϐάνοντας διώσασθαι καὶ βοῆς ἐν σταδίῳ γινομένης ἢ ἱπποδρόμῳ μὴ ἐπιστραφῆναι. καθάπερ γὰρ ὁ Σωκράτης παρῄνει φυλάττεσθαι τῶν βρωμάτων ὅσα μὴ πεινῶντας ἐσθίειν ἀναπείθει καὶ τῶν πομάτων ὅσα πίνειν μὴ διψῶντας, οὕτω χρὴ καὶ ἡμᾶς τῶν θεαμάτων καὶ ἀκουσμάτων φυλάττεσθαι καὶ φεύγειν ὅσα κρατεῖ καὶ προσάγεται τοὺς μηδὲν δεομένους.

ὁ γοῦν Κῦρος οὐκ ἐϐούλετο τὴν Πάνθειαν ἰδεῖν, ἀλλὰ τοῦ Ἀράσπου λέγοντος ὡς ἄξιον θέας εἴη τὸ τῆς γυναικὸς εἶδος ‘οὐκοῦν’ ἔφη ‘διὰ τοῦτο μᾶλλον | αὐτῆς ἀφεκτέον· εἰ γὰρ ὑπὸ σοῦ πεισθεὶς ἀφικοίμην πρὸς αὐτήν, ἴσως ἄν με πάλιν ἀναπείσειεν αὐτὴ καὶ μὴ σχολάζοντα φοιτᾶν καὶ θεᾶσθαι καὶ παρακαθῆσθαι προέμενον πολλὰ τῶν σπουδῆς ἀξίων.’ ὁμοίως οὐδ´ ὁ Ἀλέξανδρος εἰς ὄψιν ἦλθε τῆς Δαρείου γυναικὸς ἐκπρεπεστάτης εἶναι λεγομένης, ἀλλὰ πρὸς τὴν μητέρα φοιτῶν αὐτῆς πρεσϐῦτιν οὖσαν οὐχ ὑπέμεινε τὴν νέαν καὶ καλὴν ἰδεῖν. ἡμεῖς δὲ τοῖς φορείοις τῶν γυναικῶν ὑποϐάλλοντες τὰ ὄμματα καὶ τῶν θυρίδων ἐκκρεμαννύντες οὐδὲν ἁμαρτάνειν δοκοῦμεν οὕτως ὀλισθηρὰν καὶ ῥευστὴν εἰς ἅπαντα τὴν πολυπραγμοσύνην ποιοῦντες.
                                                                                                                             Plutarque, de la curiosité, 13



[13] Il n'est pas non plus bien pénible et bien difficile, lorsque deux hommes se querellent dans la place publique et se disent des injures, de ne pas s'approcher d'eux, ou bien de rester assis lorsqu'il se forme quelque part un rassemblement, ou bien encore, si l'on n'y peut tenir, de se lever et de quitter la place. Vous n'aurez rien à gagner si vous vous mêlez aux curieux. Il y aura au contraire grand profit à détourner de force votre curiosité, à la faire disparaître en prenant l'habitude d'obéir à la réflexion. Par suite, et pour se fortifier encore dans cet exercice, il sera bon de passer sans y entrer devant un théâtre d'où partent des applaudissements d'auditeurs, de repousser des amis qui insistent pour qu'on aille voir avec eux un danseur ou un comédien, de ne pas se retourner lorsqu'on entend des cris s'élever du stade ou de l'hippodrome. De même que Socrate recommandait de s'abstenir des aliments qui font manger sans faim et des breuvages qui font boire sans soif, de même nous devons éviter et fuir tout ce qui est de nature à captiver et à séduire, sans qu'il y ait aucune utilité, nos yeux et nos oreilles.


Cyrus ne voulut pas voir Panthée; et comme Araspe lui disait que la beauté de cette princesse méritait d'être vue : « Eh bien, répondit-il, c'est pour cela que je dois m'en défendre encore davantage. Si à ta persuasion je me rendais auprès d'elle, peut-être une autre fois me déterminerait-elle à y aller quand je n'en aurais pas le loisir; et pour la voir, pour rester à ses côtés, je négligerais des affaires de grande importance. » Semblablement Alexandre ne se présenta pas aux regards de la femme de Darius, que l'on disait être fort belle. Il alla visiter la mère du roi, laquelle était très âgée, et il eut le courage de ne pas voir une jeune princesse pleine d'attraits. Nous, au contraire, jusque dans les litières des femmes nous plongeons les yeux. Nous nous suspendons à leurs fenêtres, et nous ne croyons pas faire mal quand nous ménageons à notre curiosité une pente si rapide et si glissante vers toutes sortes de dangers.







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Agésilas dans un plaisant rôle d'entremetteur




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Χάριν δὲ τούτων εἰδὼς Ἀγησίλαος τῷ Σπιθριδάτῃ, « Εἰπέ μοι, « ἔφη, « ὦ Σπιθριδάτα, οὐκ ἂν δοίης Ὄτυϊ τὴν θυγατέρα; » « Πολύ γε, » ἔφη, « μᾶλλον ἢ ἐκεῖνος ἂν λάϐοι φυγάδος ἀνδρὸς βασιλεύων πολλῆς καὶ χώρας καὶ δυνάμεως. Τότε μὲν οὖν ταῦτα μόνον ἐρρήθη περὶ τοῦ γάμου. » (5) Ἐπεὶ δὲ Ὄτυς ἔμελλεν ἀπιέναι, ἦλθε πρὸς τὸν Ἀγησίλαον ἀσπασόμενος· ἤρξατο δὲ λόγου ὁ Ἀγησίλαος παρόντων τῶν τριάκοντα, μεταστησάμενος τὸν Σπιθριδάτην· (6) « Λέξον μοι, » ἔφη, ὦ Ὄτυ, ποίου τινὸς γένους ἐστὶν ὁ Σπιθριδάτης; » Ὁ δ᾽ εἶπεν ὅτι Περσῶν οὐδενὸς ἐνδεέστερος. « Τὸν δὲ υἱόν, » ἔφη, « ἑόρακας αὐτοῦ ὡς καλός ἐστι; » « Τί δ᾽ οὐ μέλλω; καὶ γὰρ ἑσπέρας συνεδείπνουν αὐτῷ. » « Τούτου μέν φασι τὴν θυγατέρα αὐτῷ καλλίονα εἶναι. » (7) « Νὴ Δί᾽, » ἔφη ὁ Ὄτυς, « καλὴ γάρ ἐστι. » « Καὶ ἐγὼ μέν, » ἔφη, « ἐπεὶ φίλος ἡμῖν γεγένησαι, συμϐουλεύοιμ᾽ ἄν σοι τὴν παῖδα ἄγεσθαι γυναῖκα, καλλίστην μὲν οὖσαν, οὗ τί ἀνδρὶ ἥδιον; Πατρὸς δ᾽ εὐγενεστάτου, δύναμιν δ᾽ ἔχοντος τοσαύτην, ὃς ὑπὸ Φαρναϐάζου ἀδικηθεὶς οὕτω τιμωρεῖται αὐτὸν ὥστε φυγάδα πάσης τῆς χώρας, ὡς ὁρᾷς, πεποίηκεν. (8) Εὖ ἴσθι μέντοι, » ἔφη, « ὅτι ὥσπερ ἐκεῖνον ἐχθρὸν ὄντα δύναται τιμωρεῖσθαι, οὕτω καὶ φίλον ἄνδρα εὐεργετεῖν <ἂν> δύναιτο. Νόμιζε δὲ τούτων πραχθέντων μὴ ἐκεῖνον ἄν σοι μόνον κηδεστὴν εἶναι, ἀλλὰ καὶ ἐμὲ καὶ τοὺς ἄλλους Λακεδαιμονίους, ἡμῶν δ᾽ ἡγουμένων τῆς Ἑλλάδος καὶ τὴν ἄλλην Ἑλλάδα. (9) Καὶ μὴν μεγαλειοτέρως γε σοῦ, εἰ ταῦτα πράττοις, τίς ἄν ποτε γήμειε; Ποίαν γὰρ νύμφην πώποτε τοσοῦτοι ἱππεῖς καὶ πελτασταὶ καὶ ὁπλῖται προύπεμψαν ὅσοι τὴν σὴν γυναῖκα εἰς τὸν σὸν οἶκον προπέμψειαν ἄν; »
                                                                                                                                                                                     Xénophon, Hellénique, 4, 1, 4-9



Agésilas sut gré de ce service à Spithridatès et lui posa cette question : « Dis-moi, Spithridatès, ne donnerais-tu pas ta fille à Otys ? Beaucoup plus volontiers, répondit Otys, qu'il ne prendrait la fille d'un exilé, lui qui commande à un si grand pays et à une si grande armée. » 5. Cette fois, il ne fut pas parlé davantage du mariage. Mais lorsque Otys, sur le point de partir, vint prendre congé d'Agésilas, celui-ci se mit à converser avec lui devant les trente, après avoir écarté Spithridatès. 6. « Dis moi, Otys, lui demanda-t-il, de quelle famille Spithridatès est-il issu ? » Otys répondit qu'il n'était sous ce rapport inférieur à aucun Perse. « Et son fils, reprit Agésilas, as-tu vu comme il est beau ? Sans doute, puisque j'ai dîné avec lui hier soir. On dit que sa fille est plus belle encore. 7. Oui, par Zeus, répondit Otys, elle est belle. Eh bien, moi, reprit Agésilas, puisque tu es devenu notre ami, je te conseille de prendre sa fille pour femme, puisqu'elle est très belle, et qu'il n'y a rien de plus charmant pour un mari. En outre, c'est la fille d'un homme de haute naissance et qui est assez puissant pour se venger des injures de Pharnabaze en le chassant, comme tu vois, de tout son territoire. 8. Sache bien, poursuivit-il, que s'il est capable de se venger de cet homme qui était son ennemi, il pourrait aussi faire du bien à un ami. Dis-toi aussi que, si ce mariage se fait, ce n'est pas seulement lui que tu auras pour allié, mais aussi moi-même et les autres Lacédémoniens, et, puisque nous sommes les maîtres de la Grèce, la Grèce tout entière. 9. Et puis, si tu suis mon conseil, qui pourrait jamais faire un plus magnifique mariage ? Quelle épousée fut jamais escortée d'autant de cavaliers, de peltastes et d'hoplites que le sera ta femme se rendant en ta maison ? »




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χάριν εἰδέναι : savoir gré.
εἰπέ μοι ... οὐκ ἂν δοίης Ὄτυϊ τὴν θυγατέρα; : dis-moi, ne donnerais-tu pas ta fille à Otys ?


ποίαν γὰρ νύμφην πώποτε τοσοῦτοι ἱππεῖς καὶ πελτασταὶ καὶ ὁπλῖται προύπεμψαν ὅσοι τὴν σὴν γυναῖκα εἰς τὸν σὸν οἶκον προπέμψειαν ἄν;quelle épousée fut jamais escortée d'autant de cavaliers, de peltastes et d'hoplites que le sera ta femme se rendant en ta maison ? »





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Vanité de la gloire

 
DIOGÈNE ET ALEXANDRE

ΔΙΟΓΕΝΗΣ
Τί τοῦτο͵ ὦ Ἀλέξανδρε; καὶ σὺ τέθνηκας ὥσπερ καὶ ἡμεῖς ἅπαντες;
ΑΛΕΞΑΝΔΡΟΣ
Ὁρᾷς͵ ὦ Διόγενες· οὐ παράδοξον δέ͵ εἰ ἄνθρωπος ὢν ἀπέθανον.
ΔΙΟΓΕΝΗΣ
Οὐκοῦν ὁ Ἄμμων ἐψεύδετο λέγων ἑαυτοῦ σε εἶναι͵ σὺ δὲ Φιλίππου ἄρα ἦσθα;
ΑΛΕΞΑΝΔΡΟΣ
Φιλίππου δηλαδή· οὐ γὰρ ἂν ἐτεθνήκειν Ἄμμωνος ὤν.
ΔΙΟΓΕΝΗΣ
Καὶ μὴν καὶ περὶ τῆς Ὀλυμπιάδος ὅμοια ἐλέγετο͵ δράκοντα ὁμιλεῖν αὐτῇ καὶ βλέπεσθαι ἐν τῇ εὐνῇ͵ εἶτα οὕτω σε τεχθῆναι͵ τὸν δὲ Φίλιππονἐξηπατῆσθαι οἰόμενον πατέρα σου εἶναι.
ΑΛΕΞΑΝΔΡΟΣ
Κἀγὼ ταῦτα ἤκουον ὥσπερ σύ͵ νῦν δὲ ὁρῶ ὅτι οὐδὲν ὑγιὲς οὔτε ἡ μήτηρ οὔτε οἱ τῶν Ἀμμωνίων προφῆται ἔλεγον.
ΔΙΟΓΕΝΗΣ
Ἀλλὰ τὸ ψεῦδος αὐτῶν οὐκ ἄχρηστόν σοι͵ ὦ Ἀλέξανδρε͵ πρὸς τὰ πράγματα ἐγένετο· πολλοὶ γὰρ ὑπέπτησσον θεὸν εἶναί σε νομίζοντες. ἀτὰρ εἰπέ μοι͵ τίνι τὴν τοσαύτην ἀρχὴν καταλέλοιπας;
ΑΛΕΞΑΝΔΡΟΣ
Οὐκ οἶδα͵ ὦ Διόγενες· οὐ γὰρ ἔφθασα ἐπισκῆψαί τι περὶ αὐτῆς ἢ τοῦτο μόνον͵ ὅτι ἀποθνήσκων Περδίκκᾳ τὸν δακτύλιον ἐπέδωκα. πλὴν
ἀλλὰ τί γελᾷς͵ ὦ Διόγενες;
ΔΙΟΓΕΝΗΣ
Τί γὰρ ἄλλο ἢ ἀνεμνήσθην οἷα ἐποίει ἡ Ἑλλάς͵ ἄρτι σε παρειληφότα τὴν ἀρχὴν κολακεύοντες καὶ προστάτην αἱρούμενοι καὶ στρατηγὸν ἐπὶ τοὺς βαρϐάρους͵ ἔνιοι δὲ καὶ τοῖς δώδεκα θεοῖς προστιθέντες καὶ οἰκοδομοῦντές σοι νεὼς καὶ θύοντες ὡς δράκοντος υἱῷ. ἀλλ΄ εἰπέ μοι͵ ποῦ σε οἱ Μακεδόνες ἔθαψαν;
ΑΛΕΞΑΝΔΡΟΣ
Ἔτι ἐν Βαϐυλῶνι κεῖμαι τριακοστὴν ἡμέραν ταύτην͵ ὑπισχνεῖται δὲ Πτολεμαῖος ὁ ὑπασπιστής͵ ἤν ποτε ἀγάγῃ σχολὴν ἀπὸ τῶν θορύ
ϐων τῶν ἐν ποσίν͵ εἰς Αἴγυπτον ἀπαγαγὼν θάψειν ἐκεῖ͵ ὡς γενοίμην εἷς τῶν Αἰγυπτίων θεῶν.
ΔΙΟΓΕΝΗΣ
Μὴ γελάσω οὖν͵ ὦ Ἀλέξανδρε͵ ὁρῶν καὶ ἐν ᾅδου ἔτι σε μωραίνοντα καὶ ἐλπίζοντα Ἄνουϐιν ἢ Ὄσιριν γενήσεσθαι; πλὴν ἀλλὰ ταῦτα μέν͵ ὦ
θειότατε͵ μὴ ἐλπίσῃς· οὐ γὰρ θέμις ἀνελθεῖν τινα τῶν ἅπαξ διαπλευσάντων τὴν λίμνην καὶ εἰς τὸ εἴσω τοῦ στομίου παρελθόντων· οὐ
γὰρ ἀμελὴς ὁ Αἰακὸς οὐδὲ ὁ Κέρϐερος εὐκαταφρόνητος. <4> ἐκεῖνο δέ γε ἡδέως ἂν μάθοιμι παρὰ σοῦ͵ πῶς φέρεις͵ ὁπόταν ἐννοήσῃς ὅσην
εὐδαιμονίαν ὑπὲρ γῆς ἀπολιπὼν ἀφῖξαι͵ σωματοφύλακας καὶ ὑπασπιστὰς καὶ σατράπας καὶ χρυσὸν τοσοῦτον καὶ ἔθνη προσκυνοῦντα
καὶ Βαϐυλῶνα καὶ Βάκτρα καὶ τὰ μεγάλα θηρία καὶ τιμὴν καὶ δόξαν καὶ τὸ ἐπίσημον εἶναι ἐξελαύνοντα διαδεδεμένον ταινίᾳ λευκῇ τὴν κεφαλὴν πορφυρίδα ἐμπεπορπημένον. οὐ λυπεῖ ταῦτά σε ὑπὲρ τὴν μνήμην ἰόντα; τί δακρύεις͵ ὦ μάταιε; οὐδὲ ταῦτά σε ὁ σοφὸς Ἀριστοτέλης ἐπαίδευσεν μὴ οἴεσθαι βέϐαια εἶναι τὰ παρὰ τῆς τύχης;
ΑΛΕΞΑΝΔΡΟΣ
 Ὁ σοφὸς ἐκεῖνος ἁπάντων κολάκων ἐπιτριπτότατος ὤν; ἐμὲ μόνον ἔασον τὰ Ἀριστοτέλους εἰδέναι͵ ὅσα μὲν ᾔτησεν παρ΄ ἐμοῦ͵ οἷα δὲ
ἐπέστελλεν͵ ὡς δὲ κατεχρῆτό μου τῇ περὶ παιδείαν φιλοτιμίᾳ θωπεύων καὶ ἐπαινῶν ἄρτι μὲν πρὸς τὸ κάλλος͵ ὡς καὶ τοῦτο μέρος ὂν τἀγαθοῦ͵ ἄρτι δὲ ἐς τὰς πράξεις καὶ τὸν πλοῦτον. καὶ γὰρ αὖ καὶ τοῦτο ἀγαθὸν ἡγεῖτο εἶναι͵ ὡς μὴ αἰσχύνοιτο καὶ αὐτὸς λαμϐάνων· γόης͵ ὦ Διόγενες͵ ἅνθρωπος καὶ τεχνίτης. πλὴν ἀλλὰ τοῦτό γε ἀπολέλαυκα τῆς σοφίας αὐτοῦ͵ τὸ λυπεῖσθαι ὡς ἐπὶ μεγίστοις ἀγαθοῖς ἐκείνοις͵ ἃ κατηριθμήσω μικρῷ γε ἔμπροσθεν.
ΔΙΟΓΕΝΗΣ
 Ἀλλ΄ οἶσθα ὃ δράσεις; ἄκος γάρ σοι τῆς λύπης ὑποθήσομαι. ἐπεὶ ἐνταῦθά γε ἐλλέϐορος οὐ φύεται͵ σὺ δὲ κἂν τὸ Λήθης ὕδωρ χανδὸν
ἐπισπασάμενος πίε καὶ αὖθις πίε καὶ πολλάκις· οὕτω γὰρ ἂν παύσαιο ἐπὶ τοῖς Ἀριστοτέλους ἀγαθοῖς ἀνιώμενος. καὶ γὰρ Κλεῖτον ἐκεῖνον ὁρῶ καὶΚαλλισθένην καὶ ἄλλους πολλοὺς ἐπὶ σὲ ὁρμῶντας͵ ὡς διασπάσαιντο καὶ ἀμύναιντο σε ὧν ἔδρασας αὐτούς. ὥστε τὴν ἑτέραν σὺ ταύτην βάδιζε καὶ πῖνε πολλάκις͵ ὡς ἔφην.
                                                                                                                                                                                         Lucien, Dialogues des morts, 13


DIOGÈNE.
Qu'est-ce donc, Alexandre ? te voilà mort comme nous tous !
ALEXANDRE.
Tu le vois ; Diogène; il n'y a rien d'extraordinaire; j'étais homme, je suis mort.
DIOGÈNE.
Ainsi Ammon mentait, lorsqu'il disait que tu étais son fils; car tu étais bien, n'est-ce pas, celui de Philippe ?
ALEXANDRE.
Oui celui de Philippe. Je ne serais pas mort, si j'avais été le fils d'Ammon.
DIOGÈNE.
Et c'étaient aussi des mensonges qu'on débitait sur Olympias, quand on disait qu'un serpent avait couché avec elle, qu'on l'avait vu dans son lit, que tu lui devais la naissance, et que Philippe était dans l'erreur en se croyant ton père ?
ALEXANDRE.
J'ai entendu dire cela comme toi; maintenant, je vois que ni ma mère ni les oracles d'Ammon n'avaient le sens commun.
DIOGÈNE.
Ce mensonge, toutefois, Alexandre, n'a pas nui à tes affaires. Nombre de gens tremblaient devant toi, convaincus que tu étais un dieu. Mais, dis-moi, à qui as-tu légué ton immense empire ?
ALEXANDRE.
Je n'en sais rien, Diogène; je n'ai eu le temps de prendre aucune disposition à cet égard. Tout ce que j'ai pu faire, ç'a été, en mourant, de donner mon anneau à Perdiccas. Pourquoi ris-tu, Diogène ?
DIOGÈNE.
Je ris en me rappelant toutes les flatteries que les Grecs t'ont prodiguées, lorsque, maître du pouvoir, tu as été nommé leur chef et leur généralissime contre les barbares; on en a vu qui te mettaient au nombre des douze grands dieux, te bâtissant des temples, et t'offrant des sacrifices comme étant le fils du serpent. Mais, dis-moi. Où les Macédoniens t'ont-ils enseveli ?
ALEXANDRE.
Voilà trois jours que je suis gisant à Babylone; mais Ptolémée, l'un de mes gardes, a promis que, dès qu'il serait sorti des embarras de la situation, il me ferait porter en Égypte, afin d'y être enseveli et mis au rang des divinités égyptiennes.
DIOGÈNE.
Et je ne rirais pas, Alexandre, quand je te vois, jusque dans les enfers, occupé de ces billevesées, espérant devenir un Anubis ou un Osiris ? Va, très divin personnage, quitte cet espoir ! Il n'y a plus de retour, quand une fois on a traversé le lac des enfers et franchi cet étroit passage. Éaque est vigilant, et il faut compter avec Cerbère. Cependant je voudrais bien savoir de toi comment tu supportes ton état actuel, lorsque tu songes à ce grand bonheur que tu as laissé sur la terre : gardes du corps, satellites, satrapes, or en abondance, peuple d'adorateurs, Babylone, Bactres, éléphants énormes, honneur, gloire, promenade triomphante sur un char, la tête ceinte d'une bandelette blanche, le corps couvert d'un manteau de pourpre. Tout cela ne te fait-il pas de peine, en te revenant à la pensée ? Pourquoi pleures-tu, insensé ? Le sage Aristote ne t'a-t-il pas appris qu'il n'y a rien de solide dans ce qui nous vient de la fortune !
ALEXANDRE.
Ah ! ce philosophe a été le plus détestable de tous mes flatteurs ! Personne ne sait donc tout ce qu'il a fait, cet Aristote, quelles demandes il m'a adressées, quelles lettres il m'a écrites, combien il a abusé de mon amour pour les sciences, toujours prêt à me flatter, à louer ma beauté, comme si la beauté faisait partie du bonheur, ou bien mes exploits, ou bien mes richesses; car il disait aussi que c'étaient là de vrais biens, afin de n'avoir point à rougir de recevoir mes riches présents. C'était un charlatan, Diogène, un vrai faiseur. Tout le fruit que j'ai retiré de sa sagesse a été de m'affliger de me voir enlever, comme de grands biens, tout ce dont tu viens de faire l'énumération.
DIOGÈNE.
Sais-tu ce que tu as à faire ? car je veux t'indiquer un remède à ton chagrin. Comme il ne croît pas ici d'ellébore, va boire à longs traits l'eau du Léthé, puis retourne en boire encore et souvent; c'est le seul moyen de ne plus regretter les biens d'Aristote. Aussi bien j'aperçois Clitus, Callisthène, et plusieurs autres qui viennent en hâte de ce côté, sans doute pour te mettre en pièces et se venger des maux que tu leur as faits. Prends donc cette autre route, et bois souvent, comme je te l'ai dit.





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Sur les ruines de Ninive





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(3.4.6) καὶ οἱ μὲν πολέμιοι οὕτω πράξαντες ἀπῆλθον, οἱ δὲ Ἕλληνες ἀσφαλῶς πορευόμενοι τὸ λοιπὸν τῆς ἡμέρας ἀφίκοντο ἐπὶ τὸν Τίγρητα ποταμόν. (3.4.7) ἐνταῦθα πόλις ἦν ἐρήμη μεγάλη, ὄνομα δ᾽ αὐτῇ ἦν Λάρισα· ᾤκουν δ᾽ αὐτὴν τὸ παλαιὸν Μῆδοι. τοῦ δὲ τείχους αὐτῆς ἦν τὸ εὖρος πέντε καὶ εἴκοσι πόδες, ὕψος δ᾽ ἑκατόν· τοῦ δὲ κύκλου ἡ περίοδος δύο παρασάγγαι· ᾠκοδόμητο δὲ πλίνθοις κεραμεαῖς· κρηπὶς δ᾽ ὑπῆν λιθίνη τὸ ὕψος εἴκοσι ποδῶν. (3.4.8) ταύτην βασιλεὺς Περσῶν ὅτε παρὰ Μήδων τὴν ἀρχὴν ἐλάμβανον Πέρσαι πολιορκῶν οὐδενὶ τρόπῳ ἐδύνατο ἑλεῖν· ἥλιον δὲ νεφέλη προκαλύψασα ἠφάνισε μέχρι ἐξέλιπον οἱ ἄνθρωποι, καὶ οὕτως ἑάλω. (3.4.9) παρὰ ταύτην τὴν πόλιν ἦν πυραμὶς λιθίνη, τὸ μὲν εὖρος ἑνὸς πλέθρου, τὸ δὲ ὕψος δύο πλέθρων. ἐπὶ ταύτης πολλοὶ τῶν βαρβάρων ἦσαν ἐκ τῶν πλησίον κωμῶν ἀποπεφευγότες.

[3,4,10] ἐντεῦθεν δ᾽ ἐπορεύθησαν σταθμὸν ἕνα παρασάγγας ἓξ πρὸς τεῖχος ἔρημον μέγα πρὸς τῇ πόλει κείμενον· ὄνομα δὲ ἦν τῇ πόλει Μέσπιλα· Μῆδοι δ᾽ αὐτήν ποτε ᾤκουν. ἦν δὲ ἡ μὲν κρηπὶς λίθου ξεστοῦ κογχυλιάτου, τὸ εὖρος πεντήκοντα ποδῶν καὶ τὸ ὕψος πεντήκοντα. (3.4.11) ἐπὶ δὲ ταύτῃ ἐπῳκοδόμητο πλίνθινον τεῖχος, τὸ μὲν εὖρος πεντήκοντα ποδῶν, τὸ δὲ ὕψος ἑκατόν· τοῦ δὲ τείχους ἡ περίοδος ἓξ παρασάγγαι. ἐνταῦθα λέγεται Μήδεια γυνὴ βασιλέως καταφυγεῖν ὅτε ἀπώλλυσαν τὴν ἀρχὴν ὑπὸ Περσῶν Μῆδοι. (3.4.12) ταύτην δὲ τὴν πόλιν πολιορκῶν ὁ Περσῶν βασιλεὺς οὐκ ἐδύνατο οὔτε χρόνῳ ἑλεῖν οὔτε βίᾳ· Ζεὺς δὲ βροντῇ κατέπληξε τοὺς ἐνοικοῦντας, καὶ οὕτως ἑάλω.
                                                                                                                                                                                         Xénophon, Anabase. 3, 4, 6-12.



(3.4.6)Après cet échec, ceux-ci (les Barbares) s'éloignèrent et Les Grecs marchant sans être inquiétés pendant le reste de la journée, arrivèrent sur les bords du Tigre. (3.4.7) Là était une grande ville déserte; elle s'appelait Larissa; elle était jadis habitée par les Mèdes ; la muraille de cette ville avaient vingt-cinq pieds d'épaisseur, cent de hauteur; le tour de l'enceinte était de deux parasanges; elle était construite avec des briques d'argile, mais le soubassement étaient en pierre jusqu'à une hauteur de vingt pieds. (3.4.8) Le roi des Perses, quand ceux-ci s'efforçaient d'enlever l'empire aux Mèdes, avaient mis le siège devant cette ville et ne pouvaient s'en emparer d'aucune façon, quand une nuée ayant voilé le soleil le rendit invisible, jusqu'à ce que les habitants eussent quitté la ville : c'est ainsi qu'elle fut prise. (3.4.9) Dans les environs était une pyramide de pierre, large d'un plèthre et haute de deux. Sur cette pyramide il y avait un grand nombre de Barbares, qui s'y étaient réfugiés des villages voisins.

[3,4,10] De là les Grecs firent une étape, six parasanges, et arrivèrent à une muraille déserte, immense, située près d'une ville appelée Mespila, qui était jadis habitée par les Mèdes. La base de cette muraille, faite de pierre polie, pleine de coquillages, avait cinquante pieds d'épaisseur et cinquante de hauteur. [3,4,11] Sur cette base était construit un mur de briques, épais de cinquante pieds et haut de cent. La muraille avait six parasanges de tour. C'est là, dit-on, que Médéia, femme du Roi, s'était réfugiée, quand les Mèdes furent dépouillés du pouvoir par les Perses. [3,4,12]  Le roi des Perses, quand il assiégeait cette ville, ne pouvait s'en emparer ni par la famine, ni par la force, mais Zeus avec son tonnerre frappa d'épouvante les habitants, et ainsi elle fut prise.
                                      trad. Masqueray; éd. les belles lettres


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ἁλίσκομαι (futur ἁλώσομαι; aor. 2 ἑάλων, d’où subj. ἁλῶ, opt. ἁλοίην, inf. ἁλῶναι, part. ἁλούς; parf. ἑάλωκα : être pris; être saisi, tomber aux mains de.
βροντή, ῆς (ἡ) : tonnerre.
καταπλήσσω att. καταπλήττω (futur καταπλήξω) : frapper de stupeur, d’admiration ou de crainte.
Ζεὺς δὲ βροντῇ κατέπληξε τοὺς ἐνοικοῦντας, καὶ οὕτως ἑάλω :  mais Zeus avec son tonnerre frappa d'épouvante les habitants, et ainsi elle fut prise.







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Œdipe et le Sphinx




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[3,5,8] Λάιον μὲν οὖν θάπτει βασιλεὺς Πλαταιέων Δαμασίστρατος, τὴν δὲ βασιλείαν Κρέων ὁ Μενοικέως παραλαμϐάνει. τούτου δὲ βασιλεύοντος οὐ μικρὰ συμφορὰ κατέσχε Θήϐας. ἔπεμψε γὰρ Ἥρα Σφίγγα, ἣ μητρὸς μὲν Ἐχίδνης ἦν πατρὸς δὲ Τυφῶνος, εἶχε δὲ πρόσωπον μὲν γυναικός, στῆθος δὲ καὶ βάσιν καὶ οὐρὰν λέοντος καὶ πτέρυγας ὄρνιθος. μαθοῦσα δὲ αἴνιγμα παρὰ μουσῶν ἐπὶ τὸ Φίκιον ὄρος ἐκαθέζετο, καὶ τοῦτο προύτεινε Θηϐαίοις. ἦν δὲ τὸ αἴνιγμα· τί ἐστιν ὃ μίαν ἔχον φωνὴν τετράπουν καὶ δίπουν καὶ τρίπουν γίνεται· χρησμοῦ δὲ Θηϐαίοις ὑπάρχοντος τηνικαῦτα ἀπαλλαγήσεσθαι τῆς Σφιγγὸς ἡνίκα ἂν τὸ αἴνιγμα λύσωσι, συνιόντες εἰς ταὐτὸ πολλάκις ἐζήτουν τί τὸ λεγόμενόν ἐστιν, ἐπεὶ δὲ μὴ εὕρισκον, ἁρπάσασα ἕνα κατεϐίϐρωσκε. πολλῶν δὲ ἀπολομένων, καὶ τὸ τελευταῖον Αἵμονος τοῦ Κρέοντος, κηρύσσει Κρέων τῷ τὸ αἴνιγμα λύσοντι καὶ τὴν βασιλείαν καὶ τὴν Λαΐου δώσειν γυναῖκα. Οἰδίπους δὲ ἀκούσας ἔλυσεν, εἰπὼν τὸ αἴνιγμα τὸ ὑπὸ τῆς Σφιγγὸς λεγόμενον ἄνθρωπον εἶναι· γίνεσθαι, γὰρ τετράπουν βρέφος ὄντα τοῖς τέτταρσιν ὀχούμενον κώλοις, τελειούμενον δὲ δίπουν, γηρῶντα δὲ τρίτην προσλαμϐάνειν βάσιν τὸ βάκτρον. ἡ μὲν οὖν Σφὶγξ ἀπὸ τῆς ἀκροπόλεως ἑαυτὴν ἔρριψεν, Οἰδίπους δὲ καὶ τὴν βασιλείαν παρέλαϐε καὶ τὴν μητέρα ἔγημεν ἀγνοῶν, καὶ παῖδας ἐτέκνωσεν ἐξ αὐτῆς Πολυνείκη καὶ Ἐτεοκλέα, θυγατέρας δὲ Ἰσμήνην καὶ Ἀντιγόνην. εἰσὶ δὲ οἳ γεννηθῆναι τὰ τέκνα φασὶν ἐξ Εὐρυγανείας αὐτῷ τῆς Ὑπέρφαντος.
                                                                                                                                                                Apollodore, Bibliothèque, 3, 5, 8



[3,5,8] Laïos fut enseveli par Damasistratos, le roi de Platées; à Thèbes, Créon, fils de Ménécée, s'empara du trône. Pendant son règne, Thèbes fut frappée d'un grave fléau. La déesse Héra y envoya le Sphinx, fils d'Échidna et de Typhon ; il avait le visage d'une femme, la poitrine, les pattes et la queue d'un lion, et les ailes d'un oiseau. Les Muses lui avaient appris une énigme. Installé sur le mont Phicium, il posait cette énigme aux Thébains. Il disait : " Quel être est pourvu d'une seule voix, qui a d'abord quatre jambes, puis deux jambes, et trois jambes ensuite ? " Les Thébains avaient reçu un oracle, selon lequel ils seraient délivrés du Sphinx, seulement lorsqu'ils auraient résolu cette énigme. Aussi souvent se réunissaient-ils pour en deviner la signification. Mais comme ils n'y parvenaient pas, le Sphinx se saisissait de l'un d'eux et le dévorait. Nombreux étaient ceux qui avaient ainsi péri, et le dernier en date, Hémon, le fils de Créon. Alors Créon proclama que celui qui réussirait à résoudre l'énigme du Sphinx obtiendrait le royaume et la veuve de Laïos comme épouse. Ayant entendu cela, Œdipe trouva la solution : il s'agissait de l'homme. De fait, lorsqu'il est enfant, il a quatre jambes, car il se déplace à quatre pattes ; adulte, il marche sur deux jambes ; quand il est vieux, il a trois jambes, lorsqu'il s'appuie sur son bâton. Le Sphinx se jeta du haut de son rocher. Œdipe obtint le règne et, sans le savoir, il épousa sa mère; il eut deux fils, Étéocle et Polynice, et deux filles, Ismène et Antigone. Certains soutiennent qu'il eut ses enfants d'Euryganie, la fille d'Hyperphas.



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τί ἐστιν ὃ μίαν ἔχον φωνὴν τετράπουν καὶ δίπουν καὶ τρίπουν γίνεται : quel être est pourvu d'une seule voix, qui a d'abord quatre jambes, puis deux jambes, et trois jambes ensuite ?


γεννάω-ῶ (imparf. ἐγέννων, futur γεννήσω, aor. ἐγέννησα, parf. γεγέννηκα) : engendrer, enfanter, produire.
εἰσὶ δὲ οἳ γεννηθῆναι τὰ τέκνα φασὶν ἐξ Εὐρυγανείας αὐτῷ τῆς Ὑπέρφαντος : certains soutiennent qu'il eut ses enfants d'Euryganie, la fille d'Hyperphas.






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Le crime de haute trahison





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[73] ἀναστὰς δὲ Θηραμένης ἐκέλευσεν ὑμᾶς τριάκοντα ἀνδράσιν ἐπιτρέψαι τὴν πόλιν καὶ τῇ πολιτεία χρῆσθαι ἣν Δρακοντίδης ἀπέφαινεν. ὑμεῖς δ᾽ ὅμως καὶ οὕτω διακείμενοι ἐθορυϐεῖτε ὡς οὐ ποιήσοντες ταῦτα· ἐγιγνώσκετε γὰρ ὅτι περὶ δουλείας καὶ ἐλευθερίας ἐν ἐκείνῃ τῇ ἡμέρα ἠκκλησιάζετε. [74] θηραμένης δέ, ὦ ἄνδρες δικασταί, (καὶ τούτων ὑμᾶς αὐτοὺς μάρτυρας παρέξομαι) εἶπεν ὅτι οὐδὲν αὐτῷ μέλοι τοῦ ὑμετέρου θορύϐου, ἐπειδὴ πολλοὺς μὲν Ἀθηναίων εἰδείη τοὺς τὰ ὅμοια πράττοντας αὑτῷ, δοκοῦντα δὲ Λυσάνδρῳ καὶ Λακεδαιμονίοις λέγοι. μετ᾽ ἐκεῖνον δὲ Λύσανδρος ἀναστὰς ἄλλα τε πολλὰ εἶπε καὶ ὅτι παρασπόνδους ὑμᾶς ἔχοι, καὶ ὅτι οὐ περὶ πολιτείας ὑμῖν ἔσται ἀλλὰ περὶ σωτηρίας, εἰ μὴ ποιήσεθ᾽ἃ Θηραμένης κελεύει. [75] τῶν δ᾽ ἐν τῇ ἐκκλησία ὅσοι ἄνδρες ἀγαθοὶ ἦσαν, γνόντες τὴν παρασκευὴν καὶ τὴν ἀνάγκην, οἱ μὲν αὐτοῦ μένοντες ἡσυχίαν ἦγον, οἱ δὲ ᾤχοντο ἀπιόντες, τοῦτο γοῦν σφίσιν αὐτοῖς συνειδότες, ὅτι οὐδὲν κακὸν τῇ πόλει ἐψηφίσαντο· ὀλίγοι δέ τινες καὶ πονηροὶ καὶ κακῶς βουλευόμενοι τὰ προσταχθέντα ἐχειροτόνησαν. [76] παρήγγελτο γὰρ αὐτοῖς δέκα μὲν οὓς Θηραμένης ἀπέδειξε χειροτονῆσαι, δέκα δὲ οὓς οἱ καθεστηκότες ἔφοροι κελεύοιεν, δέκα δ᾽ ἐκ τῶν παρόντων· οὕτω γὰρ τὴν ὑμετέραν ἀσθένειαν ἑώρων καὶ τὴν αὑτῶν δύναμιν ἠπίσταντο, ὥστε πρότερον ᾔδεσαν τὰ μέλλοντα ἐν τῇ ἐκκλησία πραχθήσεσθαι. [77] ταῦτα δὲ οὐκ ἐμοὶ δεῖ πιστεῦσαι, ἀλλὰ ἐκείνῳ: πάντα γὰρ τὰ ὑπ᾽ ἐμοῦ εἰρημένα ἐν τῇ βουλῇ ἀπολογούμενος ἔλεγεν, ὀνειδίζων μὲν τοῖς φεύγουσιν, ὅτι δι᾽ αὑτὸν κατέλθοιεν, οὐδὲν φροντιζόντων Λακεδαιμονίων, ὀνειδίζων δὲ τοῖς τῆς πολιτείας μετέχουσιν, ὅτι πάντων τῶν πεπραγμένων τοῖς εἰρημένοις τρόποις ὑπ᾽ ἐμοῦ αὐτὸς αἴτιος γεγενημένος τοιούτων τυγχάνοι, πολλὰς πίστεις αὐτοῖς ἔργῳ δεδωκὼς καὶ παρ᾽ ἐκείνων ὅρκους εἰληφώς. [78] καὶ τοσούτων καὶ ἑτέρων κακῶν καὶ αἰσχρῶν καὶ πάλαι καὶ νεωστὶ καὶ μικρῶν καὶ μεγάλων αἰτίου γεγενημένου τολμήσουσιν αὑτοὺς φίλους ὄντας ἀποφαίνειν, οὐχ ὑπὲρ ὑμῶν ἀποθανόντος Θηραμένους ἀλλ᾽ ὑπὲρ τῆς αὑτοῦ πονηρίας, καὶ δικαίως μὲν ἐν ὀλιγαρχίᾳ δίκην δόντος (ἤδη γὰρ αὐτὴν κατέλυσε), δικαίως δ᾽ ἂν ἐν δημοκρατίᾳ· δὶς γὰρ ὑμᾶς κατεδουλώσατο, τῶν μὲν παρόντων καταφρονῶν, τῶν δὲ ἀπόντων ἐπιθυμῶν, καὶ τῷ καλλίστῳ ὀνόματι χρώμενος δεινοτάτων ἔργων διδάσκαλος καταστάς.
                                                                                                                                                                                  Lysias, contre Eratosthène, 73 sq




[73] Théramène se lève; il vous invite à remettre la cité aux mains de trente citoyens et à adopter le projet de constitution exposé par Dracontidès. Malgré la difficulté de votre situation, vous déclarez, au milieu du tumulte, que vous n'en ferez rien. Vous compreniez, en effet, que c'était votre esclavage ou votre liberté qui, ce jour-là, était en délibération. [74] Alors Théramène, juges (j'en appelle à votre propre témoignage), déclara qu'il se moquait de vos protestations : il savait, disait-il, qu'il avait avec lui beaucoup d'Athéniens et qu'il parlait selon les vues des Lacédémoniens et de Lysandre. Après lui, Lysandre se leva pour vous dire, avec beaucoup d'autres choses, qu'il vous tenait pour coupables d'infraction au traité, et qu'il ne s'agirait plus de la constitution, mais de votre salut, si vous n'obéissiez pas à Théramène. [75] Tous les bons citoyens présents dans l'assemblée, comprenant la manoeuvre et sentant leur impuissance, ou bien restèrent en gardant une attitude passive, ou bien se retirèrent. Ils pouvaient du moins se rendre cette justice qu'ils n'avaient rien voté de néfaste pour la cité. Un petit nombre de citoyens lâches, mal intentionnés, adoptèrent à main levée les mesures qu'on leur dictait. [76] Le mot d'ordre avait été donné d'élire dix citoyens désignés par Théramène, dix imposés par les éphores nouvellement établis, dix autres pris dans l'assistance. Car ils voyaient si bien votre faiblesse et connaissaient si bien leur force qu'ils avaient prévu ce qui se passerait dans l'assemblée. [77] Et ce n'est pas moi qu'il faut en croire, mais Théramène lui-même. Tout ce que je viens de dire, il le disait pour sa défense dans le Conseil, lorsqu'il se répandait en reproches contre les exilés : c'est à lui qu'ils devaient leur rappel ; les Lacédémoniens ne s'en souciaient pas du tout. Et il s'en prenait aussi à ses collègues du gouvernement : tous les résultats obtenus - je vous ai dit par quels procédés - c'est à lui qu'ils en étaient redevables, et voilà la récompense qu'il en recevait, malgré tous les gages qu'il leur avait donnés par sa conduite, malgré les serments qui le liaient à lui ! [78] Et c'est cet homme, coupable de tous ces forfaits et de beaucoup d'autres, d'infamies de toutes sortes, anciennes et récentes, petites et grandes, dont on osera se déclarer l'ami, ce Théramène qui a péri non pas pour votre cause, mais pour ses crimes ! Justement châtié sous l'oligarchie qu'il travaillait déjà à renverser, il l'eût été aussi justement pendant la démocratie; car il a par deux fois asservi le peuple, toujours mécontent du présent et rêvant d'autre chose, et décorant du plus beau nom les crimes abominables dont il donnait l'exemple.

       trad. Louis Gernet et Marcel Bizos; éd. les belles lettres

                                                                                                 voir la page de Jean-Paul Woitrain




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Lysias aborde l'accusation contre Eratosthène





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[12,1] Οὐκ ἄρξασθαί μοι δοκεῖ ἄπορον εἶναι, ὦ ἄνδρες δικασταί, τῆς κατηγορίας, ἀλλὰ παύσασθαι λέγοντι· τοιαῦτα αὐτοῖς τὸ μέγεθος καὶ τοσαῦτα τὸ πλῆθος εἴργασται, ὥστε μήτ' ἂν ψευδόμενον δεινότερα τῶν ὑπαρχόντων κατηγορῆσαι, μήτε τἀληθῆ βουλόμενον εἰπεῖν ἅπαντα δύνασθαι, ἀλλ' ἀνάγκη ἢ τὸν κατήγορον ἀπειπεῖν ἢ τὸν χρόνον ἐπιλιπεῖν.

[12,2] Τοὐναντίον δέ μοι δοκοῦμεν πείσεσθαι ἢ ἐν τῷ πρὸ τοῦ χρόνῳ. Πρότερον μὲν γὰρ ἔδει τὴν ἔχθραν τοὺς κατηγοροῦντας ἐπιδεῖξαι, ἥτις εἴη πρὸς τοὺς φεύγοντας· νυνὶ δὲ παρὰ τῶν φευγόντων χρὴ πυνθάνεσθαι ἥτις ἦν αὐτοῖς πρὸς τὴν πόλιν ἔχθρα, ἀνθ' ὅτου τοιαῦτα ἐτόλμησαν εἰς αὐτὴν ἐξαμαρτάνειν. Οὐ μέντοι ὡς οὐκ ἔχων οἰκείας ἔχθρας καὶ συμφορὰς τοὺς λόγους ποιοῦμαι, ἀλλ' ὡς ἅπασι πολλῆς ἀφθονίας οὔσης ὑπὲρ τῶν ἰδίων ἢ ὑπὲρ τῶν δημοσίων ὀργίζεσθαι.

[12,3] Ἐγὼ μὲν οὖν, ὦ ἄνδρες δικασταί, οὔτ' ἐμαυτοῦ πώποτε οὔτε ἀλλότρια πράγματα πράξας νῦν ἠνάγκασμαι ὑπὸ τῶν γεγενημένων τούτου κατηγορεῖν, ὥστε πολλάκις εἰς πολλὴν ἀθυμίαν κατέστην, μὴ διὰ τὴν ἀπειρίαν ἀναξίως καὶ ἀδυνάτως ὑπὲρ τοῦ ἀδελφοῦ καὶ ἐμαυτοῦ τὴν κατηγορίαν ποιήσομαι. ὅμως δὲ πειράσομαι ὑμᾶς ἐξ ἀρχῆς ὡς ἂν δύνωμαι δι' ἐλαχίστων διδάξαι.
                                                                                                                                                    Lysias, contre Eratosthène, 1, 2, 3.




[12,1] Aborder l'accusation n'est pas ce qui me paraît embarrassant, juges : c'est plutôt de m'arrêter dans mon discours. Les crimes de ces hommes sont si graves et si nombreux que, voulût-on mentir, on ne saurait proférer contre eux d'accusations plus graves que les faits, et qu'à s'en tenir à la réalité, on ne peut tout dire : fatalement, ou bien la force manquera à l'accusateur, ou bien le temps lui fera défaut.

[12,2] Au reste, il me semble que les rôles vont être renversés : jusqu'à présent, l'accusateur devait faire connaître quel motif de haine il avait contre l'accusé; aujourd'hui, c'est à l'accusé qu'il faut demander compte d'une haine qui l'a poussé à de pareils crimes envers la cité. Si je fais d'ailleurs ces réflexions, ce n'est pas que je n'aie personnellement sujet de haïr mon adversaire pour le mal qu'il m'a fait; c'est parce que je songe au contraire aux mille raisons que nous avons tous, en notre nom personnel comme au nom de l'État, d'être indignés contre lui.

[12,3] En ce qui me concerne, juges, je ne me suis jamais occupé d'aucun procès, ni pour mon compte, ni pour celui des autres, et il a fallu que les circonstances m'obligent aujourd'hui à accuser cet homme. Aussi ai-je été pris bien des fois d'un profond découragement, craignant, faute d'expérience, de ne pouvoir soutenir l'accusation avec l'habileté convenable, au nom de mon frère et au mien. Je vais essayer pourtant de vous exposer toute l'affaire depuis ses débuts, aussi brièvement que je pourrai.
          trad. Louis Gernet et Marcel Bizos; éd les belles lettres



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ἄρχω (imparf. ἦρχον, futur ἄρξω, aor. ἦρξα, parf. ἦρχα; passif futur ἄρξομαι, aor. ἤρχθην, parf. ἦργμαι) : être le premier, aller en tête, montrer le chemin, guider; guider, conduire; commander, être le chef.
moyen ἄρχομαι (futur ἄρξομαι, aor. ἠρξάμην) : commencer, entreprendre.
avec gén. ἄρξασθαί ... τῆς κατηγορίας : entreprendre l'accusation, aborder l'accusation.
οὐκ ἄρξασθαί μοι δοκεῖ ἄπορον εἶναι τῆς κατηγορίας : il ne me semble pas embarrassant d'aborder l'accusation.
ἀλλὰ παύσασθαι λέγοντι : mais de cesser de parler.
moyen παύομαι (futur παύσομαι, aor. ἐπαυσάμην, parf. πέπαυμαι) : cesser.
τὸ ἐναντίον ou τοὐναντίον : le contraire.
ἐν τῷ πρὸ τοῦ χρόνῳ : du temps avant cela, auparavant.
τοὐναντίον δέ μοι δοκοῦμεν πείσεσθαι ἢ ἐν τῷ πρὸ τοῦ χρόνῳ : c'est dans une situation opposée à celle d'auparavant, me semble-t-il, que nous allons nous trouver.
moyen πείθομαι (futur πείσομαι, aor. 2 ἐπιθόμην) et passif (futur πεισθήσομαι, aor. ἐπείσθην, parf. πέπεισμαι) : se laisser persuader
μοι δοκοῦμεν πείσεσθαι : il me semble, nous allons nous laisser persuader.







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Cynisme de Pison à l'égard de Lysias





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[12,9] Ἐγὼ δὲ Πείσωνα μὲν ἠρώτων εἰ βούλοιτό με σῶσαι χρήματα λαϐών. Ὁ δ' ἔφασκεν, εἰ πολλὰ εἴη. Εἶπον ὅτι τάλαντον ἀργυρίου ἕτοιμος εἴην δοῦναι· ὁ δ' ὡμολόγησε ταῦτα ποιήσειν. Ἠπιστάμην μὲν οὖν ὅτι οὔτε θεοὺς οὔτ' ἀνθρώπους νομίζει, ὅμως δ' ἐκ τῶν παρόντων ἐδόκει μοι ἀναγκαιότατον εἶναι πίστιν παρ' αὐτοῦ λαϐεῖν.

[12,10] Ἐπειδὴ δὲ ὤμοσεν, ἐξώλειαν ἑαυτῷ καὶ τοῖς παισὶν ἐπαρώμενος, λαϐὼν τὸ τάλαντόν με σώσειν, εἰσελθὼν εἰς τὸ δωμάτιον τὴν κιϐωτὸν ἀνοίγνυμι. Πείσων δ' αἰσθόμενος εἰσέρχεται, καὶ ἰδὼν τὰ ἐνόντα καλεῖ τῶν ὑπηρετῶν δύο, καὶ τὰ ἐν τῇ κιϐωτῷ λαϐεῖν ἐκέλευσεν.

[12,11] Ἐπεὶ δὲ οὐχ ὅσον ὡμολόγητο εἶχεν, ὦ ἄνδρες δικασταί, ἀλλὰ τρία τάλαντα ἀργυρίου καὶ τετρακοσίους κυζικηνοὺς καὶ ἑκατὸν δαρεικοὺς καὶ φιάλας ἀργυρᾶς τέτταρας, ἐδεόμην αὐτοῦ ἐφόδιά μοι δοῦναι,

[12,12] ὁ δ' ἀγαπήσειν με ἔφασκεν, εἰ τὸ σῶμα σώσω. Ἐξιοῦσι δ' ἐμοὶ καὶ Πείσωνι ἐπιτυγχάνει Μηλόϐιός τε καὶ Μνησιθείδης ἐκ τοῦ ἐργαστηρίου ἀπιόντες, καὶ καταλαμϐάνουσι πρὸς αὐταῖς ταῖς θύραις, καὶ ἐρωτῶσιν ὅποι βαδίζοιμεν· ὁ δ' ἔφασκεν εἰς τὰ τοῦ ἀδελφοῦ τοῦ ἐμοῦ, ἵνα καὶ τὰ ἐν ἐκείνῃ τῇ οἰκίᾳ σκέψηται. ἐκεῖνον μὲν οὖν ἐκέλευον βαδίζειν, ἐμὲ δὲ μεθ' αὑτῶν ἀκολουθεῖν εἰς Δαμνίππου.

[12,13] Πείσων δὲ προσελθὼν σιγᾶν μοι παρεκελεύετο καὶ θαρρεῖν, ὡς ἥξων ἐκεῖσε. Καταλαμϐάνομεν δὲ αὐτόθι Θέογνιν ἑτέρους φυλάττοντα· ᾧ παραδόντες ἐμὲ πάλιν ᾤχοντο. Ἐν τοιούτῳ δ' ὄντι μοι κινδυνεύειν ἐδόκει, ὡς τοῦ γε ἀποθανεῖν ὑπάρχοντος ἤδη.

[12,14] Καλέσας δὲ Δάμνιππον λέγω πρὸς αὐτὸν τάδε, « ἐπιτήδειος μέν μοι τυγχάνεις ὤν, ἥκω δ' εἰς τὴν σὴν οἰκίαν, ἀδικῶ δ' οὐδέν, χρημάτων δ' ἕνεκα ἀπόλλυμαι. σὺ οὖν ταῦτα πάσχοντί μοι πρόθυμον παράσχου τὴν σεαυτοῦ δύναμιν εἰς τὴν ἐμὴν σωτηρίαν.» Ὁ δ' ὑπέσχετο ταῦτα ποιήσειν. Ἐδόκει δ' αὐτῷ βέλτιον εἶναι πρὸς Θέογνιν μνησθῆναι· ἡγεῖτο γὰρ ἅπαν ποιήσειν αὐτόν, εἴ τις ἀργύριον διδοίη.

[12,15] Ἐκείνου δὲ διαλεγομένου Θεόγνιδι (ἔμπειρος γὰρ ὢν ἐτύγχανον τῆς οἰκίας, καὶ ᾔδη ὅτι ἀμφίθυρος εἴη) ἐδόκει μοι ταύτῃ πειρᾶσθαι σωθῆναι, ἐνθυμουμένῳ ὅτι, ἐὰν μὲν λάθω, σωθήσομαι, ἐὰν δὲ ληφθῶ, ἡγούμην μέν, εἰ Θέογνις εἴη πεπεισμένος ὑπὸ τοῦ Δαμνίππου χρήματα λαϐεῖν, οὐδὲν ἧττον ἀφεθήσεσθαι, εἰ δὲ μή, ὁμοίως ἀποθανεῖσθαι.
                                                                                                                                                               Lysias, contre Eratosthène, 12, 9-15



[12,9] Je dis à Pison : «Veux-tu me sauver pour de l'argent ?» «Oui», répond-il, «si la somme est forte». Je me déclarai prêt à lui donner un talent. «Entendu !» fit-il. Je le connaissais pour n'avoir ni foi ni loi; pourtant, dans ma situation, il me parut indispensable d'exiger de lui un serment.

[12,10] Il jura sur la tête de ses enfants et sur la sienne de me sauver la vie pour un talent. J'entre alors dans ma chambre, et j'ouvre mon coffre. Pison s'en aperçoit, entre à son tour, et, voyant le contenu, il appelle deux de ses aides et leur ordonne de s'en saisir.

[12,11] Ce n'était plus seulement la somme convenue, juges, mais trois talents d'argent, quatre cents cyzicènes, cent dariques et quatre coupes d'argent : je lui demandai de me laisser au moins de quoi voyager. «Tu devras t'estimer heureux, me répondit-il, si tu as la vie sauve».

[12,12] Au moment où nous sortions, Pison et moi, nous tombons sur Mèlobios et Mnèsithéidès, qui revenaient de l'atelier; ils nous rencontrent sur le seuil même de la porte et nous demandent où nous allons. Pison répondit qu'il se rendait chez mon frère, afin de faire aussi une perquisition dans sa maison. Ils le laissèrent aller et m'enjoignirent de les suivre chez Damnippe
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[12,13] Pison s'approche alors de moi : «Pas un mot, me dit-il, et ne crains rien. J'irai vous rejoindre.» Chez Damnippe, nous trouvons Théognis qui gardait d'autres prisonniers. Ils me remettent entre ses mains et repartent. Dans la situation où j'étais, je pris le parti de courir quelque risque, puisque aussi bien je me voyais déjà perdu.

[12,14] J'appelle Damnippe. « Écoute, lui dis-je, tu es mon ami et me voici dans ta maison : je suis innocent ; c'est ma fortune qui me perd. Tu vois mon malheur; sois généreux et use de ton crédit pour me sauver.» Il me le promit. Le mieux lui parut d'en parler à Théognis qui, pensait-il, ferait tout pour de l'argent.

[12,15] Pendant qu'il était en conversation avec Théognis (justement je connaissais la maison, et je savais qu'elle avait deux issues), je décidai d'en profiter pour essayer de me tirer d'affaire : si je trompe mes gardiens, me dis-je, je suis sauvé; et si je suis pris, de deux choses l'une : ou bien Théognis se sera laissé acheter par Damnippe, et je n'en serai pas moins relâché, ou bien il refuse, et je périrai de toute façon.
                    
trad. Gernet et Bizos; éd. les belles lettres.




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(ἔμπειρος γὰρ ὢν ἐτύγχανον τῆς οἰκίας, καὶ ᾔδη ὅτι ἀμφίθυρος εἴη) ἐδόκει μοι ταύτῃ πειρᾶσθαι σωθῆναι, ἐνθυμουμένῳ ὅτι, ἐὰν μὲν λάθω, σωθήσομαι, ἐὰν δὲ ληφθῶ, ἡγούμην μέν, εἰ Θέογνις εἴη πεπεισμένος ὑπὸ τοῦ Δαμνίππου χρήματα λαβεῖν, οὐδὲν ἧττον ἀφεθήσεσθαι, εἰ δὲ μή, ὁμοίως ἀποθανεῖσθαι : (justement je connaissais la maison, et je savais qu'elle avait deux issues), je décidai d'en profiter pour essayer de me tirer d'affaire : si je trompe mes gardiens, me dis-je, je suis sauvé; et si je suis pris, de deux choses l'une : ou bien Théognis se sera laissé acheter par Damnippe, et je n'en serai pas moins relâché, ou bien il refuse, et je périrai de toute façon.










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Un cocu bien naïf





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[1,6] Ἐγὼ γάρ, ὦ ᾿Αθηναῖοι, ἐπειδὴ ἔδοξέ μοι γῆμαι καὶ γυναῖκα ἠγαγόμην εἰς τὴν οἰκίαν, τὸν μὲν ἄλλον χρόνον οὕτω διεκείμην ὥστε μήτε λυπεῖν μήτε λίαν ἐπ’ ἐκείνῃ εἶναι ὅ τι ἂν ἐθέλῃ ποιεῖν, ἐφύλαττόν τε ὡς οἷόν τε ἦν, καὶ προσεῖχον τὸν νοῦν ὥσπερ εἰκὸς ἦν. Ἐπειδὴ δέ μοι παιδίον γίγνεται, ἐπίστευον ἤδη καὶ πάντα τὰ ἐμαυτοῦ ἐκείνῃ παρέδωκα, ἡγούμενος ταύτην οἰκειότητα μεγίστην εἶναι.

[1,7] Ἐν μὲν οὖν τῷ πρώτῳ χρόνῳ, ὦ ᾿Αθηναῖοι, πασῶν ἦν βελτίστη· καὶ γὰρ οἰκονόμος δεινὴ καὶ φειδωλὸς {ἀγαθὴ} καὶ ἀκριϐῶς πάντα διοικοῦσα· ἐπειδὴ δέ μοι ἡ μήτηρ ἐτελεύτησε, πάντων τῶν κακῶν ἀποθανοῦσα αἰτία μοι γεγένηται.

[1,8] Ἐπ’ ἐκφορὰν γὰρ αὐτῇ ἀκολουθήσασα ἡ ἐμὴ γυνὴ ὑπὸ τούτου τοῦ ἀνθρώπου ὀφθεῖσα, χρόνῳ διαφθείρεται· ἐπιτηρῶν γὰρ τὴν θεράπαιναν τὴν εἰς τὴν ἀγορὰν βαδίζουσαν καὶ λόγους προσφέρων ἀπώλεσεν αὐτήν.

[1,9] Πρῶτον μὲν οὖν, ὦ ἄνδρες, (δεῖ γὰρ καὶ ταῦθ’ ὑμῖν διηγήσασθαἰ) οἰκίδιον ἔστι μοι διπλοῦν, ἴσα ἔχον τὰ ἄνω τοῖς κάτω κατὰ τὴν γυναικωνῖτιν καὶ κατὰ τὴν ἀνδρωνῖτιν. Ἐπειδὴ δὲ τὸ παιδίον ἐγένετο ἡμῖν, ἡ μήτηρ αὐτὸ ἐθήλαζεν· ἵνα δὲ μή, ὁπότε λοῦσθαι δέοι, κινδυνεύῃ κατὰ τῆς κλίμακος καταϐαίνουσα, ἐγὼ μὲν ἄνω διῃτώμην, αἱ δὲ γυναῖκες κάτω.

[1,10] Καὶ οὕτως ἤδη συνειθισμένον ἦν, ὥστε πολλάκις ἡ γυνὴ ἀπῄει κάτω καθευδήσουσα ὡς τὸ παιδίον, ἵνα τὸν τιτθὸν αὐτῷ διδῷ καὶ μὴ βοᾷ. Καὶ ταῦτα πολὺν χρόνον οὕτως ἐγίγνετο, καὶ ἐγὼ οὐδέποτε ὑπώπτευσα, ἀλλ’ οὕτως ἠλιθίως διεκείμην, ὥστε ᾤμην τὴν ἐμαυτοῦ γυναῖκα πασῶν σωφρονεστάτην εἶναι τῶν ἐν τῇ πόλει.

[1,11] Προϊόντος δὲ τοῦ χρόνου, ὦ ἄνδρες, ἧκον μὲν ἀπροσδοκήτως ἐξ ἀγροῦ, μετὰ δὲ τὸ δεῖπνον τὸ παιδίον ἐϐόα καὶ ἐδυσκόλαινεν ὑπὸ τῆς θεραπαίνης ἐπίτηδες λυπούμενον, ἵνα ταῦτα ποιῇ· ὁ γὰρ ἅνθρωπος ἔνδον ἦν· ὕστερον γὰρ ἅπαντα ἐπυθόμην.

[1,12] Καὶ ἐγὼ τὴν γυναῖκα ἀπιέναι ἐκέλευον καὶ δοῦναι τῷ παιδίῳ τὸν τιτθόν, ἵνα παύσηται κλᾶον. Ἡ δὲ τὸ μὲν πρῶτον οὐκ ἤθελεν, ὡς ἂν ἀσμένη με ἑωρακυῖα ἥκοντα διὰ χρόνου· ἐπειδὴ δὲ ἐγὼ ὠργιζόμην καὶ ἐκέλευον αὐτὴν ἀπιέναι, « ἵνα σύ γε » ἔφη « πειρᾷς ἐνταῦθα τὴν παιδίσκην· καὶ πρότερον δὲ μεθύων εἷλκες αὐτήν.» Κἀγὼ μὲν ἐγέλων,

[1,13] ἐκείνη δὲ ἀναστᾶσα καὶ ἀπιοῦσα προστίθησι τὴν θύραν, προσποιουμένη παίζειν, καὶ τὴν κλεῖν ἐφέλκεται. Κἀγὼ τούτων οὐδὲν ἐνθυμούμενος οὐδ’ ὑπονοῶν ἐκάθευδον ἄσμενος, ἥκων ἐξ ἀγροῦ.

[1,14] Ἐπειδὴ δὲ ἦν πρὸς ἡμέραν, ἧκεν ἐκείνη καὶ τὴν θύραν ἀνέῳξεν. Ἐρομένου δέ μου τί αἱ θύραι νύκτωρ ψοφοῖεν, ἔφασκε τὸν λύχνον ἀποσβεσθῆναι τὸν παρὰ τῷ παιδίῳ, εἶτα ἐκ τῶν γειτόνων ἐνάψασθαι. Ἐσιώπων ἐγὼ καὶ ταῦτα οὕτως ἔχειν ἡγούμην. Ἐδοξε δέ μοι, ὦ ἄνδρες, τὸ πρόσωπον ἐψιμυθιῶσθαι, τοῦ ἀδελφοῦ τεθνεῶτος οὔπω τριάκονθ’ ἡμέρας· ὅμως δ’ οὐδ’ οὕτως οὐδὲν εἰπὼν περὶ τοῦ πράγματος ἐξελθὼν ᾠχόμην ἔξω σιωπῇ.
                                                                                                                                    Lysias, Sur le meurtre d'Eratosthène, 1, 6-14




[1,6] Lorsque j'eus décidé de me marier, Athéniens, et que j'eus pris femme, voici quelle fut d'abord mon attitude : évitant à la fois d'ennuyer ma femme et de lui laisser une liberté excessive, je la surveillais dans la mesure du possible, et, comme de juste, j'avais l'oeil sur elle. Mais, du jour où nous eûmes un enfant, je n'eus plus de défiance, je lui confiai toutes mes affaires, estimant que nous étions maintenant unis par le plus fort des liens.

[1,7] Dans les premiers temps, juges, c'était le modèle des femmes, ménagère adroite et économe, maîtresse de maison accomplie. Mais je perdis ma mère, et cette mort a été la cause de tous mes malheurs.

[1,8] C'est en effet en suivant ses funérailles que ma femme fut aperçue par Ératosthène, qui réussit, avec le temps, à la séduire : il guetta l'esclave qui allait au marché, se mit en rapports avec sa maîtresse et la perdit.

[1,9] Il faut vous dire d'abord (car ces détails mêmes sont nécessaires) que ma maisonnette a un étage ; la disposition y est la même en haut et en bas, pour l'appartement des femmes et pour celui des hommes. Survint la naissance du petit, que sa mère nourrissait. Chaque fois qu'il fallait le baigner, elle était obligée de descendre et risquait de tomber dans l'escalier; aussi habitais-je au premier étage et les femmes au rez-de-chaussée.

[1,10] C'était une habitude prise, et ma femme allait ainsi à chaque instant se coucher près du petit pour lui donner le sein et l'empêcher de crier. Les choses restèrent comme cela pendant longtemps sans jamais éveiller mes soupçons. Dans ma simplicité, je croyais ma femme la plus sage de toute la ville.

[1,11] A quelque temps de là, je revins de la campagne sans être attendu. Après le dîner, l'enfant était méchant et criait : c'était la servante qui le tourmentait pour qu'il fît cette vie-là, car l'homme était dans la maison (j'ai tout appris plus tard).

[1,12] Je dis à ma femme d'aller donner le sein au petit pour le faire taire. Elle ne voulait pas d'abord : elle était, disait-elle, si contente de me voir revenu, depuis le temps. Mais je me fâchai et lui dis de s'en aller. « Oui, répondit-elle, pour que tu restes à faire la cour à la petite esclave ; déjà, une fois que tu avais bu, tu la serrais de près ». Moi, je me mets à rire;

[1,13] elle, se lève, ferme la porte en s'en allant, comme pour s'amuser, et tire la clef. Je n'y pris pas garde, et, sans le moindre soupçon, je m'endormis content, comme un homme qui arrivait de la campagne.

[1,14] Un peu avant le jour, elle revint et ouvrit la chambre. Comme je lui demandais pourquoi les portes avaient fait du bruit pendant la nuit, elle répondit que la lampe de l'enfant s'était éteinte et qu'on avait été la rallumer chez les voisins. Je ne dis rien, croyant que c'était vrai. Il me sembla bien qu'elle était fardée, trente jours à peine après la mort de son frère. Mais je ne fis encore aucune réflexion à ce sujet et je m'en allai sans rien dire.

             trad. Gernet et Bizos; éd. les belles lettres




















            






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Cléobis et Biton





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[1,31, 1] ὣς δὲ τὰ κατὰ τὸν Τέλλον προετρέψατο ὁ Σόλων τὸν Κροῖσον εἴπας πολλά τε καὶ ὀλϐία, ἐπειρώτα τίνα δεύτερον μετ᾽ ἐκεῖνον ἴδοι, δοκέων πάγχυ δευτερεῖα γῶν οἴσεσθαι. ὃ δ᾽ εἶπε "Κλέοϐίν τε καὶ Βίτωνα. (2) τούτοισι γὰρ ἐοῦσι γένος Ἀργείοισι βίος τε ἀρκέων ὑπῆν, καὶ πρὸς τούτῳ ῥώμη σώματος τοιήδε· ἀεθλοφόροι τε ἀμφότεροι ὁμοίως ἦσαν, καὶ δὴ καὶ λέγεται ὅδε ὁ λόγος. ἐούσης ὁρτῆς τῇ Ἥρῃ τοῖσι Ἀργείοισι ἔδεε πάντως τὴν μητέρα αὐτῶν ζεύγεϊ κομισθῆναι ἐς τὸ ἱρόν, οἱ δέ σφι βόες ἐκ τοῦ ἀγροῦ οὐ παρεγίνοντο ἐν ὥρῃ· ἐκκληιόμενοι δὲ τῇ ὥρῃ οἱ νεηνίαι ὑποδύντες αὐτοὶ ὑπὸ τὴν ζεύγλην εἷλκον τὴν ἅμαξαν, ἐπὶ τῆς ἁμάξης δέ σφι ὠχέετο ἡ μήτηρ, σταδίους δὲ πέντε καὶ τεσσεράκοντα διακομίσαντες ἀπίκοντο ἐς τὸ ἱρόν. (3) ταῦτα δέ σφι ποιήσασι καὶ ὀφθεῖσι ὑπὸ τῆς πανηγύριος τελευτὴ τοῦ βίου ἀρίστη ἐπεγένετο, διέδεξέ τε ἐν τούτοισι ὁ θεὸς ὡς ἄμεινον εἴη ἀνθρώπῳ τεθνάναι μᾶλλον ἢ ζώειν. Ἀργεῖοι μὲν γὰρ περιστάντες ἐμακάριζον τῶν νεηνιέων τὴν ῥώμην, αἱ δὲ Ἀργεῖαι τὴν μητέρα αὐτῶν, οἵων τέκνων ἐκύρησε· (4) ἡ δὲ μήτηρ περιχαρής ἐοῦσα τῷ τε ἔργῳ καὶ τῇ φήμῃ, στᾶσα ἀντίον τοῦ ἀγάλματος εὔχετο Κλεόϐι τε καὶ Βίτωνι τοῖσι ἑωυτῆς τέκνοισι, οἵ μιν ἐτίμησαν μεγάλως, τὴν θεὸν δοῦναι τὸ ἀνθρώπῳ τυχεῖν ἄριστον ἐστί. (5) μετὰ ταύτην δὲ τὴν εὐχὴν ὡς ἔθυσάν τε καὶ εὐωχήθησαν, κατακοιμηθέντες ἐν αὐτῷ τῷ ἱρῷ οἱ νεηνίαι οὐκέτι ἀνέστησαν ἀλλ᾽ ἐν τέλεϊ τούτῳ ἔσχοντο. Ἀργεῖοι δὲ σφέων εἰκόνας ποιησάμενοι ἀνέθεσαν ἐς Δελφοὺς ὡς ἀριστῶν γενομένων".
                                                                                                                        Hérodote, Histoires, 1, 31, 1-5



En vantant le bonheur et la destinée de Tellos, Solon avait excité Crésus à questionner ; Crésus lui demanda qui, des hommes qu’il avait vus, serait le second après Tellos ; il était fermement persuadé que la seconde place au moins serait pour lui. Mais Solon répondit : " Cléobis et Biton". Ils étaient de race argienne, jouissaient de ressources suffisantes, et, de plus, d’une force corporelle dont voici les preuves : tous deux pareillement avaient remporté des prix dans les concours, et on raconte d’eux cette histoire. Un jour de fête d’Héra chez les Argiens, il fallait absolument que leur mère fût portée au sanctuaire par un attelage ; et leurs bœufs n’étaient pas arrivés des champs en temps voulu; empêchés d’attendre faute de temps, les jeunes gens se mirent eux-mêmes sous le joug et traînèrent le char, le char où leur mère avait pris place; ils la transportèrent pendant quarante-cinq stades et arrivèrent au sanctuaire. Cet exploit accompli à la vue de l’assemblée, ils terminèrent leur vie de la meilleure façon; et, dans la circonstance, la divinité fit bien voir que, pour l’homme, il vaut mieux être mort que vivant. Les Argiens, entourant les jeunes gens, les félicitaient de leur force; les Argiennes félicitaient leur mère d’avoir de semblables enfants; elle, charmée de leur action et de l’éloge qu’on en faisait, debout en face de la statue divine, pria la déesse d’accorder à Cléobis et à Biton ses fils, qui l’avaient grandement honorée, ce que l’homme peut obtenir de meilleur. À la suite de cette prière, après le sacrifice et le banquet, les jeunes gens s’endormirent dans le sanctuaire même; et ils ne se relevèrent plus, mais trouvèrent là leur fin. Les Argiens firent faire d’eux des statues qu’ils consacrèrent à Delphes comme celles d’hommes excellents.








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Κλέοϐις, ιος (ὁ)  : Cléobis, frère de Biton.
ὀλϐία, ας (ἡ) : bonheur.
εἰς ὀλϐίαν (s. e. βάλλε) : va-t’en au bonheur, c. à d. ironiq. à tous les diables (ὄλϐιος : heureux, fortuné).
moyen προτρέπομαι (futur προτρέψομαι, aor. 1 προετρεψάμην, aor. 2 προετραπόμην) : se tourner vers, se diriger vers; exhorter, exciter.
ῥώμη σώματος τοιήδε (ὡς) ἀεθλοφόροι ἤσαν ἀμφότεροι : une telle force corporelle, que tous deux remportaient le prix de la lutte.










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Socrate demande à être nourri au Prytanée





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(35e) τὸ μὲν μὴ ἀγανακτεῖν, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, ἐπὶ τούτῳ (36a) τῷ γεγονότι, ὅτι μου κατεψηφίσασθε, ἄλλα τέ μοι πολλὰ συμϐάλλεται, καὶ οὐκ ἀνέλπιστόν μοι γέγονεν τὸ γεγονὸς τοῦτο, ἀλλὰ πολὺ μᾶλλον θαυμάζω ἑκατέρων τῶν ψήφων τὸν γεγονότα ἀριθμόν. οὐ γὰρ ᾠόμην ἔγωγε οὕτω παρ᾽ ὀλίγον ἔσεσθαι ἀλλὰ παρὰ πολύ· νῦν δέ, ὡς ἔοικεν, εἰ τριάκοντα μόναι μετέπεσον τῶν ψήφων, ἀπεπεφεύγη ἄν. Μέλητον μὲν οὖν, ὡς ἐμοὶ δοκῶ, καὶ νῦν ἀποπέφευγα, καὶ οὐ μόνον ἀποπέφευγα, ἀλλὰ παντὶ δῆλον τοῦτό γε, ὅτι εἰ μὴ ἀνέϐη Ἄνυτος καὶ Λύκων κατηγορήσοντες ἐμοῦ, κἂν ὦφλε (36b) χιλίας δραχμάς, οὐ μεταλαϐὼν τὸ πέμπτον μέρος τῶν ψήφων.

τιμᾶται δ᾽ οὖν μοι ὁ ἀνὴρ θανάτου. εἶεν· ἐγὼ δὲ δὴ τίνος ὑμῖν ἀντιτιμήσομαι, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι; ἢ δῆλον ὅτι τῆς ἀξίας; τί οὖν;

(36b)
 τί ἄξιός εἰμι παθεῖν ἢ ἀποτεῖσαι, ὅτι μαθὼν ἐν τῷ βίῳ οὐχ ἡσυχίαν ἦγον, ἀλλ᾽ ἀμελήσας ὧνπερ οἱ πολλοί, χρηματισμοῦ τε καὶ οἰκονομίας καὶ στρατηγιῶν καὶ δημηγοριῶν καὶ τῶν ἄλλων ἀρχῶν καὶ συνωμοσιῶν καὶ στάσεων τῶν ἐν τῇ πόλει γιγνομένων, ἡγησάμενος ἐμαυτὸν (36c) τῷ ὄντι ἐπιεικέστερον εἶναι ἢ ὥστε εἰς ταῦτ᾽ ἰόντα σῴζεσθαι, ἐνταῦθα μὲν οὐκ ᾖα οἷ ἐλθὼν μήτε ὑμῖν μήτε ἐμαυτῷ ἔμελλον μηδὲν ὄφελος εἶναι, ἐπὶ δὲ τὸ ἰδίᾳ ἕκαστον ἰὼν εὐεργετεῖν τὴν μεγίστην εὐεργεσίαν, ὡς ἐγώ φημι, ἐνταῦθα ᾖα, ἐπιχειρῶν ἕκαστον ὑμῶν πείθειν μὴ πρότερον μήτε τῶν ἑαυτοῦ μηδενὸς ἐπιμελεῖσθαι πρὶν ἑαυτοῦ ἐπιμεληθείη ὅπως ὡς βέλτιστος καὶ φρονιμώτατος ἔσοιτο, μήτε τῶν τῆς πόλεως, πρὶν αὐτῆς τῆς πόλεως, τῶν τε ἄλλων οὕτω κατὰ τὸν (36d) αὐτὸν τρόπον ἐπιμελεῖσθαι;

τί οὖν εἰμι ἄξιος παθεῖν τοιοῦτος ὤν; ἀγαθόν τι, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, εἰ δεῖ γε κατὰ τὴν ἀξίαν τῇ ἀληθείᾳ τιμᾶσθαι· καὶ ταῦτά γε ἀγαθὸν τοιοῦτον ὅτι ἂν πρέποι ἐμοί. τί οὖν πρέπει ἀνδρὶ πένητι εὐεργέτῃ δεομένῳ ἄγειν σχολὴν ἐπὶ τῇ ὑμετέρᾳ παρακελεύσει; οὐκ ἔσθ᾽ ὅτι μᾶλλον, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, πρέπει οὕτως ὡς τὸν τοιοῦτον ἄνδρα ἐν πρυτανείῳ σιτεῖσθαι, πολύ γε μᾶλλον ἢ εἴ τις ὑμῶν ἵππῳ ἢ συνωρίδιζεύγει νενίκηκεν Ὀλυμπίασιν· ὁ μὲν γὰρ ὑμᾶς ποιεῖ εὐδαίμονας δοκεῖν εἶναι, ἐγὼ δὲ (36e) εἶναι, καὶ ὁ μὲν τροφῆς οὐδὲν δεῖται, ἐγὼ δὲ δέομαι. εἰ οὖν δεῖ με κατὰ τὸ δίκαιον τῆς ἀξίας τιμᾶσθαι, τούτου (37a) τιμῶμαι, ἐν πρυτανείῳ σιτήσεως.
                                                                                                                                                                               Platon, apologie de Socrate, 35e-37a





(35e) Si je ne m'indigne pas d'être condamné par vous, Athéniens, c'est pour plusieurs raisons, et notamment parce que je n'étais pas sans m'y attendre. Je m'étonne plutôt de la proportion selon laquelle les voix se sont réparties. Vraiment, je ne pensais qu'une si faible majorité se prononcerait contre moi; je croyais qu'il y en aurait une beaucoup plus forte. Car, si je compte bien, il eût suffi d'un déplacement de trente voix pour que je fusse acquitté. Je conclus de là qu'en ce qui dépendait de Mélétos, me voici absous; bien plus, personne ne peut douter que, si Anytos et Lycon n'étaient pas venus ici m'accuser, il aurait été condamné à une amende de mille drachmes, faute d'avoir recueilli le cinquième des voix.

Maintenant, il propose qu'on me condamne à mort. Soit. A mon tour, Athéniens, que vais-je proposer ? Evidemment, ce que je mérite. qu'est-ce donc ?  Quel traitement, quelle amende ai-je mérité pour avoir cru que je devais renoncer à une vie tranquille, négliger ce que la plupart des hommes ont à cœur, fortune, intérêts privés, commandements militaires, succès de tribune, magistratures, coalitions, factions politiques ? pour m'être convaincu qu'avec mes scrupules je me perdrais si j'entrais dans cette voie ? pour n'avoir pas voulu m'engager dans ce qui n'eût été d'aucun profit ni pour vous ni pour moi ? pour avoir préféré rendre à chacun de vous en particulier ce que je déclare être le plus grand des services, en essayant de lui persuader de se préoccuper moins de ce qui lui appartient que de sa propre personne, pour se rendre aussi excellent, aussi raisonnable que possible, de songer moins aux choses de la cité qu'à la cité elle-même, et, en somme, d'appliquer à tout ces mêmes principes ?

Qu'ai-je mérité, je le demande, pour m'être ainsi conduit ? un bon traitement, Athéniens, si nous voulons être justes; et sans doute un bon traitement qui me soit approprié. Qu'y a-t-il donc d'approprié à un bienfaiteur pauvre, qui a besoin de loisir pour vous exhorter ? Rien ne conviendrait à un tel homme, Athéniens, que d'être nourri dans le prytanée. Oui, cela siérait bien mieux qu'à tel d'entre vous qui a été vainqueur à Olympie avec un cheval de course ou un attelage à deux ou un quadrige. Un tel vainqueur vous procure une satisfaction d'apparence : moi, je vous en apporte une qui est réelle. De plus, il n'a pas besoin, lui, qu'on le nourrisse; moi, j'en ai besoin. Si donc vous voulez me traiter justement et selon mon mérite, c'est là ce que je vous propose : de me nourrir au prytanée.
      trad. Maurice Croiset; éd les belles lettres


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Agésilas, homme vertueux





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 Ἀγησιιλαος ἱερὰ μὲν καὶ τὰ ἐν τοῖς πολεμίοις ἐσέϐετο, ἡγούμενος τοὺς θεοὺς οὐχ ἧττον ἐν τῇ πολεμίαι χρῆναι ἢ ἐν τῇ φιλίαι συμμάχους ποιεῖσθαι· ἱκέτας δὲ θεῶν οὐδὲ ἐχθροὺς ἐϐιάζετο, νομίζων ἄλογον εἶναι τοὺς μὲν ἐξ ἱερῶν κλέπτοντας ἱεροσύλους καλεῖν, τοὺς δὲ βωμῶν ἱκέτας ἀποσπῶντας εὐσεϐεῖς ἡγεῖσθαι. ἐκεῖνός γε μὴν ὑμνῶν οὔποτ᾽ ἔληγεν ὡς τοὺς θεοὺς οἴοιτο οὐδὲν ἧττον ὁσίοις ἔργοις ἢ ἁγνοῖς ἱεροῖς ἥδεσθαι. ἀλλὰ μὴν καὶ ὁπότε εὐτυχοίη, οὐκ ἀνθρώπων ὑπερεφρόνει, ἀλλὰ θεοῖς χάριν ᾔδει. καὶ θαρρῶν πλείονα ἔθυεν ἢ ὀκνῶν ηὔχετο. εἴθιστο δὲ φοϐούμενος μὲν ἱλαρὸς φαίνεσθαι, εὐτυχῶν δὲ πρᾶιος εἶναι. τῶν γε μὴν φίλων οὐ τοὺς δυνατωτάτους ἀλλὰ τοὺς προθυμοτάτους μάλιστα ἠσπάζετο. ἐμίσει οὐκ εἴ τις κακῶς πάσχων ἠμύνετο, ἀλλ᾽ εἴ τις εὐεργετούμενος ἀχάριστος φαίνοιτο. ἔχαιρε δὲ τοὺς μὲν αἰσχροκερδεῖς πένητας ὁρῶν, τοὺς δὲ δικαίους πλουσίους ποιῶν, βουλόμενος τὴν δικαιοσύνην τῆς ἀδικίας κερδαλεωτέραν καθιστάναι. ἤσκει δὲ ἐξομιλεῖν μὲν παντοδαποῖς, χρῆσθαι δὲ τοῖς ἀγαθοῖς.
                                                                                                                                                                                             Xénophon, Agésilas, 1-4





Agésilas respectait les temples, même sur le territoire ennemi, convaincu que l’aide des dieux n’est pas moins désirable sur le terrain de la guerre que sur celui de la paix. Il ne voulait donc pas qu’on fît violence aux ennemis réfugiés auprès des dieux, regardant comme absurde d’appeler sacrilèges les voleurs des temples, et de croire pieux quiconque arrache les suppliants des autels. Une maxime qu’il ne cessait de répéter, c’est que, selon lui, les dieux n’aiment pas moins les bonnes actions que les victimes pures. Dans la prospérité, il ne méprisait pas les hommes, mais il remerciait les dieux. Hors du péril, il faisait plus de sacrifices qu’il n’en avait promis dans le danger. Il avait coutume, dans les moments critiques, de paraître gai, et modeste dans les occasions favorables. Entre ses amis, ce n’étaient pas les plus puissants, mais les plus aimants qu’il chérissait davantage. Il haïssait, non l’homme qui se vengeait d’une injure, mais celui qui, après un bienfait, se montrait ingrat. Il aimait à voir pauvres ceux qui recherchent les profits honteux, enrichissait les justes, et voulait que la probité rapportât plus que l’injustice. Il conversait d’ordinaire avec tout le monde; mais il ne se liait qu’avec les gens de bien.


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ἀσκέω-ῶ (imparf. ἤσκουν, futur ἀσκήσω, aor. ἤσκησα, parf. ἤσκηκα; passif futur ἀσκηθήσομαι, aor. ἠσκήθην, parf. ἤσκημαι) : travailler des matériaux bruts, façonner; s’exercer à, s'appliquer à.
ἐξομιλέω-ῶ : avoir des relations avec, converser avec.
ἤσκει δὲ ἐξομιλεῖν μὲν παντοδαποῖς : il s'appliquait à converser avec tout le monde.












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Socrate plaisante sur son procès
 





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[2] (Εὐθύφρων). (2a) Τί νεώτερον, ὦ Σώκρατες, γέγονεν, ὅτι σὺ τὰς ἐν Λυκείῳ καταλιπὼν διατριϐὰς ἐνθάδε νῦν διατρίϐεις περὶ τὴν τοῦ βασιλέως στοάν; οὐ γάρ που καὶ σοί γε δίκη τις οὖσα τυγχάνει πρὸς τὸν βασιλέα ὥσπερ ἐμοί. (Σωκράτης) Οὔτοι δὴ Ἀθηναῖοί γε, ὦ (Εὐθύφρων), δίκην αὐτὴν καλοῦσιν ἀλλὰ γραφήν. (Εὐθύφρων) (2b) Τί φῄς; γραφὴν σέ τις, ὡς ἔοικε, γέγραπται· οὐ γὰρ ἐκεῖνό γε καταγνώσομαι, ὡς σὺ ἕτερον. (Σωκράτης) Οὐ γὰρ οὖν. (Εὐθύφρων) Ἀλλὰ σὲ ἄλλος; (Σωκράτης) Πάνυ γε. (Εὐθύφρων) Τίς οὗτος; (Σωκράτης) Οὐδ' αὐτὸς πάνυ τι γιγνώσκω, ὦ (Εὐθύφρων), τὸν ἄνδρα, νέος γάρ τίς μοι φαίνεται καὶ ἀγνώς· ὀνομάζουσι μέντοι αὐτόν, ὡς ἐγᾦμαι, Μέλητον. Ἔστι δὲ τῶν δήμων Πιτθεύς, εἴ τινα νῷ ἔχεις Πιτθέα Μέλητον οἷον τετανότριχα καὶ οὐ πάνυ εὐγένειον, ἐπίγρυπον δέ. (Εὐθύφρων) Οὐκ ἐννοῶ, ὦ Σώκρατες· ἀλλὰ δὴ τίνα γραφήν σε γέγραπται; (Σωκράτης) (2c) Ἥντινα; οὐκ ἀγεννῆ, ἔμοιγε δοκεῖ· τὸ γὰρ νέον ὄντα τοσοῦτον πρᾶγμα ἐγνωκέναι οὐ φαῦλόν ἐστιν. Ἐκεῖνος γάρ, ὥς φησιν, οἶδε τίνα τρόπον οἱ νέοι διαφθείρονται καὶ τίνες οἱ διαφθείροντες αὐτούς. Καὶ κινδυνεύει σοφός τις εἶναι, καὶ τὴν ἐμὴν ἀμαθίαν κατιδὼν ὡς διαφθείροντος τοὺς ἡλικιώτας αὐτοῦ, ἔρχεται κατηγορήσων μου ὥσπερ πρὸς μητέρα πρὸς τὴν πόλιν. Καὶ φαίνεταί μοι τῶν πολιτικῶν μόνος ἄρχεσθαι ὀρθῶς· (2d) ὀρθῶς γάρ ἐστι τῶν νέων πρῶτον ἐπιμεληθῆναι ὅπως ἔσονται ὅτι ἄριστοι, ὥσπερ γεωργὸν ἀγαθὸν τῶν νέων φυτῶν εἰκὸς πρῶτον ἐπιμεληθῆναι, μετὰ δὲ τοῦτο καὶ τῶν ἄλλων.


[3] Καὶ δὴ καὶ Μέλητος ἴσως πρῶτον μὲν ἡμᾶς ἐκκαθαίρει (3a) τοὺς τῶν νέων τὰς βλάστας διαφθείροντας, ὥς φησιν· ἔπειτα μετὰ τοῦτο δῆλον ὅτι τῶν πρεσ
ϐυτέρων ἐπιμεληθεὶς πλείστων καὶ μεγίστων ἀγαθῶν αἴτιος τῇ πόλει γενήσεται, ὥς γε τὸ εἰκὸς συμϐῆναι ἐκ τοιαύτης ἀρχῆς ἀρξαμένῳ
                                                                                                                                                                                  Platon, Eutyphron, 2, 3




[2] (Εὐθύφρων) (2a) Quelle nouveauté, Socrate ? Quitter tes habitudes du Lycée pour le portique du Roi ! J'espère que tu n'as pas, comme moi, un procès devant le Roi ? (Σωκράτης) Non pas un procès, Euthyphron : les Athéniens appellent cela une affaire d'Etat. (Εὐθύφρων) (2b) Une affaire d'Etat ! Quelqu'un t'accuse apparemment; car pour toi, Socrate, je ne croirai jamais que tu accuses personne. (Σωκράτης) Certainement non. (Εὐθύφρων) Ainsi donc, c'est toi qu'on accuse ? (Σωκράτης) Justement. (Εὐθύφρων) Et quel est ton accusateur ? (Σωκράτης) Je ne le connais guère personnellement; il paraît que c'est un jeune homme assez obscur; on l'appelle, je crois, Mélitus; il est du bourg de Pithos. Si tu te rappelles quelqu'un de Pithos, qui se nomme Mélitus, et qui ait les cheveux plats, la barbe rare, le nez recourbé, c'est mon homme. (Εὐθύφρων) Je ne me rappelle personne qui soit ainsi fait ; (2c) mais quelle accusation, Socrate, ce Mélitus intente-t-il donc contre toi ? (Σωκράτης) Quelle accusation ? Une accusation qui ne marque pas un homme ordinaire; car, à son âge y ce n'est pas peu que d'être instruit dans des matières si relevées. Il dit qu'il sait tout ce qu'on fait aujourd'hui pour corrompre la jeunesse, et qui sont ceux qui la corrompent. C'est apparemment quelque habile homme qui, connaissant mon ignorance, vient, devant la patrie, comme devant la mère commune, m'accuser de corrompre les hommes de son âge : et, il faut l'avouer, il me paraît le (2d) seul de nos hommes d'Etat qui entende les fondements d'une bonne politique; car la raison ne dit-elle pas qu'il faut commencer par l'éducation des jeunes gens, et travailler à les rendre aussi vertueux qu'ils peuvent l'être, comme un bon jardinier donne ses premiers soins aux nouvelles plantes, et ensuite s'occupe des autres ?

[3] Mélitus tient sans doute la même conduite, et commence par nous retrancher, nous qui (3a) corrompons les générations dans leur fleur, comme il s'exprime, après quoi il étendra ses soins bienfaisants sur l'âge avancé, et rendra à sa patrie les plus grands services. On ne peut attendre moins d'un homme qui sait si bien commencer.


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Le printemps et l'été



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[1,9] Ἦρος ἦν ἀρχὴ καὶ πάντα ἤκμαζεν ἄνθη, τὰ ἐν δρυμοῖς, τὰ ἐν λειμῶσι καὶ ὅσα ὄρεια· βόμϐος ἦν ἤδη μελιττῶν, ἦχος ὀρνίθων μουσικῶν, σκιρτήματα ποιμνίων ἀρτιγεννήτων· ἄρνες ἐσκίρτων ἐν τοῖς ὄρεσιν, ϐόμϐουν ἐν τοῖς λειμῶσιν αἱ μέλιτται, τὰς λόχμας κατῇδον ὄρνιθες. Τοσαύτης δὴ πάντα κατεχούσης εὐωρίας οἷ´ ἁπαλοὶ καὶ νέοι μιμηταὶ τῶν ἀκουομένων ἐγίνοντο καὶ βλεπομένων· ἀκούοντες μὲν τῶν ὀρνίθων ᾀδόντων ᾖδον, βλέποντες δὲ σκιρτῶντας τοὺς ἄρνας ἥλλοντο κοῦφα, καὶ τὰς μελίττας δὲ μιμούμενοι τὰ ἄνθη συνέλεγον· καὶ τὰ μὲν εἰς τοὺς κόλπους ἔϐαλλον, τὰ δὲ στεφανίσκους πλέκοντες ταῖς Νύμφαις ἐπέφερον.

[1,23] Ἐξέκαε δὲ αὐτοὺς καὶ ἡ ὥρα τοῦ ἔτους. Ἦρος ἦν ἤδη τέλος καὶ θέρους ἀρχή, καὶ πάντα ἐν ἀκμῇ· δένδρα ἐν καρποῖς, πεδία ἐν ληΐοις. Ἡδεῖα μὲν τεττίγων ἠχή, γλυκεῖα δὲ ὀπώρας ὀδμή, τερπνὴ δὲ ποιμνίων βληχή. Εἴκασεν ἄν τις καὶ τοὺς ποταμοὺς ᾄδειν ἠρέμα ῥέοντας καὶ τοὺς ἀνέμους συρίττειν ταῖς πίτυσιν ἐμπνέοντας καὶ τὰ μῆλα ἐρῶντα πίπτειν χαμαὶ καὶ τὸν ἥλιον φιλόκαλον ὄντα πάντας ἀποδύειν. Ὁ μὲν δὴ Δάφνις θαλπόμενος τούτοις ἅπασιν εἰς τοὺς ποταμοὺς ἐνέϐαινε, καὶ ποτὲ μὲν ἐλούετο, ποτὲ δὲ καὶ τῶν ἰχθύων τοὺς ἐνδινεύοντας ἐθήρα· πολλάκις δὲ καὶ ἔπινεν, ὡς τὸ ἔνδοθεν καῦμα σϐέσων.

[3,24] Θερμοτέρου δὲ καθ´ ἑκάστην ἡμέραν γινομένου τοῦ ἡλίου, οἷα τοῦ μὲν ἦρος παυομένου τοῦ δὲ θέρους ἀρχομένου, πάλιν αὐτοῖς ἐγίνοντο καιναὶ τέρψεις καὶ θέρειοι. Ὁ μὲν γὰρ ἐνήχετο ἐν τοῖς ποταμοῖς, ἡ δὲ ἐν ταῖς πηγαῖς ἐλούετο· ὁ μὲν ἐσύριζεν ἁμιλλώμενος πρὸς τὰς πίτυς, ἡ δὲ ᾖδε ταῖς ἀηδόσιν ἐρίζουσα· ἐθήρων ἀκρίδας λάλους, ἐλάμϐανον τέττιγας ἠχοῦντας, ἄνθη συνέλεγον, δένδρα ἔσειον, ὀπώραν ἤσθιον· ἤδη ποτὲ καὶ γυμνοὶ συγκατεκλίθησαν καὶ ἓν δέρμα αἰγὸς ἐπεσύραντο.
                                                                                                                                                                                 Longus, Daphnis et Chloé




[1,9] Or était-il lors environ le commencement du printemps, que toutes fleurs sont en vigueur, celles des bois, celles des prés, et celles des montagnes. Aussi çà commençait à s'ouïr par les champs bourdonnement d'abeilles, gazouillement d'oiseaux, bêlement d'agneaux nouveaux nés. Les troupeaux bondissaient sur les collines, les mouches à miel murmuraient par les prairies, les oiseaux faisaient résonner les buissons de leur chant. Toutes choses adonc faisant bien leur devoir de s'égayer à la saison nouvelle, eux aussi, tendres, jeunes d'âge, se mirent à imiter ce qu'ils entendaient et voyaient. Car entendant chanter les oiseaux, ils chantaient ; voyant bondir les agneaux, ils sautaient à l'envie; et, comme les abeilles, allaient cueillant des fleurs, dont ils jetaient les unes dans leur sein, et des autres arrangeaient des chapelets pour les Nymphes.

[1,23] Mais plus encore les enflammait la saison de l'année. Il était déjà environ la fin du printemps et commencement de l'été, toutes choses en vigueur; et déjà montraient les arbres leurs fruits, les blés leurs épis; et aussi était la voix des cigales plaisante à ouïr, tout gracieux le bêlement des brebis, la richesse des champs admirable à voir, l'air tout embaumé suave à respirer; les fleuves paraissaient endormis, coulant lentement et sans bruit; les vents semblaient orgues ou flûtes, tant ils soupiraient doucement à travers les branches des pins. On eût dit que les pommes d'elles-mêmes se laissaient tomber enamourées, que le soleil amant de beauté faisait chacun dépouiller. Daphnis, de toutes parts échauffé, se jetait dans les rivières, et tantôt se lavait, tantôt s'ébattait à vouloir saisir les poissons, qui glissant dans l'onde se perdaient sous sa main; et souvent buvait, comme si avec l'eau il eût dû éteindre le feu qui le brûlait.

[3,24] La chaleur allait tous les jours de plus en plus augmentant, parce que le printemps finissait et l'été commençait; et aussi avaient-ils de nouveaux passe-temps convenables à la saison d'été. Daphnis nageait dans les rivières, Chloé se baignait dans les fontaines; il jouait de la flûte à l'envi des pins que les vents faisaient résonner; elle chantait à l'encontre des rossignols à qui mieux mieux. Ensemble ils chassaient aux cigales, prenaient des sauterelles, cueillaient les fleurs, croulaient les arbres, mangeaient les fruits; et à la fin se couchèrent tous deux sous une même peau de chèvre, nue à nu.

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ἔαρ, ἔαρος par contr. ἦρ, ἦρος (τὸ) : printemps.
Ἦρος ἦν ἀρχὴ : c'était le commencement du printemps.
ἀκμάζω : être au plus haut point, dans toute sa force, sa fraîcheur, sa maturité.
ἄνθος, εος-ους (τὸ) : ce qui croît, ce qui pousse, une pousse; fleur.
πάντα ἤκμαζεν ἄνθη : toutes fleurs sont en vigueur.
συγκατακλίνω, anc. att. ξυγκατακλίνω : faire coucher avec; au passif coucher avec, datif.







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Ischomache raconte comment il a convaincu sa femme de renoncer au maquillage





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ἐγὼ τοίνυν, ἔφη, ἰδών ποτε αὐτήν, ὦ Σώκρατες, ἐντετριμμένην πολλῷ μὲν ψιμυθίῳ, ὅπως λευκοτέρα ἔτι δοκοίη εἶναι ἢ ἦν, πολλῇ δ' ἐγχούσῃ, ὅπως ἐρυθροτέρα φαίνοιτο τῆς ἀληθείας, ὑποδήματα δ' ἔχουσαν ὑψηλά, ὅπως μείζων δοκοίη εἶναι ἢ ἐπεφύκει, (3) εἰπέ μοι, ἔφην, ὦ γύναι, ποτέρως ἄν με κρίναις ἀξιοφίλητον μᾶλλον εἶναι χρημάτων κοινωνόν, εἴ σοι αὐτὰ τὰ ὄντα ἀποδεικνύοιμι, καὶ μήτε κομπάζοιμι ὡς πλείω τῶν ὄντων ἔστι μοι, μήτε ἀποκρυπτοίμην τι τῶν ὄντων μηδέν, ἢ εἰ πειρῴμην σε ἐξαπατᾶν λέγων τε ὡς πλείω ἔστι μοι τῶν ὄντων, ἐπιδεικνύς τε ἀργύριον κίϐδηλον (δηλοίην σε) καὶ ὅρμους ὑποξύλους καὶ πορφυρίδας ἐξιτήλους φαίην ἀληθινὰς εἶναι;

(4) καὶ ὑπολαϐοῦσα εὐθύς, εὐφήμει, ἔφη· μὴ γένοιο σὺ τοιοῦτος· οὐ γὰρ ἂν ἔγωγέ σε δυναίμην, εἰ τοιοῦτος εἴης, ἀσπάσασθαι ἐκ τῆς ψυχῆς. οὐκοῦν, ἔφην ἐγώ, συνεληλύθαμεν, ὦ γύναι, ὡς καὶ τῶν σωμάτων κοινωνήσοντες ἀλλήλοις; φασὶ γοῦν, ἔφη, οἱ ἄνθρωποι. 

(5) ποτέρως ἂν οὖν, ἔφην ἐγώ, τοῦ σώματος αὖ δοκοίην εἶναι ἀξιοφίλητος μᾶλλον κοινωνός, εἴ σοι τὸ σῶμα πειρῴμην παρέχειν τὸ ἐμαυτοῦ ἐπιμελόμενος ὅπως ὑγιαῖνόν τε καὶ ἐρρωμένον ἔσται, καὶ διὰ ταῦτα τῷ ὄντι εὔχρως σοι ἔσομαι, ἢ εἴ σοι μίλτῳ ἀλειφόμενος καὶ τοὺς ὀφθαλμοὺς ὑπαλειφόμενος ἀνδρεικέλῳ ἐπιδεικνύοιμί τε ἐμαυτὸν καὶ συνείην ἐξαπατῶν σε καὶ παρέχων ὁρᾶν καὶ ἅπτεσθαι μίλτου ἀντὶ τοῦ ἐμαυτοῦ χρωτός;

(6)
ἐγὼ μέν, ἔφη ἐκείνη, οὔτ' ἂν μίλτου ἁπτοίμην ἥδιον ἢ σοῦ οὔτ' ἂν ἀνδρεικέλου χρῶμα ὁρῴην ἥδιον ἢ τὸ σὸν οὔτ' ἂν τοὺς ὀφθαλμοὺς ὑπαληλιμμένους ἥδιον ὁρῴην τοὺς σοὺς ἢ ὑγιαίνοντας. (7) καὶ ἐμὲ τοίνυν νόμιζε, εἰπεῖν ἔφη ὁ Ἰσχόμαχος, ὦ γύναι, μήτε ψιμυθίου μήτε ἐγχούσης χρώματι ἥδεσθαι μᾶλλον ἢ τῷ σῷ, ἀλλ' ὥσπερ οἱ θεοὶ ἐποίησαν ἵπποις μὲν ἵππους, βουσὶ δὲ βοῦς ἥδιστον, προϐάτοις δὲ πρόϐατα, οὕτω καὶ οἱ ἄνθρωποι ἀνθρώπου σῶμα καθαρὸν οἴονται ἥδιστον εἶναι·

(8)
αἱ δ' ἀπάται αὗται τοὺς μὲν ἔξω πως δύναιντ' ἂν ἀνεξελέγκτως ἐξαπατᾶν, συνόντας δὲ ἀεὶ ἀνάγκη ἁλίσκεσθαι, ἂν ἐπιχειρῶσιν ἐξαπατᾶν ἀλλήλους. ἢ γὰρ ἐξ εὐνῆς ἁλίσκονται ἐξανιστάμενοι πρὶν παρασκευάσασθαι ἢ ὑπὸ ἱδρῶτος ἐλέγχονται ἢ ὑπὸ δακρύων βασανίζονται ἢ ὑπὸ λουτροῦ ἀληθινῶς κατωπτεύθησαν.
                                                                                                                                                                          Xénophon, Œconomique, 10, 2-8




Eh bien, (Socrate), je l'ai vue un jour toute fardée de céruse
pour avoir le teint encore plus clair que nature, toute fardée d'orcanète pour paraître plus rose qu'elle n'était en réalité, avec de hauts souliers pour avoir l'air plus grande qu'elle n'était naturellement. (3) Dis-moi, ma femme, lui dis-je, dans l'association de nos biens, te paraîtrais-je mériter davantage ton amour si je te montrais ce que j'ai tel quel, sans me vanter d'en posséder plus que je n'en possède, sans rien t'en cacher non plus, ou si j'essayais de te tromper en te disant que j'ai plus de bien que je n'en possède, et si je te jouais en montrant de l'argent de mauvais aloi et des colliers de bois doré, enfin si je te faisais passer pour étoffes de pourpre véritable des tissus de mauvais teint.

(4) Elle réplique vivement : "Tais-toi donc, je souhaite que tu n'agisses jamais ainsi; pour moi, je serais bien incapable, si tu avais une telle conduite, de te chérir de tout mon cœur. --- Eh bien, ma femme, dis-je, ne nous sommes-nous pas mariés pour faire aussi une association de nos corps ? --- C'est du moins ce qu'on dit", répond-elle.

(5) "Or, dis-je, dans cette association de nos corps, penserais-je mériter davantage ton amour si je tentais de t'apporter un corps que mes soins ont rendu sain et vigoureux et si par là tu me vois avec un bon teint véritable ou si je m'enduisais de vermillon ou me fardais sous les yeux avec de l'incarnat pour me montrer à toi et te prendre dans mes bras, en te trompant, en offrant à tes yeux et à tes caresses du vermillon au lieu de ma peau avec son teint naturel."

(6Pour moi, répond'elle, j'aimerais bien mieux me serrer contre toi que contre du verrmillon, voir ton teint plutôt que de l'incarnat, voir dans tes yeux l'éclat de ta santé plutôt que le fard qui les soulignerait. (7) Eh bien, moi aussi, crois-le, dit Ischomaque,  ma femme,  je ne trouve pas plus d'agrément dans la céruse ou l'orcanète que dans ton propre teint : les dieux ont fait  les chevaux la chose la plus agréable du monde pour les chevaux,  les bestiaux pour les bestiaux,  les moutons pour les moutons,  de même les hommes  ne trouvent rien de plus agréable que le corps de l'homme  sans aucun artifice.

(8) Ces supercheries pourraient peut-être tromper des étangersqui ne peuvent les percer à jour, mais quand des gens vivent toujours ensemble, ils doivent nécessairement se laisser prendre s'ils essaient de se tromper mutuellement : ou bien on est surpris au saut du lit avant de s'être préparé, ou bien on est confondu de supercherie, parce qu'on s'est mis en sueur, ou bien encore on est mis à l'épreuve par les larmes, ou bien on apparaît tout d'un coup tel qu'on est, au sortir du bain.
                                                        trad. Pierre Chantraine; éd. les belles lettres

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ἐντρίϐω : j'enduis, je frotte.
ἐντετριμμένος ψιμυθίῳ, Xén. Œc. 10, 2 : couvert de fard.
ὅπως λευκοτέρα ἔτι δοκοίη εἶναι ἢ ἦν : afin de paraître plus blanche qu'elle ne l'était.



                                                                                     






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Le vaniteux




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Ἡ δὲ μικροφιλοτιμία δόξει εἶναι ὄρεξις τιμῆς ἀνελεύθερος, ὁ δὲ μικροφιλότιμος τοιοῦτός τις, οἷος σπουδάσαι ἐπὶ δεῖπνον κληθεὶς παρ´ αὐτὸν τὸν καλέσαντα κατακείμενος δειπνῆσαι. καὶ τὸν υἱὸν ἀποκεῖραι ἀπαγαγὼν εἰς Δελφούς, καὶ ἐπιμεληθῆναι δέ, ὅπως αὐτῷ ὁ ἀκόλουθος Αἰθίοψ ἔσται. καὶ ἀποδιδοὺς μνᾶν ἀργυρίου καινὸν ποιῆσαι ἀποδοῦναι. καὶ κολοιῷ δὲ ἔνδον τρεφομένῳ δεινὸς κλιμάκιον πρίασθαι καὶ ἀσπίδιον χαλκοῦν ποιῆσαι, ὃ ἔχων ἐπὶ τοῦ κλιμακίου ὁ κολοιὸς πηδήσεται. καὶ βοῦν θύσας τὸ προμετωπίδιον ἀπαντικρὺ τῆς εἰσόδου προσπατταλεῦσαι στέμμασι μεγάλοις περιδήσας, ὅπως οἱ εἰσιόντες ἴδωσιν, ὅτι βοῦν ἔθυσε. καὶ πομπεύσας δὲ μετὰ τῶν ἱππέων τὰ μὲν ἄλλα πάντα δοῦναι τῷ παιδὶ ἀπενεγκεῖν οἴκαδε, ἀναϐαλλόμενος δὲ θοἰμάτιον ἐν τοῖς μύωψι κατὰ τὴν ἀγορὰν περιπατεῖν. καὶ κυναρίου δὲ Μελιταίου τελευτήσαντος αὐτῷ, μνῆμα ποιῆσαι καὶ στηλίδιον, ποιήσας ἐπιγράψαι· Κλάδος Μελιταῖος. καὶ ἀναθεὶς δακτυλίδιον χαλκοῦν ἐν τῷ Ἀσκληπιείῳ τοῦτο ἐκτρίϐειν, στεφανοῦν, ἀλείφειν ὁσημέραι. ἀμέλει δὲ καὶ διοικήσασθαι παρὰ τῶν συμπρυτάνεων, ὅπως ἀπαγγείλῃ τῷ δήμῳ τὰ ἱερά, καὶ παρεσκευασμένος λαμπρὸν ἱμάτιον καὶ ἐστεφανωμένος παρελθὼν εἰπεῖν· Ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, ἐθύομεν οἱ πρυτάνεις τὰ ἱερὰ τῇ Μητρὶ τῶν θεῶν, τὰ γαλάξια, καὶ τὰ ἱερὰ καλά, καὶ ὑμεῖς δέχεσθε τὰ ἀγαθά. καὶ ταῦτα ἀπαγγείλας ἀπιὼν διηγήσασθαι οἴκαδε τῇ ἑαυτοῦ γυναικί, ὡς καθ´ ὑπερϐολὴν εὐημέρει.
                                                                                                                                                                     Théophraste, Caractères, 21


Ce type d'ambition apparaîtra comme un vil appétit d'honneurs, et le faiseur est du genre que voici. Est-il prié à dîner, il s'empresse de s'installer aux côtés de son hôte lui-même. Pour faire couper les cheveux à son fils, il le conduit à Delphes et veille à avoir dans sa suite un Éthiopien. A-t-il à rembourser une mine d'argent, il rembourse en monnaie toute neuve. Pour son geai apprivoisé, il est homme à acheter une échelle miniature et à faire fabriquer un petit bouclier de bronze, que l'oiseau porte pour sauter sur l'échelle. A-t-il sacrifié un bœuf, il cloue face à sa porte d'entrée la peau de la tête entourée de larges bandelettes, afin que ceux qui entrent chez lui voient bien qu'il a sacrifié un bœuf ! S'il a pris part à la procession avec les cavaliers, il donne à son esclave l'ensemble de son équipement à rapporter à la maison, mais garde tout de même son manteau retroussé et ses éperons pour déambuler sur le marché. Son bichon de Malte étant mort, il lui fait faire un monument et une petite stèle avec l'inscription "Greffon de Malte". A-t-il dédié, dans le sanctuaire d'Asclepios, un petit doigt de bronze, il l'astique, le couronne, l'oint chaque jour d'huile parfumée. À n'en pas douter, il s'arrange avec les prytanes ses collègues pour faire lui-même au peuple l'annonce du sacrifice et, s'étant procuré un manteau d'un blanc éclatant, la tête couronnée, il s'avance en disant : "Citoyens d'Athènes, nous, vos prytanes, avons offert à la Mère des dieux le sacrifice des Galaxies; le sacrifice est favorable, recevez-en, vous autres, le bienfait !" Après cette annonce, il se retire et rentre à la maison raconter à sa femme comme il a supérieurement bien réussi.


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μικροφιλοτιμία, ας (ἡ) : ambition mise dans de toutes petites choses.
μικροφιλότιμος, ος, ον : ambitieux de toutes petites choses.
τοιοῦτός  οἷος σπουδάσαι : il est homme à s'empresser.
ἀκόλουθος, ος, ον : compagnon de route, qui suit, qui accompagne, qui est à sa suite.
ὅπως αὐτῷ ὁ ἀκόλουθος Αἰθίοψ ἔσται : de façon à avoir dans sa suite un Éthiopien.
ἀπαγγέλλω (futur ἀπαγγελῶ, aor. ἀπήγγειλα, parf. ἀπήγγελκα) : apporter une réponse; revenir annoncer.
εὐημερέω-ῶ : couler des jours heureux; avoir du bonheur ou de la chance, prospérer, réussir.
διηγέομαι-οῦμαι : exposer en détail, raconter, décrire
ταῦτα ἀπαγγείλας ἀπιὼν διηγήσασθαι οἴκαδε τῇ ἑαυτοῦ γυναικί, ὡς καθ´ ὑπερϐολὴν εὐημέρει : après cette annonce, il se retire et rentre à la maison raconter à sa femme comme il a supérieurement bien réussi.

 







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Discours invitant les jeunes à imiter chez les païens des traits de vertu évangélique.         
         





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[7, 1]  Τοὺς μὲν οὖν τῶν λόγων οἳ τὰς τῶν καλῶν ἔχουσιν ὑποθήκας, οὕτως ἀποδεχόμεθα. Ἐπειδὴ δὲ καὶ πράξεις σπουδαῖαι τῶν παλαιῶν ἀνδρῶν ἢ μνήμης ἀκολουθίᾳ πρὸς ἡμᾶς διασώζονται, ἢ ποιητῶν ἢ συγγραφέων φυλαττόμεναι λόγοις, μηδὲ τῆς ἐντεῦθεν ὠφελείας ἀπολειπώμεθα. (2) Οἷον, ἐλοιδόρει τὸν Περικλέα τῶν ἐξ ἀγορᾶς τις ἀνθρώπων· ὁ δὲ οὐ προσεῖχε· καὶ εἰς πᾶσαν διήρκεσαν τὴν ἡμέραν, ὁ μὲν ἀφειδῶς πλύνων αὐτὸν τοῖς ὀνείδεσιν, ὁ δὲ οὐ μέλον αὐτῷ. (3) Εἶτα, ἑσπέρας ἤδη καὶ σκότους, ἀπαλλαττόμενον μόλις ὑπὸ φωτὶ παρέπεμψε Περικλῆς, ὅπως αὑτῷ μὴ διαφθαρείη τὸ πρὸς φιλοσοφίαν γυμνάσιον. (4) Πάλιν τις Εὐκλείδῃ τῷ Μεγαρόθεν παροξυνθεὶς θάνατον ἠπείλησε καὶ ἐπώμοσεν· ὁ δὲ ἀντώμοσεν ἦ μὴν ἱλεώσασθαι αὐτὸν καὶ παύσειν χαλεπῶς πρὸς αὐτὸν ἔχοντα. (5) Πόσου ἄξιον τῶν τοιούτων τι παραδειγμάτων εἰσελθεῖν τὴν μνήμην, ἀνδρὸς ὑπὸ ὀργῆς ἤδη κατεχομένου; Τῇ τραγῳδίᾳ γὰρ οὐ πιστευτέον ἁπλῶς λεγούσῃ ἐπ´ ἐχθροὺς θυμὸς ὁπλίζει χέρα, ἀλλὰ μάλιστα μὲν μηδὲ διανίστασθαι πρὸς θυμὸν τὸ παράπαν, εἰ δὲ μὴ ῥᾴδιον τοῦτο, ἀλλ´ ὥσπερ χαλινὸν αὐτῷ τὸν λογισμὸν ἐμϐάλλοντας, μὴ ἐᾶν ἐκφέρεσθαι περαιτέρω.

(6) Ἐπαναγάγωμεν δὲ τὸν λόγον αὖθις πρὸς τὰ τῶν σπουδαίων πράξεων παραδείγματα. Ἔτυπτέ τις τὸν Σωφρονίσκου Σωκράτην εἰς αὐτὸ τὸ πρόσωπον ἐμπεσὼν ἀφειδῶς· ὁ δὲ οὐκ ἀντῆρεν, ἀλλὰ παρεῖχε τῷ παροινοῦντι τῆς ὀργῆς ἐμφορεῖσθαι, ὥστε ἐξοιδεῖν ἤδη καὶ ὕπουλον αὐτῷ τὸ πρόσωπον ὑπὸ τῶν πληγῶν εἶναι. (7) Ὡς δ´ οὖν ἐπαύσατο τύπτων, ἄλλο μὲν οὐδὲν ὁ Σωκράτης ποιῆσαι, ἐπιγράψαι δὲ τῷ μετώπῳ λέγεται, ὥσπερ ἀνδριάντι τὸν δημιουργόν, ὁ δεῖνα ἐποίει· καὶ τοσοῦτον ἀμύνασθαι. Ταῦτα σχεδὸν εἰς ταὐτὸν τοῖς ἡμετέροις φέροντα πολλοῦ ἄξιον εἶναι μιμήσασθαι τοὺς τηλικούτους φημί. (8) Τουτὶ μὲν γὰρ τὸ τοῦ Σωκράτους ἀδελφὸν ἐκείνῳ τῷ παραγγέλματι, ὅτι τῷ τύπτοντι κατὰ τῆς σιαγόνος καὶ τὴν ἑτέραν παρέχειν προσῆκε, τοσούτου δεῖν ἀπαμύνασθαι, τὸ δὲ τοῦ Περικλέους ἢ τὸ Εὐκλείδου τῷ τοὺς διώκοντας ὑπομένειν καὶ πρᾴως αὐτῶν τῆς ὀργῆς ἀνέχεσθαι, καὶ τῷ τοῖς ἐχθροῖς εὔχεσθαι τὰ ἀγαθά, ἀλλὰ μὴ ἐπαρᾶσθαι. (9) Ὡς ὅ γε ἐν τούτοις προπαιδευθεὶς οὐκ ἔτ´ ἂν ἐκείνοις ὡς ἀδυνάτοις διαπιστήσειεν. (10) Οὐδ´ ἂν παρέλθοιμι τὸ τοῦ Ἀλεξάνδρου, ὃς τὰς θυγατέρας Δαρείου αἰχμαλώτους λαϐὼν θαυμαστόν τι οἷον τὸ κάλλος παρέχειν μαρτυρουμένας οὐδὲ προσιδεῖν ἠξίωσεν, αἰσχρὸν εἶναι κρίνων τὸν ἄνδρας ἑλόντα γυναικῶν ἡττηθῆναι. (11) Τουτὶ γὰρ εἰς ταὐτὸν ἐκείνῳ φέρει, ὅτι ὁ ἐμϐλέψας πρὸς ἡδονὴν γυναικί, κἂν μὴ τῷ ἔργῳ τὴν μοιχείαν ἐπιτελέσῃ, ἀλλὰ τῷ γε τὴν ἐπιθυμίαν τῇ ψυχῇ παραδέξασθαι, οὐκ ἀφίεται τοῦ ἐγκλήματος. (12) Τὸ δὲ τοῦ Κλεινίου, τῶν Πυθαγόρου γνωρίμων ἑνός, χαλεπὸν πιστεῦσαι ἀπὸ ταὐτομάτου συμϐῆναι τοῖς ἡμετέροις, ἀλλ´ οὐχὶ μιμησαμένου σπουδῇ. Τί δὲ ἦν ὃ ἐποίησεν ἐκεῖνος; Ἐξὸν δι´ ὅρκου τριῶν ταλάντων ζημίαν ἀποφυγεῖν, ὁ δὲ ἀπέτισε μᾶλλον ἢ ὤμοσε, καὶ ταῦτα εὐορκεῖν μέλλων, ἀκούσας ἐμοὶ δοκεῖν τοῦ προστάγματος τὸν ὅρκον ἡμῖν ἀπαγορεύοντος.
                                                                                                                                    Saint Basile, Homélie aux jeunes gens, VII.



(7, 1) Par conséquent, parmi les livres, ceux qui contiennent les préceptes moraux, nous les accueillerons dans cet esprit. Puisque que des conduites vertueuses des Anciensont été conservées jusqu'à nous, soit par la perpétuation  de leur souvenir,  soit parce qu'elles ont été gardées par les livres des poètes et des prosateurs, ne laissons pas de côté non plus le profit qui s'y trouve. (2) Par exemple, un homme de l'agora injuria Périclès, sans que lui n'y prêtât attention; et tout au long de la journée, ils continuèrent, lui à inonder continuellement Périclès de reproches, et Périclès à ne pas s'en soucier. (3) Puis, alors que le soir était venu et avec lui l'obscurité, et qu'à grand-peine l'homme finissait par s'en aller, Périclès le fit escorter à la lueur d'une torche, afin que ne soit pas réduit à néant son enseignement à la philosophie. (4) Autre exemple : un homme irrité contre Euclide de Mégare l'avait menacé de mort et avait juré de mettre son projet à exécution; Euclide jura à son tour, de l'apaiser et de lui faire mettre un terme à ses méchantes dispositions envers lui. (5) Quel grand avantage il y a à ce que de tels exemples se présentent à la mémoire de l'homme déjà pris de colère !  Car il ne faut pas croire la tragédie quand elle dit sans détour :

"Au contraire, il ne faut pas du tout nous laisser entraîner à la colère, et, si ce n'est pas facile, il faut du moins ne pas la laisser s'élancer trop loin. (6) Mais ramenons le discours encore une fois aux exemples de conduites vertueuses. Quelqu'un frappait en plein visage le fils de Sophronisque, Socrate, en faisant pleuvoir les coups sans répit. Lui, sans faire de résistance, laissait l'ivroge se rassasier de colère, jusqu'à en avoir le visage tuméfié et meutri sous les coups.
(7) Lorsque l'homme eut cessé de frapper, Socrate ne fit rien, dit-on, sinon écrire sur son front comme l'artisan sur une statue : "C'est Untel qui l'a fait". Et ce fut là toute sa vengeance. Ces exemples qui vont à peu près dans le même sens  que nos préceptes, j'affirme qu'il est d'une grande valeur que les gens de votre âge les imitent. (8) Car l'exemple de Socrate dont je viens de parler est analogue au précepte qui dit que, à celui qui frappe sur la  joue, il conviendrait de tendre l'autre joue aussi, bien loin d'en tirer vengeance, et l'exemple de Périclès ou d'Euclide l'est au précepte d'endurer les persécuteurs et de supporter leur colère avec douceur, ainsi qu'au précepte de prier pour le bien des ennemis et de ne pas les maudire. (9) Car celui qui est éduqué préalablement par le biais de ces exemples ne saurait plus se défier de nos préceptes, comme de choses impossibles. (10) Et je ne voudrais pas laisser de côté non plus l'exemple d'Alexandre : alors qu'il avait fait prisonnières les filles de Darius, connues pour leur beauté admirable entre toutes, il ne jugea pas bien ne serait-ce que de les voir, estimant honteux que celui qui l'a emporté sur des hommes soit vaincu par des femmes. (11) Cet exemple va dans le même sens que : "Celui qui a jeté les yeux sur une femme avec concupiscence, même s'il n'a pas accompli l'adultère en acte, n'échappe pas pour autant à l'accusation, pour avoir accueilli le désir en son âme. (12) Quant à l'exemple de Clinias, un des disciples de Pythagore, il est difficile de croire qu'il rencontre nos préceptes par le fait du hasard, et non pas parce qu'ils les a imités intentionnellement. Qu'a-t-il donc fait, ce personnage ? Alors qu'il pouvait éviter une amende de trois talents grâce à un serment, il préféra, lui, payer plutôt que de jurer, quand bien même il était en mesure de jurer la vérité, parce qu'il avait entendu, me semble-t-il, le commandement qui nous interdit le serment.
                           trad. F. Boulenger; éd. les belles lettres

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τοὺς μὲν οὖν τῶν λόγων οἳ τὰς τῶν καλῶν ἔχουσιν ὑποθήκας : (nous devons donc admettre) les discours qui renferment les bonnes maximes.
πρᾶξις, εως (ἡ) : action, le fait d’agir; exécution, accomplissement.
σπουδαῖος, α, ον : ardent, actif; sérieux, honnête; important;  fait avec zèle, avec soin.
πράξεις σπουδαῖαι τῶν παλαιῶν ἀνδρῶν : les actions vertueuses des anciens personnages.
Ἐπειδὴ δὲ καὶ πράξεις σπουδαῖαι τῶν παλαιῶν ἀνδρῶν ἢ μνήμης ἀκολουθίᾳ πρὸς ἡμᾶς διασώζονται, ἢ ποιητῶν ἢ συγγραφέων φυλαττόμεναι λόγοις, μηδὲ τῆς ἐντεῦθεν ὠφελείας ἀπολειπώμεθα : mais puisqu'aussi des conduites vertueuses des Anciens ont été conservées jusqu'à nous, soit par le perpétuation de leur souvenir, soit parce qu'elles ont été gardées par les livres des poètes et des prosateurs, ne laissons pas de côté non plus le profit qui s'y trouve.
διασῴζω (futur διασώσω, etc.)  (διά, avec idée de séparation) : sauver en tirant de (d’un danger; de la mort, etc.);  (διά, avec idée de continuité) conserver jusqu'au bout, conserver fidèlement.
ἀκολουθία, ας (ἡ) : suite, cortège de serviteurs, de gens, etc.; suite, succession, ordre; suite, conséquence; suite naturelle, conformité, analogie..
τῶν ἐξ ἀγορᾶς τις ἀνθρώπων : un homme de l'agora, un misérable.
Ταῦτα σχεδὸν εἰς ταὐτὸν τοῖς ἡμετέροις φέροντα πολλοῦ ἄξιον εἶναι μιμήσασθαι τοὺς τηλικούτους φημί : ces exemples, qui vont presque dans le même sens que nos saintes Ecritures, je prétends qu'ils méritent bien que des jeunes de votre âge les imitent.
τις Εὐκλείδῃ τῷ Μεγαρόθεν παροξυνθεὶς θάνατον ἠπείλησε : un homme irrité contre Euclide de Mégare, avait juré qu'il lui arracherait la vie.
ἀπειλέω-ῶ (imparf. ἠπείλουν, futur ἀπειλήσω, aor. ἠπείλησα, parf. ἠπείληκα) : repousser de l’assemblée, repousser, acculer; repousser avec menace, menacer.
παροξύνω : aiguiser contre; exciter, pousser à; iriter; cf. paroxysme.
παροξυνθείς : irrité.
πρᾴως adv. : avec douceur, avec calme.
πρᾴως αὐτῶν τῆς ὀργῆς ἀνέχεσθαι : souffrir avec douceur leur colère.
moyen ἀνέχομαι (imparf. ἠνειχόμην; futur ἀνέξομαι, rar. ἀνασχήσομαι; aor.2 ἠνεσχόμην, rar. ἀνεσχόμην) : tenir droit, tenir ferme, d’où soutenir, supporter avec constance.
cf. souffre et abstiens-toi : sustine et abstine : ἀνέχου καὶ ἀπέχου.
τὸ δὲ τοῦ Περικλέους ἢ τὸ Εὐκλείδου τῷ τοὺς διώκοντας ὑπομένειν καὶ πρᾴως αὐτῶν τῆς ὀργῆς ἀνέχεσθαι : l'exemple de Périclès ou d'Euclide l'est au précepte d'endurer les persécuteurs et de supporter leur colère avec douceur. ---- cf. l'Evangile.
ὑπομένω (futur ὑπομενῶ, aor. ὑπέμεινα, etc.) : rester en arrière; rester là, demeurer, séjourner; supporter, endurer.
τοὺς διώκοντας ὑπομένειν : supporter ceux qui nous persécutent.
περαίτερος, α, ον : qui va au delà de.






   
                                                                    


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Le cantique de l'homme
 




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[1, 16] εἰ γὰρ νοῦν εἴχομεν, ἄλλο τι ἔδει ἡμᾶς ποιεῖν καὶ κοινῇ καὶ ἰδίᾳ ἢ ὑμνεῖν τὸ θεῖον καὶ εὐφημεῖν καὶ ἐπεξέρχεσθαι τὰς χάριτας; οὐκ ἔδει καὶ σκάπτοντας καὶ ἀροῦντας καὶ ἐσθίοντας ᾄδειν τὸν ὕμνον τὸν εἰς τὸν θεόν; ‘μέγας ὁ θεὸς, ὅτι ἡμῖν παρέσχεν ὄργανα ταῦτα δι´ ὧν τὴν γῆν ἐργασόμεθα· μέγας ὁ θεός, ὅτι χεῖρας δέδωκεν, ὅτι κατάποσιν, ὅτι κοιλίαν, ὅτι αὔξεσθαι λεληθότως, ὅτι καθεύδοντας ἀναπνεῖν. ταῦτα ἐφ´ ἑκάστου ἐφυμνεῖν ἔδει καὶ τὸν μέγιστον καὶ θειότατον ὕμνον ἐφυμνεῖν, ὅτι τὴν δύναμιν ἔδωκεν τὴν παρακολουθητικὴν τούτοις καὶ ὁδῷ χρηστικήν.

τί οὖν; ἐπεὶ οἱ πολλοὶ ἀποτετύφλωσθε, οὐκ ἔδει τινὰ εἶναι τὸν ταύτην ἐκπληροῦντα τὴν χώραν καὶ ὑπὲρ πάντων ᾄδοντα τὸν ὕμνον τὸν εἰς τὸν θεόν; τί γὰρ ἄλλο δύναμαι γέρων χωλὸς εἰ μὴ ὑμνεῖν τὸν θεόν; εἰ γοῦν ἀηδὼν ἤμην, ἐποίουν τὰ τῆς ἀηδόνος, εἰ κύκνος, τὰ τοῦ κύκνου. νῦν δὲ λογικός εἰμι· ὑμνεῖν με δεῖ τὸν θεόν. τοῦτό μου τὸ ἔργον ἐστίν, ποιῶ αὐτὸ οὐδ´ ἐγκαταλείψω τὴν τάξιν ταύτην, ἐφ´ ὅσον ἂν διδῶται, καὶ ὑμᾶς ἐπὶ τὴν αὐτὴν ταύτην ᾠδὴν παρακαλῶ.
                                                                                                                                                            Arrien, les entretiens d'Epictète, livre 1


Car, si nous étions intelligents, quelle autre chose devrions-nous faire en public aussi bien qu'en privé, sinon chanter la divinité, la célébrer, parcourir en esprit la suite de ses bienfaits ? Ne devrions-nous pas, en bêchant, en labourant, en mangeant, chanter l'hymne en l'honneur de Dieu : " Dieu est grand, parce qu'il nous a fourni ces outils qui permettent de travailler la terre ! Dieu est grand, parce qu'il nous a donné des mains, un gosier, un ventre, parce qu'il nous a donné de grandir sans nous en apercevoir et de respirer tout en dormant ? Voilà ce qu'en toute occasion nous devrions chanter, en particulier chanter l'hymne le plus grand et le plus divin, parce qu'il nous a donné la faculté capable de comprendre ces choses et d'en user avec méthode.

Que conclure ? puisque, pour la plupart, vous restez aveugles, ne fallait-il pas  vous êtes aveugles, vous le grand nombre, ne fallait-il pas qu'il y ait quelqu'un pour occuper votre place et pour chanter, au nom de tous, l'hymne en l'honneur de Dieu ? Que puis-je bien faire d'autre, moi, vieillard boiteux, sinon de chanter Dieu ? Bien sûr, si j'étais rossignol, je ferais le métier de rossignol; si j'étais cygne, celui de cygne. Mais je suis un être raisonnable : je dois célébrer Dieu. Voilà quelle est ma tâche; je l'accomplis et je ne veux pas déserter ce poste-là, aussi longtemps qu'il me sera  permis; et je vous exhorte à chanter ce même chant.
                                                                                                                  trad. Poulain et Lefaure; Exercices grecs; éd. J de Gigord.

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Les chrétiens dans le monde







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Χριστιανοί ἐπὶ γῆς διατρίϐουσιν, ἀλλʹ ἐν οὐρανῴ πολιτεύονται. Πείθονται τοῖς ὠρισμένοις νόμοις, καὶ τοῖς ἰδίοις βίοις νικῶσι τοὺς νόμους.  Ἀγαπῶσι πάντας, καὶ ὑπὸ πάντων διώκονται. Ἀγνοοῦνται, καὶ κατακρίνονται· θανατοῦνται, καὶ  ζωοποιοῦνται. Πτωχεύουσι, καὶ πλουτίζουσι πολλούς·  πάντων ὑστεροῦνται, καὶ ἑν πᾶσι περισσεύοισιν. Ἀντιμοῦνται καὶ ἐν ταῖς ἀτιμίαις δοξάζονται· βλασφημοῦνται, καὶ δικαιοῦνται. Λοιδοροῦνται καὶ εὐλογοῦσιν· ὑϐρίζονται καὶ τιμῶσιν. Ἀγαθοποιοῦντες ὡς κακοὶ κολαζόμενοι χαίροισιν ὡς ζωσποιούμονοι. Ἀπλῶς δʹεἰπεῖν ὅπερ ἐστὶν ἐν σώματι ψυχή, τοῦτʹ εἰσὶν ἐν κόσμῳ Χριστιανοί. Ἔσπαρται κατὰ πάντων τῶν τοῦ σώματος μελῶν ἡ ψυχή, καὶ Χριστιανοὶ κατὰ τὰς τοῦ κόσμου πόλεις. Οἰκεῖ μὲν ἐν τῷ σώματι ψυχὴ, οὐκ ἔστι δὲ ἐκ τοῦ σώματος· καὶ Χριστιανοὶ ἐν κόσμῳ οίκοῦσιν, οὐκ εἰσὶ δὲ ἐκ τοῦ κόσμου.  
                                                                                                                                                                             De la lettre à Diognète.



Les chrétiens passent leur vie sur terre, mais c'est dans le ciel qu'est leur cité. Ils obéissent aux lois établies, mais par leur manière de vivre ils l'emportent sur les lois. Ils aiment tous les hommes et tous les persécutent. On les ignore et on les condamne; on les met à mort et ils y gagne la vie. Ils sont pauvres et ils font bien des riches; ils manquent de tout et ils ont tout en abondance. On les méprise et, dans ce mépris, ils trouvent leur gloire; on les calomnie et ils sont justifiés. On les insulte et ils bénissent; on les outrage et ils honorent.  Ils font du bien et on les châtie comme des méchants; et des châtiments ils se réjouissent, comme s'ils y trouvaient la vie. Pour le dire d'un mot, ce que l'âme est dans le corps, les chrétiens le sont dans le monde. L'âme est disséminée dans tous les membres du corps, et les chrétiens dans les cités du monde. l'âme a beau habiter dans le corps, elle n'est pas du corps; les chrétiens eux aussi habitent dans le monde, mais ils ne sont pas du monde.
                                                                                                                                  trad. Poulain et Lefaure; Exercices grecs; éd. J de Gigord.

                                                                                                                                 Voir hors site le  Vatican
                                                                                                                                 Voir hors site evangeliser. net
                                                                                                                                 Voir autre site


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πολιτεύω (futur πολιτεύσω, aor. ἐπολίτευσα, parf. inus. ; passif aor. ἐπολιτεύθην, parf. πεπολίτευμαι) : être citoyen, vivre comme citoyen; avoir les droits de citoyen; participer aux affaires publiques, gouverner l’État.
ὡρισμένος, part. parf. passif d’ὁρίζω.
ὁρίζω (impf. ὥριζον, futur ὁρίσω, aor. ὥρισα, parf. ὥρικα, passif futur ὀρισθήσομαι, aor. ὡρίσθην, parf. ὥρισμαι, pl. q. parf. ὡρίσμην) : limiter, borner, fixer les bornes ou la limite.
Πείθονται τοῖς ὠρισμένοις νόμοις, καὶ τοῖς ἰδίοις βίοις νικῶσι τοὺς νόμους : Ils obéissent aux lois établies, mais par leur manière de vivre ils l'emportent sur les lois.
ἀγνοέω-ἀγνοῶ (imparf. ἠγνόουν, futur ἀγνοήσω, aor. ἠγνόησα; passif aor. ἠγνοήθην, parf. ἠγνόημαι) : ne pas connaître, ignorer.
Ἀγνοοῦνται, καὶ κατακρίνονται : on les ignore et on les condamne.



 
1. Χριστιανοὶ γὰρ οὔτε γῇ οὔτε φωνῇ οὔτε ἔσθεσι διακεκριμένοι τῶν λοιπῶν εἰσιν ἀνθρώπων. 2. οὔτε γάρ που πόλεις ἰδίας κατοικοῦσιν οὔτε διαλέκτῳ τινὶ παρηλλαγμένῃ χρῶνται οὔτε βίον παράσημον ἀσκοῦσιν. 3. οὐ μὴν ἐπινοίᾳ τινὶ καὶ φροντίδι πολυπραγμόνων ἀνθρώπων μάθημα τοῦτ' αὐτοῖς ἐστὶν εὑρημένον, οὐδὲ δόγματος ἀνθρωπίνου προεστᾶσιν, ὥσπερ ἔνιοι. 4. κατοικοῦντες δὲ πόλεις ἑλληνίδας τε καὶ βαρβάρους ὡς ἕκαστος ἐκληρώθη, καὶ τοῖς ἐγχωρίοις ἔθεσιν ἀκολουθοῦντες ἔν τε ἐσθῆτι καὶ διαίτῃ καὶ τῷ λοιπῷ βίῳ θαυμαστὴν καὶ ὁμολογουμένως παράδοξον ἐνδείκνυνται τὴν κατάστασιν τῆς ἑαυτῶν πολιτείας. 5. πατρίδας οἰκοῦσιν ἰδίας, ἀλλ' ὡς πάροικοι· μετέχουσι πάντων ὡς πολῖται, καὶ πανθ' ὑπομένουσιν ὡς ξένοι· πᾶσα ξένη πατρίς ἐστιν αὐτῶν, καὶ πᾶσα πατρὶς ξένη. 6. γαμοῦσιν ὡς πάντες, τεκνογονοῦσιν· ἀλλ' οὐ ῥίπτουσι τὰ γεννώμενα. 7. τράπεζαν κοινὴν παρατίθενται, ἀλλ' οὐ κοίτην. 8. ἐν σαρκὶ τυγχάνουσιν, ἀλλ' οὐ κατὰ σάρκα ζῶσιν. 9. ἐπὶ γῆς διατρίβουσιν, ἀλλ' ἐν οὐρανῷ πολιτεύονται. 10. πείθονται τοῖς ὡρισμένοις νόμοις, καὶ τοῖς ἰδίοις βίοις νικῶσι τοὺς νόμους. 11. ἀγαπῶσι πάντας, καὶ ὑπὸ πάντων διώκονται. 12.  ἀγνοοῦνται, καὶ κατακρίνονται· θανατοῦνται, καὶ ζωοποιοῦνται. 13. πτωχεύουσι, καὶ πλουτίζουσι πολλούς· πάντων ὑστεροῦνται, καὶ ἐν πᾶσι περισσεύουσιν. 14. ἀτιμοῦνται, καὶ ἐν ταῖς ἀτιμίαις δοξάζονται· βλασφημοῦνται, καὶ δικαιοῦνται. 15. λοιδοροῦνται καὶ εὐλογοῦσιν· ὑβρίζονται, καὶ τιμῶσιν. 16. ἀγαθοποιοῦντες ὡς κακοὶ κολάζονται· κολαζόμενοι χαίρουσιν ὡς ζωοποιούμενοι. 17. ὑπὸ Ἰουδαίων ὡς ἀλλόφυλοι πολεμοῦνται, καὶ ὑπὸ Ἑλλήνων διώκονται, καὶ τὴν αἰτίαν τῆς ἔχθρας εἰπεῖν οἱ μισοῦντες οὐκ ἔχουσιν.

VI. 1. Ἁπλῶς δ' εἰπεῖν, ὅπερ ἐστὶν ἐν σώματι ψυχή, τοῦτ' εἰσὶν ἐν κόσμῳ Χριστιανοί. 2. ἔσπαρται κατὰ πάντων τῶν τοῦ σώματος μελῶν ἡ ψυχή, καὶ Χριστιανοὶ κατὰ τὰς τοῦ κόσμου πόλεις. 3. οἰκεῖ μὲν ἐν τῷ σώματι ψυχή, οὐκ ἔστι δὲ ἐκ τοῦ σώματος· καὶ Χριστιανοὶ ἐν κόσμῳ οἰκοῦσιν, οὐκ εἰσὶ δὲ ἐκ τοῦ κόσμου. 4. ἀόρατος ἡ ψυχὴ ἐν ὁρατῷ φρουρεῖται τῷ σώματι· καὶ Χριστιανοὶ γινώσκονται μὲν ὄντες ἐν τῷ κοσμῷ, ἀόρατος δὲ αὐτῶν ἡ θεοσέβεια μένει. 5. μισεῖ τὴν ψυχὴν ἡ σὰρξ καὶ πολεμεῖ μηδὲν ἀδικουμένη, δίοτι ταῖς ἡδοναῖς κωλύεται χρῆσθαι· μισεῖ καὶ Χριστιανοὺς ὁ κόσμος μηδὲν ἀδικούμενος, ὅτι ταῖς ἡδοναῖς ἀντιτάσσονται. 6. ἡ ψυχὴ τὴν μισοῦσαν ἀγαπᾷ σάρκα καὶ τὰ μέλη· καὶ Χριστιανοὶ τοὺς μισοῦντας ἀγαπῶσιν. 7. ἐγκέκλεισται μὲν ἡ ψυχὴ τῷ σώματι, συνέχει δὲ αὐτὴ τὸ σῶμα· καὶ Χριστιανοὶ κατέχονται μὲν ὡς ἐν φρουρᾷ τῷ κόσμῳ, αὐτοὶ δὲ συνέχουσι τὸν κόσμον. 8.  ἀθάνατος ἡ ψυχὴ ἐν θνητῷ σκηνώματι κατοικεῖ· καὶ Χριστιανοὶ παροικοῦσιν ἐν φθαρτοῖς, τὴν ἐν οὐρανοῖς ἀφθαρσίαν προσδεχόμενοι. 9. κακουργουμένη σιτίοις καὶ ποτοῖς ἡ ψυχὴ βελτιοῦται· καὶ Χριστιανοὶ κολαζόμενοι καθ' ἡμέραν πλεονάζουσι μᾶλλον. 10. εἰς τοσαύτην αὐτοὺς τάξιν ἔθετο ὁ Θεός, ἣν οὐ θεμιτὸν αὐτοῖς παραιτήσασθαι.

VII. 1. Οὐ γὰρ ἐπίγειον, ὡς ἔφην, εὕρημα τοῦτ' αὐτοῖς παρεδόθη, οὐδὲ θνητὴν ἐπίνοιαν φυλάσσειν οὕτως ἀξιοῦσιν ἐπιμελῶς, οὐδὲ ἀνθρωπίνων οἰκονομίαν μυστηρίων πεπίστευνται. 2. ἀλλ' αὐτὸς ἀληθῶς ὁ παντοκράτωρ καὶ παντοκτίστης καὶ ἀόρατος θεός, αὐτὸς ἀπ' οὐρανῶν τὴν αλήθειαν καὶ τὸν λόγον τὸν ἅγιον καὶ ἀπερινόητον ἀνθρώποις ἐνίδρυσε καὶ ἐγκατεστήριξε ταῖς καρδίαις αὐτῶν· οὐ, καθάπερ ἄν τις εἰκάσειεν ἀνθρώποις ὑπηρέτην τινὰ πέμψας ἢ ἄγγελον ἢ ἄρχοντα ἤ τινα τῶν διεπόντων τὰ ἐπίγεια ἤ τινα τῶν πεπιστευμένων τὰς ἐν οὐρανοῖς διοικήσεις, ἀλλ' αὐτὸν τὸν τεχνίτην καὶ δημιουργὸν τῶν ὅλων, ᾧ τοὺς οὐρανοὺς ἔκτισεν, ᾧ τὴν θάλασσαν ἰδίοις ὅροις ἐνέκλεισεν, οὗ τὰ μυστήρια πιστῶς πάντα φυλάσσει τὰ στοιχεῖα, παρ' οὗ τὰ μέτρα τῶν τῆς ἡμέρας δρόμων ὁ ἥλιος εἴληφε φυλάσσειν, ᾧ πειθαρχεῖ σελήνη νυκτὶ φαίνειν κελεύοντι, ᾧ πειθαρχεῖ τὰ ἄστρα τῷ τῆς σελήνης ἀκολουθοῦντα δρόμῳ· ᾧ πάντα διατέτακται καὶ διώρισται καὶ ὑποτέτακται, οὐρανοὶ καὶ τὰ ἐν οὐρανοῖς, γῆ καὶ τὰ ἐν τῇ γῇ, θάλασσα καὶ τὰ ἐν τῇ θαλάσσῃ, πῦρ, ἀήρ, ἄβυσσος, τὰ ἐν ὕψεσι, τὰ ἐν βάθεσι, τὰ ἐν τῷ μεταξύ· τοῦτον πρὸς αὐτοὺς ἀπέστειλεν. 3. ἆρά γε, ὡς ἀνθρώπων ἄν τις λογίσαιτο, ἐπὶ τυραννίδι καὶ φόβῳ καὶ καταπλήξει; 4. οὐ μὲν οὖν· ἀλλ' ἐν ἐπιεικείᾳ καὶ πραΰτητι ὡς βασιλεὺς πέμπων υἱὸν βασιλέα ἔπεμψεν, ὡς θεὸν ἔπεμψεν, ὡς ἄνθρωπον πρὸς ἀνθρώπους ἔπεμψεν, ὡς σώζων ἔπεμψεν, ὡς πείθων, οὐ βιαζόμενος· βία γὰρ οὐ πρόσεστι τῷ Θεῷ. 5. ἔπεμψεν ὡς καλῶν, οὐ διώκων· ἔπεμψεν ὡς ἀγαπῶν, οὐ κρίνων. 6. πέμψει γὰρ αὐτὸν κρίνοντα, καὶ τίς αὐτοῦ τὴν παρουσίαν ὑποστήσεται;..............7...............παραβαλλομένους θηρίοις, ἵνα ἀρνήσωνται τὸν Κύριον, καὶ μὴ νικωμένους; 8. οὐχ ὁρᾷς ὅσῳ πλείονες κολάζονται, τοσούτῳ πλεονάζοντας ἄλλους; 9. ταῦτα ἀνθρώπου οὐ δοκεῖ τὰ ἔργα, ταῦτα δύναμίς ἐστι θεοῦ· ταῦτα τῆς παρουσίας αὐτοῦ δείγματα.

1
Tu veux donc savoir, illustre Diognète, quelle est la religion des chrétiens. Je te vois très préoccupé de ce désir. Tu leur demandes publiquement et avec le plus vif intérêt quel est le Dieu sur lequel ils fondent leur espoir, et quel est le culte qu'ils lui rendent ? Qui donc leur fait ainsi mépriser le monde et la mort, et leur inspire cet éloignement pour les fausses divinités des Grecs et pour les pratiques superstitieuses des Juifs ? D'où leur vient cet amour qu'ils ont les uns pour les autres ? Pourquoi ce nouveau culte, ces nouvelles mœurs n'ont-ils paru que de nos jours ?

J'approuve ton désir, Diognète, et je demande à Dieu, qui seul donne la parole et l'intelligence, de mettre dans ma bouche le langage le plus propre à changer ton cœur, et de te faire la grâce de m'écouter, de manière que celui qui te parle n'ait plus à s'affliger de ton sort.

2
Quand tu seras dégagé de tous les préjugés qui t'assiègent, et libéré du poids des habitudes qui t'égarent et présentent un obstacle à la vérité; enfin quand tu sera devenu un homme nouveau semblable à celui qui vient de naître, puisque de ton aveu la parole que tu vas entendre est nouvelle pour toi, considère des yeux de l'esprit et du corps quelle est la nature et la forme de ceux que tu appelles et que tu crois être des dieux.

L'un n'est-il pas fait d'une pierre semblable à celles que tu foules aux pieds, l'autre d'un cuivre qui n'a pas plus de valeur que celui dont on fait des récipients pour toute sorte d'utilisations ; celui-ci d'un bois qui se pourrit, celui-là d'un argent qui réclame la surveillance de l'homme par peur des voleurs; quelques uns d'un fer rongé par la rouille, plusieurs d'un argile qui n'a rien de plus remarquable que l'argile qui, par sa forme, sert aux emplois les plus bas ? Enfin ne sont-ils pas tous d'une matière corruptible, façonnée à l'aide du fer et du feu, ou par un sculpteur ou par un forgeron ou par un orfèvre ou par un potier ? Aucun de ces dieux avait-il une forme, une figure, avant de les avoir reçues des mains de l'ouvrier ? Tous les vases faits de la même matière ne peuvent-ils pas à l'instant devenir des dieux, s'il se rencontrent des mains habiles qui leur rendent ce service ; comme aussi les dieux que vous adorez ne peuvent-ils pas à leur tour, s'il plaît à l'ouvrier, devenir des vases semblables à ceux dont nous nous servons tous les jours ?
Tous ces dieux ne sont-ils pas sourds, ne sont-ils pas aveugles, inanimés, insensibles, incapables de se mouvoir ? Ne les voit-on pas se pourrir, se corrompre ? Et tels sont les dieux que tu sers, les dieux que tu adores ! Et vous, leurs adorateurs, vous leur devenez entièrement semblables ! Les chrétiens ne vous sont odieux que parce qu'ils refusent de reconnaître de pareilles divinités ; mais vous, qui vous courbez devant elles, ne les traitez-vous pas avec plus de mépris que ne le font les Chrétiens ? Plus que nous vous les raillez, vous les outragez. Celles qui ne sont que d'argile ou de bois, vous vous contentez de les adorer, vous ne leur faites par l'injure de leur donner des gardes ; mais pour les dieux d'argent, vous avez bien soin de les enfermer pendant la nuit, et de les faire surveiller de l'œil pendant le jour, de peur qu'on ne les enlève.
Les honneurs que vous leur rendez sont un vrai supplice pour eux, s'ils sont doués de sentiment ; mais s'ils en sont tout à fait privés, vous le faites trop voir par cette odeur de sang et de graisse qui s'exhale dans les sacrifices que vous leur offrez. Qui de vous la supporterait et se laisserait ainsi suffoquer ? Non, certainement, personne, à moins d'y être condamné, n'endurerait ce supplice, parce tout homme est doué de sentiment et de raison. Mais la pierre le subit, parce qu'elle est insensible. Ainsi donc, vous ne voulez laisser aucun doute sur l'insensibilité de vos dieux et voilà une des raisons qui vous empêchent de ramper en esclaves à leurs pieds !
J'en aurais bien d'autres à te donner, mais si celles-ci ne suffisent pas pour te convaincre, toutes celles que je pourrais ajouter deviendraient inutiles.

3
Je vais maintenant te dire en quoi notre culte diffère de celui des Juifs : c'est encore un point sur lequel tu désires ardemment t'instruire, si je ne me trompe.

Les Juifs, il est vrai, n'adorent pas ces idoles stupides, ils ne reconnaissent qu'un Dieu, ils le regardent comme le maître, l'arbitre de l'univers. Si cependant ils lui rendent un culte semblable à celui dont nous venons de parler, n'est-il pas évident qu'ils sont dans l'erreur ? Car les offrandes que les Grecs font à leurs dieux sourds et insensibles, offrandes folles et absurdes, les juifs les présentent à ce Dieu unique, s'imaginant qu'il en a besoin. N'est-ce pas de leur part une extravagance plutôt qu'un hommage digne de la majesté divine ? Est-il croyable que celui qui a fait le ciel et la terre et tout ce qu'ils renferment ; que celui qui fournit à tous ce dont nous avons besoin [nos besoins], ait besoin lui-même de ce qu'il accorde à ceux qui ont la prétention de lui en faire une sorte d'aumône ? Or, ceux qui par ce sang, cette fumée des victimes et leurs holocaustes pompeux, s'imaginent offrirent à Dieu des sacrifices qui lui soient agréables et qui l'honorent, et venir au secours de celui qui n'a besoin de rien, en quoi voulez-vous que je les distingue de ceux dont la folie rend avec tant de soin de semblables honneurs à des statues insensibles, qui ne comprennent rien à ces honneurs. [donc la lettre a été écrite avant la destruction du temple, puisque après, les sacrifices sanglants ont cessé].

4
Te parlerais-je des précautions minutieuses que prennent les Juifs sur le choix des viandes, de leur superstition sur l'observance du sabbat, de leur jactance à cause de leur circoncision, de l'hypocrisie de leurs jeûnes et de leurs cérémonies au retour des nouvelles lunes ; tout cela est si absurde, si peu digne d'être raconté, que tu peux te dispenser de l'apprendre, et je crois pouvoir t'en faire grâce.

Dans cette multitude d'êtres que Dieu a faits pour l'usage de l'homme, admettre les uns comme portant le caractère de la sagesse de leur auteur, rejeter les autres comme inutiles et superflus, n'est-ce pas un crime ?

 Se glorifier de la circoncision comme du sceau de l'élection divine, comme d'un signe qui atteste de la part de Dieu une prédilection toute particulière, n'est-ce pas une folie des plus ridicules ? Que dirai-je de cette attention continuelle à suivre le cours de la lune et des astres pour observer les jours et les mois, arranger à sa manière les plans de la sagesse divine, les révolutions des saisons, distinguer des jours de joie, des jours de deuil ; est-ce faire preuve de piété et non pas de délire ?
 Je t'en ai dit assez, je pense, pour vous montrer que c'est avec raison que les Chrétiens s'éloignent de l'imposture et de la vanité des idoles, de la superstition et de la jactance des Juifs ; mais le sublime mystère de leur culte tout divin, n'espérez pas l'apprendre d'une bouche mortelle.

5
Les Chrétiens ne sont distingués du reste des hommes ni par leurs pays, ni par leur langage, ni par leur manière de vivre ; ils n'ont pas d'autres villes que les vôtres, d'autre langage que celui que vous parlez ; rien de singulier dans leurs habitudes ; seulement ils ne se livrent pas à l'étude de vains systèmes, fruit de la curiosité des hommes, et ne s'attachent pas, comme plusieurs, à défendre des doctrines humaines. Répandus, selon qu'il a plu à la Providence, dans des villes grecques ou barbares, ils se conforment, pour le vêtement, pour la nourriture, pour la manière de vivre, aux usages qu'ils trouvent établis ; mais ils placent sous les yeux de tous l'étonnant spectacle de leur vie toute angélique et à peine croyable.
Ils habitent leur cités comme étrangers, ils prennent part à tout comme citoyens, ils souffrent tout comme voyageurs. Pour eux, toute région étrangère est une patrie, et toute patrie ici-bas est une région étrangère. Comme les autres, ils se marient, comme les autres, ils ont des enfants, seulement ils ne les abandonnent pas. Ils ont tous une même table, mais pas le même lit. Ils vivent dans la chair et non selon la chair. Ils habitent la terre et leur conversations est dans le ciel. Soumis aux lois établies, ils sont par leurs vies, supérieurs à ces lois. Ils aiment tous les hommes et tous les hommes les persécutent. Sans les connaître, on les condamne. Mis à mort, ils naissent à la vie. Pauvres, ils font des riches. Manquant de tout, ils surabondent. L'opprobre dont on les couvre devient pour eux une source de gloire ; la calomnie qui les déchire dévoile leur innocence. La bouche qui les outrage se voit forcée de les bénir, les injures appellent ensuite les éloges. Irréprochables, ils sont punis comme criminels et au milieu des tourments ils sont dans la joie comme des hommes qui vont à la vie. Les Juifs les regardent comme des étrangers et leur font la guerre. Les Grecs les persécutent, mais ces ennemis si acharnés ne pourraient dire la cause de leur haine.

6
Pour tout dire, en un mot, les chrétiens sont dans le monde ce que l'âme est dans le corps : l'âme est répandue dans toutes les parties du corps ; les chrétiens sont dans toutes les parties de la Terre ; l'âme habite le corps sans être du corps, les chrétiens sont dans le monde sans être du monde. L'âme, invisible par nature, est placée dans un corps visible qui est sa demeure. Vois les chrétiens pendant leur séjour sur la Terre, mais leur culte qui est tout divin, ne tombe pas sous les yeux. La chair, sans avoir reçue aucun outrage de l'esprit, le déteste et lui fait la guerre, parce qu'il est ennemi des voluptés. Ainsi le monde persécute les chrétiens, dont il n'a pas à se plaindre, parce qu'ils fuient les plaisirs. L'âme aime la chair qui la combat et les membres toujours soulevés contre elle. Ainsi les chrétiens n'ont que de l'amour pour ceux qui ne leur montrent que de la haine. L'âme, enfermée dans le corps, le conserve ; les chrétiens enfermés dans ce monde comme dans une prison, empêchent qu'il ne périsse. L'âme immortelle habite un tabernacle périssable ; les chrétiens, qui attendent la vie incorruptible des cieux, habitent comme des étrangers les demeures corruptibles d'ici-bas. L'âme se fortifie par les jeûnes, les chrétiens se multiplient par les persécutions : le poste que Dieu leur a confié est si glorieux, qu'ils regardent comme un crime de l'abandonner.

7
Je l'ai déjà dit et je le répète, la parole qu'ils ont reçue n'est pas une invention de la terre. Elle n'est pas un mensonge des mortels la doctrine qu'ils se font un devoir de conserver avec soin. Enfin le mystère confié à leur foi n'a rien de commun avec ceux de la sagesse humaine.
Dieu lui-même, le tout-puissant, le créateur de toutes choses, a fait descendre du ciel sur la Terre la vérité, c'est à dire son Verbe saint et incompréhensible. Il a voulu que le cœur de l'homme fût à jamais sa demeure. Ce n'est donc pas, comme quelques-uns pourraient le croire, un ministre du Très Haut qui nous a été envoyé, un ange, un archange, un des esprits qui veillent sur la conduite du monde, ou qui président au gouvernement des cieux. Celui qui est venu vers nous est l'auteur, le créateur du monde, par qui Dieu le Père a fait les cieux, a donné des limites à la mer; c'est lui à qui obéissent et le soleil, dont il a tracé la route dans les cieux avec ordre de la parcourir chaque jour sans sortir de la ligne tracée, et la Lune qui doit prêter son flambeau à la nuit, et les astres qui suivent son cours ; enfin c'est lui qui a tout disposé avec ordre et tout circonscrit dans de justes limites ; à qui tout est soumis, les cieux et tout ce qui est dans les cieux, le Terre et tout ce qui est sur la Terre, la mer et tout ce qui est au sein de la mer, le feu, l'air, les abîmes, les hauteurs du ciel, les profondeurs de la Terre, les régions placées entre la terre et les cieux ; voilà celui que Dieu nous a envoyé, non comme un conquérant chargé de semer la terreur et d'exercer partout un tyrannique empire, ainsi que quelques-uns pourraient le croire. Non, il l'a envoyé comme un roi envoie son fils, lui donnant pour cortège la douceur et la clémence ; il a envoyé ce fils comme étant Dieu lui-même ; il l'a envoyé comme à de faibles mortels ; il l'a envoyé en père qui veut les sauver, qui ne réclame que leur soumission, qui ne connaît pas la violence, la violence n'est pas en Dieu ; il l'a envoyé comme un ami qui appelle et non comme un persécuteur ; il l'a envoyé n'écoutant que l'amour ; il l'enverra comme juge et qui soutiendra cet avènement ?
Ne vois-tu pas que l'on jette les chrétiens aux bêtes féroces ? On voudrait en faire des apostats ; vois s'ils se laissent vaincre ! Plus on fait de martyres, plus on fait de chrétiens. Cette force ne vient pas de l'homme ; le doigt de Dieu est là ; tout ici proclame son avènement.

8
qui des hommes savait ce que c'est que Dieu avant qu'il vînt lui-même nous l'apprendre ? Sont-ce tes philosophes ? Assurément, ils sont bien dignes de foi ! Approuves-tu leurs opinions si vaines et si ridicules ? Selon ceux-ci, Dieu, c'est le feu. Ils ont appelé Dieu ce feu qu'ils doivent retrouver après cette vie. Selon ceux-là, c'est l'eau, ou quelque autre des substances que Dieu a créées. Admets tous ces beaux systèmes et il te faudra dire de toute créature qu'elle est Dieu. Mais tout ce langage n'est que mensonge, et mensonge monstrueux, imposture de charlatans. Aucun mortel n'a vu Dieu, aucun mortel n'a donc pu le connaître. Il s'est manifesté lui-même ; il se manifeste encore par la foi ; à la foi seule est donnée le privilège de le voir.
Le maître, le créateur de toutes choses, le Dieu qui a tout fait et tout disposé avec tant d'ordre et de sagesse, est rempli pour les hommes, non seulement d'amour, mais de patience. Il a toujours été ce qu'il est et sera toujours, c'est à dire bon, miséricordieux, plein de douceur, fidèle en ses promesses, seul bon. Il a conçu de toute éternité un dessein aussi grand qu'ineffable, et ne l'a confié qu'à son fils ; tandis qu'il tenait caché sous un voile mystérieux ce conseil de sa sagesse, il semblait négliger les hommes et ne prendre aucun soin de sa créature ; mais quand il eut révélé et mis au grand jour, par son fils bien-aimé, le mystère qu'il avait préparé avant les siècles, alors tout s'est expliqué pour nous, et nous avons pu jouir de ses bienfaits, et voir ce qu'il était. Qui de nous se serait attendu à tant d'amour ? Ainsi donc tout était caché en Dieu, Dieu seul savait tout avec son fils, à la faveur de son infinie sagesse.

9
S'il a permis que l'homme, jusqu'à ces derniers temps, suivît à son gré ses désirs corrompus et se laissât emporter à travers tous les désordres, par les voluptés et par les passions, ce n'est pas qu'il approuvât le crime, seulement il le tolérait ; non, il n'approuvait pas ce règne de l'iniquité ; il préparait, au contraire, dans les cœurs, celui de la justice. Il voulait nous laisser le temps de nous convaincre, par nos propres œuvres, combien nous étions indignes de la vie avant que sa bonté daignât nous l'accorder. Il nous fallait en effet reconnaître que, par nous-mêmes, nous ne pouvions pas parvenir au royaume de Dieu avant que Dieu vînt nous en offrir les moyens.
Lors donc que notre malice fut montée à son comble, qu'il fut démontré que nous n'étions dignes que de châtiment, et que nous n'avions plus que la mort en perspective, arriva le temps que Dieu avait marqué pour signaler tout à la fois sa bonté et sa puissance, et montrer que son immense amour pour l'homme ne laissait aucune place à la haine ; qu'il était loin de nous avoir rejetés ; qu'ils ne se souvenait plus de nos iniquités ; qu'il les avait souffertes et supportées avec patience, alors qu'a-t-il fait ? Il a pris sur lui nos péchés ; il a fait de son propre fils le prix de notre rançon, substituant le saint, le juste, l'innocent, l'incorruptible, l'immortel, à la place de l'homme pécheur, inique, pervers, sujet à la corruption, dévoué à la mort. Qui pouvait couvrir nos crimes, sinon sa sainteté ? Par quel autre que par le fils de Dieu, l'homme injuste pouvait-il être justifié ? O doux échange ! O artifice impénétrable de la sagesse divine ! O bienfait qui surpasse toute attente ! L'iniquité de tous est ensevelie dans la justice d'un seul, et la justice d'un seul fait que tous sont justifiés !
Quand il eut, par les temps écoulés, convaincu notre nature de son impuissance pour s'élever à la vie, il nous a montré le Sauveur, qui seul peut préserver de la mort ce qui périssait sans lui. Par ce double exemple du passé et du présent, il a voulu que nous eussions foi en sa bonté et que désormais l'homme le regardât comme un père qui le nourrit, comme un maître qui le conseille, comme un médecin qui le guérit ; que dirai-je encore ! Comme son intelligence, sa lumière, son honneur, sa gloire, sa force, sa vie, et qu'il cessât de s'inquiéter du vêtement et de la nourriture.

10
Si donc, ô Diognète, tu désires ardemment le don de la foi, tu l'obtiendra. D'abord, tu connaîtras Dieu le père : vois comme il a aimé l'homme ; c'est pour lui qu'il a créé le monde ; il a placé sous sa dépendance tout ce que le monde renferme ; il lui a donné l'intelligence et la raison. C'est à l'homme seul qu'il a permis de regarder le ciel ; il l'a formé à son image ; il lui a envoyé son fils unique ; il lui promet son royaume ; il le donnera à ceux qui lui rendront amour pour amour. O quelle joie sera la tienne quand tu le connaîtras ! Combien tu aimeras celui qui, le premier, t'a tant aimé ? Une fois touché de son amour, tu chercheras à l'imiter, à retracer sa bonté. Quoi ! L'homme pourrait imiter Dieu ! Quel langage ! Cesse de t'étonner, l'homme le peut, puisque Dieu le veut.
Faire peser sur ses semblables le joug de la tyrannie, se croire d'une condition meilleure que ceux qu'on opprime, étaler le faste de l'opulence, écraser le faible, tout cela ne fait pas le bonheur ; aussi n'est-ce pas en cela que l'homme peut imiter son Dieu, car aucun de ces traits ne caractérise la majesté divine ; mais prendre sur soi le fardeau du malheureux, du lieu élevé où le ciel nous a placés, répandre des bienfaits sur ceux qui se trouvent au dessous de nous, regarder les richesses comme des dons que Dieu fait passer par nos mains pour arriver à l'indigent, c'est devenir le Dieu de ceux qu'on soulage, c'est imiter Dieu lui-même. Alors en passant sur la Terre, vous comprendrez qu'il est au ciel un Dieu qui tient les rênes du monde et qui le gouverne comme un empire.
Les Mystères de Dieu se dévoileront à tes yeux, tu en parleras le langage, tu aimeras, tu admireras ces hommes que l'on opprime, parce qu'ils ne veulent pas renoncer à ce Dieu. Tu condamneras l'erreur et l'imposture du monde, lorsque tu auras appris à vivre pour le ciel, et à mépriser ce que l'on nomme la mort. Tu ne redouteras qu'une seule mort, la véritable mort, celle qui est réservée aux pécheurs condamnés à des feux éternels qui seront à jamais leur supplice. Oui, tu admireras ces hommes qui endurent ici-bas les tourments du feu pour la justice, et tu proclameras leur bonheur quand tu connaîtra ce feu éternel auquel ils ont échappé.

11
Ce que je te dis est l'expression véritable de notre foi, c'est le langage même de la raison. Disciple des apôtres, je suis devenu le docteur des nations ; la parole de vérité que j'ai reçue, je la transmets à ceux qui se montrent dignes de la recevoir. Quel homme bien préparé par les premiers éléments de la foi ne s'empresse de s'instruire de toutes les vérités que le Verbe expliquait clairement lui-même aux disciples qui eurent l'avantage de le voir. Il parlait librement, s'inquiétant peu des incrédules qui ne le comprenaient pas ; mais les mêmes choses, il les développait ensuite à ses disciples ; et c'est ainsi que ceux qu'il jugeait fidèles connurent les secrets de son Père. Le Père envoya son Verbe pour qu'il fût connu des hommes ; rejeté par son peuple, il a été prêché par les apôtres et cru des nations. C'est lui qui était dès le commencement, et qui a paru dans les derniers temps, toujours nouveau, parce qu'il naît tous les jours dans le cœur des justes. Il est aujourd'hui ce qu'il a toujours été, le fils de Dieu ; par lui, l'Eglise ne cesse de s'enrichir ; sa grâce se répand, reçoit sans cesse par ses saints de nouveaux accroissements, communiquant partout l'intelligence, dévoilant les mystères, annonçant la fin des temps, heureuse de ceux qui sont fidèles, prompte à se donner à ceux qui cherchent, mais dont la curiosité ne force pas les barrières de la foi, et respecte les bornes qu'ont respectées nos pères.
La loi de crainte est abolie, la loi de grâce annoncée par les prophètes est connue, la foi des saints Evangiles est affermie, la tradition des apôtres conservée, et la grâce qui soutient l'Eglise triomphe. Ah ! Cette grâce qui vous parle, ne l'attriste pas, ô Diognète, et tu connaîtras la vérité que le Verbe communique aux hommes quand il veut et par les organes qu'il lui plait de choisir. Il nous ordonne, il nous presse de parler, sa voix réclame nos travaux, et l'amour nous porte à vous communiquer ce que nous avons reçu.

12
Recueille soigneusement, médite avec attention ces vérités, et tu sauras de quels bien Dieu comble ceux qui l'aiment. Ton âme sera comme un paradis de délices, comme un arbre fécond qui se couvre d'un riche feuillage, qui porte toute sorte de fruits : ces fruits seront ta parure, tu les produira en toi-même.
Dans le paradis terrestre, furent plantés l'arbre de la science et l'arbre de la vie ; car ce n'est pas la science qui fait mourir, mais la désobéissance. Il n'y a pas d'obscurité dans ces paroles de l'Ecriture : "Dieu planta au commencement l'arbre de vie au milieu du paradis terrestre", nous montrant la science comme chemin de la vie. Nos premiers parents en furent dépouillés par l'imposture du serpent pour n'en avoir pas bien usé. Il n'y a pas de vie sans la science, et il n'y a pas de science certaine sans la vraie vie. Aussi ces deux arbres furent-ils placés près l'un de l'autre dans le paradis. L'apôtre l'avait bien compris, et voilà pourquoi, blâmant la science qui veut régler la vie sans la parole de vérité, il dit : "la science enfle, mais la charité édifie". En effet, celui qui croit savoir quelque chose sans la science véritable à laquelle la vie rend témoignage, celui-là s'abuse, il ne sait rien, le serpent le trompe, il n'aime pas la vie, mais celui qui fait marcher la crainte avec la science et cherche la vie, plante au sein de l'espérance et peut se promettre des fruits. Que cette science soit au fond de ton cœur, que la parole de vérité soit ta vie, tu seras un arbre fertile, tu ne cesseras de produire les fruits que demande le Seigneur, fruits heureux que n'atteint pas le souffle du serpent et que ne peut corrompre son imposture.
Une autre Eve n'a pas participé à la corruption ; vierge, elle a notre foi ; le salut du monde a paru, l'intelligence est donnée aux apôtres, la pâque du Seigneur s'accomplit, le chœur des élus se forme, l'ordre du monde se rétablit, le Verbe enfante des saints et triomphe ; par lui, Dieu le père est glorifié. Gloire lui soit rendue dans tous les siècles.
     [Fin de la lettre à Diognète].

Traduction de M. de Genoude, éditée à Paris, chez SAPIA, libraire éditeur, rues de Sèvres 16, et du Doyenné 12. Traduction adaptée par JesusMarie.com. Fichier placé sous licence creative commons, Paris, 11 septembre 2010.


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Deux amis parfaits





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Ἕως μὲν γὰρ παῖδες ἦμεν, περὶ πλείονος ἡμᾶς αὐτοὺς ἡγούμεθα ἢ τοὺς ἀδελφούς, καὶ οὔτε θυσίαν οὔτε θεωρίαν οὔτ᾽ ἄλλην ἑορτὴν οὐδεμίαν χωρὶς ἀλλήλων ἤγομεν· ἐπειδὴ δ᾽ ἄνδρες ἐγενόμεθα, οὐδὲν πώποτ᾽ ἐναντίον ἡμῖν αὐτοῖς ἐπράξαμεν, ἀλλὰ καὶ τῶν ἰδίων ἐκοινωνοῦμεν καὶ πρὸς τὰ τῆς πόλεως ὁμοίως διεκείμεθα καὶ φίλοις καὶ ξένοις τοῖς αὐτοῖς ἐχρώμεθα. Καὶ τί δεῖ λέγειν τὰς οἴκοι χρήσεις; ἀλλ᾽ οὐδὲ φυγόντες ἀπ᾽ ἀλλήλων ἠξιώσαμεν γενέσθαι. Τὸ δὲ τελευταῖον φθόῃ σχόμενον αὐτὸν καὶ πολὺν χρόνον ἀσθενήσαντα, καὶ τοῦ μὲν ἀδελφοῦ Σωπόλιδος αὐτῷ πρότερον τετελευτηκότος, τῆς δὲ μητρὸς καὶ τῆς ἀδελφῆς οὔπω παρουσῶν, μετὰ τοσαύτης ἐρημίας γενόμενον οὕτως ἐπιπόνως καὶ καλῶς αὐτὸν ἐθεράπευσα, ὥστ᾽ ἐκεῖνον μὴ νομίζειν ἀξίαν μοι δύνασθαι χάριν ἀποδοῦναι τῶν πεπραγμένων. Ὅμως δ᾽ οὐδὲν ἐνέλιπεν, ἀλλ᾽ ἐπειδὴ πονηρῶς διέκειτο καὶ οὐδεμίαν ἐλπίδ᾽ εἶχε τοῦ βίου, παρακαλέσας μάρτυρας υἱόν μ᾽ ἐποιήσατο καὶ τὴν ἀδελφὴν τὴν αὑτοῦ καὶ τὴν οὐσίαν ἔδωκεν. Καί μοι λαβὲ τὰς διαθήκας. Διαθῆκαι. Ἀνάγνωθι δή μοι καὶ τὸν νόμον τὸν Αἰγινητῶν· κατὰ γὰρ τοῦτον ἔδει ποιεῖσθαι τὰς διαθήκας· ἐνθάδε γὰρ μετῳκοῦμεν. Νόμος.

<13> Κατὰ τουτονὶ τὸν νόμον, ὦ ἄνδρες Αἰγινῆται, υἱόν μ᾽ ἐποιήσατο Θρασύλοχος, πολίτην μὲν αὑτοῦ καὶ φίλον ὄντα, γεγονότα δ᾽ οὐδενὸς χεῖρον Σιφνίων, πεπαιδευμένον δ᾽ ὁμοίως αὑτῷ καὶ τεθραμμένον. Ὤστ᾽ οὐκ οἶδ᾽ ὅπως ἂν μᾶλλον κατὰ τὸν νόμον ἔπραξεν, ὃς τοὺς ὁμοίους κελεύει παῖδας εἰσποιεῖσθαι. Λαϐὲ δή μοι καὶ τὸν Κείων νόμον, καθ᾽ ὃν ἡμεῖς ἐπολιτευόμεθα.
                                                                                                                                                                   Isocrate, Eginetique, 10-12



Durant notre enfance, nous étions plus attachés à l'un et l'autre qu'à nos frères; nous ne célébrions ni sacrifice, ni pélerinage, ni aucune autre fête l'un sans l'autre. Devenus hommes, jamais nous n'avons agis l'un contre l'autre : nous mettions en commun nos biens personnels; en politique, nos positions étaient semblables; nous avions mêmes amis, mêmes hôtes. A quoi bon évoquer nos façons d'agir dans notre pays ? Même exilés, nous ne nous sommes pas résignés à une séparation. Enfin quand mon ami fut atteint consomption et privé de ses forces pour longtemps - son frère Sopolis était mort avant lui, sa mère et sa sœur n'étaient pas encore là - le trouvant dans un tel état d'abandon, je me suis donné tant de mal pour le bien soigner qu'il se jugeait impuissant à me témoigner une reconnaissance à la mesure de ma conduite. Cependant il n'y manqua pas du tout, et lorsqu'il se trouva bien mal et perdit tout espoir vivre, il appela les témoins, m'adopta pour fils et me donna sa propre sœur et son avoir.
           trad. Poulain et Lefaure; Exercices grecs; éd. J de Gigord.

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περὶ πολλοῦ, περὶ πλείονος, περὶ πλείστου ποιεῖσθαι : faire grand cas, plus grand cas, très grand cas de.
περὶ ὀλίγου, ἐλάττονος ποιεῖσθαι : faire peu de cas, moins de cas de.
περὶ οὐδενὸς ἡγεῖσθαι, Lys. 189, 42, ne faire aucun cas de.
περὶ παντὸς ποιεῖσθαι, Xén. Cyr. 1, 4, 1 : estimer au plus haut point, estimer au-dessus de tout.


ὀλίγου δεῖ  : il s'en faut de peu
πολλοῦ δεῖ : il s'en faut de beaucoup
περὶ πολλοῦ  ποιεῖσθαι : faire grand cas  de
περὶ πλείονος / πλείστου ποιεῖσθαι  : faire plus grand cas / très grand cas de
περὶ ἐλάττονος  ποιεῖσθαι : faire moins grand cas de
cf. grammaire grecque de Louvain. (1290)

Φιλίας γὰρ οὐδέν ἐστι τιμιώτερον (Mén., Comp., I, 247) : Car rien n'est plus estimable que l'amitié.
Σιγή ποτ' ἐστὶν αἱρετωτέρα λόγου (Mén., Mon., 709) : Le silence est parfois préférable à la parole.
Φιλεῖ δ' ἐαυτοῦ πλεῖον οὐδεὶς οὐδένα (Mén., Mon. 814) : Personne n'aime personne plus que lui-même.
Εἰ ἐσωφρονεῖς, τοῦτο πλουσιωτέρῳ μὲν ἄν ἢ ἐμοὶ ἐδίδους (d'après Xén., Cyr., 8, 3, 32) : Si tu étais sensé, tu donnerais cela à un plus riche que moi. [ἐμοὶ : second terme de comparaison au datif, comme πλουσιωτέρῳ].
cf. grammaire grecque de Louvain. (1256)








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Courage extraordinaire de Socrate






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(219e) στρατεία ἡμῖν εἰς Ποτείδαιαν ἐγένετο κοινὴ καὶ συνεσιτοῦμεν ἐκεῖ. πρῶτον μὲν οὖν τοῖς πόνοις οὐ μόνον ἐμοῦ περιῆν, ἀλλὰ καὶ τῶν ἄλλων ἁπάντων. ὁπότ᾽ ἀναγκασθεῖμεν ἀποληφθέντες που, οἷα δὴ ἐπὶ στρατείας, (220a) ἀσιτεῖν, οὐδὲν ἦσαν οἱ ἄλλοι πρὸς τὸ καρτερεῖν· ἔν τ᾽ αὖ ταῖς εὐωχίαις μόνος ἀπολαύειν οἷός τ᾽ ἦν τά τ᾽ ἄλλα καὶ πίνειν οὐκ ἐθέλων, ὁπότε ἀναγκασθείη, πάντας ἐκράτει, καὶ ὃ πάντων θαυμαστότατον, Σωκράτη μεθύοντα οὐδεὶς πώποτε ἑώρακεν ἀνθρώπων. τούτου μὲν οὖν μοι δοκεῖ καὶ αὐτίκα ὁ ἔλεγχος ἔσεσθαι. πρὸς δὲ αὖ τὰς τοῦ χειμῶνος καρτερήσεις — δεινοὶ γὰρ αὐτόθι χειμῶνες — θαυμάσια εἰργάζετο τά τε (220b) ἄλλα, καί ποτε ὄντος πάγου οἵου δεινοτάτου, καὶ πάντων ἢ οὐκ ἐξιόντων ἔνδοθεν, ἢ εἴ τις ἐξίοι, ἠμφιεσμένων τε θαυμαστὰ δὴ ὅσα καὶ ὑποδεδεμένων καὶ ἐνειλιγμένων τοὺς πόδας εἰς πίλους καὶ ἀρνακίδας, οὗτος δ᾽ ἐν τούτοις ἐξῄει ἔχων ἱμάτιον μὲν τοιοῦτον οἷόνπερ καὶ πρότερον εἰώθει φορεῖν, ἀνυπόδητος δὲ διὰ τοῦ κρυστάλλου ῥᾷον ἐπορεύετο ἢ οἱ ἄλλοι ὑποδεδεμένοι, οἱ δὲ στρατιῶται ὑπέϐλεπον (220c) αὐτὸν ὡς καταφρονοῦντα σφῶν.
                                                                                                                                                                              Platon, Banquet, 219-220


Nous fîmes campagne ensemble à Potidée et nous y étions de la même popote. D'abord, à la peine, Socrate était plus fort non seulement que moi, mais que tous les autres. Chaque fois que, coupés du ravitaillement quelque part, comme il arrive justement en campagne, il nous fallait rester sans manger, les autres, auprès de lui, n'existaient pas pour l'endurance. Au contraire, les jours de bombance, il n'y en avait pas deux comme lui pour savoir en profiter, notamment pour boire : il n'y tenait pas, mais si on l'y forçait, il nous surpassait tous; et le plus étonnant, c'est que personne au monde n'a jamais vu Socrate en état d'ivresse.  On en aura, je crois, une preuve encore dans un instant. Et puis, quand il s'agissait de tenir contre les rigueurs  de l'hiver - or ils sont rudes, les hivers, là-bas - Socrate faisait merveille. Un jour notamment où la gelée était on ne peut plus terrible, alors que chacun évitait de sortir de son abri ou n'en sortait que dans un accoutrement bizarre au possible, les pieds enveloppés, emmitouflés dans des bandes de feutre  ou de peau d'agneau, lui, parmi eux, sortait avec le même manteau qu'il avait coutume de porter auparavant; il circulait pieds nus sur la glace plus aisément que les autres avec leurs chaussons. Mais les soldats lui lançaient un regard en-dessous, croyant qu'il voulait le narguer.
       trad. Poulain et Lefaure; Exercices grecs; éd. J de Gigord.

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ἐκεῖ, adv. : là-bas mais δεῦρο : ici.
σιτέω-ῶ (seul. part. prés.) : nourrir.
moyen σιτέομαι-οῦμαι (impf. ἐσιτούμην, f. σιτήσομαι, aor. ἐσιτήθην) : se nourrir.
συσσιτέω, anc. att. ξυσσιτέω-ῶ : manger avec, manger ensemble.
καὶ συνεσιτοῦμεν ἐκεῖ : et ils mangeaient ensemble là-bas.
ὑποϐλέπω (futur ὑποϐλέψομαι, aor. ὑπέϐλεψα, etc.) : regarder en dessous d’un air défiant ou mécontent.
καταφρονέω-ῶ : mépriser, dédaigner, ne faire aucun cas de.
οἱ δὲ στρατιῶται ὑπέϐλεπον αὐτὸν ὡς καταφρονοῦντα σφῶν : les soldats lui lançaient un regard en-dessous, croyant qu'il voulait le narguer.









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La légende d'Aédon et de Chélidonis





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Ἀνθέως τοῦ Νομίονος ἐγένετο παῖς Αἰγυπιός· ᾤκει δὲ παρὰ τὴν ἐσχατιὰν τῆς Θεσσαλίας καὶ αὐτὸν ἐφίλησαν θεοὶ ὁσιότητος ἕνεκα καὶ ἄνθρωποι ὅτι ἦν μεγαλόφρων καὶ δίκαιος. [2] οὗτος ἰδὼν Τιμάνδρην ἠράσθη· μαθὼν δ' ὅτι ἀνδρὸς ἦν χήρα, πείσας χρήμασιν ἐμίγνυτο φοιτῶν εἰς τὰ ἐκείνης οἰκία. πρὸς δὲ τοῦτο Νεόφρων ὁ παῖς τῆς Τιμάνδρης χαλεπῶς εἶχε (τῷ Αἰγυπιῷ δ' ἦν ἡλικιώτης) κἀκείνῳ δόλον ἐϐούλευε. [3] δοὺς (δὲ) πλεῖστα δῶρα καὶ ἀναπείσας Βουλίδα τὴν Αἰγυπιοῦ μητέρα καὶ ἀγαγὼν εἰς τὰ οἰκία εὐνάζεται σὺν αὐτῇ· προμαθὼν δὲ τὴν ὥραν ἥν εἰώθει παρὰ Τιμάνδρην ὁ Αἰγυπιὸς φοιτᾶν, τὴν μὲν αὐτοῦ μητέρα καθ' ἥντινα πρόφασιν ἐκ τῆς οἰκίας μετέστησεν, ἀντὶ δ' ἐκείνης τὴν Αἰγυπιοῦ μητέρα παρήγαγεν εἰς τὸν οἶκον ὡς ἐπανήξων πρὸς αὐτὴν καὶ ἀμφοτέρους ἐξηπάτησεν. [4] Αἰγυπιὸς δ' οὐδὲν ἐπιλεξάμενος ὧν εἰς αὐτὸν ἐμηχανᾶτο Νεόφρων μίγνυται τῇ μητρὶ δοκῶν εἶναι Τιμάνδρην· καὶ ἐπεὶ αὐτὸν ὕπνος ἔλαϐεν, ἡ Βουλὶς ἔγνω τὸν παῖδα τὸν ἑαυτῆς· καὶ ἀναλαϐοῦσα ξίφος ἐϐούλευεν ἐκείνου μὲν τὰς ὄψεις ἀφελέσθαι, ἑαυτὴν δὲ κτεῖναι· βουλῇ δ' Ἀπόλλωνος ἀνίησι τὸν Αἰγυπιόν ὁ ὕπνος· ὁ δὲ γνοὺς οἷον ἔργον ἐμηχανήσατο Νεόφρων ἐπ' αὐτῷ καὶ εἰς τὸν οὐρανὸν ἀναϐλέψας ηὔξατο σὺν ἑαυτῷ πάντας ἀφανισθῆναι. [5] Ζεὺς δὲ μετέϐαλεν εἰς ὄρνιθας καὶ ἐγένοντο Αἰγυπιὸς μὲν καὶ Νεόφρων αἰγυπιοὶ ὁμώνυμοι, χρόαν δὲ καὶ μέγεθος οὐχ ὅμοιοι, ἀλλὰ ἐλάττων ὄρνις αἰγυπιὸς ἐγένετο Νεόφρων, ἡ δὲ Βουλὶς ἐγένετο πῶυγξ καὶ αὐτῇ τροφὴν ἔδωκεν ὁ Ζεὺς μηδὲν ἐκ γῆς φυόμενον, ἀλλὰ ἐσθίειν ὀφθαλμοὺς ἰχθύος ἤ ὄρνιθος ἤ ὄφεως, ὅτι ἔμελλεν Αἰγυπιοῦ τοῦ παιδὸς ἀφελέσθαι τὰς ὄψεις· Τιμάνδην δὲ ἐποίησεν αἰγιθαλλόν· καὶ ἐφάνησαν ἐπὶ ταὐτὸν οὐδέποθ' οἱ ὄρνιθες οὗτοι.
                                                                                                                                                                              Antoninus Liberalis, 5



Antheus, fils de Nomion, eut comme fils Aegypios;  celui-ci habitait aux confins de la Thessalie et fut chéi des dieux pour sa piété et des hommes pour sa générosité et son équité. [2] Un jour, il vit Timandré et en tomba amoureux. Apprenant qu'elle était veuve, il la séduisit avec de l'argent, et il lui rendit de fréquentes visites à la maison pour s'unir à elle. Néophron, fils de Timandré, prenait mal cette liaison (il était du même âge qu'Aegypios) et cherchait à tendre un piège à ce dernier. [3] Il offrit maints présents à Boulis; la mère d'Aegypios la séduisit, l'amena chez lui et en fit sa maîtresse; ayant appris auparavant l'heure à laquelle Aegypios rendait d'habitude visite à Timandré, il trouva un prétexte quelquonque pour éloigner sa propre mère de la maison. A sa place, il fit venir secrètement la mère d'Aegypios en lui promettant de revenir auprès d'elle et trompa mère et fils. [4] Sans rien soupçonner de ce que Néophron manigançait contre lui, Aegypios s'unit à sa mère, croyant que c'était Timandré; lorsqu'il fut pris par le sommeil, Boulis reconnut en lui son propre fils et, saisissant son épée, elle songeait à lui arracher les yeux et à se donner la mort. Mais, par la volonté d'Apollon, le sommeil quitta Aegypios. Celui-ci, comprenant l'horrible machination que Néophron avait ourdie, leva ses regards au ciel et souhaita que tout le monde disparût avec lui. [5 Et Zeus les transforma en oiseaux : Aegypios et Néophron devinrent des vautours du même nom, mais de couleur et de grandeur différentes : Néophron devint un vautour moins grand. Boulis devint un poynix et Zeus lui assigna de ne rien manger de ce qui pousse sur la terre mais de se nourrir d'yeux de poissons, d'oiseaux ou de serpents parce qu'il avait voulu arracher les yeux à son fils Aegypios. De Timandré il fit une mésange. Et depuis ce temps on ne vit jamais ces oiseaux ensemble.
        trad. Manólis Papathomópoulos; éd. les belles lettres, 2023

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ἐσχατιός, ά, όν : c. ἔσχατος, NIC. Th. 746 ; OPP. C. 1, 124 ; ANTH. 7, 555.
ἔσχατος, η, ον : qui est à l’extrémité, extrême, dernier.
παρὰ τὴν ἐσχατιὰν τῆς Θεσσαλίας : aux confins de la Thessalie.
έσχάτως : au plus haut point.
ὁσιότης, ητος (ἡ) : religion, culte des dieux; piété, sainteté.
μεγαλόφρων, ων, ον, gén. ονος : qui a des sentiments élevés, de la grandeur d’âme, de la générosité.
μεταϐάλλω (futur μεταϐαλῶ, aor.2 μετέϐαλον, etc.) : changer, prendre en changeant; devenir en changeant, se transformer.

πώϋγξ, ϋγγος (ἡ) : oiseau aquatique, peut-être le plongeon, A. Lib. 5
φαίνω (futur φανῶ [ᾰ] ao. ἔφηνα, parf. πέφαγκα, parf.2 πέφηνα; passif futur φανήσομαι, aor.1 ἐφάνθην, aor.2 ἐφάνην, parf. πέφασμαι, ασαι, ανται ou αται, etc.) : faire briller; montrer, manifester. --- voir dico Bailly version établie par Gérard Gréco
καὶ ἐφάνησαν ἐπὶ ταὐτὸν οὐδέποθ' οἱ ὄρνιθες οὗτοι : et depuis ce temps on ne vit jamais ces oiseaux ensemble.




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ὁ Ζεὺς αὐτοὺς πάντας μετέϐαλεν εἰς ὄρνιθας.
καὶ οἱ μὲν αὐτῶν ἐξέπτησαν πρὸς τὴν θάλασσαν, οἱ δὲ εἰς τὸν ἀέρα.
Πανδάρεως μὲν οὖν ἐγένετο ἁλιαίετος, ἡ δὲ μήτηρ τῆς Ἀηδόνος ἀλκυών.
οὗτοι τοῖς πλέουσιν οἱ ὄρνιθες αἴσιοι φαίνονται.
Πολύτεχνος δ'ἐγένετο πελεκᾶς· καὶ ἔστιν ἀγαθὸς οὗτος ὄρνις φανεὶς τέκτονι.
Ἀηδὼν δὲ καὶ Χελιδονίς, ἡ μὲν παρὰ ποταμοὺς καὶ λόχμας τὸν παῖδα τὸν Ἴτυν θρηνεῖ, Χελιδονὶς δ΄ ἐγένετο Χελιδών, ὄρνις σύνοικος ἀνθρώποις.
ὁ Ζεὺς μετέϐαλε τὴν μὲν μητέρα τῆς Ἀηδόνος εἰς ἀλκυόνα, Πολύτεχνον  δὲ πελεκᾶντα,
τὰς δὲ θυγατέρας τοῦ Πανδαρέου (μετέϐαλεν) τὴν μὲν εἰς ἁηδόνα τὴν δὲ εἰς χελιδόνα.

ἐξίπταμαι  aor. 1 ἐξέπτατο; aor. 2 ἐξέπτη : s’envoler.
πέτομαι (futur πτήσομαι et πετήσομαι, ao.2 ἐπτόμην, d’où inf. πτέσθαι; aor. radical ἐπτάμην (c. de πέταμαι) ; act. intr. ἔπτην, d’où opt. πταίην, inf. πτῆναι et participe πτάς ; parf. inus.) : voler.


Zeus les transforma tous en oiseaux.
et les uns s'envolèrent vers la mer, les autres vers le ciel.
Ainsi Pandaréos devint-il aigle marin et la mère d'Aédon alcyon.
Ces oiseaux sont, pour les marins, de bon augure.
Polytechnos, lui, devint pivert, et c'est un bon présage pour un charpentier qui le voit.
Quant à Aédon et Chélidonis, l'une pleure son fils le long des fleuves et dans les taillis, l'autre devint hirondelle et vit, au contraire avec les hommes.
       voir le grec par les textes, 4è/3è, page 40; éd. Magnard.





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Une innocente victime





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[15] ΜΙΚΚΑ ΚΑΙ ΜΕΓΙΣΤΩ. Ἀριστότιμος Ἠλείοις ἐπαναστὰς τύραννος ἴσχυε μὲν δι´ Ἀντιγόνου τοῦ βασιλέως, ἐχρῆτο δὲ τῇ δυνάμει πρὸς οὐδὲν ἐπιεικὲς οὐδὲ μέτριον· καὶ γὰρ αὐτὸς ἦν φύσει θηριώδης, καὶ τοῖς φυλάττουσι τὴν ἀρχὴν καὶ τὸ σῶμα βαρϐάροις μιγάσι δουλεύων ὑπὸ φόϐου, πολλὰ μὲν ὑϐριστικὰ πολλὰ δ´ ὠμὰ τοὺς πολίτας ὑπ´ αὐτῶν περιεώρα πάσχοντας· οἷον ἦν καὶ τὸ Φιλοδήμου πάθος.

ἔχοντος γὰρ αὐτοῦ θυγατέρα καλὴν ὄνομα Μίκκαν ἐπεχείρησέ τις τῶν περὶ τὸν τύραννον ξεναγῶν ὄνομα Λεύκιος ὕϐρει μᾶλλον ἢ ἔρωτι συγγενέσθαι· καὶ πέμψας ἐκάλει τὴν παρθένον. οἱ μὲν οὖν γονεῖς τὴν ἀνάγκην ὁρῶντες ἐκέλευον βαδίζειν· ἡ δὲ παῖς οὖσα γενναία καὶ μεγαλόφρων ἐδεῖτο τοῦ πατρὸς περιπλεκομένη καὶ καθικετεύουσα μᾶλλον αὐτὴν περιιδεῖν ἀποθανοῦσαν ἢ τὴν παρθενίαν αἰσχρῶς καὶ παρανόμως ἀφαιρεθεῖσαν. καὶ διατριϐῆς γενομένης σπαργῶν καὶ μεθύων ὁ Λεύκιος αὐτὸς ἐξανέστη μεταξὺ πίνων πρὸς ὀργήν· καὶ τὴν Μίκκαν εὑρὼν ἐν τοῖς γόνασι τοῦ πατρὸς τὴν κεφαλὴν ἔχουσαν ἐκέλευεν αὐτῷ συνακολουθεῖν·

οὐ βουλομένης δὲ τὸ χιτώνιον περιρρήξας ἐμαστίγου γυμνήν, αὐτὴν μὲν ἐγκαρτεροῦσαν σιωπῇ ταῖς ἀλγηδόσιν· ὁ δὲ πατὴρ καὶ ἡ μήτηρ, ὡς οὐδὲν ἀντιϐολοῦντες καὶ δακρύοντες ἐπέραινον, ἐτράποντο πρὸς θεῶν καὶ ἀνθρώπων ἀνάκλησιν ὡς δεινὰ καὶ παράνομα πάσχοντες. ὁ δὲ βάρϐαρος ἐκμανεὶς παντάπασιν ὑπὸ τοῦ θυμοῦ καὶ μέθης ἀποσφάττει τὴν παρθένον, ὡς ἔτυχεν ἐν τοῖς κόλποις τοῦ πατρὸς ἔχουσα τὸ πρόσωπον.
                                                                                                                                                              Plutarque, les vertus des femmes, 15


[15] MICCA ET MEGISTO. Aristotime, ayant usurpé le souverain pouvoir en Élide, devait sa force au roi Antigonus; mais il usait de l'autorité sans douceur et sans modération. Naturellement féroce par lui-même, la crainte le rendait, en outre, l'esclave des Barbares de toute espèce à qui il avait confié la garde de sa personne et de sa puissance. Quelque nombreux que fussent les outrages et les mauvais traitements exercés par cette soldatesque contre les citoyens, il était insensible à leurs maux. Telle fut, entre autres, la malheureuse aventure de Philodème.

Cet Eléen avait une fille merveilleusement belle, nommée Micca, sur qui Lucius, un des officiers étrangers que soldait le Tyran, jeta ses vues plutôt par brutalité que par amour. Il envoie dire qu'il veut parler à Micca, et les parents de la jeune fille, en présence de la nécessité, la contraignent de se rendre à cet appel. Comme c'était une enfant généreuse et magnanime, elle se jeta au cou de son père et le supplia, avec les plus grandes instances, de souffrir qu'elle mourût plutôt que de perdre honteusement sa virginité par un crime. Cette scène avait causé un retard. Lucius, qui était en train de boire, enivré de débauche et de vin s'élance lui-même hors de son logis avec fureur. Il trouve Micca ayant la tête dans les genoux de son père. Il lui enjoint de le suivre.

Elle s'y refuse; il lui déchire sa robe et la fouette toute nue, mais sans que la douleur arrache un seul cri à l'héroïque jeune fille. Le père et la mère, ne pouvant rien obtenir par leurs supplications et leurs larmes, n'avaient plus qu'à protester, en implorant les dieux et les hommes, contre d'aussi horribles et indignes traitements; mais le Barbare, tout à fait égaré par la colère et par l'ivresse, égorge la jeune fille, dans l'état même où elle se trouve là, le visage appuyé sur le sein de son père.


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Μεγιστώ, οῦς (ἡ) : Mégisto.
Ἦλις, gén. Ἦλιδος, acc. Ἦλιν, épq. Ἦλιδα (ἡ) : l’Élide (contrée du Péloponnèse); Élis (capitale de l’Élide).
Ἠλεῖος, α, ον : d’Élide, Éléen.

moyen χράομαι-ῶμαι (futur χρήσομαι, aor. ἐχρησάμην, parf. κέχρημαι, aor. au sens passif ἐχρήσθην : prendre une chose en main, se l’approprier, se servir de.
ἐχρῆτο δὲ τῇ δυνάμει πρὸς οὐδὲν ἐπιεικὲς οὐδὲ μέτριον : il usait de l'autorité sans douceur et sans modération.
ἐπιεικής, ής, ές : d’une juste mesure, équitable.

περιοράω- --- voir hors site dico Baillif
περιοράω-ῶ (futur περιόψομαι, aor. 2 περιεῖδον, parf. περιεόρακα ; passif aor. περιώφθην, parf. περιῶμμαι) : voir ou regarder autour.
περιορᾶν τινα πάσχοντα τι : voir avec indifférence quelqu'un supporter quelque chose.


χιτώνιον, ου (τὸ) : petite tunique de femme.
τρέπω (futur τρέψω, aor.1 ἔτρεψα, aor.2 ἔτραπον, parf.2 τέτροφα ou τέτραφα ; passif aor.1 ἐτρέφθην, ao.2 ἐτράπην, pf. τέτραμμαι) : tourner, tourner, diriger.
ἀνάκλησις, εως (ἡ) : invocation, appel au secours.
ἐτράποντο πρὸς θεῶν καὶ ἀνθρώπων ἀνάκλησιν : ils dirigèrent leur l'appel au secours auprès des dieux et des hommes.


ὡς ἔτυχεν ἐν τοῖς κόλποις τοῦ πατρὸς ἔχουσα τὸ πρόσωπον : mot à mot comme elle se trouvait ayant le visage.
κόλπος, ου (ὁ) : sein.







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Trois sources sacrées en Inde

       voir "le grec par les textes", 4/3 ème; Gravil et Maurois, page 66; éditions Gallimard.




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[6] ἐν Ἰνδοῖς τοῖς Μαχλαίοις, οἳ τὰ λαιὰ τοῦ Ἰνδοῦ ποταμοῦ, εἰ κατὰ ῥοῦν αὐτοῦ βλέποις, ἐπινεμόμενοι μέχρι πρὸς τὸν Ὠκεανὸν καθήκουσι, παρὰ τούτοις ἄλσος ἐστὶν ἐν περιφράκτῳ, οὐ πάνυ μεγάλῳ χωρίῳ, συνηρεφεῖ δέ· κιττὸς γὰρ πολὺς καὶ ἄμπελοι σύσκιον αὐτὸ ἀκριϐῶς ποιοῦσιν. ἐνταῦθα πηγαί εἰσι τρεῖς καλλίστου καὶ διειδεστάτου ὕδατος, ἡ μὲν Σατύρων, ἡ δὲ Πανός, ἡ δὲ Σιληνοῦ. καὶ εἰσέρχονται εἰς αὐτὸ οἱ Ἰνδοὶ ἅπαξ τοῦ ἔτους ἑορτάζοντες τῷ θεῷ, καὶ πίνουσι τῶν πηγῶν, οὐχ ἁπασῶν ἅπαντες, ἀλλὰ καθ´ ἡλικίαν, τὰ μὲν μειράκια τῆς τῶν Σατύρων, οἱ ἄνδρες δὲ τῆς Πανικῆς, τῆς δὲ τοῦ Σιληνοῦ οἱ κατ´ ἐμέ.

[7] Ἃ μὲν οὖν πάσχουσιν οἱ παῖδες ἐπειδὰν πίωσιν, ἢ οἷα οἱ ἄνδρες τολμῶσι κατεχόμενοι τῷ Πανί, μακρὸν ἂν εἴη λέγειν· ἃ δ´ οἱ γέροντες ποιοῦσιν, ὅταν μεθυσθῶσιν τοῦ ὕδατος, οὐκ ἀλλότριον εἰπεῖν· ἐπειδὰν πίῃ ὁ γέρων καὶ κατάσχῃ αὐτὸν ὁ Σιληνός, αὐτίκα ἐπὶ πολὺ ἄφωνός ἐστι καὶ καρηϐαροῦντι καὶ βεϐαπτισμένῳ ἔοικεν, εἶτα ἄφνω φωνή τε λαμπρὰ καὶ φθέγμα τορὸν καὶ πνεῦμα λιγυρὸν ἐγγίγνεται αὐτῷ καὶ λαλίστατος ἐξ ἀφωνοτάτου ἐστίν, οὐδ´ ἂν ἐπιστομίσας παύσειας αὐτὸν μὴ οὐχὶ συνεχῆ λαλεῖν καὶ ῥήσεις μακρὰς συνείρειν. συνετὰ μέντοι πάντα καὶ κόσμια καὶ κατὰ τὸν Ὁμήρου ἐκεῖνον ῥήτορα· νιφάδεσσι γὰρ ἐοικότα χειμερίῃσι διεξέρχονται, οὐδ´ ἀποχρήσει σοι κύκνοις κατὰ τὴν ἡλικίαν εἰκάσαι αὐτούς, ἀλλὰ τεττιγῶδές τι πυκνὸν καὶ ἐπίτροχον συνάπτουσιν ἄχρι βαθείας ἑσπέρας.
                                                                                                                                                                                    Lucien, Bacchus, 6 et 7



[6] Chez les Indiens Machlées, qui occupent la rive gauche du fleuve Indus, si vous considérez la direction de son cours, et qui descendent jusqu'à l'Océan, il est un bois sacré renfermé dans une enceinte. Son étendue n'est pas considérable, mais il est touffu, le lierre et la vigne y forment un épais ombrage. Dans ce bois sont trois sources d'une eau fort belle et fort limpide, l'une consacrée aux Satyres, l'autre à Pan, la troisième à Silène. Tous les ans, les Indiens se rendent dans ce bois, afin d'y célébrer la fête de Bacchus, et ils boivent à ces fontaines, non pas indistinctement, mais chacun suivant son âge, les jeunes gens à la fontaine des Satyres, les hommes faits à celle de Pan, et les vieillards de mon âge à celle de Silène.

[7] Ce qui arrive aux enfants, après qu'ils ont bu à leur source, ou quelle est l'audace des hommes qui ont puisé à celle de Pan, serait chose trop longue à vous dire. Mais il n'est pas inutile de vous raconter ce que font les vieillards, quand ils se sont enivrés à leur fontaine. À peine un vieillard a-t-il bu qu'il est tout à coup pénétré de l'esprit de Silène, il demeure quelque temps sans voix, sa tête est lourde. Il ressemble à un homme complètement plongé dans l'ivresse, puis soudain il recouvre la parole. Sa voix devient pleine et sonore, son accent mélodieux. De muet qu'il était il se fait bavard. En vain vous essayeriez de lui fermer la bouche pour l'empêcher de parler et mettre un terme à ses longs discours. Cependant tout ce qu'il dit est rempli de sens et d'agrément. Comme l'orateur d'Homère, ses paroles sont aussi pressées que les flocons de neige qui tombent en hiver. Il ne conviendrait pas de le comparer aux cygnes, à cause de son âge, mais son éloquence ressemble plutôt aux chants rapides et précipités de la cigale, qui se prolongent jusqu'à une heure avancée du soir.

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λαιός, ά, όν : gauche, situé à gauche.
οἳ : qui (le pronom relatif)
ἐν Ἰνδοῖς τοῖς Μαχλαίοις, οἳ τὰ λαιὰ τοῦ Ἰνδοῦ ποταμοῦ : chez les Indiens Machlées, qui occupent la rive gauche du fleuve Indus.
ῥόος-ῥοῦς, ῥόου-ῥοῦ (ὁ)  : écoulement; courant d’un fleuve.
κατὰ ῥοῦν : en suivant le courant.
βλέπω (imparf. ἔϐλεπον, futur βλέψομαι, postér. βλέψω, aor. ἔϐλεψα, parf. inus. ; parf. passif. βέϐλεμμαι) : jouir de la vue; regarder.
εἰ κατὰ ῥοῦν αὐτοῦ βλέποις : si on regarde dans la direction du courant.
ἀκριϐῶς : tout à fait.
ἄλσος, εος-ους (τὸ) : bois; bois sacré.
ἄφνω, adv. : soudain, tout à coup.
διειδής, ής, ές : transparent, limpide.
διειδεστάτος : très limpide.
ἐνταῦθα, adv. : là, là même; à ce moment-là, alors.
ἐνταῦθα πηγαί εἰσι τρεῖς καλλίστου καὶ διειδεστάτου ὕδατος, ἡ μὲν Σατύρων, ἡ δὲ Πανός, ἡ δὲ Σιληνοῦ : là il y a trois sources d'une eau fort belle et fort limpide, l'une consacrée aux Satyres, l'autre à Pan, la troisième à Silène.
καὶ πίνουσι τῶν πηγῶν, οὐχ ἁπασῶν ἅπαντες, ἀλλὰ καθ´ ἡλικίαν : et ils boivent l'eau des sources, pas tous aux mêmes, mais selon leur âge.



Ἃ μὲν οὖν πάσχουσιν οἱ παῖδες ἐπειδὰν πίωσιν, ἢ οἷα οἱ ἄνδρες τολμῶσι κατεχόμενοι τῷ Πανί, μακρὸν ἂν εἴη λέγειν : Ce qui arrive aux enfants, après qu'ils ont bu à leur source, ou quelle est l'audace des hommes qui ont puisé à celle de Pan, serait chose trop longue à vous dire.
ἀλλότριος, α, ον : qui concerne autrui, d’autrui; étranger.
μεθύω (seul. prés. et imparf. ; les autres temps se confondent avec ceux de μεθύσκω) : être ivre.
μεθύσκω (futur μεθύσω, aor. ἐμέθυσα, parf. inus. ; passif futur μεθυσθήσομαι, aor ἐμεθύσθην, parf. μεμέθυσμαι) : enivrer. --- voir Bailly. version établie par Gérard Gréco.
ἃ δ´ οἱ γέροντες ποιοῦσιν, ὅταν μεθυσθῶσιν τοῦ ὕδατος, οὐκ ἀλλότριον εἰπεῖν : mais il n'est pas hors sujet de vous raconter ce que font les vieillards, quand ils se sont enivrés à leur fontaine.



βαθύς, εῖα, ύ : profond; qui s'étend en profondeur, qui s'étend au loin.
ἄχρι βαθείας ἑσπέρας : jusqu'à une heure avancée du soir.









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Des exemples de générosité

   
  voir "le grec par les textes", 4/3 ème; Gravil et Maurois, page 119; éditions Gallimard.





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Κόνων δὲ τῇ περὶ Κνίδον ναυμαχίᾳ νικήσας Λακεδαιμονίους καὶ τειχίσας τὸν Πειραιᾶ ἑκατόμϐην τῷ ὄντι θύσας καὶ οὐ ψευδωνύμως πάντας Ἀθηναίους εἱστίασεν. Ἀλκιϐιάδης δὲ Ὀλύμπια νικήσας ἅρματι πρῶτος καὶ δεύτερος καὶ τέταρτος, εἰς ἃς νίκας καὶ Εὐριπίδης ἔγραψεν ἐπινίκιον, θύσας Ὀλυμπίῳ Διὶ τὴν πανήγυριν πᾶσαν εἱστίασε. τὸ αὐτὸ ἐποίησε καὶ Λεώφρων Ὀλυμπίασιν, ἐπινίκιον γράψαντος τοῦ Κείου Σιμωνίδου. Ἐμπεδοκλῆς δ´ ὁ Ἀκραγαντῖνος ἵπποις Ὀλύμπια νικήσας, Πυθαγορικὸς ὢν καὶ ἐμψύχων ἀπεχόμενος, ἐκ σμύρνης καὶ λιϐανωτοῦ καὶ τῶν πολυτελεστάτων ἀρωμάτων βοῦν ἀναπλάσας διένειμε τοῖς εἰς τὴν πανήγυριν ἀπαντήσασιν. ὁ δὲ Χῖος Ἴων τραγῳδίαν νικήσας Ἀθήνησιν ἑκάστῳ τῶν Ἀθηναίων ἔδωκε Χίου κεράμιον. τοῦ γάρ τις ἄλλου πρὸς θεῶν ἂν οὕνεκα εὔξαιτο πλουτεῖν εὐπορεῖν τε χρημάτων ἢ τοῦ δύνασθαι παραϐοηθεῖν τοῖς φίλοις σπείρειν τε καρπὸν Χάριτος, ἡδίστης θεῶν; τοῦ μὲν πιεῖν γὰρ καὶ φαγεῖν τὰς ἡδονὰς ἔχομεν ὁμοίας· οὐδὲ τοῖς λαμπροῖσι γὰρ δείπνοις τὸ πεινῆν παύεται, Ἀντιφάνης φησίν. ὅτι Ξενοκράτης ὁ Χαλκηδόνιος καὶ Σπεύσιππος ὁ Ἀκαδημαικὸς καὶ Ἀριστοτέλης βασιλικοὺς νόμους ἔγραψε. ἀλλὰ μὴν καὶ ὁ Ἀκραγαντῖνος Τελλίας, φιλόξενος ὢν καὶ πάντας πολυωρῶν, πεντακοσίοις ἱππεῦσιν ἐκ Γέλας ποτὲ καταλύσασιν ὡς αὐτὸν χειμῶνος ὥρᾳ ἔδωκεν ἑκάστῳ χιτῶνα καὶ ἱμάτιον.
                                                                                                                                              Athénée, Le Banquet ou les Deipnosophistes, 1, 5



Conon, ayant triomphé des Lacédémoniens à la bataille navale de Cnide et ayant fortifié le Pirée, offrit un sacrifice (= une hécatombe) et sans user d'une appelation trompeuse, et il invita tous les Athéniens à un festin. Alcibiade, ayant obtenu à Olympie, à la course des chars, le premier, le second et le quatrième prix, victoires auxquels Eurpide consacra une ode triomphale, fit un sacrifice à Zeus Olympien et invita toute la foule venue assister aux fêtes. Léophron fit de même à Olympie. Empédocle d'Agrigente gagna à Olypie la course des chevaux, mais comme il était disciple de Pythagore et s'abstenait de nourriture animale, il fit modeler un bœuf avec de la myrrhe, de l'encens et les aromates les plus préceux et le répartit entre ceux qui s'étaient rassemblés pour les fêtes. Quant à Ion de Chios, qui avait remporté à Athènes le concours de tragédie, il fit donner à chacun des Athéniens une amphore de vin de Chios. Antiphane a dit : " Par les dieux ! pourquoi désirer être riche et dans l'abondance. " Mais Tellias d'Agrigente, qui exerçait avec tant de plaisir l'hospitalité, et se tenait, pour ainsi dire, à la porte pour recevoir le premier qui se présentait, ne reçut-il pas un jour cinq cents cavaliers de Gela, qui vinrent chez lui au milieu de l'hiver, donnant même à chacun une tunique et un manteau ?

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ψευδωνύμως adv. : sous un faux nom.
τειχίζω (imparf. ἐτείχιζον, futur att. τειχιῶ, aor. ἐτείχισα, parf. τετείχικα) : construire un mur; construire en guise de rempart ou pour se défendre.
ἑκατόμϐη, ης (ἡ) : hécatombe ou sacrifice de cent bœufs. --- voir dico Bailly version établie par Gérard Gréco.
Κόνων δὲ τῇ περὶ Κνίδον ναυμαχίᾳ νικήσας Λακεδαιμονίους καὶ τειχίσας τὸν Πειραιᾶ : Conon, ayant triomphé des Lacédémoniens à la bataille navale de Cnide et ayant fortifié le Pirée.
ἑκατόμϐην τῷ ὄντι θύσας καὶ οὐ ψευδωνύμως πάντας Ἀθηναίους εἱστίασεν : il offrit un sacrifice (= une hécatombe) et sans user d'une appelation trompeuse, et il invita tous les Athéniens à un festin.


κεράμιον, ου (τὸ) : jarre, amphore.
κεράμιον (s. ent. οἶνου) : amphore de vin.
ὁ δὲ Χῖος Ἴων τραγῳδίαν νικήσας Ἀθήνησιν ἑκάστῳ τῶν Ἀθηναίων ἔδωκε Χίου κεράμιον : quant à Ion de Chios, ayant remporté à Athènes le concours de tragédie, il fit donner à chacun des Athéniens une amphore de vin de Chios.

φιλόξενος, ος, ον : qui aime les étrangers, qui pratique l’hospitalité, hospitalier.
πολυωρέω-ῶ : prendre grand soin de.
ἀλλὰ μὴν καὶ ὁ Ἀκραγαντῖνος Τελλίας, φιλόξενος ὢν καὶ πάντας πολυωρῶν : mais Tellias d'Agrigente, hospitalier et qui prenait soin de tout le monde.
χειμῶνος ὥρα : la saison d’hiver.
χειμῶνος ὥρᾳ : au milieu de l'hiver.










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      voir "le grec par les textes", 4/3 ème; Gravil et Maurois, page 119; éditions Gallimard.

Les Héraclides





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Μετὰ τὸν Ἡρακλέους ἐξ ἀνθρώπων ἀφανισμὸν Εὐρυσθεὺς ἐξελάσας τοὺς παῖδας τῆς πατρίδος αὐτὸς ἐϐασίλευεν. οἱ δὲ Ἡρακεῖδαι καταφυγόντες πρὸς Δημοφῶντα τὸν Θησέως ᾤκησαν τὴν τετράπολιν τῆς Ἀττικῆς· Εὐρυσθεὺς δὲ πέμψας ἄγγελον εἰς Ἀθήνας πόλεμον προέλεγε τοῖς Ἀθηναίοις, εἰ μὴ τοὺς Ἡρακλείδας ἐξελάσωσιν. οἱ μὲν οὖν Ἀθηναῖοι τὸν πόλεμον οὐκ ἀπολέγονται, Εὐρυσθεὺς δ' ἐνέϐαλεν εἰς τὴν Ἀττικὴν καὶ παραταξάμενος αὐτὸς μὲν ἀποθνῄσκει μαχόμενος, ἡ δὲ πληθὺς ἐτράπη τῶν Ἀργείων. Ὕλλος δὲ καὶ οἱ ἄλλοι Ἡρακλεῖδαι καὶ οἱ σὺν αὐτοῖς ἀποθανόντος Εὐρυσθέως κατοικίζονται πάλιν ἐν Θήϐαις.

ἐν δὲ τούτῳ καὶ Ἀλκμήνη κατὰ γῆρας ἀποθνῄσκει καὶ αὐτὴν ἐξεκόμισαν Ἡρακλεῖδαι· ᾤκουν δὲ παρὰ τὰς Ἠλέκτρας πύλας, ὅθιπερ καὶ Ἡρακλῆς ἐν τῇ ἀγορᾷ. Ζεὺς δὲ Ἑρμῆν πέμπει κελεύων Ἀλκμνήνην ἐκκλέψαι καὶ ἀπενεγκεῖν εἰς Μακάρων νήσους καὶ δοῦναι Ῥοδαμάνθυι γυναῖκα· Ἑρμῆς δὲ πεισθεὶς Ἀλκμνήνην ἐκκλέπτει, λίθον δ' ἀντ' αὐτῆς ἐντίθησιν εἰς τὴν σορόν. οἱ δ' Ἡρακλεῖδαι ἐπεὶ τὴν λάρνακα φέροντες ἐϐαρύνοντο, κατατίθενται καὶ ἀποκαλύψαντες εὗρον ἀντὶ τῆς Ἀλκμνήνης λίθον καὶ αὐτὸν ἐξελόντες ἔστησαν ἐν τῷ ἄλσει, ὅθιπέρ ἐστι τὸ ἡρῷον τὸ τῆς Ἀλκμνήνης ἐν Θήϐαις.
                                                                                                                                                       
Antoninius Liberalis, les Métamorphoses, 33




Quand Héraclès eut disparu d'entre les hommes, Eurystée bannit ses enfants de leur patrie et régna en personne sur le pays. Les Héraclides qui s'étaient réfugiés auprès de Démophon, fils de Thésée, habitèrent la tétrapole de l'Attique. Eurysthée envoya un messager à Athènes, en menaçant les habitants de la guerre s'ils ne chassaient pas les Héraclides. Les Athéniens ne reculèrent devant la guerre; Eurysthée envahit l'Attique et, ayant mis ses troupes en ordre de bataille, il périt lui-même au cours du combat, quant à la foule des Argiens, elle fut mise en déroute. Hyllas, les autres Héraclides et leurs partisans, après la mort d'Eurysthée, s'installèrent à nouveau à Thèbes.

En ce temps-là, Alcmène mourut de vieillesse et les Héraclides lui firent des funérailles; ils habitaient près des portes Electres à l'endroit même où Héraclès avait aussi vécu. Zeus envoya Hermès avec l'ordre d'enlever furtivement Alcmène, de l'emmener aux îles des Bienheureux et de la donner comme épouse à Rhadamanthe. Hermès obéit, enleva Alcmène et mit une pierre à sa place dans le cercueil. Et comme les Héraclides qui portaient le cercueil le trouvaient trop lourd, ils le posèrent par terre, ôtèrent le couvercle et y découvrirent une pierre à la place d'Alcmène, ils la prirent et la dressèrent dans le bois sacré à l'endroit même où est situé l'hérôon d'Alcmène à Thèbes.
            trad. Manólis Papathomópoulos; éd. les belles lettres

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Ἀλκμήνη, ης (ἡ) : Alcmène, mère d’Hèraklès.
μάκαρ, μάκαιρα, μάκαρ, ou μάκαρ pour les trois genres ; voc. μάκαρ, gén. μάκαρος : heureux.
δίδωμι (imparf. ἐδίδουν; futur δώσω; aor.1 ἔδωκα; aor.2 *ἔδων, seul. au plur., d’où impér. δός, subj. δῶ, opt. δοίην, inf. δοῦναι, participe δούς ; parf. δέδωκα; passif futur δοθήσομαι, aor. ἐδόθην, parf. δέδομαι) : donner.
Ζεὺς δὲ Ἑρμῆν πέμπει κελεύων Ἀλκμνήνην ἐκκλέψαι καὶ ἀπενεγκεῖν εἰς Μακάρων νήσους καὶ δοῦναι Ῥοδαμάνθυι γυναῖκα : Zeus envoya Hermès avec l'ordre d'enlever furtivement Alcmène, de l'emmener aux îles des Bienheureux et de la donner comme épouse à Rhadamanthe.
ἡρῷος, ος, ον : de héros, héroïque. --- voir dico Bailly version établie par Gérard Gréco.








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Les Amazones





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Ἀμαζόνες γὰρ Ἄρεως μὲν τὸ παλαιὸν ἦσαν θυγατέρες, οἰκοῦσαι δὲ παρὰ τὸν Θερμώδοντα ποταμόν, μόναι μὲν ὡπλισμέναι σιδήρῳ τῶν περὶ αὐτάς, πρῶται δὲ τῶν πάντων ἐφ' ἵππους ἀναϐᾶσαι, οἷς ἀνελπίστως δι' ἀπειρίαν τῶν ἐναντίων ᾕρουν μὲν τοὺς φεύγοντας, ἀπέλειπον δὲ τοὺς διώκοντας· ἐνομίζοντο δὲ διὰ τὴν εὐψυχίαν μᾶλλον ἄνδρες ἢ διὰ τὴν φύσιν γυναῖκες· πλέον γὰρ ἐδόκουν τῶν ἀνδρῶν ταῖς ψυχαῖς διαφέρειν ἢ ταῖς ἰδέαις ἐλλείπειν.
[2,5] ἄρχουσαι δὲ πολλῶν ἐθνῶν, καὶ ἔργῳ μὲν τοὺς περὶ αὐτὰς καταδεδουλωμέναι, λόγῳ δὲ περὶ τῆσδε τῆς χώρας ἀκούουσαι κλέος μέγα, πολλῆς δόξης καὶ μεγάλης ἐλπίδος χάριν παραλαϐοῦσαι τὰ μαχιμώτατα τῶν ἐθνῶν ἐστράτευσαν ἐπὶ τήνδε τὴν πόλιν. τυχοῦσαι δ' ἀγαθῶν ἀνδρῶν ὁμοίας ἐκτήσαντο τὰς ψυχὰς τῇ φύσει, καὶ ἐναντίαν τὴν δόξαν τῆς προτέρας λαϐοῦσαι μᾶλλον ἐκ τῶν κινδύνων ἢ ἐκ τῶν σωμάτων ἔδοξαν εἶναι γυναῖκες. [2,6] μόναις δ' αὐταῖς οὐκ ἐξεγένετο ἐκ τῶν ἡμαρτημένων μαθούσαις περὶ τῶν λοιπῶν ἄμεινον βουλεύσασθαι, οὐδ' οἴκαδε ἀπελθούσαις ἀπαγγεῖλαι τήν τε σφετέραν αὐτῶν δυστυχίαν καὶ τὴν τῶν ἡμετέρων προγόνων ἀρετήν· αὐτοῦ γὰρ ἀποθανοῦσαι, καὶ δοῦσαι δίκην τῆς ἀνοίας, τῆσδε μὲν τῆς πόλεως διὰ τὴν ἀρετὴν ἀθάνατον τὴν μνήμην ἐποίησαν, τὴν δὲ ἑαυτῶν πατρίδα διὰ τὴν ἐνθάδε συμφορὰν ἀνώνυμον κατέστησαν. ἐκεῖναι μὲν οὖν τῆς ἀλλοτρίας ἀδίκως ἐπιθυμήσασαι τὴν ἑαυτῶν δικαίως ἀπώλεσαν.
                                                                                                                                        Lysias,  oraison funèbre,  2, 4- 2, 5






[2,4] On a connu les Amazones, ces filles d'Arès, qui habitaient sur les bords du Thermodon; elles étaient les seules dans ces régions éloignées à porter une armure d'airain, et les premières à monter sur des chevaux pour combattre. Étonnant par cette hardiesse leurs ennemis qui n'avaient jamais vu de cavaliers, elles pouvaient en même temps, et les atteindre lorsqu'ils fuyaient, et leur échapper lorsqu'elles en étaient poursuivies. Bien supérieures à leur sexe par le courage, on les voyait même l'emporter sur les hommes par la force de l'âme, plus qu'elles ne leur cédaient par la faiblesse du corps.

[2,5] Souveraines de plusieurs peuples, et déjà dominatrices de tous leurs voisins, elles entendirent parler de notre contrée et de la renommée de ses habitants. Le désir et l'espoir de s'illustrer par de nouveaux triomphes les animent; et les engagent à les suivre des nations belliqueuses,[2] et s'avancent contre notre ville. Mais comme elles trouvèrent en nous des hommes d'un courage extraordinaire, rendues à leur faiblesse naturelle, elles démentirent la gloire dont elles avaient joui jusqu'alors, et prouvèrent, par le mauvais succès de leur entreprise, que l'éducation ne peut vaincre entièrement la nature. [6] L'avantage de pouvoir s'instruire par leurs fautes et prendre à l'avenir un parti plus sage leur fut même refusé. Elles ne purent retourner dans leur pays pour y annoncer leur infortune et la bravoure de nos ancêtres; elles périrent toutes dans l'Attique, punies de leur imprudence, et fournirent à notre ville l'occasion de s'immortaliser par la valeur en même temps que, par une défaite totale, elles privèrent leur patrie de son ancienne célébrité. Enfin, pour avoir désiré injustement les possessions d'autrui, elles perdirent justement les leurs.


autre traduction :

[2,4 Jadis vivaient les Amazones, filles d'Arès, habitant près du fleuve Thermodon. Elles étaient les seules, parmi les peuples d'alentour, à porter une armure de fer, et elles furent les premières dans le monde entier qui montèrent sur des chevaux : ainsi, elles pouvaient surprendre l'ennemi étonné, l'atteindre dans sa fuite, aussi bien qu'échapper à sa poursuite. Femmes par le sexe, leur courage les faisait plutôt considérer comme des hommes. Elles se montraient en effet supérieures aux hommes par la vigueur de leurs âmes, plus qu'elles ne leur cédaient par la faiblesse de leurs corps.

[2,5] Souveraines de nombreux peuples, elles avaient déjà asservi leurs voisins, quand la glorieuse renommée de notre pays leur inspira un grand espoir de s'illustrer : suivies des nations les plus belliqueuses, elles marchent sur notre ville. Mais elles trouvèrent devant elles des hommes de cœur, et leurs âmes ne furent plus au-dessus de leur sexe : elles démentirent leur première réputation, et ces périls mieux que la faiblesse de leurs corps les révélèrent femmes. 6 Par un malheur singulier, elles ne purent tirer une leçon de leurs fautes pour mieux se conduire dans la suite : au lieu de retourner chez elles avouer leur insuccès et proclamer la valeur de nos ancêtres, c'est sur notre sol même qu'elles périrent, et que leur folie reçut son châtiment.

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Θερμώδων, οντος (ὁ) : le Thermodon (fleuve).
οἰκέω-ῶ (futur οἰκήσω, aor. ᾤκησα, parf. ᾤκηκα) : vivre dans sa maison; habiter.
παρὰ τὸν Θερμώδοντα ποταμόν : près du fleuve Thermodon.
ὁπλίζω (imparf. ὥπλιζον, aor. ὥπλισα, pl.q.parf. ὡπλίκειν; passif aor. ὡπλίσθην, parf. ὥπλισμαι): appareiller, mettre en état;  munir d’armes, armer.
σίδηρος, ου (ὁ) : fer; épée, pointe de flèche, hache.
μόναι μὲν ὡπλισμέναι σιδήρῳ τῶν περὶ αὐτάς : les seules dans ces régions éloignées à porter une armure d'airain.

ἁμαρτάνω (futur ἁμαρτήσομαι, aor.2 ἥμαρτον, parf. ἡμάρτηκα; passif aor. ἡμαρτήθην, parf. ἡμάρτημαι) : manquer le but; se tromper, commettre une erreur; pécher, faire une faute.
memento τὰ ἡμαρτημένα : les fautes commises.
μανθάνω (futur μαθήσομαι, aor.2 ἔμαθον, parf. μεμάθηκα; passif. seul. prés. et parf. μεμάθημαι): apprendre, étudier, s’instruire.
μανθάνω (futur μαθήσομαι, aor.2 ἔμαθον, parf. μεμάθηκα; passif. seul. prés. et parf. μεμάθημαι): apprendre, étudier, s’instruire.
ἐκγίγνομαι (futur ἐκγενήσομαι, aor. ἐξεγενόμην, parf. ἐκγέγονα): naître de; sortir de
memento οὐκ ἐξεγένετο, Her. 3, 142 : cela ne fut pas en son pouvoir.

πατρίς, ίδος,  adj. f. : des ancêtres, de la patrie.
ἡ πατρίς (s.-ent. γῆ ou χώρα) : terre des ancêtres.
ἀλλότριος, α, ον : qui concerne autrui, d’autrui.

ἐπιθυμέω-ῶ : désirer.
ἀπόλλυμι (imparf. ἀπώλλυν, futur ἀπολέσω, att. ἀπολῶ; aor. ἀπώλεσα; parf.1 ἀπολώλεκα) : perdre, faire périr.
ἐκεῖναι τῆς ἀλλοτρίας ἀδίκως ἐπιθυμήσασαι τὴν ἑαυτῶν δικαίως ἀπώλεσαν : ayant désiré injustement les biens d'autrui, elles perdirent justement les leurs.










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L'homme juste ne peut exercer le pouvoir





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ἱκανὸν γάρ, οἶμαι, ἐγὼ παρέχομαι τὸν μάρτυρα ὡς ἀληθῆ λέγω, τὴν πενίαν. ἴσως ἂν οὖν δόξειεν ἄτοπον εἶναι, ὅτι δὴ ἐγὼ ἰδίᾳ μὲν ταῦτα συμβουλεύω περιιὼν καὶ πολυπραγμονῶ, δημοσίᾳ δὲ οὐ τολμῶ ἀναϐαίνων εἰς τὸ πλῆθος τὸ ὑμέτερον συμϐουλεύειν τῇ πόλει. τούτου δὲ αἴτιόν ἐστιν ὃ ὑμεῖς ἐμοῦ πολλάκις ἀκηκόατε πολλαχοῦ λέγοντος, ὅτι μοι θεῖόν τι καὶ (31d) δαιμόνιον γίγνεται (φωνή), ὃ δὴ καὶ ἐν τῇ γραφῇ ἐπικωμῳδῶν Μέλητος ἐγράψατο. ἐμοὶ δὲ τοῦτ᾽ ἔστιν ἐκ παιδὸς ἀρξάμενον, φωνή τις γιγνομένη, ἣ ὅταν γένηται, ἀεὶ ἀποτρέπει με τοῦτο ὃ ἂν μέλλω πράττειν, προτρέπει δὲ οὔποτε. τοῦτ᾽ ἔστιν ὅ μοι ἐναντιοῦται τὰ πολιτικὰ πράττειν, καὶ παγκάλως γέ μοι δοκεῖ ἐναντιοῦσθαι· εὖ γὰρ ἴστε, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, εἰ ἐγὼ πάλαι ἐπεχείρησα πράττειν τὰ πολιτικὰ πράγματα, πάλαι ἂν ἀπολώλη καὶ οὔτ᾽ ἂν ὑμᾶς ὠφελήκη (31e) οὐδὲν οὔτ᾽ ἂν ἐμαυτόν. καί μοι μὴ ἄχθεσθε λέγοντι τἀληθῆ· οὐ γὰρ ἔστιν ὅστις ἀνθρώπων σωθήσεται οὔτε ὑμῖν οὔτε ἄλλῳ πλήθει οὐδενὶ γνησίως ἐναντιούμενος καὶ διακωλύων πολλὰ ἄδικα καὶ παράνομα ἐν τῇ πόλει γίγνεσθαι, ἀλλ᾽ (32a) ἀναγκαῖόν ἐστι τὸν τῷ ὄντι μαχούμενον ὑπὲρ τοῦ δικαίου, καὶ εἰ μέλλει ὀλίγον χρόνον σωθήσεσθαι, ἰδιωτεύειν ἀλλὰ μὴ δημοσιεύειν.
                                                                                                                                                    Platon, apologie de Socrate, 31b-32a



En effet, il me suffit, j'imagine, de produire le témoin qui atteste que je dis vrai : c'est ma pauvreté ! Une chose toutefois pourra sembler étrange : alors que, bien sûr, je prodigue à tout vent mes conseils en privé et que je me mêle des affaires de tout le monde, je n'ai pas l'audace de m'occuper des affaires publiques et de monter à la tribune de l'Assemblée du peuple, dont vous êtes les membres, pour donner des conseils à la cité. Cela tient à ce que, comme vous me l'avez maintes fois et en maints endroits entendu dire, se manifeste à moi quelque chose de divin, de démonique, dont précisément fait état Mélétos dans l'action qu'il a intentée, en se comportant comme un auteur de comédie. Les débuts en remontent à mon enfance. C'est une voix qui, lorsqu'elle se fait entendre, me détourne toujours de ce que je vais faire, mais qui jamais ne me pousse à l'action. Voilà ce qui s'oppose à ce que je me mêle des affaires de la cité, et c'est là, pour ma part je le crois - une opposition particulièrement heureuse. Car, sachez-le, Athéniens, si j'avais entrepris de me mêler de la cité, il y a longtemps que je serais mort et que je ne serais plus d'aucune utilité ni pour vous ni pour moi-même. Et ne vous mettez pas en colère contre moi, car je vais vous asséner une vérité. Il n'est personne qui ne puisse rester en vie,  s'il s'oppose franchement soit à vous soit à une autre assemblée, et qu'il cherche à empêcher que nombre d'actions injustes et illégales ne soient commises dans la cité. Mais celui qui aspire vraiment à combattre pour la justice, s'il tient à rester en vie si peu de temps que ce soit, doit demeurer un simple particulier et se garder de devenir un homme public.
          trad. Luc Brisson; éd. GF Flammarion

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ἱκανός, ή, όν : qui va bien, suffisant, convenable.
moyen παρέχομαι (futur. παρέξομαι et παρασχήσομαι, parf. παρέσχημαι) : offrir, présenter, fournir, donner quelque chose de soi, par ses propres moyens, par sa propre volonté.
πενία, ας (ἡ) : pauvreté, indigence.
ἄτοπος, ος, ον : qui n’est pas en son lieu et place, étrange.


τῷ ὄντι : en réalité, réellement, véritablement.
ἀναγκαῖόν ἐστι τὸν τῷ ὄντι μαχούμενον ὑπὲρ τοῦ δικαίου : il est nécessaire que celui qui a l’intention de se battre réellement pour la justice.

ἀχθέω-ῶ : (imparf. ἤχθεον-ουν) : fatiguer, accabler.
καί μοι μὴ ἄχθεσθε λέγοντι τἀληθῆ : et ne m'accablez pas, moi qui vous dis la vérité.

οὐ γὰρ ἔστιν ὅστις ἀνθρώπων σωθήσεται : car nul homme n’aura la vie sauve.

ἰδιωτεύω : être simple particulier, mener une vie de simple particulier.
δημοσιεύω : rendre public, être un homme public.
καὶ εἰ μέλλει ὀλίγον χρόνον σωθήσεσθαι, ἰδιωτεύειν ἀλλὰ μὴ δημοσιεύειν : même s’il ne doit avoir la vie sauve que peu de temps, il doit mener une vie de simple particulier, et non pas celle d’un homme public.









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Rester au poste où Dieu nous a placés





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[9, 12] καὶ τοῦτον ἔδει τὸν ἀγῶνα ἀγωνίζεσθαι τὸν διδάσκαλον ὑμῶν καὶ παιδευτήν, εἴ τις ἄρα ἦν·
ὑμᾶς μὲν ἔρχεσθαι λέγοντας· " Ἐπίκτητε, οὐκέτι ἀνεχόμεθα μετὰ τοῦ σωματίου τούτου δεδεμένοι καὶ τοῦτο τρέφοντες καὶ ποτίζοντες καὶ ἀναπαύοντες καὶ καθαίροντες, εἶτα δι´ αὐτὸ συμπεριφερόμενοι τοῖσδε καὶ τοῖσδε. [13] οὐκ ἀδιάφορα ταῦτα καὶ οὐδὲν πρὸς ἡμᾶς καὶ ὁ θάνατος οὐ κακόν; καὶ συγγενεῖς τινες τοῦ θεοῦ ἐσμεν κἀκεῖθεν ἐληλύθαμεν; [14] ἄφες ἡμᾶς ἀπελθεῖν ὅθεν ἐληλύθαμεν, ἄφες λυθῆναί ποτε τῶν δεσμῶν τούτων τῶν ἐξηρτημένων καὶ βαρούντων. [15] ἐνταῦθα λῃσταὶ καὶ κλέπται καὶ δικαστήρια καὶ οἱ καλούμενοι τύραννοι δοκοῦντες ἔχειν τινὰ ἐφ´ ἡμῖν ἐξουσίαν διὰ τὸ σωμάτιον καὶ τὰ τούτου κτήματα. ἄφες δείξωμεν αὐτοῖς, ὅτι οὐδενὸς ἔχουσιν ἐξουσίαν "·

[16]
ἐμὲ δ´ ἐν τῷδε λέγειν ὅτι " ἄνθρωποι, ἐκδέξασθε τὸν θεόν. ὅταν ἐκεῖνος σημήνῃ καὶ ἀπολύσῃ ὑμᾶς ταύτης τῆς ὑπηρεσίας, τότ´ ἀπολύεσθε πρὸς αὐτόν· ἐπὶ δὲ τοῦ παρόντος ἀνάσχεσθε ἐνοικοῦντες ταύτην τὴν χώραν, εἰς ἣν ἐκεῖνος ὑμᾶς ἔταξεν. [17] ὀλίγος ἄρα χρόνος οὗτος ὁ τῆς οἰκήσεως καὶ ῥᾴδιος τοῖς οὕτω διακειμένοις. ποῖος γὰρ ἔτι τύραννος ἢ ποῖος κλέπτης ἢ ποῖα δικαστήρια φοϐερὰ τοῖς οὕτως παρ´ οὐδὲν πεποιημένοις τὸ σῶμα καὶ τὰ τούτου κτήματα; μείνατε, μὴ ἀλογίστως ἀπέλθητε ".
                                                                                                                                                      Arrien, les entretiens d'Epictète, 1, 9, 12-17





[9, 12] Voilà la lutte que devait mener votre maître et éducateur, si vraiment il en était un.
Vous viendrez lui dire : "Epictète, nous ne pouvons plus supporter d'être enchaînés à ce corps misérable, d'avoir à le nourrir, à l'abreuver, à le faire reposer, à le laver, et ensuite de l'avoir pour compagnon avec telles et telles gens. [13] N'est-il pas vrai que ce sont là choses indifférentes et qui ne sont rien pour nous, et que la mort n'est pas un mal ? Et que nous sommes de la parenté de Dieu et que là est notre origine ? [14] Laisse-nous retourner d'où nous sommes venus. Laisse-nous nous délivrer enfin de ces chaînes fixées à nous et qui nous pèsent.  Ici-bas, il n'y a que brigands et voleurs, tribunaux et ce qu'on appelle des tyrans, qui semblent avoir sur nous quelque pouvoir à cause de ce corps misérable et de ses biens. Laisse-nous leur montrer  qu'ils n'ont pouvoir sur personne.

[16] Et moi, sur ce point, je dirais : " Hommes, attendez Dieu. lorsque lui vous fera signe et vous délivrera de ce service, alors libérez-vous, pour le rejoindre. Mais pour le moment, supportez de demeurer à ce poste où lui vous a placés. Il est court, voyez-vous, ce temps de votre séjour.... Attendez, ne partez pas de façon déraisonnable.
      
trad. Poulain et Lefaure; Exercices grecs, page 126; éd. J. de Gigord.

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συγγενής, anc. att. ξυγγενής, ής, ές : qui vient de naissance, inné, naturel; de même origine, de même famille, parent.
ἔρχομαι (futur ἐλεύσομαι, att. εἶμι, aor.2 ἦλθον, parf. ἐλήλυθα : venir.
κἀκεῖθεν, crase pour καὶ ἐκεῖθεν.
ἐκεῖθεν, adv. : de là, de là-bas.
καὶ συγγενεῖς τινες τοῦ θεοῦ ἐσμεν : que nous sommes les parents de Dieu.
κἀκεῖθεν ἐληλύθαμεν : et que c'est de là-bas = de lui que nous venons.








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Après la mort, jugement impartial des âmes





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[524b] ὁ θάνατος τυγχάνει ὤν, ὡς ἐμοὶ δοκεῖ, οὐδὲν ἄλλο ἢ δυοῖν πραγμάτοιν διάλυσις, τῆς ψυχῆς καὶ τοῦ σώματος, ἀπ' ἀλλήλοιν· ἐπειδὰν δὲ διαλυθῆτον ἄρα ἀπ' ἀλλήλοιν, οὐ πολὺ ἧττον ἑκάτερον αὐτοῖν ἔχει τὴν ἕξιν τὴν αὑτοῦ ἥνπερ καὶ ὅτε ἔζη ὁ ἄνθρωπος, τό τε σῶμα τὴν φύσιν τὴν αὑτοῦ καὶ τὰ θεραπεύματα καὶ τὰ παθήματα ἔνδηλα (524c) πάντα. οἷον εἴ τινος μέγα ἦν τὸ σῶμα φύσει ἢ τροφῇ ἢ ἀμφότερα ζῶντος, τούτου καὶ ἐπειδὰν ἀποθάνῃ ὁ νεκρὸς μέγας, καὶ εἰ παχύς, παχὺς καὶ ἀποθανόντος, καὶ τἆλλα οὕτως· καὶ εἰ αὖ ἐπετήδευε κομᾶν, κομήτης τούτου καὶ ὁ νεκρός. μαστιγίας αὖ εἴ τις ἦν καὶ ἴχνη εἶχε τῶν πληγῶν οὐλὰς ἐν τῷ σώματι ἢ ὑπὸ μαστίγων ἢ ἄλλων τραυμάτων ζῶν, καὶ τεθνεῶτος τὸ σῶμα ἔστιν ἰδεῖν ταῦτα ἔχον· ἢ κατεαγότα εἴ του ἦν μέλη ἢ διεστραμμένα ζῶντος, καὶ (524d) τεθνεῶτος ταὐτὰ ταῦτα ἔνδηλα. ἑνὶ δὲ λόγῳ, οἷος εἶναι παρεσκεύαστο τὸ σῶμα ζῶν, ἔνδηλα ταῦτα καὶ τελευτήσαντος ἢ πάντα ἢ τὰ πολλὰ ἐπί τινα χρόνον. ταὐτὸν δή μοι δοκεῖ τοῦτ' ἄρα καὶ περὶ τὴν ψυχὴν εἶναι, ὦ Καλλίκλεις· ἔνδηλα πάντα ἐστὶν ἐν τῇ ψυχῇ, ἐπειδὰν γυμνωθῇ τοῦ σώματος, τά τε τῆς φύσεως καὶ τὰ παθήματα ἃ διὰ τὴν ἐπιτήδευσιν ἑκάστου πράγματος ἔσχεν ἐν τῇ ψυχῇ ὁ ἄνθρωπος. ἐπειδὰν οὖν ἀφίκωνται παρὰ τὸν δικαστήν, οἱ μὲν ἐκ τῆς Ἀσίας (524e) παρὰ τὸν Ῥαδάμανθυν, ὁ Ῥαδάμανθυς ἐκείνους ἐπιστήσας θεᾶται ἑκάστου τὴν ψυχήν, οὐκ εἰδὼς ὅτου ἐστίν, ἀλλὰ πολλάκις τοῦ μεγάλου βασιλέως ἐπιλαϐόμενος ἢ ἄλλου ὁτουοῦν βασιλέως ἢ δυνάστου κατεῖδεν οὐδὲν ὑγιὲς ὂν τῆς ψυχῆς.

[525] ἀλλὰ διαμεμαστιγωμένην καὶ οὐλῶν μεστὴν ὑπὸ (525a) ἐπιορκιῶν καὶ ἀδικίας, ἃ ἑκάστη ἡ πρᾶξις αὐτοῦ ἐξωμόρξατο εἰς τὴν ψυχήν, καὶ πάντα σκολιὰ ὑπὸ ψεύδους καὶ ἀλαζονείας καὶ οὐδὲν εὐθὺ διὰ τὸ ἄνευ ἀληθείας τεθράφθαι· καὶ ὑπὸ ἐξουσίας καὶ τρυφῆς καὶ ὕϐρεως καὶ ἀκρατίας τῶν πράξεων ἀσυμμετρίας τε καὶ αἰσχρότητος γέμουσαν τὴν ψυχὴν εἶδεν· ἰδὼν δὲ ἀτίμως ταύτην ἀπέπεμψεν εὐθὺ τῆς φρουρᾶς, οἷ μέλλει ἐλθοῦσα ἀνατλῆναι τὰ προσήκοντα πάθη.

[526d] ἐγὼ μὲν οὖν, ὦ Καλλίκλεις, ὑπό τε τούτων τῶν λόγων πέπεισμαι, καὶ σκοπῶ ὅπως ἀποφανοῦμαι τῷ κριτῇ ὡς ὑγιεστάτην τὴν ψυχήν· χαίρειν οὖν ἐάσας τὰς τιμὰς τὰς τῶν πολλῶν ἀνθρώπων, τὴν ἀλήθειαν ἀσκῶν πειράσομαι τῷ ὄντι ὡς ἂν δύνωμαι βέλτιστος ὢν καὶ ζῆν.
                                                                                                                                                          Platon, Gorgias, 524b ...




[524b]La mort, à ce qui me semble, n'est que la séparation de deux choses distinctes, l'âme et le corps; et après qu'elles sont séparées, chacune d'elles reste assez sensiblement dans l'état où elle était pendant la vie. Le corps d'une part garde sa nature propre avec les marques visibles des traitements et des accidents qu'il a subis : si, par exemple, l'homme, de son vivant, avait un corps de grande taille, soit par nature, soit pour avoir été bien nourri ou pour ces deux causes à la fois, son cadavre reste de grande taille; s'il était gros, il reste gros après la mort, et ainsi de suite; et s'il portait les cheveux longs, ils restent longs; s'il avait reçu les étrivières et que les coups de fouet eussent laissé leur trace, ou si d'autres blessures  l'avaient marqué, le cadavre présente les mêmes marques; s'il avait quelque membre rompu ou déformé, les mêmes apparences se retrouvent dans le cadavre; en un mot, tous les caractères distinctifs acquis par le corps vivant sont reconnaissables dans le cadavre, ou presque tous, pendant une certaine durée. Je crois, Calliclès, qu'il en est de même de l'âme, et qu'on y aperçoit, lorsqu'elle est dépouillée de son corps, tous ses traits naturels et toutes les modifications qu'elle a subies par suite des manières de vivre auxquelles l'homme l'a pliée en chaque circonstance.
Lorsque les morts arrivent devant le juge et que ceux d'Asie arrivent comparaissent devant Rhadamante, celui-ci les arrête et considère chaque âme, sans savoir à qui elle appartient; souvent, mettant la main sur le Grand Roi ou sur quelque autre prince ou dynaste, il constate qu'il n'y a rien de sain dans son âme, qu'elle est toute lacérée et ulcérée par les parjures et les justices dont sa conduite y a chaque fois laissé l'empreinte, que tout est déformé par le mensonge et la vanité et que rien n'y est droit parce qu'elle a vécu hors de la vérité, que la licence enfin, la mollesse, l'orgueil, l'intempérance de sa conduite l'ont remplie de désordre et de laideur; à cette vue, Rhadamante l'envoie aussitôt, déchue de ses droits, dans la prison, pour y subir les peines appropriées.


526d] Pour ma part, Calliclès, j'ajoute foi à ces récits, et je m'applique à faire en sorte de présenter au juge une âme aussi saine que possible. Dédaigneux des honneurs chers à la plupart, je veux m'efforcer par la recherche de la vérité, de me rendre aussi parfait que possible dans la vie.
     trad. Alfred Croiset et Jean-François Pradeau; éd. les belles lettres


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διαμαστιγόω, -ῶ : fouetter durement, PLAT. Gorg. 524e.

ἐάω (imparf. εἴων, futur ἐάσω, aor. εἴασα, parf. εἴακα) : souffrir, permettre; laisser de côté, renoncer.
χαίρω (impf. ἔχαιρον, futur χαιρήσω, parf. κεχάρηκα) : se réjouir, être joyeux, trouver plaisir à.
χαίρειν οὖν ἐάσας τὰς τιμὰς τὰς τῶν πολλῶν ἀνθρώπων : renonçant à trouver plaisir aux honneurs de la plupart.








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Le supplice de Tantale



Μένιππος
τί κλάεις, ὦ Τάνταλε; ἢ τί σεαυτὸν ὀδύρῃ ἐπὶ τῇ λίμνῃ ἑστώς;

Τάνταλος
ὅτι, ὦ Μένιππε, ἀπόλωλα ὑπὸ τοῦ δίψους

Μένιππος
οὕτως ἀργὸς εἶ, ὡς μὴ ἐπικύψας πιεῖν ἢ καὶ νη Δί᾽ αρυσάμενος κοίλῃ τῇ χειρί;

Τάνταλος
οὐδὲν ὄφελος, εἰ ἐπικύψαιμι: φεύγει γὰρ τὸ ὕδωρ, ἐπειδὰν προσιόντα αἴσθηταί με·  ἢν δέ ποτε καὶ ἀρύσωμαι καὶ προσενέγκω τῷ στόματι, οὐ φθάνω βρέξας ἄκρον τὸ χεῖλος, καὶ διὰ τῶν δακτύλων διαρρυὲν οὐκ οἶδ᾽ ὅπως αὖθις ἀπολείπει ξηρὰν τὴν χεῖρά μοι.

Μένιππος
τεράστιόν τι πάσχεις, ὦ Τάνταλε. ἀτὰρ εἰπέ μοι, τί δαὶ καὶ δέῃ τοῦ πιεῖν; οὐ γὰρ σῶμα ἔχεις, ἀλλ᾽ ἐκεῖνο μὲν ἐν Λυδίᾳ που τέθαπται, ὅπερ καὶ πεινῆν καὶ διψῆν ἐδύνατο, σὺ δὲ ἡ ψυχὴ πῶς ἂν ἔτι ἢ διψῴης ἢ πίνοις;

Τάνταλος
τοῦτ᾽ αὐτὸ ἡ κόλασίς ἐστι, τὸ διψῆν τὴν ψυχὴν ὡς σῶμα οὖσαν.

Μένιππος
[2] ἀλλὰ τοῦτο μὲν οὕτως πιστεύσομεν, ἐπεὶ φὴς κολάζεσθαι τῷ δίψει. τί δ᾽ οὖν σοι τὸ δεινὸν ἔσται; ἢ δέδιας μὴ ἐνδείᾳ τοῦ ποτοῦ ἀποθάνῃς; οὐχ ὁρῶ γὰρ ἄλλον ᾄδην μετὰ τοῦτον ἢ θάνατον ἐντεῦθεν εἰς ἕτερον τόπον.

Τάνταλος
ὀρθῶς μὲν λέγεις· καὶ τοῦτο δ᾽ οὖν μέρος τῆς καταδίκης, τὸ ἐπιθυμεῖν πιεῖν μηδὲν δεόμενον.

Μένιππος
ληρεῖς, ὦ Τάνταλε, καὶ ὡς ἀληθῶς ποτοῦ δεῖσθαι δοκεῖς, ἀκράτου γε ἐλλεϐόρου νὴ Δία, ὅστις τοὐναντίον τοῖς ὑπὸ τῶν λυττώντων κυνῶν δεδηγμένοις πέπονθας οὐ τὸ ὕδωρ, ἀλλὰ τὴν δίψαν πεφοϐημένος.

Τάνταλος
οὐδὲ τὸν ἐλλέϐορον, ὦ Μένιππε, ἀναίνομαι πιεῖν, γένοιτό μοι μόνον.

Μένιππος
θάρρει, ὦ Τάνταλε, ὡς οὔτε σὺ οὔτε ἄλλος πίεται τῶν νεκρῶν· ἀδύνατον γάρ· καίτοι οὐ πάντες ὥσπερ σὺ ἐκ καταδίκης διψῶσι τοῦ ὕδατος αὐτοὺς οὐχ ὑπομένοντος.
                                                                                                                                                                                           Lucien, dialogue des morts, 17





καταδίκη, ης (ἡ) : condamnation; punition, peine.
δέω (imparf. ἔδεον, futur δεήσω, aor. ἐδέησα, parf. δεδέηκα) : manquer, avoir besoin de.
moyen δέομαι (futur δεήσομαι, aor. ἐδεήθην, parf. δεδέημαι) : avoir besoin.
τοὐναντίον : crase attique pour τὸ ἐναντίον.
ὀρθῶς μὲν λέγεις· καὶ τοῦτο δ᾽ οὖν μέρος τῆς καταδίκης, τὸ ἐπιθυμεῖν πιεῖν μηδὲν δεόμενον : tu as raison; et c'est une partie de ma peine de désirer de boire sans en avoir besoin.

ὑπομένω (futur ὑπομενῶ, aor. ὑπέμεινα, etc.) : demeurer en arrière; attendre; supporter, endurer  . --- cf. dico Bailly version établie par Gérard Gréco.
θάρρει, ὦ Τάνταλε, ὡς οὔτε σὺ οὔτε ἄλλος πίεται τῶν νεκρῶν : sois tranquille, Tantale : ni toi, ni aucun mort ne boira jamais.
ἀδύνατον γάρ· καίτοι οὐ πάντες ὥσπερ σὺ ἐκ καταδίκης διψῶσι τοῦ ὕδατος αὐτοὺς οὐχ ὑπομένοντος : c'est impossible; cependant, tous ne sont pas condamnés, comme toi, à une soif perpétuelle, tandis que l'eau s'échappe de leurs mains.

ὡς ἀληθῶς : aussi véritablement que possible.
ληρέω, ῶ : déraisonner, dire ou faire des sottises.
ληρεῖς, ὦ Τάνταλε, καὶ ὡς ἀληθῶς ποτοῦ δεῖσθαι δοκεῖς : tu es fou, Tantale, et ce n'est pas d'eau que tu parais avoir besoin.

ἀναίνομαι (imparf. ἠναινόμην, aor.1 ἠνηνάμην) : refuser ou repousser avec dédain, dédaigner.
γένοιτό μοι μόνον :  si seulement je pouvais en avoir ! --- cf. gram. BCS
οὐδὲ τὸν ἐλλέϐορον, ὦ Μένιππε, ἀναίνομαι πιεῖν, γένοιτό μοι μόνον : je ne refuserais pas, Ménippe, de boire même de l'ellébore; si seulement je pouvais en avoir !
οὐδὲ ἀναίνομαι πιεῖν : je ne refuserais pas de boire.








MÉNIPPE.
Pourquoi pleurer ainsi Tantale ? pourquoi gémir sur ton sort, debout près de ce lac ?
TANTALE.
Parce que je meurs de soif, Ménippe.
MÉNIPPE.
Es-tu donc si paresseux que tu ne te baisses pour boire, ou bien, par Jupiter, que tu ne puises de l'eau dans le creux de ta main ?
TANTALE.
C'est vainement que je me baisserais : l'eau fuit, dès qu'elle me sent approcher d'elle, et si, par hasard, j'en puise un peu dans ma main et la porte à ma bouche, je n'ai pas le temps de mouiller le bord de mes lèvres que déjà elle s'écoule, je ne sais comment, à travers mes doigts, et que ma main reste sèche.
MÉNIPPE.
Ce qui t'arrive est prodigieux, Tantale. Mais, dis-moi, pourquoi as-tu besoin de boire ? Tu n'as plus de corps; le tien est enseveli quelque part en Lydie, et c'est lui qui pouvait jadis avoir soif ou faim. Aujourd'hui que tu n'es qu'une âme, comment peux-tu éprouver la faim ou la soif ? TANTALE.
C'est cela même qui est mon supplice : mon âme éprouve la soif, comme si elle était mon corps.
 MÉNIPPE.
Je veux bien le croire, puisque tu dis que cette soif est ta punition; mais qu'est-ce que cela peut avoir d'affligeant pour toi ? Crains-tu de mourir, faute de boire ? Je ne vois pas qu'il y ait d'autre enfer que celui-ci, ni de mort qui nous fasse passer en d'autres lieux.
TANTALE.
Tu as raison; et c'est une partie de ma peine de désirer de boire sans en avoir besoin.
MÉNIPPE.
Tu es fou, Tantale, et ce n'est pas d'eau que tu parais avoir besoin, mais, par Jupiter, d'ellébore pur. Tu éprouves le contraire des gens mordus par un chien enragé : ce n'est pas l'eau, c'est la soif que tu crains.
TANTALE.
Je ne refuserais pas, Ménippe, de boire même de l'ellébore; puissé-je en avoir !
MÉNIPPE.
Sois tranquille, Tantale : ni toi, ni aucun mort ne boira jamais; c'est impossible; cependant, tous ne sont pas condamnés, comme toi, à une soif perpétuelle, tandis que l'eau s'échappe de leurs mains.



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La beauté des enfers                                         





Νιρεύς
ἰδοὺ δή, Μένιππος οὑτοσὶ δικάσει, πότερος εὐμορφότερός ἐστιν. εἰπέ, ὦ Μένιππε, οὐ καλλίων σοι δοκῶ;

Μένιππος
τίνες δὲ καὶ ἔστε; πρότερον, οἶμαι, χρὴ γὰρ τοῦτο εἰδέναι.

Νιρεύς
Νιρεὺς καὶ Θερσίτης.

Μένιππος
πότερος οὖν ὁ Νιρεὺς καὶ πότερος ὁ Θερσιτης; οὐδέπω γὰρ τοῦτο δῆλον.

Θερσίτης
ἓν μὲν ἤδη τοῦτο ἔχω, ὅτι ὅμοιός εἰμί σοι καὶ οὐδὲν τηλικοῦτον διαφέρεις ἡλίκον σε Ὅμηρος ἐκεῖνος ὁ τυφλὸς ἐπῄνεσεν ἁπάντων εὐμορφότερον προσειπών, ἀλλ᾽ ὁ φοξὸς ἐγὼ καὶ ψεδνὸς οὐδὲν χείρων ἐφάνην τῷ δικαστῇ. ὅρα δὲ σύ, ὦ Μένιππε, ὅντινα καὶ εὐμορφότερον ἡγῇ.

Νιρεύς
ἐμέ γε τὸν Ἀγλαΐας καὶ Χάροπος, ὃς κάλλιστος ἀνὴρ ὑπὸ Ἴλιον ἦλθον. [p. 181]

Μένιππος

[2] ἀλλ᾽ οὐχὶ καὶ ὑπὸ γῆν, ὡς οἶμαι, κάλλιστος ἦλθες, ἀλλὰ τὰ μὲν ὀστᾶ ὅμοια, τὸ δὲ κρανίον ταύτῃ μόνον ἄρα διακρίνοιτο ἀπὸ τοῦ Θερσίτου κρανίου, ὅτι εὔθρυπτον τὸ σόν: ἀλαπαδνὸν γὰρ αὐτὸ καὶ οὐκ ἀνδρῶδες ἔχεις.

Νιρεύς
καὶ μὴν ἐροῦ Ὅμηρον, ὁποῖος ἦν, ὁπότε συνεστράτευον τοῖς Ἀχαιοῖς.

Μένιππος
ὀνείρατά μοι λέγεις: ἐγὼ δὲ βλέπω ἃ καὶ νῦν ἔχεις, ἐκεῖνα δὲ οἱ τότε ἴσασιν.

Νιρεύς
οὔκουν ἐγὼ ἐνταῦθα εὐμορφότερός εἰμι, ὦ Μένιππε;

Μένιππος
οὔτε σὺ οὔτε ἄλλος εὔμορφος: ἰσοτιμία γὰρ ἐν ᾄδου καὶ ὅμοιοι ἅπαντες.

Θερσίτης
ἐμοὶ μὲν οὖν καὶ τοῦτο ἱκανόν.
                                                                                                                                                                                    Lucien, dialogues des morts, 25







NIRÉE.
Ah ! tiens, voici Ménippe; il va juger qui de nous deux est le plus beau. Parle, Ménippe ; ne me crois-tu pas plus beau que lui ?
MÉNIPPE.
Qui êtes-vous ? avant tout, il faut que je le sache.
NIRÉE.
Nirée et Thersite.
MÉNIPPE.
Qui des deux est Nirée, qui des deux est Thersite ? Ce n'est pas facile à voir.
THERSITE.
J'ai déjà un avantage, celui de te ressembler; nous ne sommes pas si différents que le prétendait, pour te flatter, cet aveugle d'Homère, quand il t'appelait le plus beau des hommes; si bien qu'avec ma tête chauve et pointue, notre juge ne m'a pas trouvé inférieur à toi. Vois maintenant, Ménippe, lequel des deux tu trouves le plus beau.
NIRÉE.
C'est moi, sans doute, le fils d'Aglaïa et de Charops : le plus beau des guerriers qui sont venus à Troie.
MÉNIPPE.
Oui, mais non pas, je pense, le plus beau des mortels qui sont venus sous terre. Tes os sont les mêmes, ton crâne ne diffère de celui de Thersite que parce qu'il est plus facile à briser, étant plus mou et n'ayant rien de viril.
NIRÉE.
Demande donc à Homère qui j'étais, quand je vins me joindre à l'armée des Grecs.
MÉNIPPE.
Visions ! je vois ce que je vois et ce que tu es : ce que tu étais, ceux de ton temps le savent.
NIRÉE.
Ainsi, je ne suis pas plus beau que lui ?
MÉNIPPE.
Vous n'êtes beaux ni l'un ni l'autre; l'égalité règne aux enfers, vous vous ressemblez tous !
THERSITE.
Pour moi, voilà ce qui suffit.




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Prends un miroir avant d'aller aux Jeux Olypiques





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"ἔσοπτρον πρῶτον λάϐε, ἴδε σου τοὺς ὤμους, κατάμαθε τὴν ὀσφύν, τοὺς μηρούς. Ὀλύμπια μέλλεις ἀπογράφεσθαι, ἄνθρωπε, οὐχί τινά ποτε ἀγῶνα ψυχρὸν καὶ ταλαίπωρον. οὐκ ἔστιν ἐν Ὀλυμπίοις νικηθῆναι μόνον καὶ ἐξελθεῖν, ἀλλὰ πρῶτον μὲν ὅλης τῆς οἰκουμένης βλεπούσης δεῖ ἀσχημονῆσαι, οὐχὶ Ἀθηναίων μόνον ἢ Λακεδαιμονίων ἢ Νικοπολιτῶν, εἶτα καὶ δέρεσθαι δεῖ τὸν εἰκῇ ἐξελθόντα, πρὸ δὲ τοῦ δαρῆναι διψῆσαι, καυματισθῆναι, πολλὴν ἁφὴν καταπιεῖν. Βούλευσαι ἐπιμελέστερον, γνῶθι σαυτόν, ἀνάκρινον τὸ δαιμόνιον, δίχα θεοῦ μὴ ἐπιχειρήσῃς. ἂν γὰρ συμϐουλεύσῃ, ἴσθι ὅτι μέγαν σε θέλει γενέσθαι ἢ πολλὰς πληγὰς λαϐεῖν. καὶ γὰρ τοῦτο λίαν κομψὸν τῷ Κυνικῷ παραπέπλεκται· δέρεσθαι αὐτὸν δεῖ ὡς ὄνον καὶ δερόμενον φιλεῖν αὐτοὺς τοὺς δέροντας ὡς πατέρα πάντων, ὡς ἀδελφόν. οὔ· ἀλλ´ ἄν τίς σε δέρῃ, κραύγαζε στὰς ἐν τῷ μέσῳ ’ὦ Καῖσαρ, ἐν τῇ σῇ εἰρήνῃ οἷα πάσχω; ἄγωμεν ἐπὶ τὸν ἀνθύπατον‘. Κυνικῷ δὲ Καῖσαρ τί ἐστιν ἢ ἀνθύπατος ἢ ἄλλος ἢ ὁ καταπεπομφὼς αὐτὸν καὶ ᾧ λατρεύει, ὁ Ζεύς; ἄλλον τινὰ ἐπικαλεῖται ἢ ἐκεῖνον; οὐ πέπεισται δ´, ὅ τι ἂν πάσχῃ τούτων, ὅτι ἐκεῖνος αὐτὸν γυμνάζει; ἀλλ´ ὁ μὲν Ἡρακλῆς ὑπὸ Εὐρυσθέως γυμναζόμενος οὐκ ἐνόμιζεν ἄθλιος εἶναι, ἀλλ´ ἀόκνως ἐπετέλει πάντα τὰ προσταττόμενα· οὗτος δ´ ὑπὸ τοῦ Διὸς ἀθλούμενος καὶ γυμναζόμενος μέλλει κεκραγέναι καὶ ἀγανακτεῖν, ἄξιος φορεῖν τὸ σκῆπτρον τὸ Διογένους; ἄκουε, τί λέγει ἐκεῖνος πυρέσσων πρὸς τοὺς παριόντας· ’κακαί‘, ἔφη, ’κεφαλαί, οὐ μενεῖτε; ἀλλ´ ἀθλητῶν μὲν ὄλεθρον ἢ μάχην ὀψόμενοι ἄπιτε ὁδὸν τοσαύτην εἰς Ὀλυμπίαν· πυρετοῦ δὲ καὶ ἀνθρώπου μάχην ἰδεῖν οὐ βούλεσθε;" ταχύ γ´ ἂν ὁ τοιοῦτος ἐνεκάλεσεν τῷ θεῷ καταπεπομφότι αὐτὸν ὡς παρ´ ἀξίαν αὐτῷ χρωμένῳ, ὅς γε ἐνεκαλλωπίζετο ταῖς περιστάσεσι καὶ θέαμα εἶναι ἠξίου τῶν παριόντων.
                                                                                                                                                                                     Arrien, Epictète, 3, 22



Commence par prendre un miroir; regarde tes épaules; examine tes hanches et tes cuisses. Homme, tu veux te faire inscrire pour les jeux olympiques; ce ne sont pas là des luttes insignifiantes et sans difficulté. A Olympie, on n'en est pas quitte pour être vaincu et s'en aller ainsi; il faut d'abord étaler ses imperfections physiques devant toute la terre habitée, et non pas seulement devant les Athéniens, les Spartiates ou les habitants de Nicopolis; puis être abîmé de coups, quand on est descendu dans la lice à l'étourdie; et, avant d'être battu, on aura souffert de la soif et de la chaleur, et avalé beaucoup de poussière. Réfléchis-y plus sérieusement; connais-toi toi-même; sonde la divinité; n'entreprends pas l'affaire sans elle. Si elle t'y encourage, sache qu'elle veut te voir grand ou roué de coups. Car voici une bien belle chose inséparable du Cynique : il ne saurait éviter d'être battu, comme on bat un âne, et il faut que battu il aime ceux mêmes qui le battent, parce qu'il est le père et le frère de tous les hommes. — Non pas, dis-tu; mais, si quelqu'un te bat, crie devant tout le monde : ô César, voilà comment on me traite, pendant la paix que tu as établie ! Allons au proconsul. — Mais quel est le César, quel est le proconsul du Cynique, si ce n'est celui qui l'a envoyé, celui dont il est le serviteur, Jupiter lui-même ? En appelle-t-il à un autre que ce Dieu ? N'est-il pas convaincu, quoiqu'il lui arrive de tout cela, que c'est Jupiter qui l'exerce ? Hercule, quand Eurystée l'exerçait ainsi, ne se tenait pas pour malheureux, et s'empressait d'exécuter tout ce qui lui était ordonné. Et cet homme, que Jupiter éprouve et exerce, pourrait crier et s'indigner ! Comme il serait bien digne de porter le sceptre de Diogène ! Ecoute ce que ce dernier, tout enfiévré, dit aux passants : Méchants individus, leur criait-il, ne resterez-vous pas là ? Pour voir mourir ou lutter des athlètes, vous vous en allez bien loin, jusqu'à Olympie; et vous ne voulez pas voir la lutte d'un homme contre la fièvre ! Et c'est un tel homme, n'est-ce pas, qui aurait reproché au Dieu qui l'avait envoyé, de le traiter injustement, lui qui tirait gloire des épreuves, et qui se jugeait digne d'être un spectacle pour les passants !
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εἴσοπτρον ( ἔσοπτρον), ου (τὸ) : miroir.
ὦμος, ου (ὁ) : épaule.
ὀσφύς, gén. ύος, acc. ύν : hanche.
μηρός, οῦ (ὁ) : cuisse (des hommes et des animaux).
ἀπογράφω (futur ἀπογράψω, aor. ἀπέγραψα) : inscrire sur un registre, enregistrer.
moyen ἀπογράφομαι : se faire inscrire.



memento καλλωπίζω (aor. ἐκαλλώπισα)  : embellir; changer en quelque chose de beau; parer, orner.
ἐγκαλλωπίζομαι : faire le beau devant, se faire remarquer de; se parer de, tirer vanité ou se glorifier de.
περίστασις, εως (ἡ) : foule qui stationne autour, rassemblement; circonstance fâcheuse, difficulté, embarras, épreuve.
ὅς γε ἐνεκαλλωπίζετο ταῖς περιστάσεσι : lui qui tirait gloire des épreuves.
θέαμα, ατος (τὸ) : objet que l’on contemple, spectacle.










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Athènes paralysée après l'annonce de la prise d'Elatée






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"ἔσοπτρον πρῶτον λάϐε, ἴδε σου τοὺς ὤμους, κατάμαθε τὴν ὀσφύν, τοὺς μηρούς. Ὀλύμπια μέλλεις ἀπογράφεσθαι, ἄνθρωπε, οὐχί τινά ποτε ἀγῶνα ψυχρὸν καὶ ταλαίπωρον. οὐκ ἔστιν ἐν Ὀλυμπίοις νικηθῆναι μόνον καὶ ἐξελθεῖν, ἀλλὰ πρῶτον μὲν ὅλης τῆς οἰκουμένης βλεπούσης δεῖ ἀσχημονῆσαι, οὐχὶ Ἀθηναίων μόνον ἢ Λακεδαιμονίων ἢ Νικοπολιτῶν, εἶτα καὶ δέρεσθαι δεῖ τὸν εἰκῇ ἐξελθόντα, πρὸ δὲ τοῦ δαρῆναι διψῆσαι, καυματισθῆναι, πολλὴν ἁφὴν καταπιεῖν. Βούλευσαι ἐπιμελέστερον, γνῶθι σαυτόν, ἀνάκρινον τὸ δαιμόνιον, δίχα θεοῦ μὴ ἐπιχειρήσῃς. ἂν γὰρ συμϐουλεύσῃ, ἴσθι ὅτι μέγαν σε θέλει γενέσθαι ἢ πολλὰς πληγὰς λαϐεῖν. καὶ γὰρ τοῦτο λίαν κομψὸν τῷ Κυνικῷ παραπέπλεκται· δέρεσθαι αὐτὸν δεῖ ὡς ὄνον καὶ δερόμενον φιλεῖν αὐτοὺς τοὺς δέροντας ὡς πατέρα πάντων, ὡς ἀδελφόν. οὔ· ἀλλ´ ἄν τίς σε δέρῃ, κραύγαζε στὰς ἐν τῷ μέσῳ ’ὦ Καῖσαρ, ἐν τῇ σῇ εἰρήνῃ οἷα πάσχω; ἄγωμεν ἐπὶ τὸν ἀνθύπατον‘. Κυνικῷ δὲ Καῖσαρ τί ἐστιν ἢ ἀνθύπατος ἢ ἄλλος ἢ ὁ καταπεπομφὼς αὐτὸν καὶ ᾧ λατρεύει, ὁ Ζεύς; ἄλλον τινὰ ἐπικαλεῖται ἢ ἐκεῖνον; οὐ πέπεισται δ´, ὅ τι ἂν πάσχῃ τούτων, ὅτι ἐκεῖνος αὐτὸν γυμνάζει; ἀλλ´ ὁ μὲν Ἡρακλῆς ὑπὸ Εὐρυσθέως γυμναζόμενος οὐκ ἐνόμιζεν ἄθλιος εἶναι, ἀλλ´ ἀόκνως ἐπετέλει πάντα τὰ προσταττόμενα· οὗτος δ´ ὑπὸ τοῦ Διὸς ἀθλούμενος καὶ γυμναζόμενος μέλλει κεκραγέναι καὶ ἀγανακτεῖν, ἄξιος φορεῖν τὸ σκῆπτρον τὸ Διογένους; ἄκουε, τί λέγει ἐκεῖνος πυρέσσων πρὸς τοὺς παριόντας· ’κακαί‘, ἔφη, ’κεφαλαί, οὐ μενεῖτε; ἀλλ´ ἀθλητῶν μὲν ὄλεθρον ἢ μάχην ὀψόμενοι ἄπιτε ὁδὸν τοσαύτην εἰς Ὀλυμπίαν· πυρετοῦ δὲ καὶ ἀνθρώπου μάχην ἰδεῖν οὐ βούλεσθε;" ταχύ γ´ ἂν ὁ τοιοῦτος ἐνεκάλεσεν τῷ θεῷ καταπεπομφότι αὐτὸν ὡς παρ´ ἀξίαν αὐτῷ χρωμένῳ, ὅς γε ἐνεκαλλωπίζετο ταῖς περιστάσεσι καὶ θέαμα εἶναι ἠξίου τῶν παριόντων.
                                                                                                                                                                                     Arrien, Epictète, 3, 22




(169) C'était le soir; on vint annoncer aux prytanes l'occupation d'Elatée. Après cela, les uns aussitôt, se levant au milieu de leur dîner, chassaient  les gens des boutiques de l'agora et mettaient le feu aux baraques, pendant que les autres convoquaient les stratèges et appelaient le trompette; et toute la ville fut frappée d'étonnement. Le lendemain, dès le jour, les prytanes convoquaient le Conseil à la salle des séances, tandis que vous vous rendiez  à l'Assemblée; et, avant que le conseil eût délibéré et préparé son rapport, tout le peuple était assis sur la hauteur (de la Pnyx).
(170) Puis, quand le Conseil fut arrivé, que les prytanes eurent fait connaître les nouvelles qu'on leur avait apportées et eurent présenté leur informateur, quand celui-ci eut parlé, le héraut demanda : " Qui veut prendre la parole ? " On ne voyait s'avancer personne. Le héraut répéta plusieurs fois sa question; néanmoins on ne voyait toujours se lever personne. Et pourtant, tous les stratèges étaient là, tous les orateurs. Et la patrie appelait l'homme qui parlerait pour son salut, car la voix que le héraut fait entendre sur l'ordre des lois,  doit être regardée commme la voix commune  de la patrie.
(171) Cependant, si c'étaient ceux qui voulaient  le salut du pays  qui devaient s'avancer, vous tous et les autres Athéniens, vous vous seriez levés pour aller à la tribune; car tous, je le sais, vous désiriez le salut du pays. Si ç'avaient été les plus riches, çauraient été les Trois-Cents. Si ç'avaient été les gens à la fois dévoués à l'Etat et riches, c'auraient été ceux qui, par la suite, ont versé de fortes contributions volontaires; car ils ont agi à la fois par dévouement et grâce à leur richesse.
(173) Il parut, cet homme, ce jour-là, c'était moi; et je dis alors ce à quoi vous devez être attentifs pour deux raisons : premièrement, pour savoir que, seul des orateurs et des hommes politiques, je n'ai pas abandonné le poste du dévouement au milieu des dangers, que j'ai fait mes preuves en disant et en rédigeant; secondement, parce qu'en perdant un peu de temps, vous acquériez pour l'avenir une plus grande expérience de la politique générale.
       trad. Georges Mathieu; éd. les belles lettres


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ἑσπέρα μὲν γὰρ ἦν, ἧκε δ' ἀγγέλλων τις ὡς τοὺς πρυτάνεις ὡς Ἐλάτεια κατείληπται : c'était le soir; on vint annoncer aux prytanes l'occupation d'Elatée.
καταλείπω (futur καταλείψω, aor.1 κατέλειψα, d’ord. aor.2 κατέλιπον) : laisser, abandonner, céder.
πρύτανις, εως (ὁ) : chef, maître; prytane, magistrat suprême dans les villes grecques (Corinthe, Ténédos, etc.).

ἠρώτα μὲν ὁ κῆρυξ ‘τίς ἀγορεύειν βούλεται’. παρῄει δ' οὐδείς : le héraut demanda : " Qui veut prendre la parole ? " on ne voyait s'avancer personne.
κῆρυξ, selon d’autres, κήρυξ, υκος (ὁ, qqf. ἡ) : toute personne qui annonce à haute voix; héraut.
πάρειμι (inf. παριέναι, impf. παρῄειν) : être présent; être à la disposition de.







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Tryphon, le juif, se retire de la conversation avec Justin






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[142,1] Ἐπὶ ποσὸν δὲ ὁ Τρύφων ἐπισχών· Ὁρᾷς, ἔφη, ὅτι οὐκ ἀπὸ ἐπιτηδεύσεως γέγονεν ἐν τούτοις ἡμᾶς συμϐαλεῖν. Καὶ ὅτι ἐξαιρέτως ἥσθην τῇ συνουσίᾳ ὁμολογῶ, καὶ τούτους δὲ οἶμαι ὁμοίως ἐμοὶ διατεθεῖσθαι· πλέον γὰρ εὕρομεν ἢ προσεδοκῶμεν καὶ προσδοκηθῆναί ποτε δυνατὸν ἦν. Εἰ δὲ συνεχέστερον ἦν τοῦτο ποιεῖν ἡμᾶς, μάλλον ἂν ὠφελήθημεν, ἐξετάζοντες αὐτοὺς τοὺς λόγους· ἀλλ' ἐπειδή, φησί, πρὸς τῇ ἀναγωγῆ εἶ καὶ καθ' ἡμέραν πλοῦν ποιεῖσθαι προσδοκᾷς, μὴ ὄκνει ὡς φίλων ἡμῶν μεμνῆσθαι ἐὰν ἀπαλλαγῇς. 2 Ἐμοῦ δὲ χάριν, ἔφην, εἰ ἐπέμενον, καθ' ἡμέραν ἐϐουλόμην ταὐτὸ γίνεσθαι· ἀναχθήσεσθαι δὲ ἤδη προσδοκῶν, ἐπιτρέποντος τοῦ θεοῦ καὶ συνεργοῦντος, ὑμᾶς προτρέπομαι, ἐνστησαμένους ὑπὲρ τῆς ἑαυτῶν σωτηρίας μέγιστον τοῦτον ἀγῶνα, τῶν διδασκάλων ὑμῶν σπουδάσαι προτιμῆσαι μᾶλλον τὸν τοῦ παντοκράτορος θεοῦ Χριστόν. 3 Μεθ' ἃ ἀπῄεσαν λοιπὸν εὐχόμενοί τέ μοι σωτηρίαν καὶ ἀπὸ τοῦ πλοῦ καὶ ἀπὸ πάσης κακίας· ἐγώ τε ὑπὲρ αὐτῶν εὐχόμενος ἔφην· Οὐδὲν ἄλλο μεῖζον ὑμῖν εὔχεσθαι δύναμαι, ὦ ἄνδρες, ἢ ἵνα, ἐπιγνόντες διὰ ταύτης τῆς ὁδοῦ δίδοσθαι παντὶ ἀνθρώπῳ εὐδαιμονεῖν, πάντως καὶ αὐτοὶ ἡμῖν ὅμοια ποιήσητε, τὸ ἡμῶν εἶναι τὸν Χριστὸν τοῦ θεοῦ. Τέλος τοῦ πρὸς Τρύφωνα Ἰουδαῖον διαλόγου τοῦ ἁγίου Ἰουστίνου.
                                                                                                                                                               Justin, Dialogue avec le juif Tryphon, 142




[142,1] Tryphon, après un moment de silence, me dit : " Vous voyez qu'il ne vous a pas fallu faire un grand effort pour entrer en conversation avec nous. Je ne puis vous dire combien cet entretien m'a été agréable, et je suis persuadé que tous ceux qui m'entourent ont partagé ce plaisir. Assurément il nous a été plus utile que nous ne l'espérions, et que nous n'aurions osé l'espérer; s'il nous était possible d'en jouir plus souvent, nous retirerions bien plus de fruits encore de cette manière d'approfondir les divines Ecritures. Mais vous êtes sur le point de partir ; vous n'attendez plus que le moment de mettre à la voile : quand vous nous aurez quittés, ne perdez pas notre souvenir ; pensez à nous comme à des amis. 2 — Si je n'étais pas obligé de vous quitter, répondis-je, voilà les entretiens que je voudrais voir s'établir tous les jours entre nous ; mais, au moment de m'embarquer, avec la permission et le secours de Dieu, je vous recommande de ne rien négliger dans l'intérêt de votre salut, pour vous affranchir de vos docteurs, et de savoir leur préférer le Christ du Dieu tout-puissant. 3 Après ces mots, ils me quittèrent en me souhaitant un heureux voyage, une navigation exempte de tous dangers. Je formai pour eux, à mon tour, les vœux les plus ardents : puisque vous comprenez si bien, leur dis-je, que la raison a été donnée à l'homme pour lui servir de guide, tout ce que je puis vous souhaiter de plus heureux, c'est que vous sachiez faire un bon usage de cette raison pour arriver à reconnaître, comme nous, que Jésus est le Christ de Dieu."
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ἐπέχω (futur ἐφέξω ou ἐπισχήσω, aor.2 ἐπέσχον) : avoir sur, tenir sur; retenir; arrêter; attendre.
ἐπιτήδευσις, εως (ἡ) : action de s’occuper de, recherche de, pratique de.
συμϐάλλω, ancien att. ξυμϐάλλω (futur συμϐαλῶ, aor.2 συνέϐαλον) : jeter ensemble, mettre ensemble, rassembler, rapprocher, en venir aux mains.
Ἐπὶ ποσὸν δὲ ὁ Τρύφων ἐπισχών· Ὁρᾷς, ἔφη, ὅτι οὐκ ἀπὸ ἐπιτηδεύσεως γέγονεν ἐν τούτοις ἡμᾶς συμϐαλεῖν : Tryphon, après un moment de silence, me dit : "Vous voyez qu'il ne vous a pas fallu faire un grand effort pour entrer en conversation avec nous".




                     





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Comment prouver qu'il existe un autre Dieu que le Dieu créateur de toutes choses ?





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[50, 1] Καὶ ὁ Τρύφων· Ἔοικάς μοι ἐκ πολλῆς προστρίψεως τῆς πρὸς πολλοὺς περὶ πάντων τῶν ζητουμένων γεγονέναι καὶ διὰ τοῦτο ἑτοίμως ἔχειν ἀποκρίνεσθαι πρὸς πάντα ἃ ἂν ἐπερωτηθῇς. Ἀπόκριναι οὖν μοι πρότερον, πῶς ἔχεις ἀποδεῖξαι ὅτι καὶ ἄλλος θεὸς παρὰ τὸν ποιητὴν τῶν ὅλων, καὶ τότε ἀποδείξεις ὅτι καὶ γεννηθῆναι διὰ τῆς παρθένου ὑπέμεινε. 2 Κἀγὼ ἔφην· Πρότερόν μοι συγχώρησον εἰπεῖν λόγους τινὰς ἐκ τῆς Ἠσαίου προφητείας, τοὺς εἰρημένους περὶ τῆς προελεύσεως ἣν προελήλυθεν αὐτοῦ τοῦ κυρίου ἡμῶν Ἰησοῦ Χριστοῦ τούτου Ἰωάννης ὁ βαπτιστὴς καὶ προφήτης γενόμενος. Κἀκεῖνος· Συγχωρῶ. 3 Κἀγὼ εἶπον· Ἠσαίας οὖν περὶ τῆς Ἰωάννου προελεύσεως οὕτως προεῖπε· Καὶ εἶπεν Ἑζεκίας πρὸς Ἠσαίαν· «Ἀγαθὸς ὁ λόγος κυρίου, ὃν ἐλάλησε· γενέσθω εἰρήνη καὶ δικαιοσύνη ἐν ταῖς ἡμέραις μου. Καί· Παρακαλεῖτε τὸν λαόν· ἱερεῖς, λαλήσατε εἰς τὴν καρδίαν Ἰερουσαλὴμ καὶ παρακαλέσατε αὐτήν, ὅτι ἐπλήσθη ἡ ταπείνωσις αὐτῆς· λέλυται αὐτῆς ἡ ἁμαρτία, ὅτι ἐδέξατο ἐκ χειρὸς κυρίου διπλᾶ τὰ ἁμαρτήματα αὐτῆς. Φωνὴ βοῶντος ἐν τῇ ἐρήμῳ· ἑτοιμάσατε τὰς ὁδοὺς κυρίου, εὐθείας ποιεῖτε τὰς τρίϐους τοῦ θεοῦ ἡμῶν. Πᾶσα φάραγξ πληρωθήσεται, καὶ πᾶν ὄρος καὶ βουνὸς ταπεινωθήσεται· καὶ ἔσται πάντα τὰ σκολιὰ εἰς εὐθεῖαν, καὶ ἡ τραχεῖα εἰς ὁδοὺς λείας· καὶ ὀφθήσεται ἡ δόξα κυρίου, καὶ ὄψεται πᾶσα σὰρξ τὸ σωτήριον τοῦ θεοῦ, ὅτι κύριος ἐλάλησε. 4 Φωνὴ λέγοντος· Βόησον. Καὶ εἶπον· Τί βοήσω; Πᾶσα σὰρξ χόρτος, καὶ πᾶσα δόξα ἀνθρώπου ὡς ἄνθος χόρτου. Ἐξηράνθη ὁ χόρτος, καὶ τὸ ἄνθος αὐτοῦ ἐξέπεσε, τὸ δὲ ῥῆμα κυρίου μένει εἰς τὸν αἰῶνα. Ἐπ' ὄρους ὑψηλοῦ ἀνάϐηθι, ὁ εὐαγγελιζόμενος Σιών· ὕψωσον τῇ ἰσχύϊ τὴν φωνήν σου, ὁ εὐαγγελιζόμενος Ἰερουσαλήμ. Ὑψώσατε, μὴ φοϐεῖσθε. Εἶπον ταῖς πόλεσιν Ἰούδα· Ἰδοὺ ὁ θεὸς ὑμῶν· κύριος ἰδοὺ μετ' ἰσχύος ἔρχεται, καὶ ὁ βραχίων μετὰ κυρίας ἔρχεται. Ἰδοὺ ὁ μισθὸς μετ' αὐτοῦ, καὶ τὸ ἔργον ἐναντίον αὐτοῦ. Ὡς ποιμὴν ποιμανεῖ τὸ ποίμνιον αὐτοῦ, καὶ τῷ βραχίονι συνάξει ἄρνας, καὶ τὴν ἐν γαστρὶ ἔχουσαν παρακαλέσει. 
                                                                                                                                                           Justin, Dialogue avec le juif Tryphon, 50


[50, 1]  On voit bien, me dit Tryphon, que vous avez une longue habitude de la controverse, et qu'il vous est souvent arrivé de discuter avec toutes sortes de personnes et sur toutes sortes de sujets. Voilà pourquoi vous êtes toujours prêt à répondre. Mais dites-moi donc comment vous pourriez prouver qu'il existe un autre Dieu que le Dieu créateur de toutes choses. Vous essayeriez ensuite de me démontrer comment il a pu s'abaisser jusqu'à naître d'une vierge et se faire homme comme nous. 2 — Très volontiers, lui dis-je; mais permettez-moi de vous citer d'abord les paroles d'Isaïe sur la fonction de précurseur que le prophète Jean-Baptiste a remplie parmi vous avant la venue de Jésus-Christ. —- Je vous écoute, me dit-il. 3 Voici comment Isaïe parle de la mission de Jean, qui précéda le Christ : Ezéchias dit à Isaïe : « La parole du Seigneur est juste; que la vérité et la paix subsistent pendant mon règne. Console-toi, console-toi, mon peuple, dit le Seigneur ton Dieu. Prêtres, parlez au cœur de Jérusalem, et appelez-la par son nom; ses maux sont finis, son iniquité lui est pardonnée, elle a reçu du Seigneur des grâces qui surpassent ses crimes. On entend la voix de celui qui crie dans le désert : Préparez la voie du Seigneur, rendez droits les sentiers. Toute vallée sera comblée, toute montagne et toute colline sera abaissée, les chemins tortueux seront redressés, ceux qui étaient raboteux seront aplanis ; la gloire du Seigneur sera révélée, le Seigneur va parler, toute la terre verra le Sauveur. 4 Une voix m'ordonne de crier, et j'ai répondu : Que dirai-je par mes cris ? Tous les mortels ne sont que de l'herbe et toute leur beauté ressemble à la fleur des champs. Le Seigneur a répandu un souffle brûlant ; l'herbe de la prairie s'est desséchée, la fleur est tombée. Oui, les peuples sont comme l'herbe de la prairie. L'herbe sèche, la fleur tombe, mais la parole de notre Dieu subsiste dans l'éternité. Montez sur le sommet de la montagne, vous qui évangélisez Sion; criez encore plus haut, ne craignez pas; dites aux villes de Juda : Voici votre Dieu ! et voilà que le Seigneur paraît revêtu de force; son bras signale sa puissance; le prix de sa victoire est en ses mains, ses œuvres le précèdent et l'annoncent. Il gouverne ses troupeaux comme un pasteur vigilant ; il rassemble ses agneaux, il les presse dans ses bras, il les réchauffe sur son sein ; il porte lui-même les brebis pleines.
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Conseils à Domenicos

[15] Μήτε γέλωτα προπετῆ στέργε μήτε λόγον μετὰ θράσους ἀποδέχου· τὸ μὲν γὰρ ἀνόητον, τὸ δὲ μανικόν. Ἃ ποιεῖν αἰσχρὸν, ταῦτα νόμιζε μηδὲ λέγειν εἶναι καλόν. Ἔθιζε σεαυτὸν εἶναι μὴ σκυθρωπὸν ἀλλὰ σύννουν· δι' ἐκεῖνο μὲν γὰρ αὐθάδης, διὰ δὲ τοῦτο φρόνιμος εἶναι δόξεις. Ἡγοῦ μάλιστα σεαυτῷ πρέπειν κόσμον αἰσχύνην, δικαιοσύνην, σωφροσύνην· τούτοις γὰρ ἅπασιν δοκεῖ κρατεῖσθαι τὸ τῶν νεωτέρων ἦθος.

[16] Μηδέποτε μηδὲν αἰσχρὸν ποιήσας ἔλπιζε λήσειν· καὶ γὰρ ἂν τοὺς ἄλλους λάθῃς, σεαυτῷ σηνειδήσεις. Τοὺς μὲν θεοὺς φοϐοῦ, τοὺς δὲ γονεῖς τίμα, τοὺς δὲ φίλους αἰσχύνου, τοῖς δὲ νόμοις πείθου. Τὰς ἡδονὰς θήρευε τὰς μετὰ δόξης· τέρψις γὰρ σὺν τῷ καλῷ μὲν ἄριστον, ἄνευ δὲ τούτου κάκιστον.

[17] Εὐλαϐοῦ τὰς διαϐολὰς, κἂν ψευδεῖς ὦσιν· οἱ γὰρ πολλοὶ τὴν μὲν ἀλήθειαν ἀγνοοῦσιν, πρὸς δὲ τὴν δόξαν ἀποϐλέπουσιν. Ἅπαντα δόκει ποιεῖν ὡς μηδένα λήσων· καὶ γὰρ ἂν παραυτίκα κρύψῃς, ὕστερον ὀφθήσει. Μάλιστα δ' ἂν εὐδοκιμοίης, εἰ φαίνοιο ταῦτα μὴ πράττων ἃ τοῖς ἄλλοις ἂν πράττουσιν ἐπιτιμῴης.

[18] Ἐὰν ᾖς φιλομαθὴς, ἔσει πολυμαθής. Ἃ μὲν ἐπίστασαι, ταῦτα διαφύλαττε ταῖς μελέταις, ἃ δὲ μὴ μεμάθηκας, προσλάμϐανε ταῖς ἐπιστήμαις· ὁμοίως γὰρ αἰσχρὸν ἀκούσαντα χρήσιμον λόγον μὴ μαθεῖν καὶ διδόμενόν τι ἀγαθὸν παρὰ τῶν φίλων μὴ λαϐεῖν. Κατανάλισκε τὴν ἐν τῷ βίῳ σχολὴν εἰς τὴν τῶν λόγων φιληκοίαν· οὕτω γὰρ τὰ τοῖς ἄλλοις χαλεπῶς εὑρημένα συμϐήσεταί σοι ῥᾳδίως μανθάνειν.
                                                                                                                                                                                     Isocrate, conseils à Domenicos, 15-18


στέργω (imparf. ἔστεργον, futur στέρξω, aor. ἔστερξα) : aimer tendrement, chérir; se contenter de, se résigner à, supporter.
προπετής, ής, ές : qui tombe en avant; qui se porte en avant, emporté, fougueux.
ἀποδέχομαι (futur ἀποδέξομαι, aor. ἀπεδεξάμην, parf. ἀποδέδεγμαι) : recevoir; accueillir;  accueillir favorablement, accorder créance à, admettre, approuver.
θράσος, εος-ους (τὸ) : résolution, courage; confiance; confiance excessive, témérité, audace, impudence.
ἀνόητος, ος, ον : dont on n’a pas entendu parler; qui ne pense pas; qui ne comprend pas; inintelligent, sot.
μανικός, ή, όν : fou, insensé.
μήτε γέλωτα προπετῆ στέργε μήτε λόγον μετὰ θράσους ἀποδέχου· τὸ μὲν γὰρ ἀνόητον, τὸ δὲ μανικόν : dans ton rire ne t'abandonne pas à des éclats immodérés; dans tes discours n'affecte pas de présomption; l'un est d'un sot, l'autre d'un insensé.






εὑρίσκω (imparf. ηὕρισκον, futur εὑρήσω, aor.2 ηὗρον, parf. ηὕρηκα; passif parf. ηὕρημαι) : trouver.
μανθάνω (futur μαθήσομαι, ao.2 ἔμαθον, parf. μεμάθηκα) : apprendre; étudier, s’instruire.
οὕτω γὰρ τὰ τοῖς ἄλλοις χαλεπῶς εὑρημένα συμϐήσεταί σοι ῥᾳδίως μανθάνειν : de cette façon, ce que d’autres auront trouvé difficilement, il t’arrivera de l’apprendre sans peine.






[15] Dans ton rire ne t'abandonne pas à des éclats immodérés; dans tes discours n'affecte pas de présomption. L'un est d'un sot, l'autre d'un insensé. Ce qu'il est honteux de faire, crois qu'il est également honteux de le dire. Accoutume-toi à avoir un air, non pas sombre, mais réfléchi. Par l'un tu passerais pour un insolent; par l'autre tu te feras regarder comme un sage. Pense que ce qui te convient surtout, c'est la décence, la modestie, la justice, la modération : car c'est en toutes ces choses que parait consister le mérite des jeunes gens.

[16] Si jamais tu fais une action honteuse, n'espère pas la tenir cachée. Car, quand même tu la déroberais aux autres, ta conscience la saura. Crains Dieu, et honore tes parents; respecte tes amis, et obéis aux lois. Entre les plaisirs, recherche ceux qu'accompagne l'honneur. Car le plaisir, joint à l'honnêteté, n'en est que plus estimable; sans elle, il n'est digne que de blâme.


[17]  Evite les accusations, fussent-elles même sans fondement. Car le plus grand nombre ignore la vérité, et se règle sur l'opinion. Dans toutes tes actions, semble agir comme si chacun devait les connaître. Car, quand tu te cacherais pour le moment, dans la suite tu seras dévoilé. Tu te feras surtout estimer, si l'on te voit ne pas faire ce que tu reprendrais dans un autre.

[18]  Si tu aimes à apprendre, tu sauras beaucoup. Ce que tu sais, entretiens-le par des méditations; et ce que tu n’as point appris, acquiers-le par l’étude. Il est aussi honteux en effet, quand on entend un discours utile, de ne point le retenir, que de refuser le présent que vous offre un ami. Emploie tes moments de loisir à écouter des discours utiles. De cette façon, ce que d’autres auront trouvé difficilement, il t’arrivera de l’apprendre sans peine.



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La reine des abeilles

(31) εἰ δέ τις παρ' ἃ ὁ θεὸς ἔφυσε ποιεῖ, ἴσως τι καὶ ἀτακτῶν τοὺς θεοὺς οὐ λήθει καὶ δίκην δίδωσιν ἀμελῶν τῶν ἔργων τῶν ἑαυτοῦ ἢ πράττων τὰ τῆς γυναικὸς ἔργα.
(32)
δοκεῖ δέ μοι, ἔφην, καὶ ἡ τῶν μελιττῶν ἡγεμὼν τοιαῦτα ἔργα ὑπὸ τοῦ θεοῦ προστεταγμένα διαπονεῖσθαι καὶ ποῖα δή, ἔφη ἐκείνη, ἔργα ἔχουσα ἡ τῶν μελιττῶν ἡγεμὼν ἐξομοιοῦται τοῖς ἔργοις οἷς ἐμὲ δεῖ πράττειν;
(33)  ὅτι, ἔφην ἐγώ, ἐκείνη γε ἐν τῷ σμήνει μένουσα οὐκ ἐᾷ ἀργοὺς τὰς μελίττας εἶναι, ἀλλ' ἃς μὲν δεῖ ἔξω ἐργάζεσθαι ἐκπέμπει ἐπὶ τὸ ἔργον, καὶ ἃ ἂν αὐτῶν ἑκάστη εἰσφέρῃ οἶδέ τε καὶ δέχεται, καὶ σῴζει ταῦτα ἔστ' ἂν δέῃ χρῆσθαι. ἐπειδὰν δὲ ἡ ὥρα τοῦ χρῆσθαι ἥκῃ, διανέμει τὸ δίκαιον ἑκάστῃ.
(34) καὶ ἐπὶ τοῖς ἔνδον δ' ἐξυφαινομένοις κηρίοις ἐφέστηκεν, ὡς καλῶς καὶ ταχέως ὑφαίνηται, καὶ τοῦ γιγνομένου τόκου ἐπιμελεῖται ὡς ἐκτρέφηται: ἐπειδὰν δὲ ἐκτραφῇ καὶ ἀξιοεργοὶ οἱ νεοττοὶ γένωνται, ἀποικίζει αὐτοὺς σὺν τῶν ἐπιγόνων τινὶ ἡγεμόνι.
(35) ἦ καὶ ἐμὲ οὖν, ἔφη ἡ γυνή, δεήσει ταῦτα ποιεῖν; δεήσει μέντοι σε, ἔφην ἐγώ, ἔνδον τε μένειν καὶ οἷς μὲν ἂν ἔξω τὸ ἔργον ᾖ τῶν οἰκετῶν, τούτους συνεκπέμπειν, οἷς δ' ἂν ἔνδον ἔργον ἐργαστέον,
(36) τούτων σοι ἐπιστατητέον, καὶ τά τε εἰσφερόμενα ἀποδεκτέον καὶ ἃ μὲν ἂν αὐτῶν δέῃ δαπανᾶν σοὶ διανεμητέον, ἃ δ' ἂν περιττεύειν δέῃ, προνοητέον καὶ φυλακτέον ὅπως μὴ ἡ εἰς τὸν ἐνιαυτὸν κειμένη δαπάνη εἰς τὸν μῆνα δαπανᾶται. καὶ ὅταν ἔρια εἰσενεχθῇ σοι, ἐπιμελητέον ὅπως οἷς δεῖ ἱμάτια γίγνηται. καὶ ὅ γε ξηρὸς σῖτος ὅπως καλῶς ἐδώδιμος γίγνηται ἐπιμελητέον.
(37) ἓν μέντοι τῶν σοὶ προσηκόντων, ἔφην ἐγώ, ἐπιμελημάτων ἴσως ἀχαριστότερον δόξει εἶναι, ὅτι, ὃς ἂν κάμνῃ τῶν οἰκετῶν, τούτων σοι ἐπιμελητέον πάντων ὅπως θεραπεύηται.
νὴ Δί', ἔφη ἡ γυνή, ἐπιχαριτώτατον μὲν οὖν, ἂν μέλλωσί γε οἱ καλῶς θεραπευθέντες χάριν εἴσεσθαι καὶ εὐνούστεροι ἢ πρόσθεν ἔσεσθαι.
                                                                                                                                                                                Xénophon, Economique, 7, 31-37



φύω (imparf. ἔφυον, futur φύσω; aor. ἔφυσα, aor.2 ἔφυν, parf. πέφυκα; passif futur φυήσομαι, aor.2 ἐφύην) : pousser, faire naître, faire croître; produire; être par nature.
memento φύσις, εως (ἡ) : action de faire naître, formation, production; nature, manière d’être.
εἰ δέ τις παρ' ἃ ὁ θεὸς ἔφυσε ποιεῖ : si quelqu'un agit contrairement à la nature que la divinité lui a donnée.




ἐπίχαρις, ις, ι, gén. ιτος : plaisant, agréable, aimable.
memento τὸ ἐπίχαρι : le charme, la grâce.
μέλλω (imparf. ἔμελλον, att. ἤμελλον, futur μελλήσω, aor. ἐμέλλησα) : être sur le point de.
θεραπεύω : prendre soin de; servir, être serviteur; s’occuper de, entretenir, soigner, prendre soin.
εὔνοος, -ους, οος-ους, οον-ουν, plur. εὔνοοι-οι : qui a de bons sentiments, bienveillant. --- cf. dico Bailly version établie par Gérard Gréco.
εὔνοος τινι : bienveillant pour qqn.
ἔφη ἡ γυνή, ἐπιχαριτώτατον μὲν οὖν, ἂν μέλλωσί γε οἱ καλῶς θεραπευθέντες χάριν εἴσεσθαι καὶ εὐνούστεροι ἢ πρόσθεν ἔσεσθαι : voilà, dit ma femme, une tâche qui me sera tout à fait agréable et ceux que j'aurai bien soignés doivent m'en savoir gré et se montrer plus dévoués qu'auparavant.







(31) " Si quelqu'un agit contrairement à la nature que la divinité lui a donnée, quittant pour ainsi dire son poste, il n'échappe pas aux regards des dieux et il est châtié pour négliger les travaux qui lui reviennent ou pour s'occuper de ceux de sa femme.
(32)
Eh bien, je crois, dis-je, que la reine des abeilles, sur l'ordre de la divinité s'affaire à des travaux tout à fait semblables aux tiens". quels sont donc, dit ma femme, ces travaux, dévolus à la reine des abeilles, qui ressemblent tout à fait à ceux que je dois accomplir".
(33) " Voici, lui dis-je. Restant dans la ruche, elle ne laisse pas les abeilles à ne rien faire; elle envoie au travail celles qui ont leur tâche au dehors, elle vérifie et reçoit ce que chacune d'elles apporte, puis elle le garde jusqu'à ce qu'on ait besoin de s'en servir. Lorsque le moment de s'en servir est venu, elle distribue à chacune sa juste part.
(34) Elle est préposée aussi à la construction des cellules de cire dans la ruche pour qu'elles soient bien et rapidement construites; puis elle veille à élever les abeilles qui viennent de naître; quand cette progéniture est élevée et capable de travailler elle les envoient fonder une colonie avec une reine qui emmène cette  troupe. 
(35) " Est-ce que c'est la tâche que je devrai moi aussi accomplir ? dit ma femme. - oui, ai-je répondu, tu devras rester à la maison, faire partir tous ensemble ceux des serviteurs dont le travail est au dehors; il faudra surveiller ceux qui doivent ravailler à la maison.
(36) recevoir ce que l'on apportera, distribuer ce que l'on devra dépenser, penser d'avance à ce qui devra être mis de côté, et veiller à ne pas faire pour un mois la dépense prévue pour une année. Quand on t'apportera de la laine, il faudra veiller à ce qu'on en fasse des vêtements pour ceux qui en ont besoin, veiller aussi à ce que le grain de la provision reste bon à manger.
(37) Parmi les tâches qui t'incombent, dis-je, il en est toutefois une qui te paraîtra peut-être désagréable :  lorsqu'un serviteur est malade, il te faut veiller toujours à ce qu'il  reçoive les soins nécessaires."
"Au contraire, par Zeus, dit ma femme, voilà une tâche qui me sera tout à fait agréable et ceux que j'aurai bien soignés doivent m'en savoir gré et se montrer plus dévoués qu'auparavant."
                  trad. Pierre Chantraine; éd. les belles lettres


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L'apprenti-sorcier

[34] κατὰ δὲ τὸν ἀνάπλουν ἔτυχεν ἡμῖν συμπλέων Μεμφίτης ἀνὴρ τῶν ἱερῶν γραμματέων, θαυμάσιος τὴν σοφίαν καὶ τὴν παιδείαν πᾶσαν εἰδὼς τὴν Αἰγύπτιον ἐλέγετο δὲ τρία καὶ εἴκοσιν ἔτη ἐν τοῖς ἀδύτοις ὑπόγειος ᾠκηκέναι μαγεύειν παιδευόμενος ὑπὸ τῆς Ἴσιδος. --- "Παγκράτην," ἔφη ὁ Ἀρίγνωτος, "λέγεις ἐμὸν διδάσκαλον, ἄνδρα ἱερόν, ἐξυρημένον, ἐν ὀθονίοις, ἀεὶ νοήμονα, οὐ καθαρῶς ἑλληνίζοντα, ἐπιμήκη, σιμόν, πρόχειλον, ὑπόλεπτον τὰ σκέλη." --- "αὐτόν", ἦ δ᾽ ὅς, " ἐκεῖνον τὸν Παγκράτην καὶ τὰ μὲν πρῶτα ἠγνόουν ὅστις ἦν, ἐπεὶ δὲ ἑώρων αὐτὸν --- εἴ ποτε ὁρμίσαιμεν τὸ πλοῖον --- ἄλλα τε πολλὰ τεράστια ἐργαζόμενον, καὶ δὴ καὶ ἐπὶ κροκοδείλων ὀχούμενον καὶ συννέοντα τοῖς θηρίοις, τὰ δὲ ὑποπτήσσοντα καὶ σαίνοντα ταῖς οὐραῖς, ἔγνων ἱερόν τινα ἄνθρωπον ὄντα, κατὰ μικρὸν δὲ φιλοφρονούμενος ἔλαθον ἑταῖρος αὐτῷ καὶ συνήθης γενόμενος, ὥστε πάντων ἐκοινώνει μοι τῶν ἀπορρήτων.

"καὶ τέλος πείθει με τούς μὲν οἰκέτας ἅπαντας ἐν τῇ Μέμφιδι καταλιπεῖν, αὐτὸν δὲ μόνον ἀκολουθεῖν μετ᾽ αὐτοῦ, μὴ γὰρ ἀπορήσειν ἡμᾶς τῶν διακονησομένων · καὶ τὸ μετὰ τοῦτο οὕτω διήγομεν.

[35] ἐπειδὴ δὲ ἔλθοιμεν εἴς τι καταγώγιον, λαϐὼν ἂν ὁ ἀνὴρ ἢ τὸν μοχλὸν τῆς θύρας ἢ τὸ κόρηθρον ἢ καὶ τὸ ὕπερον περιϐαλὼν ἱματίοις ἐπειπών τινα ἐπῳδὴν ἐποίει βαδίζειν, τοῖς ἄλλοις ἅπασιν ἄνθρωπον εἶναι δοκοῦντα. τὸ δὲ ἀπιὸν ὕδωρ τε ἐμπίπλη καὶ ὠψώνει καὶ ἐσκεύαζεν καὶ πάντα δεξιῶς ὑπηρέτει καὶ διηκονεῖτο ἡμῖν εἶτα ἐπειδὴ ἅλις ἔχοι τῆς διακονίας, αὖθις κόρηθρον τὸ κόρηθρον ἢ ὕπερον τὸ ὕπερον ἄλλην ἐπῳδὴν ἐπειπὼν ἐποίει ἄν. τοῦτο ἐγὼ πάνυ ἐσπουδακὼς οὐκ εἶχον ὅπως ἐκμάθοιμι παρ᾽ αὐτοῦ ἐϐάσκαινε γάρ καίτοι πρὸς τὰ ἄλλα προγειρότατος ὤν. μιᾷ δέ ποτε ἡμέρᾳ λαθὼν ἐπήκουσα τῆς ἐπῳδῆς, ἦν δὲ τρισύλλαϐος σχεδόν, ἐν σκοτεινῷ ὑποστάς. καὶ ὁ μὲν ᾤχετο εἰς τὴν αγορὰν ἐντειλάμενος τῷ ὑπέρῳ ἃ ἔδει ποιεῖν.
[36] ἐγὼ δὲ εἰς τὴν ὑστεραίαν ἐκείνου τι κατὰ τὴν ἀγορὰν πραγματευομένου λαϐὼν τὸ ὕπερον σχηματίσας ὁμοίως, ἐπειπὼν τὰς συλλαϐάς, ἐκέλευσα ὑδροφορεῖν. ἐπεὶ δὲ ἐμπλησάμενον τὸν ἀμφορέα ἐκόμισε, ' ‘ πέπαυσο,'’ ἔφην, ' ‘ καὶ μηκέτι ὑδροφόρει, ἀλλ᾽ ἴσθι αὖθις ὕπερον ’· τὸ δὲ οὐκέτι μοι πείθεσθαι ἤθελεν, ἀλλ᾽ ὑδροφόρει ἀεί, ἄχρι δὴ ἐνέπλησεν ἡμῖν ὕδατος τὴν οἰκίαν ἐπαντλοῦν. ἐγὼ δὲ ἀμηχανῶν τῷ πράγματι — ἐδεδίειν γὰρ μὴ ὁ Παγκράτης ἐπανελθὼν ἀγανακτήσῃ, ὅπερ καὶ ἐγένετο — ἀξίνην λαϐὼν διακόπτω τὸ ὕπερον εἰς δύο μέρη · τὰ δέ, ἑκάτερον τὸ μέρος, ἀμφορέας λαϐόντα ὑδροφόρει καὶ ἀνθ᾽ ἑνὸς δύο μοι ἐγεγένηντο οἱ διάκονοι. ἐν τούτῳ καὶ ὁ Παγκράτης ἐφίσταται καὶ συνεὶς τὸ γενόμενον ἐκεῖνα μὲν αὖθις ἐποίησε ξύλα, ὥσπερ ἦν πρὸ τῆς ἐπῳδῆς, αὐτὸς δὲ ἀπολιπών με λαθὼν οὐκ ὅποι ἀφανὴς ᾤχετο ἀπιών.
νῦν οὖν,’ ἔφη ὁ Δεινόμαχος, ‘οἶσθα κἂν ἐκεῖνο, ἄνθρωπον ποιεῖν ἐκ τοῦ ὑπέρου; --- "νὴ Δί, ἦ δ᾽ ὅς, ἐξ ἡμισείας γε" · οὐκέτι γὰρ εἰς τὸ ἀρχαῖον οἷόν τέ μοι ἀπάγειν. αὐτό, ἢν ἅπαξ γένηται ὑδροφόρος, ἀλλὰ δεήσει ἡμῖν ἐπικλυσθῆναι τὴν οἰκίαν ἐπαντλουμένην.
                                                                                                                                                      Lucien, Philopseudès (l'ami du mensonge), 34-36
                                                                                                                                                      (φιλοψευδής, ής, ές :  qui aime à mentir)



μαγεύω (aor. ἐμάγευσα, parf. passif. μεμάγευμαι) : être magicien.
Ἶσις, gén. Ἴσιδος, acc. Ἶσιν (ἡ) : Isis, divinité égyptienne, femme et sœur d’Osiris.
ὁρμίζω (futur ὁρμίσω, aor. ὥρμισα) : mettre au mouillage dans un port ou dans une baie;  mettre en sûreté à l’ancre.
παιδεύω (futur παιδεύσω, aor. ἐπαίδευσα, parf. πεπαίδευκα) : élever un enfant; élever, instruire, former.
παιδευόμενος ὑπὸ τῆς Ἴσιδος : instruit à la magie par Osis.
καὶ τέλος πείθει με τούς μὲν οἰκέτας ἅπαντας ἐν τῇ Μέμφιδι καταλιπεῖν, αὐτὸν δὲ μόνον ἀκολουθεῖν μετ᾽ αὐτοῦ, μὴ γὰρ ἀπορήσειν ἡμᾶς τῶν διακονησομένων · καὶ τὸ μετὰ τοῦτο οὕτω διήγομεν : pour finir, il me persuade de laisser tous mes serviteurs à Memphis, et de l'accompagner seul, car nous ne manquerons pas de gens pour nous servir, me dit-il. Voici comment nous vécumes ensuite.


ἐπῳδή, ῆς (ἡ) : chant ou parole magique, charme.
ὑφίστημι : dresser sous, placer sous ou à côté de.
moyen ὑφίσταμαι (futur ὑποστήσομαι, aor. ὑπεστησάμην) : mettre sous; se mettre sous; se cacher sous, s’embusquer.
σκοτεινός, ή, όν : ténébreux, sombre, obscur.
ἐντέλλω : recommander, commander, ordonner.
ὕπερος, ου (ὁ) : pilon à mortier.
μιᾷ δέ ποτε ἡμέρᾳ λαθὼν ἐπήκουσα τῆς ἐπῳδῆς, ἦν δὲ τρισύλλαϐος σχεδόν, ἐν σκοτεινῷ ὑποστάς. καὶ ὁ μὲν ᾤχετο εἰς τὴν αγορὰν ἐντειλάμενος τῷ ὑπέρῳ  ἃ ἔδει ποιεῖν : mais un jour j'entendis à son insu l'incantation qui se composait seulement de trois syllabes : j'étais caché dans l'ombre. Puis Pancréas partit à l'agora après avoir indiqué au pilon à faire ce qu'il devait faire.


ἐδεδίειν γὰρ μὴ ὁ Παγκράτης ἐπανελθὼν ἀγανακτήσῃ, ὅπερ καὶ ἐγένετο : je craignais que Pancras à son retour ne se mît en colère, ce qui d'ailleurs se produisit.


ξύλον, ου (τὸ) : bois; bois mort, souche, tronc ou morceau de bois.
αὖθις, ion. et poét. αὖτις, adv. : en arrière, en sens inverse, en revenant sur ses pas;  de nouveau.
ἀμηχανέω, -ῶ (imparf. ἠμηχάνουν, futur ἀμηχανήσω, aor. ἠμηχάνησα) : n’avoir pas le moyen de.
memento ἀμήχανος, ος, ον : qui n'a pas les moyens, incapable; impossible, inconcevable.
γίγνομαι : voir dico Bailly. version établie par Gérard Gréco.
τὸ γενόμενον ou τὰ γενόμενα : ce qui s’est passé, l’événement, les faits, la réalité.
ἐγὼ δὲ ἀμηχανῶν τῷ πράγματι --- ἐν τούτῳ καὶ ὁ Παγκράτης ἐφίσταται καὶ συνεὶς τὸ γενόμενον : ne sachant que faire dans une telle situation (je craignais que Pancras à son retour ne se mît en colère, ce qui d'ailleurs se produisit).

ὑδροφόρος, ος, ον : qui porte de l’eau.
 subst.ou ἡ : porteur d’eau, porteuse d’eau.
ἐπαντλέω-ῶ (imparf. ἐπήντλουν, futur ἐπαντλήσω, aor. ἐπήντλησα ; passif imparf. ἐπηντλούμην, aor. ἐπηντλήθην, parf. ἐπήντλημαι) : puiser et verser sur ou dans; verser en abondance, épancher à flots, inonder.

ἐπικλύζω (futur ἐπικλύσω, aor. ἐπέκλυσα, parf. ἐπικέκλυκα) : déborder sur, inonder.
ὕπερος, ου (ὁ) : pilon à mortier.
"νῦν οὖν," ἔφη ὁ Δεινόμαχος, " οἶσθα κἂν ἐκεῖνο, ἄνθρωπον ποιεῖν ἐκ τοῦ ὑπέρου; " alors maintenant, dit Déimachos, tu sais au moins transformer un pilon en être humain ?
οὐκέτι γὰρ εἰς τὸ ἀρχαῖον οἷόν τέ μοι ἀπάγειν αὐτό, ἢν ἅπαξ γένηται ὑδροφόρος, ἀλλὰ δεήσει ἡμῖν ἐπικλυσθῆναι τὴν οἰκίαν ἐπαντλουμένην : car une fois qu'il est devenu porteur d'eau, je ne suis plus capable de le ramener à son état antérieur, et notre maison sera forcément engloutie par l'eau qu'il puisera. 





[34] Or durant notre remontée du fleuve, il y avait à bord avec nous un homme de Memphis, un des scribes sacrés, d'une sagesse admirable, qui connaissait tout l'enseignement des Egyptiens. On disait qu'il avait vécu vingt-trois ans sous terre dans les sanctuaires et qu'il avait été instruit à la magie par Osis.
--- C'est de Pancratès, mon maître, que tu parles, dit Arignotos. Un homme sacré, rasé, vêtu d'une tunique légère, toujours pensif, ne s'exprimant pas en un grec très pur, assez grand, avec un nez camus, des lèvres proéminentes, des jambes un peu grèles.
--- C'est lui, dit l'autre, c'est ce Pancratès. Au début, j'ignorais qui il était, mais lorsque je le vis, chaque fois que nous mettions le bateau à l'ancre, accomplir de nombreux prodiges, notamment chevaucher des crocodiles et nager au milieu des bêtes sauvages - celles-ci se blottissaient d'effroi et agitaient la queue --- alors, je sus qu'il était un homme sacré. Peu à peu, à force de prévenances, je devins insensiblement son ami et son familier, si bien qu'il partageait avec moi toutes ses connaissances secrètes.
Pour finir, il me persuade de laisser tous mes serviteurs à Memphis, et de l'accompagner seul, car nous ne manquerons pas de gens pour nous servir, me dit-il. Voici comment nous vécumes ensuite.
[35] Chaque fois que nous entrions dans une auberge, l'homme prenait la barre de la porte, le balai, ou même le pilon, l'entourait de vêtements, prononçait sur lui une incantation, et le faisait marcher : tout le monde le prenait pour un être humain. Il sortait puiser de l'eau et chercher des provisions, puis les préparait : il nous assistait en tout et nous servait habilement. Quand Pantacrès n'avait plus besoin de ses services il refaisait du balai un balai, ou du pilon un pilon, en prononçant sur lui une autre incantation.
Malgré tous mes efforts, je ne trouvais pas le moyen d'apprendre ce secret de lui : il le dissimulait jalousement, alors que, pour le reste il était très obligeant. Mais un jour j'entendis à son insu l'incantation qui se composait seulement de trois syllabes : j'étais caché dans l'ombre. Puis Pancréas partit à l'agora après avoir indiqué au pilon à faire ce qu'il devait faire.
[36] Le lendemain, pendant qu'il était occupé à l'agora, je pris le pilon, l'habillai de la même manière, prononçai sur lui les syllabes et lui ordonnai d'aller chercher de l'eau. Quand il rapporta l'amphore pleine, je lui dis : "Arrête, n'apporte plus d'eau, redeviens un pilon". Mais il ne voulait plus m'obéir : il apportait sans cesse de l'eau jusqu'au moment où à force de puiser, il eut inondé toute notre maison. Ne sachant que faire dans une telle situation (je craignais que Pancras à son retour ne se mît en colère, ce qui d'ailleurs se produisit), je prends une hache et je coupe le pilon en deux morceaux. Alors ceux-ci - chacun des deux morceaux - saisirent des amphores et se mirent à apporter de l'eau : au lieu d'un serviteur, j'en avais deux. Sur ces entrefaites survient Pancratès. Comprenant ce qui s'est passé, il refit d'eux des bouts de bois, ce qu'ils étaient avant l'incantation, puis il me quitta sans que je  m'en aperçus : il devint invisible et s'en alla je ne sais où.
--- Alors maintenant, dit Déimachos, tu sais au moins transformer un pilon en être humain ?
--- Oui par Zeus, répondit-il, mais à moitié seulement, car une fois qu'il est devenu porteur d'eau, je ne suis plus capable de le ramener à son état antérieur, et notre maison sera forcément engloutie par l'eau qu'il puisera.  
           trad. Anne-Marie Ozanam; éd. les belles lettres





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La chute d'Athènes en 404

(16) Τοιούτων δὲ ὄντων Θηραμένης εἶπεν ἐν ἐκκλησίᾳ ὅτι εἰ βούλονται αὐτὸν πέμψαι παρὰ Λύσανδρον, εἰδὼς ἥξει Λακεδαιμονίους πότερον ἐξανδραποδίσασθαι τὴν πόλιν βουλόμενοι ἀντέχουσι περὶ τῶν τειχῶν ἢ πίστεως ἕνεκα. Πεμφθεὶς δὲ διέτριϐε παρὰ Λυσάνδρῳ τρεῖς μῆνας καὶ πλείω, ἐπιτηρῶν ὁπότε Ἀθηναῖοι ἔμελλον διὰ τὸ ἐπιλελοιπέναι τὸν σῖτον ἅπαντα ὅ τι τις λέγοι ὁμολογήσειν. (17) Ἐπεὶ δὲ ἧκε τετάρτῳ μηνί, ἀπήγγειλεν ἐν ἐκκλησίᾳ ὅτι αὐτὸν Λύσανδρος τέως μὲν κατέχοι, εἶτα κελεύοι εἰς Λακεδαίμονα ἰέναι· οὐ γὰρ εἶναι κύριος ὧν ἐρωτῷτο ὑπ᾽ αὐτοῦ, ἀλλὰ τοὺς ἐφόρους. Μετὰ ταῦτα ᾑρέθη πρεσϐευτὴς εἰς Λακεδαίμονα αὐτοκράτωρ δέκατος αὐτός. (18) Λύσανδρος δὲ τοῖς ἐφόροις ἔπεμψεν ἀγγελοῦντα μετ᾽ ἄλλων Λακεδαιμονίων Ἀριστοτέλην, φυγάδα Ἀθηναῖον ὄντα, ὅτι ἀποκρίναιτο Θηραμένει ἐκείνους κυρίους εἶναι εἰρήνης καὶ πολέμου.  (19) Θηραμένης δὲ καὶ οἱ ἄλλοι πρέσϐεις ἐπεὶ ἦσαν ἐν Σελλασίᾳ, ἐρωτώμενοι δὲ ἐπὶ τίνι λόγῳ ἥκοιεν εἶπον ὅτι αὐτοκράτορες περὶ εἰρήνης, μετὰ ταῦτα οἱ ἔφοροι καλεῖν ἐκέλευον αὐτούς. Ἐπεὶ δ᾽ ἧκον, ἐκκλησίαν ἐποίησαν, ἐν ᾗ ἀντέλεγον Κορίνθιοι καὶ Θηϐαῖοι μάλιστα, πολλοὶ δὲ καὶ ἄλλοι τῶν Ἑλλήνων, μὴ σπένδεσθαι Ἀθηναίοις, ἀλλ᾽ ἐξαιρεῖν.

(20) Λακεδαιμόνιοι δὲ οὐκ ἔφασαν πόλιν Ἑλληνίδα ἀνδραποδιεῖν μέγα ἀγαθὸν εἰργασμένην ἐν τοῖς μεγίστοις κινδύνοις γενομένοις τῇ Ἑλλάδι, ἀλλ᾽ ἐποιοῦντο εἰρήνην ἐφ᾽ ᾧ τά τε μακρὰ τείχη καὶ τὸν Πειραιᾶ καθελόντας καὶ τὰς ναῦς πλὴν δώδεκα παραδόντας καὶ τοὺς φυγάδας καθέντας τὸν αὐτὸν ἐχθρὸν καὶ φίλον νομίζοντας Λακεδαιμονίοις ἕπεσθαι καὶ κατὰ γῆν καὶ κατὰ θάλατταν ὅποι ἂν ἡγῶνται. (21) Θηραμένης δὲ καὶ οἱ σὺν αὐτῷ πρέσϐεις ἐπανέφερον ταῦτα εἰς τὰς Ἀθήνας. εἰσιόντας δ᾽ αὐτοὺς ὄχλος περιεχεῖτο πολύς, φοϐούμενοι μὴ ἄπρακτοι ἥκοιεν· οὐ γὰρ ἔτι ἐνεχώρει μέλλειν διὰ τὸ πλῆθος τῶν ἀπολλυμένων τῷ λιμῷ. (22) Τῇ δὲ ὑστεραίᾳ ἀπήγγελλον οἱ πρέσϐεις ἐφ᾽ οἷς οἱ Λακεδαιμόνιοι ποιοῖντο τὴν εἰρήνην· προηγόρει δὲ αὐτῶν Θηραμένης, λέγων ὡς χρὴ πείθεσθαι Λακεδαιμονίοις καὶ τὰ τείχη περιαιρεῖν. Ἀντειπόντων δέ τινων αὐτῷ, πολὺ δὲ πλειόνων συνεπαινεσάντων, ἔδοξε δέχεσθαι τὴν εἰρήνην.
                                                                                                                                                                                                  Xénophon, Hell. 2, 2, 16-22

ἐξανδραποδίζω : réduire en servitude.
ἀντέχω : tenir devant; tenir contre, résister.

(16) On en était là lorsque Théramène déclara dans l'assemblée que, si on voulait l'envoyer auprès de Lysandre, il se rendrait compte, avant de revenir, si les Lacédémoniens tenaient à la destruction des murs pour réduire la ville en esclavage ou pour s'assurer une garantie. On l'envoya, et il resta près de Lysandre plus de trois mois, épiant le moment où les Athéniens seraient disposés, faute de vivres, à donner les mains à ce qu'on leur proposerait. (17). Quand il revint, le quatrième mois, il rapporta dans l'assemblée que Lysandre l'avait retenu jusque-là, puis l'avait invité à se rendre à Lacédémone, sous prétexte qu'il n'avait pas qualité pour répondre à ce qu'il lui demandait, que cela dépendait des éphores. Là-dessus il fut choisi pour aller en ambassade à Lacédémone, lui dixième, avec pleins pouvoirs. (18) De son côté Lysandre envoya aux éphores un exilé d'Athènes, Aristotélès, avec d'autres messagers qui étaient Lacédémoniens, pour les informer qu'il avait répondu à Théramène qu'eux seuls pouvaient décider de la paix et de la guerre. (19) Lorsque Théramène et les autres ambassadeurs furent arrivés à Sellasia, on leur demanda quelles propositions ils apportaient. Ils dirent qu'ils venaient avec pleins pouvoirs pour traiter de la paix, sur quoi les éphores les firent appeler. Quand ils furent arrivés, les éphores convoquèrent une assemblée où les Corinthiens et les Thébains surtout, mais aussi bon nombre d'autres Grecs protestèrent qu'il ne fallait pas traiter avec Athènes, mais la détruire.

(20) Mais les Lacédémoniens déclarèrent qu'ils ne réduiraient pas en servitude une ville grecque qui avait rendu un grand service à la Grèce, quand elle était menacée des plus grands dangers, et ils firent la paix à condition que les Athéniens abattraient les Longs Murs et les fortifications du Pirée, qu'ils livreraient leurs vaisseaux, sauf douze, rappelleraient les exilés, reconnaîtraient pour ennemis et pour amis ceux de Lacédémone et suivraient les Lacédémoniens sur terre et sur mer partout où ils les conduiraient. (21) Théramène et ses collègues rapportèrent ces conditions à Athènes. À leur entrée, ils se virent entourés d'une foule immense, qui craignait de les voir revenir sans avoir rien conclu; car il n'était plus possible de tenir, vu le nombre de ceux qui mouraient de faim. (22) Le lendemain, les ambassadeurs annoncèrent à quelles conditions les Lacédémoniens accordaient la paix. Théramène porta la parole et déclara qu'il fallait se soumettre aux Lacédémoniens et abattre les murs. Quelques-uns protestèrent; mais l'immense majorité l'approuva et l'on décida d'accepter la paix.






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Quelle chance d'avoir été ruiné par les sycophantes !

[29] ῾Ο δὲ Καλλίας, Σὸν μέρος, ἔφη, λέγειν, ὦ Χαρμίδη, δι᾿ ὅ τι ἐπὶ πενίᾳ μέγα φρονεῖς. Οὐκοῦν τόδε μέν, ἔφη, ὁμολογεῖται, κρεῖττον εἶναι θαρρεῖν ἢ φοϐεῖσθαι καὶ ἐλεύθερον εἶναι μᾶλλον ἢ δουλεύειν καὶ θεραπεύεσθαι μᾶλλον ἢ θεραπεύειν καὶ πιστεύεσθαι ὑπὸ τῆς πατρίδος μᾶλλον ἢ ἀπιστεῖσθαι.

᾿Εγὼ τοίνυν ἐν τῇδε τῇ πόλει ὅτε μὲν πλούσιος ἦν πρῶτον μὲν ἐφοϐούμην μή τίς μου τὴν οἰκίαν διορύξας καὶ τὰ χρήματα λάϐοι καὶ αὐτόν τί με κακὸν ἐργάσαιτο· ἔπειτα δὲ καὶ τοὺς συκοφάντας ἐθεράπευον, εἰδὼς ὅτι παθεῖν μᾶλλον κακῶς ἱκανὸς εἴην ἢ ποιῆσαι ἐκείνους. Καὶ γὰρ δὴ καὶ προσετάττετο μὲν ἀεί τί μοι δαπανᾶν ὑπὸ τῆς πόλεως, ἀποδημῆσαι δὲ οὐδαμοῦ ἐξῆν. [31] Νῦν δ᾿ ἐπειδὴ τῶν ὑπερορίων στέρομαι καὶ τὰ ἔγγεια οὐ καρποῦμαι καὶ τὰ ἐκ τῆς οἰκίας πέπραται, ἡδέως μὲν καθεύδω ἐκτεταμένος, πιστὸς δὲ τῇ πόλει γεγένημαι, οὐκέτι δὲ ἀπειλοῦμαι, ἀλλ᾿ ἤδη ἀπειλῶ ἄλλοις, ὡς ἐλευθέρῳ τε ἔξεστί μοι καὶ ἀποδημεῖν καὶ ἐπιδημεῖν· ὑπανίστανται δέ μοι ἤδη καὶ θάκων καὶ ὁδῶν ἐξίστανται οἱ πλούσιοι. [32] Καὶ εἰμὶ νῦν μὲν τυράννῳ ἐοικώς, τότε δὲ σαφῶς δοῦλος ἦν· καὶ τότε μὲν ἐγὼ φόρον ἀπέφερον τῷ δήμῳ, νῦν δὲ ἡ πόλις τέλος φέρουσα τρέφει με. ᾿Αλλὰ καὶ Σωκράτει, ὅτε μὲν πλούσιος ἦν, ἐλοιδόρουν με ὅτι συνῆν, νῦν δ᾿ ἐπεὶ πένης γεγένημαι, οὐκέτι οὐδὲν μέλει οὐδενί. Καὶ μὴν ὅτε μέν γε πολλὰ εἶχον, ἀεί τι ἀπέϐαλλον ἢ ὑπὸ τῆς πόλεως ἢ ὑπὸ τῆς τύχης· νῦν δὲ ἀποϐάλλω μὲν οὐδέν {οὐδὲ γὰρ ἔχω}, ἀεὶ δέ τι λήψεσθαι ἐλπίζω.

[33] Οὐκοῦν, ἔφη ὁ Καλλίας, καὶ εὔχῃ μηδέποτε πλουτεῖν, καὶ ἐάν τι ὄναρ ἀγαθὸν ἴδῃς, τοῖς ἀποτροπαίοις θύεις; Μὰ Δία τοῦτο μέντοι, ἔφη, ἐγὼ οὐ ποιῶ, ἀλλὰ μάλα φιλοκινδύνως ὑπομένω, ἄν ποθέν τι ἐλπίζω λήψεσθαι. [34] ᾿Αλλ᾿ ἄγε δή, ἔφη ὁ Σωκράτης, σὺ αὖ λέγε ἡμῖν, ὦ ᾿Αντίσθενες, πῶς οὕτω βραχέα ἔχων μέγα φρονεῖς ἐπὶ πλούτῳ. ῞Οτι νομίζω, ὦ ἄνδρες, τοὺς ἀνθρώπους οὐκ ἐν τῷ οἴκῳ τὸν πλοῦτον καὶ τὴν πενίαν ἔχειν ἀλλ᾿ ἐν ταῖς ψυχαῖς.

[35]
῾Ορῶ γὰρ πολλοὺς μὲν ἰδιώτας, οἳ πάνυ πολλὰ ἔχοντες χρήματα οὕτω πένεσθαι ἡγοῦνται ὥστε πάντα μὲν πόνον, πάντα δὲ κίνδυνον ὑποδύονται, ἐφ᾿ ᾧ πλείω κτήσονται, οἶδα δὲ καὶ ἀδελφούς, οἳ τὰ ἴσα λαχόντες ὁ μὲν αὐτῶν τἀρκοῦντα ἔχει καὶ περιττεύοντα τῆς δαπάνης, ὁ δὲ τοῦ παντὸς ἐνδεῖται· [36] αἰσθάνομαι δὲ καὶ τυράννους τινάς, οἳ οὕτω πεινῶσι χρημάτων ὥστε ποιοῦσι πολὺ δεινότερα τῶν ἀπορωτάτων· δι᾿ ἔνδειαν μὲν γὰρ δήπου οἱ μὲν κλέπτουσιν, οἱ δὲ τοιχωρυχοῦσιν, οἱ δὲ ἀνδραποδίζονται· τύραννοι δ᾿ εἰσί τινες οἳ ὅλους μὲν οἴκους ἀναιροῦσιν, ἁθρόους δ᾿ ἀποκτείνουσι, πολλάκις δὲ καὶ ὅλας πόλεις χρημάτων ἕνεκα ἐξανδραποδίζονται. [37] Τούτους μὲν οὖν ἔγωγε καὶ πάνυ οἰκτίρω τῆς ἄγαν χαλεπῆς νόσου. ὅμοια γάρ μοι δοκοῦσι πάσχειν ὥσπερ εἴ τις πολλὰ ἔχοι καὶ πολλὰ ἐσθίων μηδέποτε ἐμπίμπλαιτο. ᾿Εγὼ δὲ οὕτω μὲν πολλὰ ἔχω ὡς μόλις αὐτὰ καὶ ἐγὼ ἂν αὐτὸς εὑρίσκω · ὅμως δὲ περίεστί μοι καὶ ἐσθίοντι ἄχρι τοῦ μὴ πεινῆν ἀφικέσθαι καὶ πίνοντι μέχρι τοῦ μὴ διψῆν καὶ ἀμφιέννυσθαι ὥστε ἔξω μὲν μηδὲν μᾶλλον Καλλίου τούτου τοῦ πλουσιωτάτου ῥιγοῦν·
                                                                                                                                                                                             Xénophon, le Banquet, 29-37



θεραπεύω : prendre soin de; servir, être serviteur; entourer de soins, de sollicitude; faire la cour.
ἔπειτα δὲ καὶ τοὺς συκοφάντας ἐθεράπευον, εἰδὼς ὅτι παθεῖν μᾶλλον κακῶς ἱκανὸς εἴην ἢ ποιῆσαι ἐκείνους : ensuite je faisais la cour aux sycophantes, car je me savais plus en état de devenir leur victime que de leur faire du mal.



μόλις adv. : avec peine, difficilement
memento οὐ μόλις : sans peine.   
εὑρίσκω (imparf. ηὕρισκον, futur εὑρήσω, aor.2 ηὗρον, parf. ηὕρηκα) : trouver; rencontrer, trouver par hasard; trouver, rencontrer, obtenir.
ἀμφιέννυμι (imparf. ἠμφιέννυν, futur ἀμφιέσω) : vêtir de, habiller de.
moyen ἀμφιέννυμαι (futur ἀμφιέσομαι, aor. ἠμφιεσάμην) : se revêtir, se couvrir de.
γὼ δὲ οὕτω μὲν πολλὰ ἔχω ὡς μόλις αὐτὰ καὶ ἐγὼ ἂν αὐτὸς εὑρίσκω · ὅμως δὲ περίεστί μοι καὶ ἐσθίοντι ἄχρι τοῦ μὴ πεινῆν ἀφικέσθαι καὶ πίνοντι μέχρι τοῦ μὴ διψῆν καὶ ἀμφιέννυσθαι ὥστε ἔξω μὲν μηδὲν μᾶλλον Καλλίου τούτου τοῦ πλουσιωτάτου ῥιγοῦν : quant à moi je possède tant de biens qu'il ne m'est pas facile à moi-même de mettre la main sur eux; ils me permettent cependant de manger jusqu'à l'apaisement de ma faim, de boire jusqu'à celle de ma soif, de me vêtir de telle sorte que je ne souffre plus du froid, quand je sors, que Callias, notre hôte qui est pourtant si riche.


[29] Alors Callias : « A ton tour, dit-il, Charmide, d'expliquer pourquoi tu es si fier de ta pauvreté.
--- Eh bien, répondit Charmide, tout le monde s'accorde à le dire, mieux vaut se sentir de l'assurance que de la crainte, et il est préférable d'être libre que d'être esclave, d'être l'objet de soins que d'en rendre à autrui, de jouir de la confiance de notre patrie que d'être en butte à sa défiance.
[30] Or, voici ce qu'il en était de moi dans notre cité au temps où j'étais riche : d'abord je craignais qu'un perceur de murailles ne s'emparât de mon argent et ne me maltraitât; ensuite je faisais la cour aux sycophantes, car je me savais plus en état de devenir leur victime que de leur faire du mal. C'est que la cité m'imposait sans cesse dee nouvelles dépenses et que je n'étais pas libre de m'en aller ailleurs.  [31] Mais maintenant que je suis privé des biens que je possédais à l'étranger, que je n'ai plus les récoltes de mes propriétés d'Attique et que mon mobilier a été vendu, je goûte, bien allongé sur ma couche, un délicieux sommeil; j'ai gagné la confiance de la cité; loin d'être en butte aux menaces c'est moi qui désormais menace les autres; enfin je puis en homme libre aussi bien aller vivre à l'étranger que demeurer à Athènes. Les riches maintenant se lèvent devant moi de leurs sièges ou s'écartent devant mes pas.
[32] Me voilà devenu semblable à un despote, moi qui étais visiblement esclave. Naguère aussi je payais tribut au peuple, maintenant c'est la cité qui me paye et m'entretient. En outre, quand j'étais riche, on me blâmait fort de fréquenter Socrate, mais aujourd'hui que je suis devenu pauvre, nul ne s'en soucie le moins du monde. Ajoutez qu'au temps où je possédais des biens nombreux, j'éprouvais sans cesse des pertes du fait de la cité ou du fait de la fortune; actuellement je ne perds plus rien, faute de rien posséder; mais, par contre, je ne cesse d'espérer quelque heureuse aubaine.
[33] Alors, fit Callias, tu souhaites de ne jamais redevenir riche, et s'il t'arrive d'avoir un songe de bon augure, tu sacrifies aux dieux qui détournent les maux ? --- Non, par Zeus, répondit Charmide, ce n'est pas là mon genre, mais je tiens bon d'un cœur intrépide, lorsque j'espère de quelque part la venue d'une aubaine. [34] " Allons, dit Socrate, à toi maintenant de nous dire, Antistène, comment il se fait  qu'étant si à court de biens tu sois fier de ta richesse.  --- C'est que j'estime, mes amis, que les hommes détiennent la richesse et la pauvreté, non dans leur maison, mais dans leurs âmes.
[35] Je vois, en effet, nombre de particuliers qui, tout en possédant d'abondantes ressources, s'imaginent être dans une telle pauvreté qu'ils assument toute sorte de travaux et toute sorte de dangers, afin d'acquérir encore davantage; je sais aussi des frères qui ont hérité à égalité, et dont l'un possède le nécessaire et même le superflu tandis que l'autre manque de tout. [36] Je vois encore que certains tyrans ont un tel appétit de richesses qu'ils commettent de bien plus grands crimes que les derniers des gueux. Pressés par le besoin, on le sait, certains de ceux-ci dérobent, d'autres percent les murailles, d'autres vendent comme esclaves des hommes libres; mais il y a des tyrans qui détruisent des familles entières, massacrent une multitude de gens, et même souvent par cupidité réduisent des villes entières en esclavage. [36] De ces hommes-là j'ai grandement pitié pour ma part, car ils sont terriblement malades. Leur maladie me paraît en effet ressembler à celle d'un homme abondamment pourvu qui tout en mangeant beaucoup ne serait jamais rassasié. Quant à moi je possède tant de biens qu'il ne m'est pas facile à moi-même de mettre la main sur eux. Ils me permettent cependant de manger jusqu'à l'apaisement de ma faim, de boire jusqu'à celle de ma soif, de me vêtir de telle sorte que je ne souffre plus du froid, quand je sors, que Callias, notre hôte qui est pourtant si riche.
                trad. François Ollier; éd. les belles lettres








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De la liberté
περὶ ἐλευθερίας




[4, 1, 1] ἐλεύθερός ἐστιν ὁ ζῶν ὡς βούλεται, ὃν οὔτ᾽ ἀναγκάσαι ἔστιν οὔτε κωλῦσαι οὔτε βιάσασθαι, οὗ αἱ ὁρμαὶ ἀνεμπόδιστοι, αἱ ὀρέξεις ἐπιτευκτικαί, αἱ ἐκκλίσεις ἀπερίπτωτοι. [2] τίς οὖν θέλει ζῆν ἁμαρτάνων ;
— οὐδείς.
— τίς θέλει ζῆν ἐξαπατώμενος, προπίπτων, ἄδικος ὤν, ἀκόλαστος, μεμψίμοιρος, ταπεινός ;
[3] — οὐδείς.
— οὐδεὶς ἄρα τῶν φαύλων ζῇ ὡς βούλεται  ·  οὐ τοίνυν οὐδ᾽ ἐλεύθερός ἐστιν. [4] τίς δὲ θέλει λυπούμενος ζῆν, φοϐούμενος, φθονῶν, ἐλεῶν, ὀρεγόμενος καὶ ἀποτυγχάνων, ἐκκλίνων καὶ περιπίπτων ;
[5] — οὐδὲ εἷς.
— ἔχομεν οὖν τινα τῶν φαύλων ἄλυπον, ἄφοϐον, ἀπερίπτωτον, ἀναπότευκτον ;
— οὐδένα.
— οὐκ ἄρα οὐδὲ ἐλεύθερον.

[6] ταῦτα ἄν τις ἀκούσῃ δισύπατος, ἂν μὲν προσθῇς ὅτι ‘ἀλλὰ σύ γε σοφὸς εἶ, οὐδὲν πρὸς σὲ ταῦτα,’ συγγνώσεταί σοι. [7] ἂν δ᾽ αὐτῷ τὰς ἀληθείας εἴπῃς ὅτι ‘τῶν τρὶς πεπραμένων οὐδὲν διαφέρεις πρὸς τὸ μὴ καὶ αὐτὸς δοῦλος εἶναι,’ τί ἄλλο ἢ πληγάς σε δεῖ προσδοκᾶν ;
--- [8] πῶς γάρ, φησίν, ἐγὼ δοῦλός εἰμι ; ὁ πατὴρ ἐλεύθερος, ἡ μήτηρ ἐλευθέρα, οὗ ὠνὴν οὐδεὶς ἔχει  ·  ἀλλὰ καὶ συγκλητικός εἰμι καὶ Καίσαρος φίλος καὶ ὑπάτευκα καὶ δούλους πολλοὺς ἔχω.
---  [9] πρῶτον μέν, ὦ βέλτιστε συγκλητικέ, τάχα σου καὶ ὁ πατὴρ τὴν αὐτὴν δουλείαν δοῦλος ἦν καὶ ἡ μήτηρ καὶ ὁ πάππος καὶ ἐφεξῆς πάντες οἱ πρόγονοι. [10] εἰ δὲ δὴ καὶ τὰ μάλιστα ἦσαν ἐλεύθεροι, τί τοῦτο πρὸς σέ ; τί γάρ, εἰ ἐκεῖνοι μὲν γενναῖοι ἦσαν, σὺ δ᾽ ἀγεννής ; ἐκεῖνοι μὲν ἄφοϐοι, σὺ δὲ δειλός ; ἐκεῖνοι μὲν ἐγκρατεῖς, σὺ δ᾽ ἀκόλαστος ;

--- καὶ τί, φησί, τοῦτο πρὸς τὸ δοῦλον εἶναι ;
[11] οὐδέν σοι φαίνεται εἶναι τὸ ἄκοντά τι ποιεῖν, τὸ ἀναγκαζόμενον, τὸ στένοντα πρὸς τὸ δοῦλον εἶναι ;
[12] τοῦτο μὲν ἔστω, φησίν. ἀλλὰ τίς με δύναται ἀναγκάσαι, εἰ μὴ ὁ πάντων κύριος Καῖσαρ ;
[13] οὐκοῦν ἕνα μὲν δεσπότην σαυτοῦ καὶ σὺ αὐτὸς ὡμολόγησας. ὅτι δὲ πάντων, ὡς λέγεις, κοινός ἐστιν, μηδέν σε τοῦτο παραμυθείσθω, ἀλλὰ γίγνωσκε, ὅτι ἐκ μεγάλης οἰκίας δοῦλος εἶ. [14] οὕτως καὶ Νικοπολῖται ἐπιϐοᾶν εἰώθασι ‘νὴ τὴν Καίσαρος τύχην, ἐλεύθεροί ἐσμεν.

[15] ὅμως δ᾽, ἐάν σοι δοκῇ, τὸν μὲν Καίσαρα πρὸς τὸ παρὸν ἀφῶμεν, ἐκεῖνο δέ μοι εἰπέ  · οὐδέποτ᾽ ἠράσθης τινός; οὐ παιδισκαρίου, οὐ παιδαρίου, οὐ δούλου, οὐκ ἐλευθέρου ;
[16] τί οὖν τοῦτο πρὸς τὸ δοῦλον εἶναι ἢ ἐλεύθερον ;
[17] οὐδέποθ᾽ ὑπὸ τῆς ἐρωμένης ἐπετάγης οὐδὲν ὧν οὐκ ἤθελες ; οὐδέποτέ σου τὸ δουλάριον ἐκολάκευσας ; οὐδέποτ᾽ αὐτοῦ τοὺς πόδας κατεφίλησας ; καίτοι τοῦ Καίσαρος ἄν σέ τις ἀναγκάσῃ, ὕϐριν αὐτὸ ἡγῇ καὶ ὑπερϐολὴν τυραννίδος. [18] τί οὖν ἄλλο ἐστὶ δουλεία ; νυκτὸς οὐδέποτ᾽ ἀπῆλθες, ὅπου οὐκ ἤθελες ; ἀνάλωσας, ὅσα οὐκ ἤθελες ; εἶπάς τινα οἰμώζων καὶ στένων, ἠνέσχου λοιδορούμενος, ἀποκλειόμενος ; [19] ἀλλ᾽ εἰ σὺ αἰσχύνῃ τὰ σαυτοῦ ὁμολογεῖν, ὅρα ἃ λέγει καὶ ποιεῖ ὁ Θρασωνίδης, ὃς τοσαῦτα στρατευσάμενος, ὅσα τάχα οὐδὲ σύ, πρῶτον μὲν ἐξελήλυθε νυκτός, ὅτε ὁ Γέτας οὐ τολμᾷ ἐξελθεῖν, ἀλλ᾽ εἰ προσηναγκάζετο ὑπ᾽ αὐτοῦ, πόλλ᾽ ἂν ἐπικραυγάσας καὶ τὴν πικρὰν δουλείαν ἀπολοφυράμενος ἐξῆλθεν. [20] εἶτα, τί λέγει ;
παιδισκάριόν με,
φησίν,
καταδεδούλωκ᾽ εὐτελές,
ὃν οὐδὲ εἷς τῶν πολεμίων οὐπώποτε.

Τάλας, [21] ὅς γε καὶ παιδισκαρίου δοῦλος εἶ καὶ παιδισκαρίου εὐτελοῦς. τί οὖν ἔτι σαυτὸν ἐλεύθερον λέγεις ; τί δὲ προφέρεις σου τὰς στρατείας ; [22] εἶτα ξίφος αἰτεῖ καὶ πρὸς τὸν ὑπ᾽ εὐνοίας μὴ διδόντα χαλεπαίνειν καὶ δῶρα τῇ μισούσῃ πέμπει καὶ δεῖται καὶ κλαίει, πάλιν δὲ μικρὰ εὐημερήσας ἐπαίρεται  ·  [23] πλὴν καὶ τότε πῶς μηδ᾽ ἐπιθυμεῖν ἢ φοϐεῖσθαι ; οὔτως ἐλεύθερος ἦν ;   
                                                                                                                                                                         Epictète, Entretiens, livre 4, chapitre 1, 1-23
ἐγχειρίδιος, ος, ον : que l’on tient dans la main.
subst. τὸ ἐγχειρίδιον : manche, poignée; arme portative, couteau, poignard; livre portatif, manuel, titre d’un ouvrage d’Epictète.







φαῦλος, η, ον : mauvais, défectueux; méchant, malveillant.
ἄλυπος, ος, ον : exempt de chagrin.
ἀναπότευκτος, ος, ον : (désir) non satisfait.
ἔχομεν οὖν τινα τῶν φαύλων ἄλυπον, ἄφοϐον, ἀπερίπτωτον, ἀναπότευκτον ; trouvons-nous donc quelque méchant sans chagrin, sans crainte, sans aversions contrariées, sans désirs insatisfaits ?



πλήν, adv. : ne... que, excepté.
memento πλὴν ἐν ταῖς τεταγμέναις ἡμέραις ἐν αἷς αὐτοὺς δεῖ παρεῖναι : sauf aux jours fixés où leur présence est nécessaire.
memento  πλὴν τῶν γεγαμηκότων : à l'exception de ceux qui sont mariés.
πλὴν καὶ τότε πῶς μηδ᾽ ἐπιθυμεῖν ἢ φοϐεῖσθαι ; οὔτως ἐλεύθερος ἦν ;  n'a-t-il plus rien à désirer ? plus rien à craindre ? Et voilà comment il est libre !





[4, 1, 1] Est libre celui qui vit à sa guise, celui qu'on ne peut ni contraindre, ni empêcher, ni violenter, celui dont les propensions ne sont point entravées, dont les désirs se réalisent, dont les aversions ne subissent point d'échec. [2] Qui donc veut vivre dans l'erreur ?
—Personne.
— Qui veut être dupe dans sa vie, céder à l'entraînement, à l'injustice, à l'intempérence, à la morosité, à la bassesse d'âme ?
[3] — Personne.
— Donc aucun méchant ne vit à sa guise, et par conséquent il n'est pas libre non plus. [4] Et qui veut vivre dans le chagrin, dans la crainte, ressentir l'envie, la pitié, éprouver des désirs sans pouvoir les satisfaire, des aversions sans pouvoir éviter ce qui en fait l'objet ?
[5] —Absolument personne.
—Trouvons-nous donc quelque méchant sans chagrin, sans crainte, sans aversions contrariées, sans désirs insatisfaits ?
—Aucun.
—Donc aucun non plus qui soit libre.

[6] — Cela, si un homme qui a été deux fois consul vient à l'entendre pourvu que tu ajoutes : " Mais, toi, du moins, tu es un sage, cela ne te concerne en rien", il te pardonnera. [7] Si, au contraire, tu lui dis la vérité, c'est-à-dire : " Pour ce qui est d'être esclave, toi aussi tu diffères en rien de ceux qui ont été vendu trois fois ", à quoi dois-tu t'attendre, sinon à des coups ?
[8] —Comment donc, dit-il, moi, je suis esclave ?  Mon père était libre,  ma mère était libre, personne n'a passé de contrat de vente à mon sujet.  Mais, de plus, je suis sénateur, et ami de César,  et j'ai été consul, et j'ai beaucoup d'esclaves.
[9] —Tout d'abord, très digne sénateur,  ton père était peut-être esclave au même titre que toi, ainsi que ta mère et ton grand-père et toute la série de tes ancêtres; [10] si absolument libres qu'ils pussent être, que t'importe ? Eh quoi ! s'ils étaient nobles, eux, et si toi tu es vil ? s'ils étaient courageux, et si tu es lâche ? s'ils étaient maîtres d'eux-mêmes, et si tu ne te possèdes pas ?
[11] —Et, réplique-t-il, quel rapport cela a-t-il avec le fait d'être esclave ?
[12] —Soit, répond-il. Mais qui peut me contraindre, en dehors du maître universel, César ?
[13] —Ainsi tu viens de te reconnaître un maître, toi aussi. Et qu'il soit, comme tu le prétends, le maître commun de tous, ne doit pas être pour toi une consolation, mais que tu esclave dans une grande maison. [14] C'est aussi de la sorte que les gens de Nicopolis ont coutume de crier : " Oui, par la fortune de César, nous sommes libres".
[15] —Toutefois, si cela te plaît, laissons César pour l'instant ! Mais réponds-moi à cette question : n'as-tu jamais éprouvé une passion pour quelqu'un, fillette ou garçonnet, esclave ou libre ?
[16] —Quel rapport cela a-t-il avec le fait d'être esclave ou d'être libre ?
[17] —N'as-tu jamais reçu de ta maîtresse l'ordre de faire des choses que tu ne voulais ? N'as-tu jamais flatté ta petite esclave ? Ne lui as-tu jamais baisé les pieds ? Pourtant, si l'on te force à baiser ceux de César, tu regardes cela comme une insolence et le comble de la tyrannie. [18] L'esclavage est-il donc autre chose ? La nuit, n'es-tu jamais allé où tu ne voulais pas ? Que de dépenses n'as-tu pas faites contre ton gré ? Ne t'es-tu point répandu en gémissements et en lamentations; n'as-tu pas supporté d'être injurié et laissé à la porte ? [19] Si, toutefois, tu as honte de l'avouer pour ton propre compte, vois ce que dit et fait Thrasonidès, lui dont les campagnes sont si nombreuses, campagnes plus nombreuses peut-être même que les tiennes. D'abord, le voici sorti de nuit à une heure où Géta ne l'ose pas. Or, s'il y avait été contraint par son maître, c'est avec bien des récriminations et en déplorant son amer esclavage qu'il serait sorti. [20] Et alors, que dit Thrasonidès ?
Une fillette, proclame-t-il, m'a subjugué, une fillette de vil prix,
moi, que nul ennemi n'a jamais pu soumettre.
                             
[20] Malheureux ! être l'esclave d'une fillette et d'une fillette de vil prix ! Pourquoi donc te proclamer encore libre ? Pourquoi publier tes campagnes ? Le voilà qui réclame une épée et qui se fâche contre celui qui, par bonté d'âme, la lui refuse, le voilà qui envoie des cadeaux à celle qui le déteste, le voilà qui supplie et pleure, et en revenche, après un petit succès, le voilà dans le ravissement. Et même alors pourtant, comment n'avoir ni désir ni crainte ? Etait-il libre ainsi ?
                         trad. Joseph Souilhé et Amand Jagu; éd. les belles lettres





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Comment rester serein





[4, 3, 1] Ἀναχωρήσεις αὑτοῖς ζητοῦσιν ἀγροικίας καὶ αἰγιαλοὺς καὶ ὄρη, εἴωθας δὲ καὶ σὺ τὰ τοιαῦτα μάλιστα ποθεῖν. Ὅλον δὲ τοῦτο ἰδιωτικώτατόν ἐστιν, ἐξόν, ἧς ἂν ὥρας ἐθελήσῃς, εἰς ἑαυτὸν ἀναχωρεῖν. Οὐδαμοῦ γὰρ οὔτε ἡσυχιώτερον οὔτε ἀπραγμονέστερον ἄνθρωπος ἀναχωρεῖ ἢ εἰς τὴν ἑαυτοῦ ψυχήν, μάλισθ ὅστις ἔχει ἔνδον τοιαῦτα, εἰς ἃ ἐγκύψας ἐν πάσῃ εὐμαρείᾳ εὐθὺς γίνεται· τὴν δὲ εὐμάρειαν οὐδὲν ἄλλο λέγω ἢ εὐκοσμίαν. Συνεχῶς οὖν δίδου σεαυτῷ ταύτην τὴν ἀναχώρησιν καὶ ἀνανέου σεαυτόν· βραχέα δὲ ἔστω καὶ στοιχειώδη ἃ εὐθὺς ἀπαντήσαντα ἀρκέσει εἰς τὸ πᾶσαν λύπην ἀποκλύσαι καὶ ἀποπέμψαι σε μὴ δυσχεραίνοντα ἐκείνοις ἐφ ἃ ἐπανέρχῃ. [2] Τίνι γὰρ δυσχερανεῖς ; Τῇ τῶν ἀνθρώπων κακίᾳ ; Ἀναλογισάμενος τὸ κρῖμα, ὅτι τὰ λογικὰ ζῷα ἀλλήλων ἕνεκεν γέγονε καὶ ὅτι τὸ ἀνέχεσθαι μέρος τῆς δικαιοσύνης καὶ ὅτι ἄκοντες ἁμαρτάνουσι καὶ πόσοι ἤδη διεχθρεύσαντες, ὑποπτεύσαντες, μισήσαντες, διαδορατισθέντες ἐκτέτανται, τετέφρωνται, παύου ποτέ. Ἀλλὰ καὶ τοῖς ἐκ τῶν ὅλων ἀπονεμομένοις δυσχερανεῖς ; ἀνανεωσάμενος τὸ διεζευγμένον τό· ἤτοι πρόνοια ἢ ἄτομοι, καὶ ἐξ ὅσων ἀπεδείχθη ὅτι ὁ κόσμος ὡσανεὶ πόλις. Ἀλλὰ τὰ σωματικά σου ἅψεται ἔτι ; Ἐννοήσας ὅτι οὐκ ἐπιμίγνυται λείως ἢ τραχέως κινουμένῳ πνεύματι ἡ διάνοια, ἐπειδὰν ἅπαξ ἑαυτὴν ἀπολάϐῃ καὶ γνωρίσῃ τὴν ἰδίαν ἐξουσίαν, καὶ λοιπὸν ὅσα περὶ πόνου καὶ ἡδονῆς ἀκήκοας καὶ συγκατέθου. [3] Ἀλλὰ τὸ δοξάριόν σε περισπάσει ; Ἀπιδὼν εἰς τὸ τάχος τῆς πάντων λήθης καὶ τὸ χάος τοῦ ἐφ ἑκάτερα ἀπείρου αἰῶνος καὶ τὸ κενὸν τῆς ἀπηχήσεως καὶ τὸ εὐμετάϐολον καὶ ἄκριτον τῶν εὐφημεῖν δοκούντων καὶ τὸ στενὸν τοῦ τόπου, ἐν ᾧ περιγράφεται· ὅλη τε γὰρ ἡ γῆ στιγμὴ καὶ ταύτης πόστον γωνίδιον ἡ κατοίκησις αὕτη ; Καὶ ἐνταῦθα πόσοι καὶ οἷοί τινες οἱ ἐπαινεσόμενοι ; [4] Λοιπὸν οὖν μέμνησο τῆς ὑποχωρήσεως τῆς εἰς τοῦτο τὸ ἀγρίδιον ἑαυτοῦ καὶ πρὸ παντὸς μὴ σπῶ μηδὲ κατεντείνου, ἀλλὰ ἐλεύθερος ἔσο καὶ ὅρα τὰ πράγματα ὡς ἀνήρ, ὡς ἄνθρωπος, ὡς πολίτης, ὡς θνητὸν ζῷον. Ἐν δὲ τοῖς προχειροτάτοις, εἰς ἃ ἐγκύψεις, ταῦτα ἔστω τὰ δύο· ἕν μέν, ὅτι τὰ πράγματα οὐχ ἅπτεται τῆς ψυχῆς, ἀλλ ἔξω ἕστηκεν ἀτρεμοῦντα, αἱ δὲ ὀχλήσεις ἐκ μόνης τῆς ἔνδον ὑπολήψεως· ἕτερον δέ, ὅτι πάντα ταῦτα, ὅσα ὁρᾷς, ὅσον οὐδέπω μεταϐαλεῖ καὶ οὐκ ἔτι ἔσται· καὶ ὅσων ἤδη μεταϐολαῖς αὐτὸς παρατετύχηκας, συνεχῶς διανοοῦ. Ὁ κόσμος ἀλλοίωσις, ὁ βίος ὑπόληψις.
                                                                                                                                                                                                                Marc Aurèle, 4, 3, 1-4




ἀναχώρησις, εως (ἡ) : action de se retirer, retraite; lieu de retraite, refuge.
αἰγιαλός, οῦ (ὁ) : bord de la mer, rivage, grève.
memento αἶγες : vagues.  --- cf. ἄϊξ, ἄϊκος (ἡ) : tourbillon.
ἰδιωτικός, ή, όν : d’homme privé, de simple particulier, de simple citoyen.
ποθέω, -ῶ (futur ποθήσω ou ποθέσομαι, aor. ἐπόθησα ou ἐπόθεσα, parf. πεπόθηκα): regretter; désirer avec ardeur, réclamer.
ἀναχωρήσεις αὑτοῖς ζητοῦσιν ἀγροικίας καὶ αἰγιαλοὺς καὶ ὄρη, εἴωθας δὲ καὶ σὺ τὰ τοιαῦτα μάλιστα ποθεῖν : on se cherche des refuges à la campagne, des bords de mer, et des montagnes, et toi aussi tu as coutume d'éprouver au plus haut point de telles désirs.

δυσχεραίνω (futur δυσχερανῶ) : supporter avec peine.
κρίμα, ou κρῖμα, ατος (τὸ) : objet d’une contestation, contestation, querelle; jugement, décision judiciaire; jugement.
Τίνι γὰρ δυσχερανεῖς ; Τῇ τῶν ἀνθρώπων κακίᾳ ; Ἀναλογισάμενος τὸ κρῖμα, ὅτι τὰ λογικὰ ζῷα ἀλλήλων ἕνεκεν γέγονε ; et qu'est-ce donc qui t'irrite ? la méchanceté des hommes ? reporte-toi à ce jugement, que tous les êtres raisonnables sont faits les uns pour les autres


δοξάριον, ου (τὸ) : petite gloire, gloriole.
τάχος, εος-ους (τὸ) : vitesse, rapidité, promptitude.
χάος, gén. χάεος-χάους (τὸ) : ouverture béante, gouffre, abîme.
ἀφοράω -ῶ (imparf. ἀφεώρων, futur ἀπόψομαι, aor.2 ἀπεῖδον, parf. ἀφεώρακα) : regarder de loin.
λήθη, ης (ἡ) : oubli.
ἀλλὰ τὸ δοξάριόν σε περισπάσει ; Ἀπιδὼν εἰς τὸ τάχος τῆς πάντων λήθης  : mais peut-être est-ce la gloriole qui te tourmentera ? détourne les yeux sur la promptitude de l'oubli où tombent toutes choses.


ἔσο : impératif moyen 2e sg du verbe εἰμί.
ἔσσο , late prose ἔσο.
ἐλεύθερος ἔσο : sois libre.
σπάω, -ῶ (futur σπάσω, aor. ἔσπασα, parf. ἔσπακα) : tirer, tirailler.
κατεντείνομαι : faire tous ses efforts.
λοιπὸν οὖν μέμνησο τῆς ὑποχωρήσεως τῆς εἰς τοῦτο τὸ ἀγρίδιον ἑαυτοῦ καὶ πρὸ παντὸς μὴ σπῶ μηδὲ κατεντείνου, ἀλλὰ ἐλεύθερος ἔσο : au reste donc souviens-toi de te retirer dans ce petit domaine qui est le tien et avant tout ne t'agite pas ni ne t'efforces, mais sois libre.

ἀλλοίωσις, εως (ἡ) : changement, altération.
ὑπόληψις, εως (ἡ) : action de succéder à qqn; succession, remplacement; opinion (bonne ou mauvaise qu’on a d’une personne ou d’une chose).
ὁ κόσμος ἀλλοίωσις, ὁ βίος ὑπόληψις : le monde n'est que changement, la vie n'est qu'opinion.









[4, 3, 1] On se cherche des retraites à la campagne, au bord de mer,  à la montagne, et toi aussi, tu as coutume de désirer ces sortes de choses au plus haut point. Mais tout cela marque une grande simplicité d'esprit, car on peut,  à tout heure de son choix, se retirer en soi-même. Nulle part on ne trouve de retraite plus paisible, plus exempte de tracas, que dans son âme, surtout quand elle renferme de ces biens sur lesquels il suffit de se pencher pour recouvrer aussitôt toute liberté d'esprit; et par liberté d'esprit, je ne veux dire autre chose que l'état d'une âme bien ordonnée. Accorde-toi donc constamment cette retraite et renouvelle-toi. Mais qu'il s'y trouve de ces maximes concises et essentielles, qui, rencontrées d'abord, excluront tout ennui et te renverront guéri de ton irritation au milieu où tu retournes. [2] Et qu'est-ce donc qui t'irrite ? La méchanceté des hommes ? Reporte-toi à ce jugement, que tous les êtres raisonnables sont faits les uns pour les autres et (à ceux-ci) que la patience est une partie de la justice, que leurs fautes sont involontaires; (compte) tous ceux qui, jusqu'ici, après s'être brouillés à mort, soupçonnés, haïs, transpercés de leurs lances, sont étendus dans la tombe et réduits en cendres, : - et calme-toi enfin !

Mais peut-être es-tu mécontent du lot qui t'est assigné dans l'ensemble ? Rememore-toi la disjonctive : ou une providence ou des atomes, et toutes les preuves par lesquelles on t'a démontré que le monde est comme une cité.

Mais ce qui intéresse ton corps aura encore prise sur toi ? Considère que l'intelligence ne se mêle pas aux agitations, ou douces ou violentes, du souffle, une fois qu'elle s'est reprise et qu'elle a reconnu son pouvoir; et enfin tout ce qu'on t'a enseigné sur la douleur et le plaisir, à quoi tu as donné ton assentiment.

[3] Mais peut-être est-ce la gloriole qui te tourmentera ? Détourne les yeux sur la promptitude de l'oubli où tombent toutes choses, et sur le gouffre du temps infini, de part et d'autre, sur la vanité du bruit qu'on fait, la versatilité et l'irréflexion de ceux qui ont l'air d'applaudir, les limites étroites où c'est circonscrit : toute la terre n'est qu'un point et, sur ce point, combien est réduite cette partie qui est habitée ! Et là, combien d'hommes et quels hommes ! chanteront tes louanges ! [4] Bref ! souviens-toi de la retraite en ce petit coin de terre, qui est tien. Et surtout, pas d'agitation, ni de raideur. Sois libre et examine les choses en homme de cœur, en homme raisonnable, en citoyen, en homme mortel. Parmi les maximes tenues à ta portée, sur lesquelles tu te pencheras, qu'il y ait ces deux-ci : d'abord, les choses n'atteignent pas l'âme, elles demeurent au-dehors, immobiles; les troubles ne proviennent que de l'opinion intérieure. En second lieu, tout ce spectacle que tu vois, en un clin d'œil il va se transformer, cesser d'être. Et que de choses dont les transformations t'ont déjà eu toi-même pour témoin, penses-y constamment ! Le monde n'est que changement, la vie n'est qu'opinion.
           trad. Trannoy; éd. les belles lettres.







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Après la mort de Cyrus, le sort des mercenaires grecs

[2.1.14] ἄλλους δέ τινας ἔφασαν λέγειν ὑπομαλακιζομένους, ὡς καὶ Κύρῳ πιστοὶ ἐγένοντο καὶ βασιλεῖ ἂν πολλοῦ ἄξιοι γένοιντο, εἰ βούλοιτο φίλος γενέσθαι· καὶ εἴτε ἄλλο τι θέλοι χρῆσθαι εἴτ᾽ ἐπ᾽ Αἴγυπτον στρατεύειν, συγκαταστρέψαιντ᾽ ἂν αὐτῷ. (2.1.15) ἐν τούτῳ Κλέαρχος ἧκε, καὶ ἠρώτησεν εἰ ἤδη ἀποκεκριμένοι εἶεν. Φαλῖνος δὲ ὑπολαϐὼν εἶπεν· -- οὗτοι μέν, ὦ Κλέαρχε, ἄλλος ἄλλα λέγει· (2.1.16) σὺ δ᾽ ἡμῖν εἰπὲ τί λέγεις. ὁ δ᾽ εἶπεν· -- ἐγώ σε, ὦ Φαλῖνε, ἄσμενος ἑόρακα, οἶμαι δὲ καὶ οἱ ἄλλοι πάντες· σύ τε γὰρ Ἕλλην εἶ καὶ ἡμεῖς τοσοῦτοι ὄντες ὅσους σὺ ὁρᾷς· ἐν τοιούτοις δὲ ὄντες πράγμασι συμϐουλευόμεθά σοι τί χρὴ ποιεῖν περὶ ὧν λέγεις. (2.1.17) σὺ οὖν πρὸς θεῶν συμϐούλευσον ἡμῖν ὅ τι σοι δοκεῖ κάλλιστον καὶ ἄριστον εἶναι, καὶ ὅ σοι τιμὴν οἴσει εἰς τὸν ἔπειτα χρόνον (ἀνα)λεγόμενον, ὅτι Φαλῖνός ποτε πεμφθεὶς παρὰ βασιλέως κελεύσων τοὺς Ἕλληνας τὰ ὅπλα παραδοῦναι συμϐουλευομένοις συνεϐούλευσεν αὐτοῖς τάδε. οἶσθα δὲ ὅτι ἀνάγκη λέγεσθαι ἐν τῇ Ἑλλάδι ἃ ἂν συμϐουλεύσῃς. (2.1.18) ὁ δὲ Κλέαρχος ταῦτα ὑπήγετο βουλόμενος καὶ αὐτὸν τὸν παρὰ βασιλέως πρεσβεύοντα συμϐουλεῦσαι μὴ παραδοῦναι τὰ ὅπλα, ὅπως εὐέλπιδες μᾶλλον εἶεν οἱ Ἕλληνες. Φαλῖνος δὲ ὑποστρέψας παρὰ τὴν δόξαν αὐτοῦ εἶπεν· (2.1.19) -- ἐγώ, εἰ μὲν τῶν μυρίων ἐλπίδων μία τις ὑμῖν ἐστι σωθῆναι πολεμοῦντας βασιλεῖ, συμϐουλεύω μὴ παραδιδόναι τὰ ὅπλα· εἰ δέ τοι μηδεμία σωτηρίας ἐστὶν ἐλπὶς ἄκοντος βασιλέως, συμϐουλεύω σᾐζεσθαι ὑμῖν ὅπῃ δυνατόν. (2.1.20) Κλέαρχος δὲ πρὸς ταῦτα εἶπεν· -- ἀλλὰ ταῦτα μὲν δὴ σὺ λέγεις· παρ᾽ ἡμῶν δὲ ἀπάγγελλε τάδε, ὅτι ἡμεῖς οἰόμεθα, εἰ μὲν δέοι βασιλεῖ φίλους εἶναι, πλείονος ἂν ἄξιοι εἶναι φίλοι ἔχοντες τὰ ὅπλα ἢ παραδόντες ἄλλῳ, εἰ δὲ δέοι πολεμεῖν, ἄμεινον ἂν πολεμεῖν ἔχοντες τὰ ὅπλα ἢ ἄλλῳ παραδόντες. (2.1.21) ὁ δὲ Φαλῖνος εἶπε· -- ταῦτα μὲν δὴ ἀπαγγελοῦμεν· ἀλλὰ καὶ τάδε ὑμῖν εἰπεῖν ἐκέλευσε βασιλεύς, ὅτι μένουσι μὲν ὑμῖν αὐτοῦ σπονδαὶ εἴησαν, προϊοῦσι δὲ καὶ ἀπιοῦσι πόλεμος. εἴπατε οὖν καὶ περὶ τούτου πότερα μενεῖτε καὶ σπονδαί εἰσιν ἢ ὡς πολέμου ὄντος παρ᾽ ὑμῶν ἀπαγγελῶ. (2.1.22) Κλέαρχος δ᾽ ἔλεξεν· -- ἀπάγγελλε τοίνυν καὶ περὶ τούτου ὅτι καὶ ἡμῖν ταὐτὰ δοκεῖ ἅπερ καὶ βασιλεῖ. -- τί οὖν ταῦτά ἐστιν; ἔφη ὁ Φαλῖνος. ἀπεκρίνατο Κλέαρχος· -- ἢν μὲν μένωμεν, σπονδαί, ἀπιοῦσι δὲ καὶ προϊοῦσι πόλεμος.

[2,3,1] ὃ δὲ δὴ ἔγραψα ὅτι βασιλεὺς ἐξεπλάγη τῇ ἐφόδῳ, τῷδε δῆλον ἦν. τῇ μὲν γὰρ πρόσθεν ἡμέρᾳ πέμπων τὰ ὅπλα παραδιδόναι ἐκέλευε, τότε δὲ ἅμα ἡλίῳ ἀνατέλλοντι κήρυκας ἔπεμψε περὶ σπονδῶν. (2.3.2) οἱ δ᾽ ἐπεὶ ἦλθον πρὸς τοὺς προφύλακας, ἐζήτουν τοὺς ἄρχοντας. ἐπειδὴ δὲ ἀπήγγελλον οἱ προφύλακες, Κλέαρχος τυχὼν τότε τὰς τάξεις ἐπισκοπῶν εἶπε τοῖς προφύλαξι κελεύειν τοὺς κήρυκας περιμένειν ἄχρι ἂν σχολάσῃ. (2.3.3) ἐπεὶ δὲ κατέστησε τὸ στράτευμα ὡς καλῶς ἔχειν ὁρᾶσθαι πάντῃ φάλαγγα πυκνήν, ἐκ τῶν ὅπλων δὲ μηδένα καταφανῆ εἶναι, ἐκάλεσε τοὺς ἀγγέλους, καὶ αὐτός τε προῆλθε τούς τε εὐοπλοτάτους ἔχων καὶ εὐειδεστάτους τῶν αὑτοῦ στρατιωτῶν καὶ τοῖς ἄλλοις στρατηγοῖς ταὐτὰ ἔφρασεν. (2.3.4) ἐπεὶ δὲ ἦν πρὸς τοῖς ἀγγέλοις, ἀνηρώτα (πρῶτα) τί βούλοιντο. οἱ δ᾽ ἔλεγον ὅτι περὶ σπονδῶν ἥκοιεν ἄνδρες οἵτινες ἱκανοὶ ἔσονται τά τε παρὰ βασιλέως τοῖς Ἕλλησιν ἀπαγγεῖλαι καὶ τὰ παρὰ τῶν Ἑλλήνων βασιλεῖ. (2.3.5) ὁ δὲ ἀπεκρίνατο· -- ἀπαγγέλλετε τοίνυν αὐτῷ ὅτι μάχης δεῖ πρῶτον· ἄριστον γὰρ οὐκ ἔστιν οὐδ᾽ ὁ τολμήσων περὶ σπονδῶν λέγειν τοῖς Ἕλλησι μὴ πορίσας ἄριστον. (2.3.6) ταῦτα ἀκούσαντες οἱ ἄγγελοι ἀπήλαυνον, καὶ ἧκον ταχύ· ᾧ καὶ δῆλον ἦν ὅτι ἐγγύς που βασιλεὺς ἦν ἢ ἄλλος τις ᾧ ἐπετέτακτο ταῦτα πράττειν· ἔλεγον δὲ ὅτι εἰκότα δοκοῖεν λέγειν βασιλεῖ, καὶ ἥκοιεν ἡγεμόνας ἔχοντες οἳ αὐτούς, ἐὰν σπονδαὶ γένωνται, ἄξουσιν ἔνθεν ἕξουσι τὰ ἐπιτήδεια.
                                                                                                                                                   Xénophon, Anabase, 2, 1, 14-22; 2, 3, 1-7


ὑπομαλακίζομαι : commencer à mollir, à faiblir.
συγκαταστρέφω : terminer en même temps.
moyen στρέφομαι : aider à renverser une domination.
ἀπεκρίνατο Κλέαρχος· -- ἢν μὲν μένωμεν, σπονδαί, ἀπιοῦσι δὲ καὶ προϊοῦσι πόλεμος : si nous restons, répondit Cléarque, c'est la trêve; si nous reculons ou si nous avançons, c'est la guerre.

γράφω (imparf. ἔγραφον, futur γράψω, aor. ἔγραψα, parf. γέγραφα) : égratigner, écorcher; écrire.
ὃ δὲ δὴ ἔγραψα ὅτι βασιλεὺς ἐξεπλάγη τῇ ἐφόδῳ, τῷδε δῆλον ἦν : j'ai écrit que le Roi avait été effrayé par l'arrivée de l'armée; en voici la preuve.

ἔλεγον δὲ ὅτι εἰκότα δοκοῖεν λέγειν βασιλεῖ, καὶ ἥκοιεν ἡγεμόνας ἔχοντες οἳ αὐτούς, ἐὰν σπονδαὶ γένωνται, ἄξουσιν ἔνθεν ἕξουσι τὰ ἐπιτήδεια : ils disaient que le Roi jugeait leur demande raisonnable et qu'ils venaient avec des guides qui les mèneraient, si la trêve était conclue, en un lieu où ils trouveraient des vivres.



[2.1.14] D'autres aussi, qui commençaient à faiblir, firent valoir, dit-on, qu'ils avaient été fidèles à Cyrus et qu'il pourrait être d'une grande utilité au Roi, s'il consentait à leur accorder son amitié : qu'il eût d'autres projets, qu'il voulût marcher contre l'Egypte, ils l'aideraient à la lui soumettre. (2.1.15) A ce moment survint Cléarque; il demanda si une réponse définitive avait été donnée : "Les uns, déclara Phalinos, disent une chose, l'autres, une autre, mais toi, qu'en penses-tu ? Dis-le nous." (2.1.16) Pour moi, Phalinos, répondit-il, c'est avec plaisir que je te vois et il en est de même, je crois, de tous ceux qui sont ici : tu es Grec, et nous tous que tu as devant toi, nous le sommes aussi.  Dans la situation où nous nous trouvons, nous voulons chercher avec toi ce qu'il faut décider, quand tu nous fait ces propositions. (2.1.17) Donne-nous donc, au nom des dieux, le conseil qui te paraît le plus noble, le meilleur de tous, et qui te fera honneur dans l'avenir chaque fois qu'on le rappellera. Un jour, dira-t-on, Phalinos avait été envoyé de la part du Roi pour ordonner aux Grecs de livrer leurs armes, et dans la délibération commune voilà l'avis qu'il a émis. Tu sais que ce que tu leur aura conseillé ne peut manquer d'être raconté dans l'Hellade. (2.1.18) Par ces suggestions Cléarque voulait que l'homme même qu'avait envoyé le Roi conseillât de ne pas livrer les armes, pour grandir ainsi le bon espoir des Grecs; (2.1.19) mais Phalinos se déroba, et, contre son attente : " Quant à moi, dit-il, si vous avez une chance sur dix mille de vous sauver par le seul moyen qui vous reste". (2.1.20) Cléarque répliqua : " Voilà donc ton opinion, à toi; pour nous, voici notre réponse : nous estimons, au cas où nous serions forcés de devenir les amis du Roi, que nous serions pour lui des amis plus efficaces avec les armes, qu'en les ayant livrées à autrui; dans le cas, au contraire, où il nous faudrait combattre, que nous combattrions mieux avec nos armes que si quelque autre les avait reçues de nous". (2.1.21) Phalinos reprit : " Nous rapporterons donc votre réponse, mais le Roi nous a aussi ordonné de vous prévenir que si vous restez où vous êtes, il y avait trêve, que si vous avancez ou reculez, c'était la guerre.  Dites-nous  donc aussi à ce sujet si vous resterez  et s'il y a trêve, ou si je vais annoncer  de votre part que c'est la guerre." - (2.1.22)" Eh bien, annonce, dit Cléarques, que là-dessus nous sommes aussi du même avis que le Roi" - " Quel est donc cet avis ? " demanda Phalinos. - " Si nous restons, répondit Cléarque, c'est la trêve; si nous reculons ou si nous avançons, c'est la guerre."




(2.3.1) J'ai écrit que le Roi avait été effrayé par l'arrivée de l'armée. En voici la preuve  : la veille il avait ordonné par ses envoyés de livrer les armes; au lever du soleil il dépêcha encore des hérauts, mais c'était pour traiter. (2.3.2) Dès qu'ils furent arrivés aux avant-postes, ils demandèrent les chefs. Quand les sentinelles eurent annoncé la chose, Cléarque, qui était à ce moment-là en train d'inspecter les rangs, leur répondit d'ordonner à ces hérauts d'attendre jusqu'à ce qu'il eût un moment à lui. (2.3.3) Lorsqu'il eut disposé l'armée de manière que la phalange, sans un seul vide, offrît de tous les côtés un beau coup d'œil, et qu'on ne vît pas un seul homme dépasser la ligne des hoplites, il appela les messagers et s'avança en personne au-devant d'eux avec les mieux armés, les plus beaux de ses hommes, invitant les autres stratèges à en faire autant. (2.3.4) Quand il fut près des envoyés, il leur demande ce qu'ils voulaient. Ceux-ci dirent qu'ils venaient pour une trêve et qu'ils avaient tout pouvoir pour transmettre aux Grecs les propositions du Roi et réciproquement. (2.3.5) " Alors, dites-lui, répondit Cléarque, qu'il faut que nous nous battions d'abord : nous n'avons pas de quoi déjeuner, et s'il ne leur donne à déjeuner, qui aurait le front de parler de trêve aux Hellènes ? " (2.3.6) Sur cette réponse les envoyés s'éloignèrent et revinrent quelques instants après : ce qui prouvait que le Roi était dans les environs, lui ou quelque autre chargé de cette négociation. Ils disaient que le Roi jugeait leur demande raisonnable et qu'ils venaient avec des guides qui les mèneraient, si la trêve était conclue, en un lieu où ils trouveraient des vivres.
                                         trad. Masqueray; éd. les belles lettres



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A propos des deux champions de pancrace


                              voir le grec par les textes, 4è/3è, page 220 et 223; éd. Magnard.

Τούτω γάρ ἐστον κομιδῇ παμμάχω. Οὐ κατὰ τὼ Ἀκαρνᾶνε ἐγενέσθην τὼ παγκρατιαστὰ ἀδελφώ· (271d) ἐκείνω μὲν γὰρ τῷ σώματι μόνον οἵω τε μάχεσθαι, τούτω δὲ πρῶτον μὲν τῷ σώματι δεινοτάτω ἐστὸν καὶ μάχῃ, ᾗ πάντων ἔστι κρατεῖν. [...]

(272a) ἔπειτα τὴν ἐν τοῖς δικαστηρίοις μάχην κρατίστω καὶ ἀγωνίσασθαι καὶ ἄλλον διδάξαι λέγειν τε καὶ συγγράφεσθαι λόγους οἵους εἰς τὰ δικαστήρια. Πρὸ τοῦ μὲν οὖν ταῦτα δεινὼ ἤστην μόνον, νῦν δὲ τέλος ἐπιτεθήκατον παγκρατιαστικῇ τέχνῃ. Ἣ γὰρ ἦν λοιπὴ αὐτοῖν μάχη ἀργός, ταύτην νῦν ἐξείργασθον, ὥστε μηδ' ἂν ἕνα αὐτοῖς οἷόν τ' εἶναι μηδ' ἀντᾶραι· οὕτω δεινὼ γεγόνατον ἐν τοῖς λόγοις μάχεσθαί τε καὶ ἐξελέγχειν (272b) τὸ ἀεὶ λεγόμενον, ὁμοίως ἐάντε ψεῦδος ἐάντε ἀληθὲς ᾖ. Ἐγὼ μὲν οὖν, ὦ Κρίτων, ἐν νῷ ἔχω τοῖν ἀνδροῖν παραδοῦναι ἐμαυτόν· καὶ γάρ φατον ἐν ὀλίγῳ χρόνῳ ποιῆσαι ἂν καὶ ἄλλον ὁντινοῦν τὰ αὐτὰ ταῦτα δεινόν.

(273a) ὕστερον εἰσέρχεσθον τούτω - ὅ τ' Εὐθύδημος καὶ ὁ Διονυσόδωρος - καὶ ἄλλοι μαθηταὶ ἅμα αὖ πολλοὶ ἐμοὶ δοκεῖν· εἰσελθόντε δὲ περιπατείτην ἐν τῷ καταστέγῳ δρόμῳ. Καὶ οὔπω τούτω δύ' ἢ τρεῖς δρόμους περιεληλυθότε ἤστην, καὶ εἰσέρχεται Κλεινίας, ὃν σὺ φῂς πολὺ ἐπιδεδωκέναι, ἀληθῆ λέγων· ὄπισθεν δὲ αὐτοῦ ἐρασταὶ πάνυ πολλοί τε καὶ ἄλλοι καὶ Κτήσιππος, νεανίσκος τις Παιανιεύς, μάλα καλός τε κἀγαθὸς τὴν φύσιν, ὅσον μὴ ὑϐριστὴς (δὲ) διὰ τὸ (273b) νέος εἶναι. Ἰδὼν οὖν με ὁ Κλεινίας ἀπὸ τῆς εἰσόδου μόνον καθήμενον, ἄντικρυς ἰὼν παρεκαθέζετο ἐκ δεξιᾶς, ὥσπερ καὶ σὺ φῄς. Ἰδόντε δὲ αὐτὸν ὅ τε Διονυσόδωρος καὶ ὁ Εὐθύδημος πρῶτον μὲν ἐπιστάντε διελεγέσθην ἀλλήλοιν, ἄλλην καὶ ἄλλην ἀποϐλέποντε εἰς ἡμᾶς - καὶ γὰρ πάνυ αὐτοῖν προσεῖχον τὸν νοῦν - ἔπειτα ἰόντε ὁ μὲν παρὰ τὸ μειράκιον ἐκαθέζετο, ὁ Εὐθύδημος, ὁ δὲ παρ' αὐτὸν ἐμὲ ἐξ ἀριστερᾶς, οἱ δ' ἄλλοι ὡς ἕκαστος ἐτύγχανεν.
                                                                                                                                                                             Platon, Euthydème, 271-273




παμμάχος, ος, ον : qui lutte contre tous; qui lutte au pancrace; fig. prêt pour toute sorte de luttes ou de discussions.
παγκρατιαστής, οῦ : qui lutte ou s’exerce au pancrace.
τούτω γάρ ἐστον κομιδῇ παμμάχω. Οὐ κατὰ τὼ Ἀκαρνᾶνε ἐγενέσθην τὼ παγκρατιαστὰ ἀδελφώ : ces deux-là s'entendaient à merveille aux combats en tous genres, mais non pas comme ces deux frères d'Acarnanie qui furent, l'un et l'autre, champions de pancrace.

duel φατον = φασί.
ὅστις οὖν ou ὁστισοῦν : qui que ce soit (indéfini) --- voir la déclinaison.
δεινός, ή, όν : qui inspire la crainte ou l'étonnement; que l’on craint, terrible, effrayant; qui frappe l’imagination, étonnant, extraordinaire.
φατον ἐν ὀλίγῳ χρόνῳ ποιῆσαι ἂν καὶ ἄλλον ὁντινοῦν τὰ αὐτὰ ταῦτα δεινόν : ils affirment, d'une seule voix, qu'en peu de temps, ils rendraient n'importe qui habile à réaliser le même numéro.



Ces deux-là s'entendaient à merveille aux combats en tous genres, mais non pas comme ces deux frères d'Acarnanie qui furent, l'un et l'autre, champions de pancrace, car ils n'ont, eux, été capables que de lutter avec leur corps, tandis que cette paire de sophistes est tout d'abord très capable de l'emporter sur tous par les muscles et le sens du combat.

(272a) et ensuite, au tribunal, de première force pour soutenir le combat et apprendre à un autre à parler. Auparavant, en vérité, là s'arrêtait le talent de ce duo mais maintenant ils ont fini de porter en commun l'art du pancréace à son comble. Car le seul type de lutte qui leur restait à apprendre, ils l'ont ensemble pratiqué, si bien que nul au monde n'oserait même lever la main sur l'un d'entre eux : tant ils sont devenus tous les deux redoutables pour lutter en paroles et réfuter, chaque fois, ce qu'on dit. Pour moi par conséquent, Criton, j'ai dans la tête de me livrer pieds et poings liés à ce couple car ils affirment, d'une seule voix, qu'en peu de temps, ils rendraient n'importe qui habile à réaliser le même numéro.

(273a) Un peu plus tard voici qu'entrent ensemble nos deux compères - je veux dire Euthydème et Dionysodore - et une fois entrés d'un même mouvement ils se mirent à aller et venir tous les deux sous le promenoir couvert. Ils n'avaient pas encore fait ensemble deux ou trois tours qu'entre Clinias. Et, quand il me voit assis tout seul, il vient droit vers moi et s'assit à ma droite. Ces deux-là le voyant - je veux dire Euthydème et Dionysodore -  tout d'abord s'arrêtèrent ensemble et se mirent l'un l'autre à discuter entre eux, regardant sans cesse vers nous, puis ils vinrent ensemble s'asseoir, l'un, c'était Euthydème,  près de l'adolescent, l'autre auprès de moi, à gauche; les autres s'assirent au hasard.


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Cyrus passe son armée en revue, près de la ville de Tyriaeion




(1.2.14) ἐντεῦθεν ἐξελαύνει σταθμοὺς δύο παρασάγγας δέκα εἰς Τυριάειον, πόλιν οἰκουμένην. ἐνταῦθα ἔμεινεν ἡμέρας τρεῖς. καὶ λέγεται δεηθῆναι ἡ Κίλισσα Κύρου ἐπιδεῖξαι τὸ στράτευμα αὐτῇ · βουλόμενος οὖν ἐπιδεῖξαι ἐξέτασιν ποιεῖται ἐν τῷ πεδίῳ τῶν Ἑλλήνων καὶ τῶν βαρϐάρων. (1.2.15) ἐκέλευσε δὲ τοὺς Ἕλληνας ὡς νόμος αὐτοῖς εἰς μάχην οὕτω ταχθῆναι καὶ στῆναι, συντάξαι δ' ἕκαστον τοὺς ἑαυτοῦ. ἐτάχθησαν οὖν ἐπὶ τεττάρων · εἶχε δὲ τὸ μὲν δεξιὸν Μένων καὶ οἱ σὺν αὐτῷ, τὸ δὲ εὐώνυμον Κλέαρχος καὶ οἱ ἐκείνου, τὸ δὲ μέσον οἱ ἄλλοι στρατηγοί. (1.2.16) ἐθεώρει οὖν ὁ Κῦρος πρῶτον μὲν τοὺς βαρϐάρους · οἱ δὲ παρήλαυνον τεταγμένοι κατὰ ἴλας καὶ κατὰ τάξεις · εἶτα δὲ τοὺς Ἕλληνας, παρελαύνων ἐφ' ἅρματος καὶ ἡ Κίλισσα ἐφ' ἁρμαμάξης. εἶχον δὲ πάντες κράνη χαλκᾶ καὶ χιτῶνας φοινικοῦς καὶ κνημῖδας καὶ τὰς ἀσπίδας ἐκκεκαλυμμένας. (1.2.17) ἐπειδὴ δὲ πάντας παρήλασε, στήσας τὸ ἅρμα πρὸ τῆς φάλαγγος μέσης, πέμψας Πίγρητα τὸν ἑρμηνέα παρὰ τοὺς στρατηγοὺς τῶν Ἑλλήνων ἐκέλευσε προϐαλέσθαι τὰ ὅπλα καὶ ἐπιχωρῆσαι ὅλην τὴν φάλαγγα. οἱ δὲ ταῦτα προεῖπον τοῖς στρατιώταις · καὶ ἐπεὶ ἐσάλπιγξε, προϐαλόμενοι τὰ ὅπλα ἐπῇσαν. ἐκ δὲ τούτου θᾶττον προϊόντων σὺν κραυγῇ ἀπὸ τοῦ αὐτομάτου δρόμος ἐγένετο τοῖς στρατιώταις ἐπὶ τὰς σκηνάς, (1.2.18) τῶν δὲ βαρϐάρων φόβος πολύς, καὶ ἥ τε Κίλισσα ἔφυγεν ἐπὶ τῆς ἁρμαμάξης καὶ οἱ ἐκ τῆς ἀγορᾶς καταλιπόντες τὰ ὤνια ἔφυγον. οἱ δὲ Ἕλληνες σὺν γέλωτι ἐπὶ τὰς σκηνὰς ἦλθον. ἡ δὲ Κίλισσα ἰδοῦσα τὴν λαμπρότητα καὶ τὴν τάξιν τοῦ στρατεύματος ἐθαύμασε. Κῦρος δὲ ἥσθη τὸν ἐκ τῶν Ἑλλήνων εἰς τοὺς βαρϐάρους φόϐον ἰδών.

(1.2.19) ἐντεῦθεν ἐξελαύνει σταθμοὺς τρεῖς παρασάγγας εἴκοσιν εἰς Ἰκόνιον, τῆς Φρυγίας πόλιν ἐσχάτην. ἐνταῦθα ἔμεινε τρεῖς ἡμέρας. ἐντεῦθεν ἐξελαύνει διὰ τῆς Λυκαονίας σταθμοὺς πέντε παρασάγγας τριάκοντα. ταύτην τὴν χώραν ἐπέτρεψε διαρπάσαι τοῖς Ἕλλησιν ὡς πολεμίαν οὖσαν. (1.2.20) ἐντεῦθεν Κῦρος τὴν Κίλισσαν εἰς τὴν Κιλικίαν ἀποπέμπει τὴν ταχίστην ὁδόν · καὶ συνέπεμψεν αὐτῇ στρατιώτας οὓς Μένων εἶχε καὶ αὐτόν. Κῦρος δὲ μετὰ τῶν ἄλλων ἐξελαύνει διὰ Καππαδοκίας σταθμοὺς τέτταρας παρασάγγας εἴκοσι καὶ πέντε πρὸς Δάναν, πόλιν οἰκουμένην, μεγάλην καὶ εὐδαίμονα.
                                                                                                                                                                      Xénophon, Anabase, 1, 2, 14-20




(1.2.14) De là (Cyrus) fait deux étapes, dix parasanges, et arrive à Tyraeion, ville habitée. La Cilicienne, dit-on, pria Cyrus de lui montrer son armée : voulant donc la satisfaire,  il fait dans la plaine une revue des Grecs et des barbares. (1.2.15) Il ordonna aux Grecs de s'aligner et de rester immobiles, comme ils en avaient l'habitude pour le combat, et à chacun des chefs de mettre ses hommes en position. Ils s'alignèrent donc sur quatre hommes de profondeur : Ménon était à droite avec ses gens, Cléarque à gauche avec les siens, les autres stratèges au centre. (1.2.16) Cyrus inspecta d'abord les barbares : ils défilaient rangés par escadrons et par bataillons. Il inspecta ensuite les Grecs, en passant devant eux sur un char de guerre, tandis que la Cilicienne était dans un char de voyage. Tous les Grecs avaient des casques d'airain, des tuniques rouges, dess cnémides et leurs boucliers hors de l'étui. (1.2.17) Quand il eut passé sur tout le front, Cyrus arrêta son char devant le centre de la phalange, puis ayant envoyé Pigrès l'interprète auprès des stratèges des Grecs, il ordonna que toute la colonne chargeât, les armes en avant. Les stratèges crièrent le commandement aux soldats, et quand la trompette eut sonné, bouclier tendu, ils avancèrent; puis ils doublèrent le pas, en poussant des cris, et spontanément se mirent à courir vers leurs tentes. Chez les barbares la panique fut générale. (1.2.18) La Cilicienne à la vue du bel aspect et de l'ordonnance de l'armée était dans l'admiration. Quant à Cyrus, il était enchanté de la terreur que les Grecs avaient causée aux barbares.

(1.2.19) De là il fait trois étapes, vingt parasanges, et arrive à Iconion, dernière ville de Phrygie.. Il y resta trois jours. De là il fait à travers la Lycaonie cinq étapes, trente parasanges. Comme il était dans un pays ennemi, il laissa les Grecs le piller. (1.2.20) Ensuite Cyrus renvoie la Cilicienne en Cilicie par la route la plus courte, lui donnant pour l'accompagner les soldats qu'avait Ménon et Ménon lui-même. De son côté, avec le reste de l'armée il fait à travers la Cappadoce quatre étapes, vingt-cinq parasanges, et arrive à Diana, ville habitée, grande et riche.
         trad. Paul Masqueray; éd. les belles lettres




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Enlèvement d'Hélène
 
(17) Εἰδὼς δὲ τὰς ἐπιφανείας καὶ τὰς λαμπρότητας οὐκ ἐκ τῆς ἡσυχίας, ἀλλ' ἐκ τῶν πολέμων καὶ τῶν ἀγώνων γιγνομένας, βουλόμενος αὐτῶν μὴ μόνον τὰ σώματ' εἰς θεοὺς ἀναγαγεῖν ἀλλὰ καὶ τὰς δόξας ἀειμνήστους καταλιπεῖν, τοῦ μὲν ἐπίπονον καὶ φιλοκίνδυνον τὸν βίον κατέστησε, τῆς δὲ περίϐλεπτον καὶ περιμάχητον τὴν φύσιν ἐποίησεν.

(18) Καὶ πρῶτον μὲν Θησεύς, ὁ λεγόμενος μὲν Αἰγέως, γενόμενος δ' ἐκ Ποσειδῶνος, ἰδὼν αὐτὴν οὔπω μὲν ἀκμάζουσαν, ἤδη δὲ τῶν ἄλλων διαφέρουσαν, τοσοῦτον ἡττήθη τοῦ κάλλους ὁ κρατεῖν τῶν ἄλλων εἰθισμένος, ὥσθ' ὑπαρχούσης αὐτῷ καὶ πατρίδος μεγίστης καὶ βασιλείας ἀσφαλεστάτης ἡγησάμενος οὐκ ἄξιον εἶναι ζῆν ἐπὶ τοῖς παροῦσιν ἀγαθοῖς ἄνευ τῆς πρὸς ἐκείνην οἰκειότητος,

(19) ἐπειδὴ παρὰ τῶν κυρίων οὐχ οἷός τ' ἦν αὐτὴν λαϐεῖν, ἀλλ' ἐπέμενον τήν τε τῆς παιδὸς ἡλικίαν καὶ τὸν χρησμὸν τὸν παρὰ τῆς Πυθίας, ὑπεριδὼν τὴν ἀρχὴν τὴν Τυνδάρεω καὶ καταφρονήσας τῆς ῥώμης τῆς Κάστορος καὶ Πολυδεύκους καὶ πάντων τῶν ἐν Λακεδαίμονι δεινῶν ὀλιγωρήσας, βίᾳ λαϐὼν αὐτὴν εἰς Ἄφιδναν τῆς Ἀττικῆς κατέθετο, [20] καὶ τοσαύτην χάριν ἔσχε Πειρίθῳ τῷ μετασχόντι τῆς ἁρπαγῆς, ὥστε βουληθέντος αὐτοῦ μνηστεῦσαι Κόρην τὴν Διὸς καὶ Δήμητρος, καὶ παρακαλοῦντος ἐπὶ τὴν εἰς Ἅιδου κατάβασιν, ἐπειδὴ συμϐουλεύων οὐχ οἷός τ' ἦν ἀποτρέπειν, προδήλου τῆς συμφορᾶς οὔσης ὅμως αὐτῷ συνηκολούθησε, νομίζων ὀφείλειν τοῦτον τὸν ἔρανον, μηδενὸς ἀποστῆναι τῶν ὑπὸ Πειρίθου προσταχθέντων ἀνθ' ὧν ἐκεῖνος αὐτῷ συνεκινδύνευσεν.
                                                                                                                                                                       Isocrate, Eloge d'Hélène, 17-20



(17) Sachant que la renommée et la gloire ne sont pas filles du repos, mais de la guerre et des combats, et voulant non seulement placer Hercule et Hélène parmi les dieux, mais rendre leur mémoire immortelle, à l'un il donna une vie pleine de travaux et de dangers ; et il répandit sur l'autre une beauté digne d'attirer tous les regards et d'être disputée les armes à la main.

(18) Et d'abord Thésée, que l'on nomme le fils d'Égée, quoique, dans la réalité, il doive le jour à Neptune, la voyant à une époque où elle n'était pas encore sortie de l'enfance, mais où déjà sa beauté éclipsait celle de toutes les jeunes filles de son âge, se sentit tellement subjugué par ses charmes que, bien qu'il fût accoutumé à commander aux autres hommes, et qu'il fût à la fois chef de la patrie la plus puissante et possesseur de la royauté la plus assurée, il ne crut pas qu'au sein même des prospérités dont il jouissait, la vie put avoir quelque prix pour lui, s'il n'unissait sa destinée à celle d'Hélène;

(19) et, quand il reconnut qu'il était impossible de l'obtenir de ceux qui disposaient de son sort, qu'ils attendaient, d'une part, l'âge où elle remplirait les conditions de l'hyménée, de l'autre, une réponse de l'oracle d'Apollon , sans calculer la puissance de Tyndare, sans considérer la force de Castor et de Pollux, sans tenir compte des dangers qui pouvaient le menacer du côté de Lacédémone, il l'enleva, la conduisit dans Aphidna, au sein de l'Attique, [20] et la reconnaissance qu'il éprouva pour Pirithoos, qui lui avait prêté son appui dans cet enlèvement, fut si grande que, celui-ci aspirant à la possession de Proserpine, fille de Jupiter et de Cérès, et lui ayant demandé de l'accompagner dans sa descente aux enfers, Thésée, après avoir fait de vains efforts pour l'en détourner par ses conseils, le suivit malgré l'évidence du danger, croyant devoir à Pirithoos, comme prix des périls qu'il avait bravés pour lui, de ne refuser aucune de ses demandes.


s..




ὀφείλω (imparf. ὤφειλον, futur ὀφειλήσω, aor.1 ὠφείλησα, aor.2 ὤφελον) : devoir, avoir une dette, être débiteur, être redevable de.
Πειρίθοος-ους, gén. ου, dat. ῳ, acc. ουν (ὁ) : Peirithoos (Pirithoüs) fils d’Ixion ou de Zeus, un des Lapithes.
  



                  




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Andocide a profané les mystères d'Eleusis
et mutilé  les statues d'Hermès


[50] Ἀθηναῖοι, μνήσθητε τὰ πεποιημένα Ἀνδοκίδῃ, ἐνθυμήθητε δὲ καὶ τῆς ἑορτῆς, δι' ἣν ὑπὸ τῶν πολλῶν προὐτιμήθητε. ἀλλ' ἐστὲ γὰρ ὑπὸ τῶν τούτου ἁμαρτημάτων ἤδη καταπλῆγες διὰ τὸ πολλάκις ἰδεῖν καὶ ἀκοῦσαι, ὥστε οὐδὲ τὰ δεινὰ ἔτι δεινὰ δοκεῖ ὑμῖν εἶναι, ἀλλὰ προσέχετε τὸν νοῦν, δοκείτω δ' ὑμῖν ἡ γνώμη ὁρᾶν ἃ οὗτος ἐποίει, [51] καὶ διαγνώσεσθε ἄμεινον. οὗτος γὰρ ἐνδὺς στολὴν μιμούμενος τὰ ἱερὰ ἐπεδείκνυ τοῖς ἀμυήτοις καὶ εἶπε τῇ φωνῇ τὰ ἀπόρρητα, τῶν δὲ θεῶν, οὓς ἡμεῖς νομίζομεν καὶ θεραπεύοντες καὶ ἁγνεύοντες θύομεν καὶ προσευχόμεθα, τούτους περιέκοψε. καὶ ἐπὶ τούτοις ἰέρειαι καὶ ἱερεῖς στάντες κατηράσαντο πρὸς ἑσπέραν καὶ φοινικίδας ἀνέσεισαν, [52] κατὰ τὸ νόμιμον τὸ παλαιὸν καὶ ἀρχαῖον. ὡμολόγησε δὲ οὗτος ποιῆσαι. ἔτι δὲ παρελθὼν τὸν νόμον ὃν ὑμεῖς ἔθεσθε, εἴργεσθαι τῶν ἱερῶν αὐτὸν ὡς ἀλιτήριον ὄντα, ταῦτα πάντα βιασάμενος εἰσελήλυθεν ἡμῶν εἰς τὴν πόλιν, καὶ ἔθυσεν ἐπὶ τῶν βωμῶν ὧν οὐκ ἐξῆν αὐτῷ καὶ ἀπήντα τοῖς ἱεροῖς περὶ ἃ ἠσέϐησεν, εἰσῆλθεν εἰς τὸ Ἐλευσίνιον, ἐχερνίψατο [53] ἐκ τῆς ἱερᾶς χέρνιϐος. τίνα χρὴ ταῦτα ἀνασχέσθαι; ποῖον φίλον, ποῖον συγγενῆ, ποῖον δημότην χρὴ τούτῳ χαρισάμενον κρύϐδην φανερῶς τοῖς θεοῖς ἀπεχθέσθαι; νῦν οὖν χρὴ νομίζειν τιμωρουμένους καὶ ἀπαλλαττομένους Ἀνδοκίδου τὴν πόλιν καθαίρειν καὶ ἀποδιοπομπεῖσθαι καὶ φαρμακὸν ἀποπέμπειν καὶ ἀλιτηρίου ἀπαλλάττεσθαι, ὡς ἓν τούτων οὗτός ἐστι.
                                                                                                                                                        Ps. Lysias, contre Andocide, 50-53


[50] Athéniens, rappelez-vous ce qu'a fait Andocide, songez à la fête qui vous a valu dans le monde une considération particulière. Mais non, vous êtes déjà blasés par ses crimes, à force d'en avoir vu et entendu, si bien que même les actions abominables ne sont plus abominables à vos yeux. Pourtant faites attention; que votre imagination se représente sa conduite, et vous jugerez mieux. Cet homme, revêtu d'une robe, parodiait les gestes rituels et les révélait aux non-initiés; il prononça de sa propre bouche les formules interdites, et, les dieux en qui nous croyons, à qui nous rendons un culte, à qui nous faisons des scrifices  et adressons des prières en état de pureté, il les mutila. C'est pour cela que prêtresses et prêtres debout ont prononcé des imprécations vers le couchant et secoué leurs robes de pourpre selon le vieil et antique usage. Il a fait des aveux. De plus, violant la loi que vous aviez portée et qui l'écartait des sanctuaires comme un être impur, il est entré dans la ville, il a sacrifié sur les autels qui lui étaient interdits, il s'est présenté aux cérémonies qu'il avait profanées, il a pénétré dans le sanctuaire d'Eleusis, s'est lavé les mains avec l'eau sacrée. Qui peut tolérer ces crimes ? Quel ami, quel parent, quel juge pourra, par une complaisance secrète envers lui, s'attirer la haine déclarée des Dieux ? Ainsi donc, dites-vous bien que punir aujourd'hui Andocide, vous débarrasser de lui, c'est purifier la cité, écarter d'elle une souillure, en rejeter le poison, la délvrer d'un être impur; car il est tout cela.
        trad. Bizos et Flacelière; éd. Vuibert



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ἀλλὰ γάρ ou ἀλλὰ… γάρ : mais … car, mais en effet, litt. mais (cela n’est pas) car, etc. 
ἀλλ' ἐστὲ γὰρ ὑπὸ τῶν τούτου ἁμαρτημάτων ἤδη καταπλῆγες διὰ τὸ πολλάκις ἰδεῖν καὶ ἀκοῦσαι : m
ais non, vous êtes déjà blasés par ses crimes, à force d'en avoir vu et entendu.